Suite à la dernière rencontre vendredi 11 avril entre Vladimir Poutine et l’envoyé spécial de Trump, Steve Witkoff — la troisième depuis le début de l’année —, l’administration républicaine a élaboré un « plan » visant à mettre fin au conflit. Celui-ci a été présenté la semaine dernière aux soutiens européens de l’Ukraine ainsi qu’à des représentants de Kiev lors d’une visite du secrétaire d’État américain Marco Rubio ainsi que des deux émissaires de Trump, Witkoff et Keith Kellogg, à Paris.
Le « plan » de Trump, vraisemblablement principalement élaboré par Witkoff, conduirait au gel du front sur ses lignes actuelles 1.
- Les États-Unis reconnaîtraient le contrôle russe de jure de la péninsule de Crimée, région annexée militairement par Moscou en 2014 et dont le contrôle est revendiqué par Kiev ;
- Le gel de la ligne de front conduirait à une reconnaissance de facto du territoire couvrant 4 oblasts ukrainiens actuellement partiellement occupés (Donetsk, Louhansk, Zaporijia et Kherson) comme étant sous contrôle russe ;
- En échange, la Russie serait prête à retirer ses troupes de la région de Kharkiv, dans le nord-est de l’Ukraine, dont un peu moins de 3 % est actuellement occupé 2.
- L’Ukraine devrait également s’engager à ne pas chercher à rejoindre l’OTAN, mais pourrait adhérer à l’Union européenne et recevoir des garanties de sécurité de ses alliés européens – aucune participation américaine n’est mentionnée.
- Washington lèverait les sanctions imposées à l’encontre de Moscou depuis 2014. L’accord prévoyait aussi une coopération économique accrue entre les États-Unis et la Russie, surtout dans les secteurs de l’énergie et de l’industrie.
- L’Ukraine recevrait une compensation et une assistance pour la reconstruction, mais il n’est fait aucune mention de la source de ces fonds ni du montant.
Volodymyr Zelensky n’a pas signalé être favorable à ce deal élaboré par l’administration Trump, que Kiev voit comme particulièrement favorable à la Russie.
- Plusieurs responsables ukrainiens ont répété à maintes reprises ces dernières années que l’Ukraine ne pouvait pas « légalement reconnaître une partie du territoire ukrainien comme étant russe » — ce qui s’applique pour les 6 oblasts partiellement occupés par Moscou ainsi que pour la Crimée.
- En novembre dernier, l’ancien ministre de l’Économie Tymofiy Mylovanov affirmait dans nos pages que la seule solution consisterait à modifier la Constitution ukrainienne.
La position de Kiev est de ne pas ouvrir la voie à de potentiels accords tant qu’un cessez-le-feu total n’est pas en place 3. Les précédentes tentatives de suspension partielle ou temporaire des combats — sur les infrastructures énergétiques et pour le week-end pascal — ont toutes deux été violées.
- Au milieu de cette nouvelle « frontière » à laquelle l’administration Trump est vraisemblablement favorable, les États-Unis obtiendraient le droit d’exploiter la centrale nucléaire de Zaporijia, dont l’électricité serait fournie à Kiev et aux parties de facto russes du territoire ukrainien.
La réunion qui doit avoir lieu aujourd’hui, mercredi 23 avril, devrait se tenir au niveau des conseillers et non pas des ministres, comme cela était initialement prévu. Steve Witkoff se rendra pour la quatrième fois à Moscou en fin de semaine.
- L’accord mis sur la table par Washington, s’il venait à être accepté, représenterait une victoire massive pour Vladimir Poutine.
- Selon le rédacteur en chef de la publication russe Nezavissimaïa Gazeta (Независимая газета), Poutine pourrait être prêt à mettre fin aux combats en Ukraine dès que l’oblast de Koursk sera complètement revenu sous contrôle de Moscou 4.
- Au 22 avril, l’armée russe avait repris 99,67 % (1 312 km²) du territoire pris par Kiev en août 2024.
Sources
- Max Seddon, Henry Foy et Christopher Miller, « Vladimir Putin offers to halt Ukraine invasion along current front line », Financial Times, 23 avril 2025.
- Barak Ravid, « Trump’s « final offer » for peace requires Ukraine to accept Russian occupation », Axios, 23 avril 2025.
- Publication d’Andriy Yermak sur Telegram, 23 avril 2025.
- Константин Ремчуков, « В каких границах Россия признаёт новые территории », Независимая газета, 20 avril 2025.