Depuis le renversement du régime de Bachar al-Assad et l’arrivée au pouvoir de HTC à Damas, c’est largement le Gouvernement du salut syrien — qui était jusqu’alors en charge du gouvernorat d’Idlib — qui s’est occupé des affaires courantes du pays. Le 10 décembre, al-Charaa a ainsi nommé Mohammed al-Bachir, précédemment ministre du Développement et des Affaires humanitaires de ce Gouvernement du salut à Idlib, président du Conseil des ministres du pays.

Le défi pour HTC est de former un gouvernement qui reflète le nouvel équilibre des pouvoirs en Syrie tout en créant une structure inclusive qui soit représentative des nombreuses minorités ethniques et religieuses syriennes.

  • L’envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie, Geir Pedersen, a indiqué la semaine dernière qu’un tel gouvernement enverrait un signal positif qui contribuerait à la levée des sanctions internationales 1.
  • L’une des premières tâches du nouveau gouvernement syrien, dont la composition doit être annoncée aujourd’hui, samedi 1er mars, sera de se pencher sur les recommandations émises par la conférence du dialogue national, qui a eu lieu les 24 et 25 février à Damas.
  • Malgré la bonne volonté mise en avant par les nouvelles autorités syriennes, des représentants de plusieurs minorités (notamment kurdes) ont dénoncé suite à la conférence — qui regroupait des acteurs de la société civile et des personnalités politiques locales — un processus de sélection des invités opaque ainsi qu’une sous-représentation de certains groupes.

Le contrôle territorial d’une vaste partie du nord du territoire syrien par les Forces démocratiques syriennes (SDF), principalement composées de combattants kurdes, sera au cœur des discussions qui devront par la suite conduire à la rédaction d’une nouvelle constitution. Après sa rencontre avec Ahmed al-Charaa début janvier, le leader des FDS, Mazloum Abdi, avait déclaré qu’il était favorable à une « Syrie unifiée », mais a jusqu’à présent refusé d’intégrer ses forces dans la nouvelle armée nationale syrienne.

  • L’absence d’un accord entre les nouvelles autorités de Damas et les SDF pourrait conduire à l’exclusion des Kurdes du processus de transition politique — ce qui constituerait un important facteur d’instabilité politique.
  • Abdi a rejeté l’appel à déposer les armes formulé jeudi 27 février par le leader historique du Abdullah Öcalan, affirmant : « L’appel du PKK le concerne lui et ne concerne pas nos forces [en Syrie] ».

Certaines voix en Syrie et au Moyen-Orient, notamment l’ancien ministre des Affaires étrangères jordanien Marwan al-Muasher, craignent qu’al-Charaa n’emprunte un chemin similaire à l’ex-président égyptien Mohamed Morsi 2.

  • Arrivé au pouvoir en 2012 suite au grand mouvement de contestation organisé dans le cadre du Printemps arabe et à la démission de Moubarak, Morsi, ancien leader des Frères musulmans, a considérablement renforcé le pouvoir exécutif et ignoré les demandes de la société égyptienne.
  • Ce dernier a finalement été démis de ses fonctions par un coup d’État un an après son arrivée au pouvoir puis a été remplacé par son ministre de la Défense d’alors, Abdel Fattah al-Sissi.
Sources
  1. Abby Sewell, « UN envoy says creating an inclusive Syrian government could help lift sanctions », Associated Press, 20 février 2025.
  2. Marwan al-Muasher, « Can Syria Break the Cycle of Tyranny ? », Foreign Affairs, 21 février 2025.