Sibérie orientale. Une tendance profonde semble s’accélérer. Si l’Union demeure le client principal de la Russie, la proportion de ses importations de pétrole est en baisse — alors qu’augmentent les exportations russes en Asie.
Cette semaine, Reuters rapportait la prise de position de Transneft, l’entreprise qui a le monopole sur les pipelines russes (90 % du pétrole transite par les 70 000 kilomètres des conduites contrôlées par ce géant public fondé en 1993). Selon un porte parole de Transneft, la Russie aurait augmenté ses exportations vers la Chine de 50 % par rapport à l’année précédente en réaction à la diminution de la demande européenne pour un produit de moindre qualité par rapport à l’offre du marché (5). Pour le moment la Russie transporte le pétrole en Chine à travers des connexions qui traversent le Kazakhstan et en se servant de l’oléoduc Sibérie orientale-Océan pacifique (ESPO), mais plusieurs projets sont en cours de réalisations (cf. perspectives).
Dans le débat des dernières années, plusieurs commentateurs avaient noté une possible convergence politique entre Poutine et Xi, en parlant même d’un “Russia’s pivot to Asia” (4) qui trouvait cependant dans les questions énergétiques une limite à sa transformation en doctrine (3).
On pourrait être aujourd’hui dans le moment pivot de cette séquence.
Perspectives :
- Xi Jinping et Vladimir Poutine se retrouveront pour la première fois depuis le quatrième succès électoral du Président russe à Qingdao en juin, probablement aux environs du 9-10, dans le cadre des rencontres de la Shanghai Cooperation Organization (SCO), une organisation internationale qui fournit un cadre de coopération permanent à quatre pays d’Asie centrale (Kazakhstan, Kirghizistan, Tadjikistan et Ouzbékistan), à la Russie et à la Chine.
- Attention à la publication le 25 juin des statistiques sur les exportations du pétrole par la Banque Centrale de Russie (1). NB. Il est toujours difficile de mesurer l’importance du pétrole et du gaz naturel pour l’économie russe. L’institut de statistique fédéral russe (Goskomstat Rossii) semble avoir déjà diminué le poids joué par le secteur énergétique en le limitant aux alentours de 1/10 du PIB (5). La Russie n’est, certes, pas un État qui dépend du pétrole (oil state), on peut estimer toutefois que le secteur énergétique compte pour à peu près ⅕ du PIB national.
- L’accord monstre (400 milliards de dollars) signé le 28 mai 2014 entre Gazprom et China National Petroleum Corporation (CNPN) prévoit la construction d’une série de pipelines nécessaires au transit des 38 milliard de mètres cubes par an prévus. Le projet le plus ambitieux de pipeline, Force de Sibérie, devrait être opérationnel le 20 Décembre 2019 (2) — important de noter que la durée de l’accord est de 30 ans.
Sources :
- Central Bank of Russia, External Sector Statistics.
- Gazprom, Linear part of Power of Siberia completed by 75.5 %, 21 mars 2018
- JOHNSON Keith, Russia’s Stumbling Pivot to Asia, 8 mai 2015.
- LO Bobo, HILL Fiona, Putin’s Pivot : Why Russia is Looking East, Brookings, 31 juillet 2013.
- MASAAKI Kuboniwa , SHINICHIRO Tabaka and USTINOVA Natalya (2005). How Large is the Oil and Gas Sector in Russia ? , Eurasian Geography and Economics, 46 (1), 68-76.
- Reuters, Russia’s oil exports to Europe decline as quality worsens, 8 mai 2018.