{"id":63485,"date":"2020-03-14T22:59:39","date_gmt":"2020-03-14T21:59:39","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=63485"},"modified":"2020-03-19T10:23:47","modified_gmt":"2020-03-19T09:23:47","slug":"coronavirus-en-espagne-pedro-sanchez-fait-face-a-sa-premiere-urgence-politique","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2020\/03\/14\/coronavirus-en-espagne-pedro-sanchez-fait-face-a-sa-premiere-urgence-politique\/","title":{"rendered":"Coronavirus en Espagne : Pedro S\u00e1nchez fait face \u00e0 sa premi\u00e8re urgence politique"},"content":{"rendered":"\n
Madrid. <\/em>On sait que les moments d’urgence d\u00e9finissent la substance du leadership<\/em> politique. Le juriste allemand Carl Schmitt est all\u00e9 jusqu’\u00e0 sugg\u00e9rer que le moment exceptionnel \u00e9tait au c\u0153ur de toute prise de d\u00e9cision politique, ainsi que la force d\u00e9terminante dans toute relation avec la r\u00e9alit\u00e9. <\/span>1<\/sup><\/a><\/span><\/span> Alors que le virus COVID-19 se propage rapidement en Espagne (le pays europ\u00e9en qui a le taux le plus \u00e9lev\u00e9 en ce moment), le Premier ministre Pedro Sanchez se trouve confront\u00e9 \u00e0 la premi\u00e8re urgence politique de son mandat.<\/p>\n\n\n\n Lors de son intervention publique de vendredi 13 au Palais de la Moncloa, M. Sanchez a annonc\u00e9 un ensemble de \u00ab mesures exceptionnelles \u00bb, qui entreront en vigueur aujourd\u2019hui, afin de synchroniser et de coordonner les fonctions administratives du gouvernement f\u00e9d\u00e9ral avec celles des autonomies r\u00e9gionales. <\/span>2<\/sup><\/a><\/span><\/span> Dans son discours succinct de six minutes, S\u00e1nchez a d\u00e9clar\u00e9 que le virus se propagerait tr\u00e8s probablement au-del\u00e0 de la limite des 10 000 personnes, bien qu’il ait \u00e9galement transmis de l’\u00e9quanimit\u00e9 et de l’espoir : \u00ab Ensemble, nous serons capables de surmonter cette premi\u00e8re phase de cette pand\u00e9mie qui nous affecte tous \u00bb, a-t-il remarqu\u00e9. \u00c0 la fin du discours, M. Sanchez a \u00e9galement demand\u00e9 la collaboration des jeunes, en \u00e9vitant les interactions sociales en cette p\u00e9riode difficile. Il a soulign\u00e9 la n\u00e9cessit\u00e9 d’un nouvel \u00ab h\u00e9ro\u00efsme collectif \u00bb. Dans l’ensemble, c’est un discours que beaucoup attendaient au d\u00e9but de cette semaine, et il a montr\u00e9 un leadership politique exprimant la plus pleine comp\u00e9tence de ses pouvoirs sur le risque de pand\u00e9mie.<\/p>\n\n\n\n Cette d\u00e9claration intervient un jour apr\u00e8s que les dirigeants de droite se sont violemment prononc\u00e9s contre la passivit\u00e9 et la pr\u00e9tendue \u00ab procrastination \u00bb de S\u00e1nchez. Ainsi, Pablo Casado, chef du Parti Populaire, a appel\u00e9 \u00e0 l’unification imm\u00e9diate d’un \u00ab commandement politique \u00bb central capable de d\u00e9passer les ou\u00ef-dire des techniciens et des scientifiques. <\/span>3<\/sup><\/a><\/span><\/span> Ce parti de droite, h\u00e9ritier d’une tradition de pouvoir ex\u00e9cutif fort (Donoso Cortes, C\u00e1novas del Castillo, \u00c1lvaro D’Ors) n’a pas attendu longtemps pour promouvoir sa vision traditionnelle d’un pouvoir centralis\u00e9. Comme il est apparu clairement ces deux derni\u00e8res ann\u00e9es dans la politique espagnole, la c\u00e9sure entre les d\u00e9fenseurs de l’\u00c9tat national centralis\u00e9 et ceux qui soutiennent les administrations des autonomies r\u00e9gionales, coupe \u00e0 travers les lignes partisanes et id\u00e9ologiques. Il est int\u00e9ressant de noter que c’est Ada Colau, maire de Barcelone et aujourd’hui en quarantaine apr\u00e8s avoir rencontr\u00e9 plusieurs personnes infect\u00e9es par le coronavirus, qui s’est plainte hier des incongruit\u00e9s administratives entre les niveaux national et r\u00e9gional. <\/span>4<\/sup><\/a><\/span><\/span> En effet, les r\u00e9gions de Galice, de Catalogne et du Pays Basque ont pris des mesures de leur propre chef sans coordination avec le gouvernement national, cr\u00e9ant ainsi une confusion tout en sapant un pouvoir ex\u00e9cutif unifi\u00e9. Nous savons depuis longtemps que les probl\u00e8mes territoriaux en Espagne sont dus, en partie, \u00e0 un d\u00e9ficit de f\u00e9d\u00e9ralisme. Un d\u00e9ficit qui pourrait maintenant avoir un impact sur les actions entreprises par le gouvernement national pour faire face \u00e0 l’augmentation exponentielle du COVID-19. Il se pourrait que les partis de droite (PP et Vox, mais aussi des secteurs de l’opinion publique qui sont contre la coalition Sanchez) convoquent \u00e9galement le pass\u00e9 aux efforts imprudents de Rodriguez Zapatero pour faire face \u00e0 la crise \u00e9conomique de 2008. <\/span>5<\/sup><\/a><\/span><\/span><\/p>\n\n\n\n Par ailleurs, la d\u00e9claration de l’\u00e9tat d’urgence nationale par S\u00e1nchez, telle que pr\u00e9vue par l’article 116 de la Constitution espagnole, pourrait tr\u00e8s bien constituer un leadership d’appoint qui veut transmettre l\u2019id\u00e9e que le gouvernement national diff\u00e8re substantiellement de celui de Zapatero lors de l’effondrement \u00e9conomique de 2008. D’une part, S\u00e1nchez ne gouverne plus seul ; il partage sa capacit\u00e9 de d\u00e9cision souveraine avec les membres du conseil d’administration de sa coalition, o\u00f9 il est rejoint par Unidas Podemos, et avec les partis nationalistes r\u00e9gionaux. Cette pluralit\u00e9 au niveau du gouvernement national rendrait plus difficile d’ignorer ou de diff\u00e9rer une r\u00e9ponse \u00e0 une crise aussi d\u00e9l\u00e9t\u00e8re que celle du COVID-19. Deuxi\u00e8mement, il ne faut pas oublier que Sanchez est un franc-tireur politique qui, m\u00eame au sein de son propre parti, a montr\u00e9 sa capacit\u00e9 \u00e0 se maintenir \u00e0 flot dans une crise o\u00f9 tout semblait perdu. En effet, dans son discours, il a affirm\u00e9 qu’il \u00e9tait capable de rassembler la nation sans crainte d’\u00eatre battu ou de provoquer des rivalit\u00e9s politiques. Si l’administration S\u00e1nchez parvient \u00e0 contenir et \u00e0 faire baisser sensiblement le nombre de cas de contamination, cela pourrait tr\u00e8s bien accro\u00eetre sa popularit\u00e9 dans tous les domaines.<\/p>\n\n\n\n La question \u00e0 long terme est de savoir comment la diffusion du COVID-19 dans les territoires espagnols (la Communaut\u00e9 de Madrid, La Rioja, le Pays Basque et la Navarre en t\u00eate de l’indice territorial des cas par habitant) affectera les niveaux pr\u00e9vus de d\u00e9veloppement national et de stabilit\u00e9 \u00e9conomique jusqu’\u00e0 l’\u00e9t\u00e9. <\/span>6<\/sup><\/a><\/span><\/span> Bien que le porte-parole du gouvernement S\u00e1nchez, Fernando Sim\u00f3n, ait estim\u00e9 qu\u2019elle durerait jusqu’\u00e0 deux mois, il est d\u00e9finitivement trop t\u00f4t pour fixer un cadre temporel \u00e0 un virus qui a eu une port\u00e9e mondiale sans pr\u00e9c\u00e9dent. <\/span>7<\/sup><\/a><\/span><\/span> Dans un pays o\u00f9 le tourisme d’\u00e9t\u00e9 repr\u00e9sente pr\u00e8s de 12 % du PIB, l’\u00e9mergence du COVID aura des effets \u00e9conomiques et politiques d\u00e9cisifs. Au cours des deux prochains mois, nous verrons comment Pedro S\u00e1nchez pourra faire face au probl\u00e8me de responsabilit\u00e9 pos\u00e9 par ses responsables politiques et les membres de la soci\u00e9t\u00e9 civile dans les r\u00e9gions les plus pauvres ; ces m\u00eames r\u00e9gions qui, pendant la crise \u00e9conomique, ont subi les pires effets des coupes d’aust\u00e9rit\u00e9. Les quatre prochains mois seront un test d\u00e9cisif pour le leadership politique de Pedro S\u00e1nchez.<\/p>\n\n\n\n Enfin, il y a au moins deux le\u00e7ons \u00e0 tirer de l’impact du COVID-19 en Espagne, qui pourraient \u00eatre consid\u00e9r\u00e9es comme des ouvertures sur les limites de la position progressiste. Premi\u00e8rement, une crise de l’ampleur de la COVID-19 met en \u00e9vidence la n\u00e9cessit\u00e9 de penser s\u00e9rieusement le pouvoir ex\u00e9cutif dans la pratique politique. Comme la gauche a discut\u00e9 du f\u00e9d\u00e9ralisme et de l’action politique au niveau local au cours des deux derni\u00e8res ann\u00e9es, elle a marginalis\u00e9 le pouvoir de l’ex\u00e9cutif en tant que, pr\u00e9cis\u00e9ment, la branche qui peut agir sur l’exception, et \u00e0 son tour, est capable de traiter efficacement la contingence de la temporalit\u00e9 dans la vie politique. Les nouvelles forces progressistes ne devraient pas permettre au droit d’\u00eatre le seul porte-parole des desseins de l’\u00c9tat, du pr\u00e9sidentialisme et du pouvoir ex\u00e9cutif.<\/p>\n\n\n\n Deuxi\u00e8mement, le coronavirus montre que les anciennes tactiques politiques de la modernit\u00e9 – fond\u00e9es sur le militantisme id\u00e9ologique, la division entre le public et le priv\u00e9, la construction de la subjectivit\u00e9 ou l’\u00e9mergence d’un \u00ab \u00e9v\u00e9nement \u00bb – sont moins vendeuses qu’autrefois pour transformer un \u00e9tat de fait contemporain. Comme l’ont soutenu Giorgio Cesarano & Giani Collu dans un livre presque oubli\u00e9, Apocalypse et r\u00e9volution<\/em> (\u00c9ditions la Temp\u00eate, 2020), r\u00e9cemment r\u00e9\u00e9dit\u00e9, toute transformation sociale exige aujourd’hui une transformation au niveau de l’esp\u00e8ce, capable de repenser la relation m\u00eame entre les organismes et le monde dans le cadre du mod\u00e8le actuel d’accumulation et d’extraction pour la survie. C’est pourquoi, peut-\u00eatre, la strat\u00e9gie de \u00ab solidarit\u00e9 globale \u00bb, de \u00ab retour aux communaut\u00e9s \u00bb, ou de \u00ab d\u00e9fense du public \u00bb n’est qu’un bavardage oiseux. Une nouvelle r\u00e9orientation de nos pr\u00e9suppos\u00e9s intellectuels sur la vie et la nature est n\u00e9cessaire. Dans la mesure o\u00f9 une pand\u00e9mie telle que le COVID-19 met les gouvernements occidentaux en \u00e9chec, elle constitue \u00e9galement un d\u00e9fi pour tout horizon progressiste d\u00e9sireux de penser en dehors des clich\u00e9s id\u00e9ologiques pr\u00e9\u00e9tablis.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":" Vendredi, Pedro Sanchez a d\u00e9clar\u00e9 un nouvel ensemble de \u00ab mesures exceptionnelles \u00bb pour contrer la propagation du coronavirus en Espagne. Il s’agit d’une \u00e9tape importante, qui remet en question les traditions politiques espagnoles \u00e9tablies de longue date, de centralisme contre le f\u00e9d\u00e9ralisme, autant qu\u2019elle appelle les progressistes \u00e0 entamer une r\u00e9flexion sur le r\u00f4le du pouvoir ex\u00e9cutif pour g\u00e9rer efficacement une telle crise. <\/p>\n","protected":false},"author":175,"featured_media":62577,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","sticky":false,"template":"templates\/post-briefings.php","format":"standard","meta":{"_acf_changed":false,"_trash_the_other_posts":false,"footnotes":""},"categories":[1989,2210],"tags":[2281],"geo":[543],"class_list":["post-63485","post","type-post","status-publish","format-standard","hentry","category-acces-libre","category-sante-publique","tag-coronavirus","staff-gerardo-munoz","geo-mediterranee"],"acf":[],"yoast_head":"\n
\r\n <\/picture>\r\n \n <\/a>\n<\/figure>\n\n\nCrise politique, crise \u00e9conomique<\/h4>\n\n\n\n
Deux le\u00e7ons politiques<\/h4>\n\n\n\n