La série de séminaires UNESCO SHS MOST/Groupe d’études géopolitiques (GEG) sur les “Sciences humaines face aux transformations sociales” vise à intégrer de nouveaux concepts à nos grilles d’analyse des transformations des sociétés contemporaines et des liens sociaux qui unissent les individus, à travers des dialogues entre le monde académique et les politiques publiques.
Cette troisième session sur “La transformation de l’humain face à la crise climatique” analysera et définira les transformations anthropologiques causées par la transition écologique.
Le débat portera sur les transformations anthropologiques causées par la transition écologique, l’émergence d’une nouvelle éthique et la possible naissance d’autres aspirations que la surconsommation. Il examinera les effets de cette transformation sur les structures et les liens sociaux, la possibilité d’une réponse socio-écologique aux inégalités grandissantes et l’émergence de nouvelles formes de solidarité.
Chair de séance : Sébastien Treyer, directeur général de l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI), spécialiste de la prospective au service des politiques publiques et des négociations internationales en matière d’environnement.
Introduction : Baptiste Roger-Lacan, rédacteur en chef-adjoint du Grand Continent.
Intervenants :
La séance aura lieu le 23 juin 2023, de 18h à 19h30 (CET), au Siège de l’UNESCO (7 Place de Fontenoy, Paris) et en ligne.
Elle est ouverte à toutes et à tous mais les inscriptions sont obligatoires en cliquant sur ce lien.
Alors que toute une tradition philosophique, du mythe de Prométhée à Hannah Arendt en passant par Descartes et Marx, a défini l’homme par sa relation à la technique et par sa capacité à modifier la nature selon ses besoins, cette vision anthropologique semble aujourd’hui dépassée, inadaptée aux transformations de l’Anthropocène, concept qui s’est imposé dans les débats publics et scientifiques pour penser, sur le temps long, l’ère de crise climatique globale que nous traversons. Il semblerait par conséquent que les modèles de description de l’être humain – consumens, faber, colossus – soient désormais inadaptés à l’ère de la transition écologique.
C’est pourquoi le philosophe Christophe Bouton propose le concept d’homo continens – homme de la retenue – pour décrire l’être humain à l’ère de la sobriété énergétique, dans une pièce de doctrine paru dans le Grand Continent. Ce concept d’homo continens sera le point de départ de la troisième séance du séminaire « Les sciences humaines face aux transformations sociales », consacrée à l’anthropologie climatique.
Il s’agira tout d’abord d’analyser et définir les transformations anthropologiques causées par la transition écologique. L’ère de la sobriété énergétique, rendue nécessaire par le changement climatique, et cela de façon urgente en Europe en raison de la guerre en Ukraine, augurera-t-elle d’un passage de l’humain consommateur à l’humain de la retenue, l’homo continens ? Ce concept est-il un concept descriptif, prescriptif, ou normatif ? Dans quelle mesure cette transformation anthropologique s’accompagne-t-elle de la mise en place d’une nouvelle éthique ?
Le réchauffement climatique, en rendant nécessaire une transformation de l’être humain, devrait également conduire à une évolution des structures sociales. Est-ce que les perturbations engendrées vont conduire à une destruction des organisations sociales, en forçant des populations entières à la migration car leur territoire est devenu inhabitable ? Allons-nous assister à une rupture au sein des sociétés et entre les sociétés, entre ceux qui ont les moyens financiers de s’adapter au réchauffement, et ceux qui verront leurs conditions de vie se détériorer inexorablement ? Les principes de solidarité pourraient-ils être affaiblis, voire disparaître, dans un contexte où chacun lutte pour la préservation de son mode de vie ?
Ces transformations pourraient néanmoins conduire à l’émergence de nouvelles formes de solidarités. Premièrement, la nécessité d’un effort collectif pour répondre à une crise pourrait favoriser des formes nouvelles de mobilisation des sociétés, au sein des Etats et à l’échelle internationale, proches de celles que l’on observe face à une pandémie, ou face à un conflit armé, en renforçant l’unité des corps sociaux. Ensuite, la transition énergétique et agricole pourrait rendre nécessaires des modes de production moins centralisés et moins intensifs, et donc une réorganisation plus égalitaire des sociétés. Enfin, la transition écologique pourrait, en raison des réorganisations auxquelles elle contraint, ouvrir des brèches dans lesquelles il est aussi possible de s’engouffrer pour lier transition écologique et redistribution des richesses, au sein des Etats, mais aussi entre eux, afin de rendre la transition acceptable.
Fatih Birol, “L’Afrique a le plus à gagner de la transition vers des énergies propres”, 29 juin 2022.
Christophe Bouton, “Pour une anthropologie de l’Anthropocène”, 17 novembre 2022.
Pierre Charbonnier,
Cédric Durand, Razmig Keucheyan, “Un internationalisme écosocialiste”, 20 septembre 2022.
Frédéric Keck, “Refroidir la chaleur des crises. L’anthropologie européenne de Claude Lévi-Strauss”, 29 février 2020.
Pascal Lamy, “Jalons pour une anthropologie européenne”, 08 janvier 2020.
Catherine Larrère, “Qu’est-ce que l’écoféminisme ?”, 25 avril 2023.
Bruno Latour, Le sol européen est-il en train de changer sous nos pieds ?, 23 mai 2022.
Jean-Bernard Levy, “Penser les biens communs pour affronter les « dilemmes tragiques » de l’énergie”, 25 novembre 2022.
Paul Magnette
Laurence Tubiana
Sébastien Treyer, “Diplomatie environnementale : l’Europe et les nouveaux non-alignés”, 23 juin 2022.
Greta Thunberg, “Imaginer une nouvelle action climatique”, 20 novembre 2022.
Jean Vioulac, “Une spirale d’auto-destruction”, 25 juin 2022.