Beijing. La détermination est intacte, le ton inflexible. Ce 2 janvier, dans le cadre du Palais de l’Assemblée du Peuple de Pékin, Xi Jinping a tenu son premier discours d’importance à la question taïwanaise en tant que président dédié.
Un rappel que le sujet est toujours central aux yeux de la Chine. Toujours selon cette dernière, l’importance historique et stratégique de l’île fait de sa réunification avec la Chine un but intangible, une issue cohérente et inévitable. « L’indépendance de Taïwan ne pourra conduire qu’à une impasse. Nous n’excluons pas l’emploi de la force et nous réservons la possibilité de prendre toutes les mesures nécessaires », a notamment déclaré le président chinois. Bonnie S. Glaser, du CSIS (Center for Strategic and International Studies), relève cependant que Xi Jinping n’a pas posé de limite temporelle. « Mr. Xi n’a pas établi d’agenda ou de date limite pour une réunification – il s’agit juste d’un objectif » (1). Si l’attitude paraît belliqueuse, le président fait ainsi comprendre que la force n’est pas le moyen qu’il souhaite pour parvenir à ses fins.
Le leader a même assuré la population de l’île que leur mode de vie ne serait pas entravé. « La Chine respectera les libertés religieuses et juridiques du peuple taïwanais, au sein du cadre unifié d’un pays, deux systèmes ».
Mais la simple question de la faisabilité d’une telle réunification se pose indubitablement. Comment réunifier de manière fructueuse et pacifique un système centralisé, où l’individu en tant qu’unité politique n’existe pas, où la stabilité du groupe est la priorité via un contrôle assidu d’un Parti unique et un système démocratique, libéral où la vision même du fonctionnement de la société et des droits individuels est profondément différente ? La capitulation de Taipei, sa reconnaissance d’une « Chine unique » est un préalable inévitable. Mais cela empêcherait de fait l’existence des partis progressistes et indépendantistes de l’île, et irait à l’encontre de la majorité de l’opinion publique taïwanaise (4).
Tsai Ing-Wen, présidente de Taïwan sous la bannière du PDP – un parti indépendantiste, libéral et progressiste opposé à l’idée d’une seule Chine – a rapidement et explicitement tranché la question. « Il est impossible pour moi (…) d’accepter les récentes déclarations du président Xi Jinping sans trahir la confiance et la volonté du peuple taïwanais. Nous espérons que la communauté internationale se montrera attentive et combinera ses efforts afin de parler en notre nom » (3).
Une situation délicate pour l’île, dans la mesure où le rapport de force est on ne peut plus inéquitable. Avant même d’évoquer la différence de puissance économique, diplomatique ou militaire, la reconnaissance même de Taïwan en tant qu’État recule. En 2018, les relations diplomatiques ont été rompues avec la République dominicaine, le Burkina Faso et le Salvador. Dans les trois cas, il s’agissait d’une condition à leurs rapports avec Pékin.
Perspectives :
- 2019 : Trump a promulgué l’Asia Reassurance Initiative Act, dont la partie sur Taïwan réaffirme la volonté de “contrecarrer les efforts visant à changer le statu quo”, de trouver une solution adéquate pour les deux parties, et encourage les relations avec l’île, de même que la vente d’armes (2).
Sources :
- BUCKLEY Chris et HORTON Chris, Xi Jinping warns Taiwan that unification is the goal and force is an option, The New York Times, 1er janvier 2019.
- Asia Reassurance Initiative Act of 2018, Congress.gov, 31 décembre 2018.
- HORTON Chris, Taiwan’s President, defying Beijing, calls unification offer “impossible”, The New York Times, 5 janvier 2019.
- MALOVIC Dorian, Chine, Xi Jinping menace à nouveau de réunifier Taïwan par la guerre, La Croix, 2 janvier 2019.
Jessy Périé