Lisbonne. Mardi 4 décembre a commencé la visite de deux jours du président chinois Xi Jinping au Portugal, visant à sceller plusieurs accords bilatéraux de coopération économique, notamment en financement de projet d’infrastructures. Au cours de la visite, la Chine et le Portugal ont signé un mémorandum d’entente sur la construction de la Belt and Road Initiative. Le Président Xi Jinping a salué la bonne entente avec Costa, son homologue portugais, et les perspectives enthousiasmantes du partenariat Chine-Europe. Le port de Sines, au sud-ouest du Portugal, devrait à ce titre être intégré au réseau des nouvelles routes de la soie : en effet, selon le président chinois, le Portugal est « un lien important entre les routes de la soie maritime et terrestre » (4).
Les relations économiques entre les deux États se sont intensifiées après la crise économique de 2008. Le programme d’austérité et de privatisations conditionnant le versement de fonds d’urgence par l’Union et le FMI a permis l’injection dans l’économie portugaise de près de six milliards d’euros de capital chinois jusqu’à aujourd’hui. Ces investissements concernent notamment des secteurs clés pour les intérêts stratégiques du pays, comme l’énergie : à titre d’exemple, le groupe China Three Gorges a acquis 21 pour cent du groupe Energia de Portugal (EDP) pour 2,7 milliards d’euros en 2011. CTG a aussi acquis 49 pour cent de la branche renouvelable du groupe EDP en 2012, pour 359 millions d’euros, et investi 2 milliards d’euros de parts dans des projets éoliens détenus par le groupe. Enfin, State Grid of China, l’entreprise publique détentrice et opératrice du réseau électrique chinois, a racheté 25 pour cent du capital du gestionnaire de réseau portugais REN (5).
La multiplication de ces investissements dans des actifs d’infrastructure pose de nombreuses questions d’autonomie financière et décisionnaire à plusieurs autres États européens, ainsi qu’aux États-Unis. En juillet, l’ambassadeur américain au Portugal George Glass avait exprimé sa « préoccupation » face à l’annonce de la coopération dans le port de Sines, tant au sujet de l’intérêt public et politique d’une telle infrastructure qu’à celui de la frontière ténue entre investissements chinois et intérêts gouvernementaux (3). Si quelques hauts fonctionnaires portugais ont exprimé leur satisfaction de voir s’intensifier les relations sino-portugaises (2), et par là les opportunités économiques et industrielles développées sur le territoire, la possibilité d’un règlement européen encadrant les investissements extra-européens grandit parmi les États-membres, à commencer par la France et l’Allemagne (1). Selon Jean-François Di Meglio, président du think tank Asia Centre interrogé par l’AFP, les investissements chinois sont plus hauts en valeur absolue au Royaume-Uni et en Allemagne mais représentent une part plus importante rapportée aux PIB espagnol et portugais (1). En dix ans, la Chine est passée de 28e place à la 11e place en termes d’investissements mobilisés.
Perspectives :
- Le Parlement européen devrait voter en février 2019 pour l’instauration d’un dispositif de “filtrage” des investissements étrangers
Sources :
- AFP, China seeks allies in Spain and Portugal despite EU reservations, France 24, 28/11/2018.
- AFP, Le président chinois au Portugal pour renforcer les liens économiques tissés par Pékin, Connaissance des Energies, 04/12/2018.
- Agencia Lusa, Estados Unidos “atentos” e críticos do investimento chinês em Portugal, Observador, 06/07/2018.
- BUGGE A., China wants to strengthen partnership with Portugal : Xi, Reuters, 02/12/2018.
- Factbox : Chinese investments in Portugal, Reuters, 14/05/2018.
- « La Ceinture et la Route » sera un élément clé des relations avec le Portugal, China.org.cn, 06/12/2018.
Clémence Pèlegrin