Le d\u00e9bat politique fran\u00e7ais sur le plan de relance et d\u2019investissement europ\u00e9en et sur son financement n\u2019est pas \u00e0 la hauteur des enjeux. Il oppose d\u2019un c\u00f4t\u00e9 :<\/p>\n\n\n\n
Ces deux lectures \u00e9troites et contradictoires sont politiquement et \u00e9conomiquement erron\u00e9es.<\/p>\n\n\n\n
Le plan de relance est bien historique<\/a> parce que, pour la premi\u00e8re fois depuis la crise de la zone euro, (i) il autorise des transferts entre les \u00c9tats Membres, ce qui \u00e9tait devenu un tabou absolu (ici pour pr\u00e8s de 390 milliards sur 3 ans), (ii) il lance un emprunt commun par la Commission europ\u00e9enne alors que ces derni\u00e8res ann\u00e9es les seuls emprunts communs tol\u00e9r\u00e9s \u00e9taient le fait de sch\u00e9mas intergouvernementaux<\/a>, et permet donc (iii) une mutualisation certes insuffisante et partielle de la r\u00e9ponse \u00e0 la crise, mais une mutualisation tout de m\u00eame. <\/p>\n\n\n\n Cependant, malgr\u00e9 la rupture que constitue cet accord, il faut bien reconna\u00eetre que les montants sont macro\u00e9conomiquement insuffisants pour r\u00e9pondre au choc et que, s\u2019ils doivent bien entendu \u00eatre vus comme s\u2019ajoutant aux plans de relance nationaux, la mutualisation permise par le plan europ\u00e9en est sans doute insuffisante pour permettre \u00e0 des pays comme l\u2019Italie ou l\u2019Espagne de faire face au choc macro\u00e9conomique en cours<\/a>.<\/p>\n\n\n\n Enfin, il est absolument faux de dire que ce plan ne co\u00fbtera rien aux fran\u00e7ais. Si la France recevra en effet des transferts de l\u2019Union, elle restera d\u2019une part un contributeur net, et d\u2019autre part m\u00eame si elle n\u2019\u00e9tait pas un contributeur net, le plan ne co\u00fbterait pas rien pour autant car cet endettement commun devra bien \u00eatre rembours\u00e9 soit par des contributions des \u00c9tats Membres (et donc par les imp\u00f4ts des fran\u00e7ais), soit il faut le souhaiter, par des ressources propres, de nouveaux imp\u00f4ts europ\u00e9ens, qui m\u00eame s\u2019ils sont pr\u00e9lev\u00e9s sur les entreprises du num\u00e9rique (taxe GAFA), les banques (taxe sur les transactions financi\u00e8res), sur les entreprises polluantes (taxe sur les plastiques non recyclables) ou sur le reste du monde (taxe carbone aux fronti\u00e8res), p\u00e8seront sur le pouvoir d\u2019achat des m\u00e9nages fran\u00e7ais. Il n\u2019y a donc pas \u00ab d\u2019argent magique \u00bb comme aimait \u00e0 r\u00e9p\u00e9ter le gouvernement, pas plus quand il s\u2019agit d\u2019argent europ\u00e9en. Une dette \u00e9mise en commun est une bonne chose, mais ce n\u2019est pas parce qu\u2019elle n\u2019est pas \u00e9mise par la France qu\u2019elle ne co\u00fbte rien \u00e0 la France.<\/p>\n\n\n\n Cependant, ceux qui consid\u00e8rent que puisqu\u2019il faudra rembourser cet argent et puisque nous sommes un contributeur net au budget, ce plan est n\u00e9cessairement une d\u00e9faite ou une anti-victoire, font l\u2019erreur de confondre comptabilit\u00e9 et \u00e9conomie. Oui, du point de vue comptable nous payons plus que nous recevons ; non, cela ne veut pas dire que ce plan est une perte pour la France, au contraire. Si l\u2019Italie et le reste de l\u2019Europe flanchait, nous flancherions aussi. Nous avons donc un int\u00e9r\u00eat \u00e9conomique imm\u00e9diat, direct, et permanent \u00e0 ce que ce plan fonctionne. En effet, 1 euro de relance en Italie permettrait \u00e0 l\u2019\u00e9conomie italienne de croitre davantage et, en retour, \u00e0 l\u2019\u00e9conomie fran\u00e7aise aussi. Il y a des effets multiplicateurs positifs \u00e0 la relance dans les autres pays de l\u2019Union qui font que si ce plan nous co\u00fbte du point de vue comptable, il nous b\u00e9n\u00e9ficie grandement du point de vue \u00e9conomique. C\u2019est d\u2019ailleurs l\u2019analyse que les pays plus conservateurs et frugaux eux-m\u00eames font, bien conscients de leur int\u00e9r\u00eat national.<\/p>\n\n\n\n La question n\u2019est donc pas de faire des comptes d\u2019apothicaire sur le juste retour et les transferts nets. Il faut c\u00e9l\u00e9brer ce plan comme une avanc\u00e9e notable dans le d\u00e9bat \u00e9conomique et politique europ\u00e9en. Ce qui n\u2019emp\u00eache pas de reconna\u00eetre cependant ses nombreuses faiblesses et de pr\u00e9parer d\u2019ores et d\u00e9j\u00e0 les moyens de l\u2019am\u00e9liorer.<\/p>\n\n\n\n