{"id":92834,"date":"2020-11-28T12:01:19","date_gmt":"2020-11-28T11:01:19","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=92834"},"modified":"2020-11-28T12:02:02","modified_gmt":"2020-11-28T11:02:02","slug":"de-trump-a-biden-lafrique-dans-la-politique-etrangere-americaine","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2020\/11\/28\/de-trump-a-biden-lafrique-dans-la-politique-etrangere-americaine\/","title":{"rendered":"De Trump \u00e0 Biden : l’Afrique dans la politique \u00e9trang\u00e8re am\u00e9ricaine"},"content":{"rendered":"\n

\u00c0 l’issue d’un long tour de scrutin, l’\u00e9lection de Joe Biden \u00e0 la pr\u00e9sidence des \u00c9tats-Unis d’Am\u00e9rique apporte une certitude : on n’entendra gu\u00e8re le prochain locataire de la Maison Blanche parler de l’Afrique comme de \u00ab shithole countries<\/em> \u00bb, comme le faisait son pr\u00e9d\u00e9cesseur.<\/p>\n\n\n\n

Bien s\u00fbr, lu en ces termes, le changement ne semble pas vraiment r\u00e9volutionnaire. Et pourtant, il ne faut pas s’\u00e9tonner que les \u00e9l\u00e9ments de discontinuit\u00e9 dans la politique africaine de Washington soient bas\u00e9s sur une dimension rh\u00e9torique, formelle plut\u00f4t que substantielle, quelle que soit la couleur de l’administration en place.<\/p>\n\n\n\n

Ligne de continuit\u00e9<\/strong><\/h4>\n\n\n\n

En fait, au cours des vingt derni\u00e8res ann\u00e9es, la politique \u00e9trang\u00e8re am\u00e9ricaine en Afrique s’est d\u00e9velopp\u00e9e selon une ligne de continuit\u00e9 transversale, qui a transcend\u00e9 les rangs politiques et est rest\u00e9e largement inchang\u00e9e malgr\u00e9 les alternances politiques au sommet de l’\u00c9tat.<\/p>\n\n\n\n

Une continuit\u00e9 qui s’est clairement manifest\u00e9e sous les pr\u00e9sidences de George W. Bush et de Barack Obama, traduite par une s\u00e9rie de priorit\u00e9s sensiblement inchang\u00e9es : interventions antiterroristes, politiques de coop\u00e9ration au d\u00e9veloppement \u2013\u202fc\u00e9l\u00e8bres sont les programmes pr\u00e9sidentiels lanc\u00e9s par Bush (President’s Emergency Plan for AIDS Relief<\/em>, <\/a>PEPFAR) et Obama (Young African Leaders Initiative ; Feed the Future ; Power Africa<\/em><\/a>)\u202f\u2013 et plans d’aide humanitaire.<\/p>\n\n\n\n

Les variations du score se sont essentiellement limit\u00e9es au ton et au style utilis\u00e9s, notamment dans le domaine de la s\u00e9curit\u00e9. De la rh\u00e9torique n\u00e9oconservatrice de la guerre mondiale contre le terrorisme,<\/a> \u00e0 l\u2019entreprise, le long d’un arc de crise qui unit id\u00e9alement l’Afrique de l’Ouest \u00e0 la Corne de l’Afrique, des Overseas Contingency Operations<\/em><\/a> d’Obama ; de la r\u00e9f\u00e9rence explicite \u00e0 un islam radical responsable d’actes de terrorisme, \u00e0 la tentative de construire une nouvelle relation avec le monde islamique, sanctionn\u00e9e lors du discours <\/a>d’Obama \u00e0 l’Universit\u00e9 du Caire en 2009 ; de l’exportation de la d\u00e9mocratie \u00e0 de nouvelles approches de coop\u00e9ration bas\u00e9es sur l’exaltation de mod\u00e8les de gouvernance vertueuse.<\/p>\n\n\n\n

Mais en fait, peu de choses ont chang\u00e9. Sous les administrations Obama, on a paradoxalement assist\u00e9 \u00e0 un processus de militarisation accrue de la pr\u00e9sence am\u00e9ricaine en Afrique, par le renforcement de l’empreinte militaire et du Commandement Afrique (Africom<\/a>), au Sahel \u202f\u2013\u202fla construction d’une base de drones \u00e0 Agadez, au Niger, remonte \u00e0 2015\u202f\u2013 et dans la Corne de l’Afrique, o\u00f9 la pression sur les insurg\u00e9s djihadistes d’al-Shabaab a \u00e9t\u00e9 accrue par l’utilisation de drones et de bombardements chirurgicaux, qui n’ont pas \u00e9pargn\u00e9 les victimes civiles.<\/p>\n\n\n\n

Pendant les quatre ann\u00e9es de l’administration Trump, le manque d’int\u00e9r\u00eat des \u00c9tats-Unis pour l’Afrique semblait \u00e9vident. Pour preuve, les paroles et les actes d’un pr\u00e9sident qui a exclu le continent de ses visites institutionnelles et n’a re\u00e7u que quelques d\u00e9l\u00e9gations africaines \u00e0 la Maison Blanche, laissant au secr\u00e9taire d’\u00c9tat adjoint aux affaires africaines, Tibor Nagy, la lourde t\u00e2che de maintenir le fil des relations avec l’Afrique.<\/p>\n\n\n\n

Les pressions exerc\u00e9es par M. Trump et des membres de son administration pour r\u00e9duire la pr\u00e9sence et l’engagement financier des \u00c9tats-Unis en Afrique ont envoy\u00e9 un signal encore plus \u00e9loquent \u00e0 cet \u00e9gard, mais la r\u00e9sistance du Congr\u00e8s a permis de maintenir les principales initiatives sur le continent.<\/p>\n\n\n\n

Contrecarrer l’influence sino-russe en Afrique<\/strong><\/h4>\n\n\n\n

La Nouvelle strat\u00e9gie pour l’Afrique<\/a>, pr\u00e9sent\u00e9e fin 2018, a \u00e9t\u00e9 le pilier de la politique \u00e9trang\u00e8re am\u00e9ricaine dans la macro-r\u00e9gion. <\/p>\n\n\n\n

Le fil conducteur du document est la volont\u00e9 strat\u00e9gique de contrebalancer la pr\u00e9sence chinoise et russe en Afrique par le renforcement des relations commerciales avec le continent, dans le cadre d’une concurrence mondiale o\u00f9 les \u00c9tats africains sont \u00ab objectiv\u00e9s \u00bb, consid\u00e9r\u00e9s comme des acteurs passifs au centre de dynamiques et d’int\u00e9r\u00eats strat\u00e9giques rivaux.<\/p>\n\n\n\n

Cette dimension de la pr\u00e9sence am\u00e9ricaine en Afrique a \u00e9t\u00e9 rendue explicite par le conseiller \u00e0 la s\u00e9curit\u00e9 nationale de l’\u00e9poque, John Bolton, selon lequel \u00ab les grandes puissances mondiales, la Chine et la Russie, d\u00e9veloppent d\u00e9lib\u00e9r\u00e9ment et agressivement leurs investissements dans la r\u00e9gion afin d’obtenir un avantage concurrentiel sur les \u00c9tats-Unis \u00bb. Dans un discours prononc\u00e9 \u00e0 la Heritage Foundation, M. Bolton<\/a> a soulign\u00e9 que la Chine a eu recours \u00e0 \u00ab des pots-de-vin, des accords opaques, une utilisation strat\u00e9gique de la dette pour maintenir les \u00c9tats africains captifs de la volont\u00e9 et des exigences chinoises \u00bb.<\/p>\n\n\n\n

Et la Russie a tent\u00e9 \u00ab d’accro\u00eetre son influence dans la r\u00e9gion par des accords \u00e9conomiques corrompus […] en d\u00e9veloppant des relations politiques et \u00e9conomiques sans tenir compte des principes de gouvernance transparente et responsable et de l’\u00c9tat de droit \u00bb. La menace pour les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains en mati\u00e8re de s\u00e9curit\u00e9 nationale r\u00e9side essentiellement dans l’activisme de Moscou et de P\u00e9kin, qui saperait l’ind\u00e9pendance des nations africaines et, par cons\u00e9quent, les possibilit\u00e9s d’investissement des \u00c9tats-Unis sur le continent.<\/p>\n\n\n\n

Initiatives \u00e9conomiques et objectifs strat\u00e9giques<\/strong><\/h4>\n\n\n\n

Pour soutenir les objectifs strat\u00e9giques de renforcement des relations commerciales et d’investissement des \u00c9tats-Unis en Afrique, face au d\u00e9clin constant enregistr\u00e9 ces derni\u00e8res ann\u00e9es \u2013\u202fen 2018, l’Afrique repr\u00e9sentait 1,6 % du commerce mondial des \u00c9tats-Unis et 0,8 % des investissements \u00e9trangers directs, soit environ la moiti\u00e9 du pic de 2010\u202f\u2013 l’administration Trump a lanc\u00e9 le programme gouvernemental Prosper Africa.<\/em><\/a><\/p>\n\n\n\n

L’initiative vise \u00e0 fournir un soutien technique aux activit\u00e9s des acteurs priv\u00e9s am\u00e9ricains, en mobilisant des ressources et en harmonisant les initiatives d\u00e9j\u00e0 en place. Il est conforme \u00e0 l’African Growth and Opportunity Act<\/em><\/a> (Agoa) \u2013\u202fintroduit par Clinton en 2000, renforc\u00e9 par Bush, prolong\u00e9 de 10 ans par Obama en 2015 et maintenu en vie par Trump\u202f\u2013 qui permet aux produits africains d’acc\u00e9der librement aux march\u00e9s am\u00e9ricains.<\/p>\n\n\n\n

Malgr\u00e9 le lancement de l’initiative, les proclamations de Trump \u2013\u202fg\u00e9n\u00e9ralement hostile aux trait\u00e9s multilat\u00e9raux consid\u00e9r\u00e9s comme d\u00e9savantageux pour l’Am\u00e9rique, et sa pr\u00e9f\u00e9rence pour les partenariats bilat\u00e9raux\u202f\u2013 se sont refl\u00e9t\u00e9es dans les n\u00e9gociations pour la conclusion d’un accord commercial avec le gouvernement kenyan<\/a>, qui a re\u00e7u une grande attention et un grand int\u00e9r\u00eat dans la r\u00e9gion.<\/p>\n\n\n\n

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