Buenos Aires. Soumis à une forte pression du fait des mouvements spéculatifs contre le peso argentin (qui a été dévalué à plus de 100 % en un an), le président Mauricio Macri a pris des mesures visant à convaincre les marchés financiers internationaux et sa propre population que le gouvernement est capable de gérer cette crise. Le président a annoncé que le gouvernement lèvera des taxes extraordinaires sur les exportations afin de combler le déficit fiscal. Il a également considérablement réduit son gouvernement, passant de 23 ministres à 10. Le gouvernement renégociera l’accord récemment conclu avec le FMI afin de couvrir ses besoins financiers en 2018 et 2019.

Il y a plusieurs causes à cette crise. Tout d’abord, la récente hausse des taux d’intérêt internationaux a fait pression sur les devises des pays émergents puisque les capitaux sont plus volontiers réinvestis dans les pays développés plus sûrs. Mais il y a aussi des facteurs domestiques en jeu : le programme de réformes économiques graduelles que Macri a mis en place depuis son entrée en fonction en 2015 a été insuffisant pour restaurer la croissance et limiter l’inflation et l’Argentine continue de s’appuyer sur les marchés financiers pour financer son important déficit fiscal. En promettant d’éliminer son déficit en 2019 et d’engranger des excédents en 2020, Macri avait confiance dans l’apaisement des tensions économiques (2).

L’Argentine est une terre de contrastes. Malgré le fait qu’on vante la souvent comme étant l’une des seules sources de bonnes nouvelles en Amérique latine ces dernières années, les problèmes actuels montrent que régler les anciennes tensions économiques argentines – crise de la dette, faible croissance, inflation et déficit important – sera plus long que prévu. Étant donné la récente dévaluation du peso argentin, on peut s’attendre à ce que l’inflation continue d’augmenter cette année, de plus de 40 %, et que le PIB chute d’au moins 2 % (3).

Cette crise aura bien entendu des répercussions politiques. Macri devrait se présenter à sa propre succession en octobre 2019, mais sa popularité a baissé du fait de la crise économique. Sa principale rivale sera probablement l’ancienne présidente Cristina Fernández de Kirchner, malgré de récentes révélations sur un scandale de corruption : l’ancienne présidente et son défunt mari sont accusés d’avoir touché plusieurs millions de dollars de pots-de-vin de la part de compagnies de bâtiment publiques (4). À presqu’un an des élections présidentielles, rien n’est certain.

Perspectives :

  • Septembre 2018 : l’Argentine et le FMI négocieront un nouvel accord, quelques mois seulement après le précédent.
  • Octobre 2019 : Élection présidentielle. Le président Macri et l’ancienne présidente Fernández seront certainement les principaux candidats. Le gouvernement espère que le croissance reprendra avant l’élection.

Sources :

  1. Argentina’s Macri raises taxes, axes ministries after peso plunge, Al Jazeera, 3 septembre 2018.
  2. This Time Is Different ? For Argentina and IMF, It Had Better Be, Bloomberg, 7 septembre 2018.
  3. Argentina – the crisis in six charts,. BBC World, 9 septembre 2018.
  4. En Argentine, Cristina Kirchner à nouveau face au juge, Le Monde, 4 septembre 2018.