En 2020, durant la pandémie de coronavirus, les confinements et autres mesures restrictives ont conduit à une baisse considérable de la demande de biens immobiliers. Afin de stimuler les ventes, le gouvernement russe avait lancé un nouveau programme dit de « prêts hypothécaires préférentiels » (льготная ипотекаi). Celui-ci avait connu un important succès, plusieurs centaines de milliers de familles ayant bénéficié des taux d’intérêts réduits subventionnés par l’État 1.
La hausse de la demande a toutefois favorisé l’augmentation des prix des logements neufs, alors que les taux d’intérêts élevés de la Banque centrale dissuadent les promoteurs de financer la construction de nouveaux logements.
- En octobre 2024, afin de contenir l’inflation, la Banque centrale russe a porté ses taux directeurs à 21 %, soit leur niveau le plus élevé depuis le début des années 2000.
- Les promoteurs sont les premiers affectés par la récente hausse des taux. Au cours du premier trimestre 2025, de nouveaux projets de logement totalisant seulement 8,1 millions de mètres carrés ont été lancés en Russie, soit une baisse de 24 % par rapport à l’an dernier.
- L’augmentation des taux, du coût de la main-d’œuvre, des matériaux de construction ainsi que la hausse des impôts sur le revenu alimentés par la guerre de Poutine en Ukraine se répercutent sur le prix du m², qui se situait en moyenne à 1 840 € en mars — contre 1 270 € en février 2022.
C’est à Moscou, qui concentre près d’un dixième de la population du pays, que la hausse des prix a été la plus significative depuis 2020. Il faut désormais débourser 12,9 millions de roubles en moyenne pour l’achat d’un appartement neuf d’une pièce dans la capitale russe (+ 86 % en cinq ans), et 9,6 millions de roubles pour un studio (+ 97 %). La location a elle aussi été impactée par la hausse globale des prix : le coût du loyer représente aujourd’hui 74 % du salaire moscovite moyen, contre 63 % il y a deux ans 2.
- La hausse des prix limite l’installation à Moscou de familles à revenus modestes. Pour un budget de 5 millions de roubles (environ 53 000€), qui permettait avant 2020 d’acheter un appartement de 30 à 40 m² dans des quartiers proches du centre, il existait en mars dernier seulement 7 lots disponibles à l’échelle de la ville — contre 112 en 2024 3.
- En parallèle, les autorités municipales encouragent le développement de l’immobilier de haut standing. Au 1er trimestre 2025, une étude d’Intermark City Real Estate révèle que Moscou est passée en trois ans de la 18e à la 5e place mondiale dans le classement des villes où le prix de l’immobilier pour des logements haut de gamme est le plus élevé.
- Le coût d’achat moyen au mètre carré dans ces immeubles de luxe se trouve désormais à 21 600€ à Moscou, soit plus qu’à Shanghai (19 700€), Londres (18 900€) ou Paris (18 600 €).
La hausse des prix de l’immobilier a conduit à une augmentation considérable de la durée moyenne des prêts hypothécaires en Russie : afin de maintenir les mensualités à un niveau abordable, il faut en moyenne aujourd’hui 26 ans pour rembourser l’achat d’un nouveau logement 4. En conséquence, plus de la moitié des prêts hypothécaires sont désormais remboursés par des personnes à la retraite.
Sources
- « Взлет и падение льготной ипотеки », Коммерса́нтъ, 1er juillet 2024.
- Max Seddon, Anastasia Stognei et Daria Mosolova, « Russia struggles to tame inflation in ‘overheating’ war economy », Financial Times, 20 décembre 2024.
- « Квартиры до ₽5 млн : что можно купить за такую сумму в Москве в 2025 году », РБК, 14 mars 2025.
- Мария Колобова, « Экономика 17 апреля 2025, 00:01 Платить подолгу : средний срок ипотеки в РФ приблизился к рекордным 26 годам », Известия, 17 avril 2025.