Le 4 octobre 2023, la Commission européenne a officiellement ouvert une enquête anti-subventions sur les véhicules électriques chinois en réponse à l’augmentation des exportations en provenance de Chine de voitures électriques peu chères vers le marché européen. La Commission estime en effet que la part de Pékin dans les ventes de véhicules électriques en Europe pourrait doubler d’ici 2025, passant de 8 à 15 %.

  • Le 12 juin 2024, la Commission a annoncé aux producteurs de voitures électriques basés en Chine les résultats de son enquête : des droits de douanes provisoires, allant de 17,4 % à 38,1 % ont été ainsi ajoutés aux tarifs existants de 10 % à partir de début juillet. Leur niveau reste toutefois bien inférieur à celui de 100 % appliqué par les États-Unis.
  • Une étude du mois d’avril estimait que tout tarif douanier inférieur à 40-50 % — voire plus pour les fabricants comme BYD disposant d’une structure verticalement intégrée — ne serait pas suffisant pour « rendre le marché européen inintéressant pour les exportateurs chinois de véhicules électriques ». Avec des ​​tarifs douaniers supplémentaires de 17,4 %, BYD gagnerait toujours plus de 9 000 euros par véhicule vendu en Europe, soit 7 fois plus qu’en Chine. 
  • En représailles, la Chine a annoncé le lancement d’une enquête antidumping sur le porc européen et d’une autre enquête anti-subventions sur les produits laitiers. Elle a également intensifié ses pressions et ses actions de lobbying, notamment en Allemagne et dans les pays d’Europe centrale et de l’Est. 

C’est dans ce contexte que Sánchez s’est rendu en Chine. L’Espagne avait exporté vers la Chine en 2023 des produits à base de porc d’une valeur de 1,2 milliard d’euros, se plaçant ainsi devant les Pays-Bas et le Danemark, deux autres grands exportateurs au niveau européen. Les exportations de produits laitiers avaient atteint environ 50 millions de dollars. La Chine enregistrait entre janvier et juillet 2024 un excédent commercial de presque 18 milliards de dollars avec Madrid. 

  • À Kunshan, mardi 10 septembre, Sánchez a déclaré : « nous devons tous, non seulement les États membres, mais aussi la Commission, reconsidérer notre position à l’égard de cette mesure […] Nous n’avons pas besoin d’une nouvelle guerre, dans ce cas d’une guerre commerciale ».

Les droits compensateurs définitifs devront être imposés par la Commission début novembre, avec un accord qui reste toutefois à trouver au sein du Conseil. 

  • La décision finale doit en effet être approuvée par les États membres et elle peut être bloquée à la majorité qualifiée (c’est-à-dire 55 % des États membres de l’Union représentant 65 % de la population). 
  • L’Espagne, contrairement à l’Allemagne dont l’industrie automobile craint des représailles, avait soutenu l’imposition des droits douaniers. La nouvelle position de Sánchez pourrait montrer que la stratégie chinoise, qui vise les produits agricoles dans un moment où les États membres font face à des pressions du secteur, porte ses fruits.

Alors que la Chine affiche une stratégie claire : s’appuyer sur les exportations pour sortir d’une crise qui paralyse son économie, les désaccords que les déclarations de Sánchez anticipent sont le signe des difficultés qui persistent dans la définition d’une politique industrielle commune et cohérente à l’échelle européenne.

  • Dans son rapport sur la compétitivité européenne présenté le 9 septembre, Mario Draghi a estimé que des droits de douane pourraient être nécessaires pour protéger les industries européennes de la concurrence étrangère et a condamné la « surcapacité » chinoise.