Téhéran. La stratégie de Donald Trump concernant l’Iran est agressive mais cohérente. Le président américain, lassé de voir ses alliés au Moyen-Orient, Israël et l’Arabie saoudite, mis en difficulté par l’Iran, a décidé de mettre le pays sous pression. Trump a évoqué la possibilité d’un nouvel accord, qui engloberait la question nucléaire mais également les activités iraniennes en Syrie, au Yémen, en Palestine (soutien au Hamas) et au Liban (soutien au Hezbollah). Les autorités iraniennes ont décliné cette invitation réaffirmant leur position sur le seul accord existant, le Joint Comprehensive Plan of Action (Jcpoa) de 2015.

Le président américain reprend également le discours des années Bush sur la volonté d’un “Regime change” en Iran (1). Si une certaine impatience se fait sentir dans les villes iraniennes, le régime conserve de nouvelles alliances et de nouveaux partenaires depuis l’accord de 2015. Ainsi Téhéran pourra compter sur la Chine, l’Inde, la Russie ou encore la Corée du Sud pour continuer à commercer. La Chine profite des défections européennes pour récupérer plusieurs contrats, ainsi la Cnpc (China National Petroleum Corporation) prend la place de Total dans le domaine de l’énergie. Pékin a annoncé vouloir honorer les contrats signés à hauteur de 600 milliards de dollars sur les 25 prochaines années.

La Russie comme la Chine continueront de faire des affaires avec l’Iran, au moins pour des raisons politiques, par anti-américanisme principalement. Moscou a déjà invité l’Iran à rejoindre l’union douanière de l’Union eurasiatique. L’Inde de son côté voit en Téhéran un potentiel partenaire stratégique pour contrer la relation Pékin-Islamabad. En 2016 déjà, l’Inde avait signé avec l’Iran et l’Afghanistan un accord sur le développement du port iranien de Chabahar, afin de concurrencer les investissements chinois dans le port pakistanais de Gwadar (2).

La question se pose donc également pour l’Union et ses membres, confrontés à un dilemme. Suivre la politique américaine et abandonner une partie de leur indépendance ou continuer à respecter l’accord sur le nucléaire, au risque d’être taxé, outre-Atlantique, de soutien au régime iranien. La Commission européenne a donné une indication sur la marche qu’elle souhaitait suivre en mai dernier. En effet, elle a activé une loi autorisant les entreprises européennes à ne pas se conformer aux sanctions américaines contre l’Iran. Des outils sont par ailleurs en train d’être mis en place pour faciliter les investissements des entreprises européennes en Iran (3).

Perspectives :

  • Puisque les difficultés économiques pour l’Iran vont croître, il est possible d’interroger la viabilité du soutien iranien à ses différents partenaires régionaux (Assad, Houthis, Hezbollah et Hamas).
  • Les nouvelles sanctions américaines vont mettre sous pression le gouvernement iranien et la population. Reste à savoir comment Téhéran réagira en cas de manifestations. Si une nouvelle vague de répression devait avoir lieu, les Européens seront tentés d’imposer à leur tour des sanctions au régime.

Sources :