{"id":33181,"date":"2019-05-01T13:07:43","date_gmt":"2019-05-01T11:07:43","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=33181"},"modified":"2019-05-01T13:07:45","modified_gmt":"2019-05-01T11:07:45","slug":"tirez-sur-lusurpateur-la-rhetorique-de-la-legitimite-dans-une-nouvelle-sequence-de-la-crise-venezuelienne","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2019\/05\/01\/tirez-sur-lusurpateur-la-rhetorique-de-la-legitimite-dans-une-nouvelle-sequence-de-la-crise-venezuelienne\/","title":{"rendered":"\u00ab Tirez sur l\u2019usurpateur \u00bb : la rh\u00e9torique de la l\u00e9gitimit\u00e9 dans une nouvelle s\u00e9quence de la crise v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne"},"content":{"rendered":"\n

Caracas. <\/em>Nicol\u00e1s Maduro et Juan Guaid\u00f3 sont d\u2019accord sur un point : ils veulent tout les deux mettre \u00e0 bas \u00ab l\u2019usurpateur \u00bb. Or le r\u00e9f\u00e9rent vis\u00e9 par ce terme d\u00e9nonciateur n\u2019est pas le m\u00eame dans un cas et dans l\u2019autre, et l\u2019accusation fonctionne en r\u00e9alit\u00e9 comme un miroir, dans lequel chacun des deux \u00ab pr\u00e9sidents \u00bb du Venezuela pointe du doigt son adversaire comme le responsable de la crise que vit le pays en ce moment. Ce langage manich\u00e9en, qui redessine constamment la dichotomie l\u00e9gitimit\u00e9\/imposture, contribue \u00e0 rendre le dialogue entre les deux parties inaudible.
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Ainsi, Guaid\u00f3 a lanc\u00e9, le 30 avril \u00e0 l\u2019aube, l\u2019op\u00e9ration \u00ab Libertad \u00bb pour mettre fin \u00e0 l\u2019 \u00ab usurpation \u00bb. Il a ordonn\u00e9 la lib\u00e9ration du leader de l\u2019opposition Leopoldo L\u00f3pez, qui a \u00e9t\u00e9 ensuite conduit vers la base a\u00e9rienne La Carlota ; les deux hommes sont apparus ensemble dans une vid\u00e9o diffus\u00e9e sur les r\u00e9seaux sociaux o\u00f9 ils exhortent les forces arm\u00e9es et le peuple \u00e0 se soulever contre le r\u00e9gime de Maduro et \u00e0 descendre dans la rue. Les partisans de Maduro d\u00e9noncent alors une tentative de coup d\u2019\u00c9tat et, tout en soulignant que les militaires soulev\u00e9s ne constituent qu\u2019un groupuscule nettement minoritaire, appellent l\u2019arm\u00e9e \u00e0 rester fid\u00e8le au chavisme <\/span>1<\/sup><\/a><\/span><\/span>.
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C\u2019est que l\u2019arm\u00e9e joue un r\u00f4le essentiel dans la politique v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne, et ce depuis plus d\u2019un demi-si\u00e8cle, bien que la politique chaviste ait, au cours des derni\u00e8res d\u00e9cennies, contribu\u00e9 \u00e0 renforcer sa place privil\u00e9gi\u00e9e. L\u2019auto-proclamation de Guaid\u00f3 avait d\u2019ailleurs eu lieu \u00e0 une date \u00e9minemment symbolique, l\u2019anniversaire du coup d\u2019\u00c9tat qui, en 1958, avait mis fin \u00e0 la dictature de P\u00e9rez Jim\u00e9nez. Ch\u00e1vez, qui \u00e9tait lui-m\u00eame militaire, avait tent\u00e9 en 1992 de destituer Andr\u00e9s P\u00e9rez, avant d\u2019arriver au pouvoir par les urnes en 1999 ; en 2002, une nouvelle tentative de coup d\u2019\u00c9tat voyait le jour, cette fois-ci contre Ch\u00e1vez. Or, le pr\u00e9sident en \u00e9tait sorti renforc\u00e9 : une des raisons de cela avait \u00e9t\u00e9 le soutien que lui accordait une bonne partie de l\u2019arm\u00e9e. Le chavisme a cherch\u00e9 \u00e0 conforter les forces arm\u00e9es, et en particulier la haute-hi\u00e9rarchie militaire, qui avait d\u00e8s lors une influence directe sur les choix politiques. Leur nom, Fuerza Armada Nacional Bolivariana, est un indice de leur place dans le projet chaviste et un sympt\u00f4me de leurs \u201cpolitisation et partisanisation\u201d progressives <\/span>2<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Ainsi, les choix d\u2019une arm\u00e9e traditionnellement chaviste mais dont le soutien vis-\u00e0-vis de Maduro semble s\u2019affaiblir risquent d\u2019\u00eatre d\u00e9terminants dans la situation actuelle.
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La r\u00e9action d\u2019Iv\u00e1n Duque, pr\u00e9sident de la Colombie, qui, face \u00e0 l\u2019\u00e9pisode du 30 avril, fait appel \u201caux militaires et au peuple du Venezuela pour qu\u2019ils se placent du bon c\u00f4t\u00e9 de l\u2019histoire\u201d <\/span>3<\/sup><\/a><\/span><\/span> acquiert ainsi tout son sens. Les leaders sud-am\u00e9ricains tels que Mauricio Macri et Sebasti\u00e1n Pi\u00f1era, qui avaient reconnu Guaid\u00f3 comme pr\u00e9sident \u201cen exercice\u201d du pays, consid\u00e8rent \u00e9galement qu\u2019il s\u2019agit l\u00e0 d\u2019un pas vers la restauration de la d\u00e9mocratie ; c\u2019est aussi la position des \u00c9tats-Unis, qui avait eu un r\u00f4le clef dans l\u2019auto-proclamation de Guaid\u00f3, et dont le pr\u00e9sident a affirm\u00e9 sur twitter \u201csurveiller de tr\u00e8s pr\u00e8s\u201d le d\u00e9roulement des \u00e9v\u00e9nements <\/span>4<\/sup><\/a><\/span><\/span>. L\u2019alli\u00e9 bolivarien Evo Morales, tout comme le chancelier cubain Bruno Rodr\u00edguez, condamne ce qu\u2019il voit comme un coup d\u2019\u00c9tat. Ces r\u00e9actions rendent bien compte de l\u2019opposition r\u00e9gionale entre les vestiges du socialisme du d\u00e9but du XXI\u00e8me si\u00e8cle et les protagonistes du \u201cvirage \u00e0 droite\u201d que conna\u00eet l\u2019Am\u00e9rique latine depuis le milieu des ann\u00e9es 2010 -et particuli\u00e8rement le groupe de Lima-, et perp\u00e9tuent par ailleurs l\u2019approche manich\u00e9enne de la question. L\u2019Uruguay et le Mexique sont les deux pays qui, fin janvier, avaient \u00e9mis un communiqu\u00e9 proposant un dialogue, avant toute chose, entre les deux parties ; leur potentielle m\u00e9diation est un des facteurs qui permet d\u2019esp\u00e9rer une sortie de crise non-violente <\/span>5<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n

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GEG | Cartographie pour Le Grand Continent. <\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Perspectives :<\/strong>
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