Jérusalem. Israël est le seul Etat démocratique qui renouvelle sans interruption l’état d’urgence depuis sa création (3). D’où sa grande rapidité à répondre à des pressions internes et externes (1), son habitude des mécanismes législatifs d’exception et sa tendance à fournir à la politique des outils très efficaces pour assurer cette rapidité.

Un exemple récent est l’autorité accordée par la Knesset au Premier ministre, qui pourra déclarer la guerre dans des situations extrêmes après avoir obtenu l’approbation du ministre de la Défense, sans avoir à demander l’autorisation du Parlement (2).

Cette décision peut s’expliquer par le changement de forces sur le terrain dans le conflit syrien, désormais gagné, du point de vue militaire, par le régime de Bachar el Assad. L’Iran et son allié le plus important, le Hezbollah, ne sont plus occupés sur le terrain par les milices de l’État islamique et peuvent se concentrer sur la consolidation de leurs positions en Syrie. Une situation qu’Israël n’acceptera pas, comme en témoigne sa politique de « ligne rouge implicite » (5) : contrairement aux limites explicitement fixées par Barack Obama et Emmanuel Macron à l’utilisation des armes chimiques, Jérusalem n’a pas fait de déclarations précises sur les actions sur le territoire syrien qui ne sont pas acceptables pour sa politique de sécurité, mais il a préféré communiquer implicitement ses limites à son adversaire en intervenant chaque fois qu’il a traversés la Syrie (il a par exemple frappé les transferts d’armes iraniens au Hezbollah). Les puissantes frappes menées contre les postes iraniens en réponse aux quelque vingt-cinq roquettes lancées par l’unité Al Qods de l’armée iranienne, interceptées par le système Iron Dome (quatre), ou tombées avant d’entrer dans l’espace aérien israélien (toutes les autres), font partie de cette politique. Téhéran sait qu’Israël est prêt à réagir de façon disproportionnée s’il juge que ses intérêts sont menacés (4).

Perspectives :

  • Lundi 14 mai, inauguration de l’ambassade américaine à Jérusalem, suivie d’une éventuelle agitation en Israël et de réactions iraniennes.
  • Benyamin Netanyahu s’appuie sur l’influence de Vladimir Poutine sur l’Iran pour contenir l’action des gardes révolutionnaires en Syrie. Suivre avec attention toutes les déclarations de Moscou sur ce sujet.

Sources :

  1. LIS Jonathan, Netanyahu Granted Authority to Declare War ‘In Extreme Situations’ With Only Defense Minister’s Approval, Haaretz, 30 avril 2018.
  2. MIZOCK Adam, The legality of the fifty-two year state of emergency in Israel, University of California, Davis, 2001.
  3. Articles 38 et 39 de la Basic Law de 2001.
  4. RAINERI Daniele, Israele risponde con durezza deliberata al primo attacco dell’Iran, Il Foglio, 11 mai 2018.
  5. TERTRAIS Bruno, The Diplomacy of “Red Lines”, Recherches & Documents, n°02/2016, février 2016.