Chaque année depuis la promulgation en 1988 de la loi relative à la transparence financière de la vie politique, l’État français verse une enveloppe de plusieurs dizaines de millions d’euros aux principales formations politiques. Depuis 2014, le montant annuel de cette aide publique directe aux partis, fixé chaque année dans le cadre de la loi de finances, est relativement stable.
- Depuis la loi du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques, l’aide publique aux partis est divisée en deux fractions.
- Pour 2024, le montant total de l’aide est fixé à 66,44 millions d’euros : la première tranche (32,25 millions d’euros) est calculée en fonction du nombre de voix obtenues par chacun des partis lors du premier tour. La deuxième (34,19 millions) correspond au nombre d’élus au Parlement — à la fois à l’Assemblée nationale et au Sénat.
Pour l’année 2024, la coalition présidentielle Ensemble perçoit 29,3 % de cette enveloppe, contre 15,3 % pour le Rassemblement National — soit 10,176 millions d’euros par an pour le parti de Marine Le Pen et de Jordan Bardella. À partir de l’an prochain, cette part devrait passer à 20,05 % selon nos calculs, pour un total de 13,33 millions d’euros par an (soit un montant légèrement inférieur à celui qui devrait être perçu par les partis de la coalition présidentielle Ensemble).
- En raison de la méthode de calcul de l’attribution de ces subventions prévue à l’article 9-1 de la loi n°88-227 du 11 mars 1988, les partis disposant d’un nombre important d’élus à l’Assemblée et au Sénat sont les plus favorisés.
- Ainsi, la coalition des partis de gauche, réunis sous la bannière Nouveau Front populaire, disposent désormais de deux fois plus d’élus que le RN au Parlement (275 contre 129).
- Avec 9,379 millions de suffrages exprimés au premier tour, le Rassemblement National est néanmoins le parti politique ayant reçu le plus de voix. Les formations composant le Nouveau Front populaire en ont quant elles collectivement obtenu 8,995 millions.
- En prenant en compte les partis individuellement, le Rassemblement National pourrait devenir la formation politique percevant la part la plus importante de financements publics.
De la même manière qu’après les élections législatives de 2022, Les Républicains (LR) sont le parti ayant présenté la liste de candidats la plus inégalitaire en termes de genre, avec seulement 100 femmes pour 206 hommes selon la liste publiée par le ministère de l’Intérieur. Le montant de la « modulation parité », déduite de la première tranche de financements publics, est ainsi égale à 51,96 % des 2,064 millions d’euros auxquels le parti aurait pu prétendre au titre de cette fraction — soit une augmentation de près de 8 points de pourcentage par rapport à 2022.
Réorganisation le parti ou financer une campagne permanente 2027 : une alternative stratégique
Après l’échec du « plan Matignon » qui devait permettre au RN d’éviter la recomposition d’un front républicain, en paraissant un parti de gouvernement prêt à l’alternance, une purge réorganise la structure du parti qui reste solidement entre les mains de Marine Le Pen.
- En rompant avec la traditionnelle discrétion des membres du RN, le député du Pas-de-Calais (12e circonscription) Bruno Bilde, proche de Marine Le Pen, avait déclaré au Monde dès lundi : « On ne peut plus continuer comme ça. On a besoin de rassurer. Or, nous avons eu des profils extrêmement clivants, parfois même inquiétants. Il va falloir que la direction se penche tout de suite sur ce problème qui a parasité l’intégralité de la campagne, et surtout l’entre-deux-tours. »
- Une tête tombe. Gilles Pennelle, directeur général du RN, responsable des fédérations, porte la responsabilité de l’échec du « plan Matignon ». Il a été forcé à démissionner aujourd’hui par Marine Le Pen qui l’avait pourtant désigné à son poste en 2018.
- La question qui déterminera les prochains mois est la suivante : les financements serviront-ils à la constitution d’un appareil bureaucratique – relativement – autonome ou après l’échec de la stratégie Bardella, Marine Le Pen concentrera-t-elle tous ses efforts dans la préparation de la présidentielle de 2027 ?