{"id":300702,"date":"2025-10-08T16:11:18","date_gmt":"2025-10-08T14:11:18","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=300702"},"modified":"2025-10-08T18:04:03","modified_gmt":"2025-10-08T16:04:03","slug":"a-lombre-de-mars-penser-la-diversite-des-guerres","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2025\/10\/08\/a-lombre-de-mars-penser-la-diversite-des-guerres\/","title":{"rendered":"\u00c0 l\u2019ombre de Mars : penser la diversit\u00e9 des guerres"},"content":{"rendered":"\n

Longtemps refoul\u00e9e par des concitoyens b\u00e9n\u00e9ficiant, innocemment des dividendes de la paix, moqu\u00e9e par les sciences sociales sous l\u2019\u00e9tiquette p\u00e9jorative d\u2019\u00ab histoire-bataille \u00bb, la guerre n\u2019en finit pourtant pas de refaire irruption sur le devant de la sc\u00e8ne.<\/p>\n\n\n\n

Dans un premier temps, \u00e0 partir des ann\u00e9es 1950, la dissuasion nucl\u00e9aire avait rel\u00e9gu\u00e9 au second plan l\u2019hypoth\u00e8se m\u00eame d\u2019un conflit conventionnel majeur. Puis, \u00e0 partir des ann\u00e9es 1960\u20131970, vinrent les gu\u00e9rillas insurrectionnelles, souvent fond\u00e9es sur des strat\u00e9gies asym\u00e9triques du faible au fort \u2014 parfois rudimentaires, mais redoutablement efficaces. Elles suscit\u00e8rent en retour l\u2019\u00e9laboration de doctrines de contre-insurrection, de David Galula au g\u00e9n\u00e9ral David H. Petraeus <\/span>1<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n

Depuis le milieu des ann\u00e9es 2010, nous sommes confront\u00e9s \u00e0 une situation in\u00e9dite. Avec la guerre hybride en Ukraine d\u00e8s 2014, la brutalisation du th\u00e9\u00e2tre syrien, la militarisation croissante de l\u2019espace indo-pacifique et l\u2019int\u00e9gration doctrinale par la Chine de la \u00ab guerre hors-limites \u00bb <\/span>2<\/sup><\/a><\/span><\/span>, c\u2019est un th\u00e9\u00e2tre strat\u00e9gique qui se reconfigure. <\/p>\n\n\n\n

D\u00e9sormais, trois dimensions \u2014 guerre nucl\u00e9aire, conflit conventionnel, lutte asym\u00e9trique \u2014 tendent \u00e0 s\u2019empiler et \u00e0 s\u2019activer simultan\u00e9ment (p. 32).<\/p>\n\n\n\n

Retour de la guerre et crise des fondements<\/h2>\n\n\n\n

Cette recomposition \u00e9largit consid\u00e9rablement la surface strat\u00e9gique que doivent couvrir \u00e0 grands frais (p. 33), les d\u00e9mocraties lib\u00e9rales. Elle survient au moment m\u00eame o\u00f9 celles-ci subissent d\u00e9j\u00e0 de fortes tensions internes : ralentissement de la croissance, co\u00fbt \u00e9lev\u00e9 de leurs mod\u00e8les sociaux, charge croissante li\u00e9e \u00e0 la transition environnementale et instabilit\u00e9 politique interne aliment\u00e9e par l\u2019encha\u00eenement des crises budg\u00e9taires et de la dette publique.<\/p>\n\n\n\n

Dans ce double contexte de g\u00e9opolitique incertaine et de pressions domestiques accrues, les r\u00e9gimes d\u00e9mocratiques sont contraints de repenser en profondeur leurs sch\u00e9mas doctrinaux. Ils renouent ainsi avec ce que le g\u00e9n\u00e9ral Lucien Poirier avait identifi\u00e9 d\u00e8s les ann\u00e9es de l\u2019atome triomphant comme la \u00ab crise des fondements \u00bb <\/span>3<\/sup><\/a><\/span><\/span> de la pens\u00e9e strat\u00e9gique contemporaine.<\/p>\n\n\n\n

\u00c0 l\u2019\u00e9quation militaire \u00e0 trois variables \u2014 nucl\u00e9aire, conventionnelle, asym\u00e9trique \u2014 s\u2019ajoute d\u00e9sormais une seconde \u00e9quation, celle-ci interne. Il s\u2019agit des vuln\u00e9rabilit\u00e9s propres aux d\u00e9mocraties, devenues selon le terme de Clausewitz un point de \u00ab friction \u00bb de toute conduite strat\u00e9gique de long terme \u2014 en amont comme en aval de celle-ci. Pol\u00e9mologie et science politique peinent encore \u00e0 en penser conjointement les termes, pourtant d\u00e9cisifs pour toute gouvernance \u00e9clair\u00e9e.<\/p>\n\n\n\n

D\u00e9sormais, trois dimensions \u2014 guerre nucl\u00e9aire, conflit conventionnel, lutte asym\u00e9trique \u2014 tendent \u00e0 s\u2019empiler et \u00e0 s\u2019activer simultan\u00e9ment.<\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

La guerre comme op\u00e9rateur central de bifurcation historique<\/h2>\n\n\n\n

Dans L\u2019\u00c9chiquier strat\u00e9gique<\/em> <\/span>4<\/sup><\/a><\/span><\/span>, Antony Dabila <\/span>5<\/sup><\/a><\/span><\/span> engage ce nouveau \u00ab Grand D\u00e9bat \u00bb, tant interne qu\u2019externe. Il montre que la guerre n\u2019est pas un simple \u00e9pisode violent de l\u2019histoire humaine, mais un op\u00e9rateur de bifurcation centrale. Cette bifurcation s\u2019op\u00e8re sur un plan domestique : recomposition des r\u00e9gimes politiques, r\u00e9organisation des hi\u00e9rarchies sociales, mobilisations \u00e9conomiques et technologiques. Elle se double aussi d\u2019un plan international : transformation des rapports entre entit\u00e9s politiques, red\u00e9finition des fronti\u00e8res, basculements h\u00e9g\u00e9moniques.<\/p>\n\n\n\n

Ce changement cristallise en effet un entrelacs de variables non militaires \u2014 logistiques, \u00e9cologiques, id\u00e9ologiques, religieuses ou d\u00e9mographiques \u2014 qu\u2019elle active, redistribue ou d\u00e9truit. Au-del\u00e0 de cette fonction syst\u00e9mique, la guerre concr\u00e8te est surtout, selon Dabila, un champ dynamique de combinaison et de superposition de r\u00e9gimes strat\u00e9gico-tactiques, qui se succ\u00e8dent ou s\u2019articulent au sein d\u2019une m\u00eame s\u00e9quence conflictuelle.<\/p>\n\n\n\n

Cette pluralit\u00e9 op\u00e9ratoire g\u00e9n\u00e8re des effets propres \u2014 de sid\u00e9ration, d\u2019usure, de harc\u00e8lement, de contention, de surprise et de concentration \u2014 qui, plus encore que les r\u00e9sultats politiques apparents, conditionnent la morphogen\u00e8se des ordres sociaux issus des conflits.<\/p>\n\n\n\n

C\u2019est sur ce point d\u00e9cisif que la pol\u00e9mologie de Dabila \u2014 articul\u00e9e \u00e0 une r\u00e9flexion encore trop peu suivie sur la dialectique entre conflictualit\u00e9 externe et structuration interne du politique \u2014 ouvre vers une sociologie historique compar\u00e9e de la guerre, envisag\u00e9e dans ses effets structurants sur les soci\u00e9t\u00e9s humaines, tant en amont (ante bellum<\/em>) qu\u2019en aval (post bellum<\/em>) des s\u00e9quences guerri\u00e8res.<\/p>\n\n\n\n

Dabila reprend ces questions \u00e0 la racine en op\u00e9rant une double r\u00e9inscription de la guerre : d\u2019une part, au sein d\u2019une th\u00e9orie g\u00e9n\u00e9rale des affaires humaines structur\u00e9es par la pluralit\u00e9 irr\u00e9ductible des unit\u00e9s politiques souveraines (les polities<\/em>) ; d\u2019autre part, dans une architecture strat\u00e9gique et combinatoire fond\u00e9e sur une grammaire \u00e9l\u00e9mentaire des man\u0153uvres et des configurations politico-militaires.<\/p>\n\n\n\n

Il en r\u00e9sulte une th\u00e8se forte : \u00e0 partir d\u2019un certain seuil de densit\u00e9 humaine et de coalescence politique, la guerre s\u2019impose comme une possibilit\u00e9 constitutive \u2014 virtuellement latente \u2014 des relations entre polities. Dans une conjoncture donn\u00e9e, l\u2019alignement de facteurs sociologiques peut g\u00e9n\u00e9rer des conflits , activant par l\u00e0 m\u00eame certains \u00e9l\u00e9ments s\u00e9lectionn\u00e9s par les acteurs, en fonction du contexte, au sein de l\u2019ensemble analytiquement pensable de la gamme strat\u00e9gico-tactique.<\/p>\n\n\n\n

Dans un double contexte de g\u00e9opolitique incertaine et de pressions domestiques accrues, les r\u00e9gimes d\u00e9mocratiques sont contraints de repenser en profondeur leurs sch\u00e9mas doctrinaux.<\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

La possibilit\u00e9 de la guerre comme contrainte de survie<\/h2>\n\n\n\n

La guerre, selon Dabila, n\u2019est ainsi ni l\u2019effet direct d\u2019une pulsion biologique ni un accident sans cause : elle est la forme, certes extr\u00eame mais structurellement toujours possible, des relations entre polities, inh\u00e9rente au fait de leur coexistence dans un champ d\u2019interaction conflictuel. En effet, d\u00e8s lors que plusieurs unit\u00e9s souveraines partagent un m\u00eame espace d\u2019influence ou de d\u00e9pendance, il suffit qu\u2019un diff\u00e9rend porte sur un enjeu clef, inaccessible \u00e0 toute m\u00e9diation, pour que la tension latente se mue en affrontement organis\u00e9, o\u00f9 la parole c\u00e8de la place \u00e0 la violence structur\u00e9e par l\u2019action militaire.<\/p>\n\n\n\n

Cette possibilit\u00e9 persistante de la guerre impose \u00e0 toute politie \u2014 quel que soit son r\u00e9gime politique (autocratique, d\u00e9mocratique ou hi\u00e9rocratique <\/span>6<\/sup><\/a><\/span><\/span>) et quelles que soient ses pr\u00e9f\u00e9rences normatives, d\u2019int\u00e9grer structurellement les contraintes de cette possibilit\u00e9 dans l\u2019architecture m\u00eame de sa gouvernance institu\u00e9e. Tout ordre politique doit ainsi les internaliser comme une contrainte de survie : comme le dit Dabila, un \u00ab corps politique doit avoir non seulement une capacit\u00e9 de r\u00e9sistance aux agressions, mais \u00e9galement une strat\u00e9gie \u00bb (p. 10). Si les communaut\u00e9s politiques diff\u00e8rent, ce n\u2019est qu\u2019\u00e0 deux niveaux distincts : d\u2019une part, leur aptitude \u00e0 \u00e9laborer la strat\u00e9gie militaire la plus efficace face aux chocs externes de survie ; d\u2019autre part, la l\u00e9gitimit\u00e9 de leur r\u00e9gime politique, appr\u00e9ci\u00e9e \u00e0 l\u2019aune de la validit\u00e9 \u2014 objectivement argumentable \u2014 des normes qui fondent les finalit\u00e9s politiques que leur conduite strat\u00e9gique, qu\u2019elle soit militaire ou infra-guerri\u00e8re, entend poursuivre.<\/p>\n\n\n\n

Homo strategicus <\/em> : entre \u00ab endo- \u00bb et \u00ab exopolitique \u00bb<\/h2>\n\n\n\n

Une telle approche s\u2019oppose frontalement aux pens\u00e9es politiques \u00ab h\u00e9mipl\u00e9giques \u00bb <\/span>7<\/sup><\/a><\/span><\/span>, qui \u00e9vacuent l\u2019ext\u00e9rieur strat\u00e9gique des polities au nom d\u2019une normativit\u00e9 r\u00e9duite au seul ordre interne du \u00ab r\u00e9gime politique \u00bb : comp\u00e9tition \u00e9lectorale, principes institu\u00e9s de justice et r\u00e9gime d\u2019affects centr\u00e9 exclusivement sur les injustices li\u00e9es \u00e0 la redistribution et la reconnaissance. Contre cette r\u00e9duction de l\u2019ensemble du politique \u2014 dans ses dimensions internes et externes \u2014 \u00e0 une pure \u00ab endopolitique \u00bb, par oubli ou d\u00e9ni de l\u2019\u00ab exopolitique \u00bb, Dabila rejoint les pr\u00e9misses centrales de Raymond Aron <\/span>8<\/sup><\/a><\/span><\/span> et de Jean Baechler <\/span>9<\/sup><\/a><\/span><\/span> : la guerre n\u2019est pas seulement une nuisance structurelle apparue avec la densification n\u00e9olithique des soci\u00e9t\u00e9s, elle fonctionne de mani\u00e8re chronique comme un m\u00e9canisme implacable de s\u00e9lection des formes politiques, et du m\u00eame coup des id\u00e9aux de \u00ab bonne vie \u00bb sous-jacents. Une pens\u00e9e politique qui ferait l\u2019impasse sur une contrainte aussi massive n\u2019est tout simplement pas une pens\u00e9e politique, en ce qu\u2019elle m\u00e9conna\u00eet les pressions s\u00e9lectives qui s\u2019exercent depuis l\u2019ext\u00e9rieur sur les fronti\u00e8res de l\u2019unit\u00e9 politique qu\u2019elle postule, bien imprudemment, comme souveraine.<\/p>\n\n\n\n

Si les communaut\u00e9s politiques diff\u00e8rent, ce n\u2019est qu\u2019\u00e0 deux niveaux distincts : d\u2019une part, leur aptitude \u00e0 \u00e9laborer la strat\u00e9gie militaire la plus efficace face aux chocs externes de survie ; d\u2019autre part, la l\u00e9gitimit\u00e9 de leur r\u00e9gime politique.<\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

L\u2019analytique et la sociologie historique des pratiques strat\u00e9giques que propose Dabila se fondent en cons\u00e9quence sur la figure d\u2019homo strategicus<\/em> : non pas l\u2019homme calculateur de l\u2019utilit\u00e9 maximale, \u00e0 la mani\u00e8re de l\u2019homo economicus<\/em>, mais l\u2019homme confront\u00e9 \u00e0 la n\u00e9cessit\u00e9 de survivre dans un monde d\u2019incertitude et de violence, qu\u2019elles soient radicales ou structur\u00e9es ; un homme priv\u00e9 aussi de toute instance pacificatrice de rang sup\u00e9rieur aux polities.<\/p>\n\n\n\n

L\u2019histoire humaine appara\u00eet d\u00e8s lors comme une succession et superposition de s\u00e9quences au sein desquelles la strat\u00e9gie fonctionne comme un m\u00e9canisme d\u2019adaptation, de survie ou de projection d\u2019ordre \u2014 non seulement militaire, mais aussi institutionnel, diplomatique, logistique et symbolique.<\/p>\n\n\n\n

Pour autant, la guerre n\u2019est en cela que l\u2019expression extr\u00eame et politiquement \u00e9vitable du spectre plus large des relations nou\u00e9es entre les unit\u00e9s politiques souveraines : ces relations peuvent comprendre pressions \u00e9conomiques, dissuasion, diplomatie ou usage symbolique de la puissance. La guerre constitue donc un \u00ab \u00e9chec de la pacification \u00bb <\/span>10<\/sup><\/a><\/span><\/span>, c\u2019est-\u00e0-dire de la capacit\u00e9 d\u2019un syst\u00e8me politique \u00e0 stabiliser son environnement international sans recourir \u00e0 la violence organis\u00e9e. Cela suppose que la strat\u00e9gie militaire proprement dite \u2014 d\u00e9finie comme mise en \u0153uvre de cette violence organis\u00e9e \u2014 ne soit jamais autonome. Elle doit toujours \u00eatre subordonn\u00e9e \u00e0 une conduite strat\u00e9gique plus englobante, expression synth\u00e9tique des finalit\u00e9s politiques d\u00e9finies par la politie en situation.<\/p>\n\n\n\n

Dans cette perspective, Dabila r\u00e9affirme un principe cardinal h\u00e9rit\u00e9 de Carl von Clausewitz, de Hans Delbr\u00fcck, du g\u00e9n\u00e9ral Andr\u00e9 Beaufre <\/span>11<\/sup><\/a><\/span><\/span> et du g\u00e9n\u00e9ral Lucien Poirier : l\u2019art de la guerre n\u2019a de sens qu\u2019en r\u00e9f\u00e9rence \u00e0 un objectif politique. Son \u00ab finalisme strat\u00e9gique \u00bb (p. 24) implique que toute op\u00e9ration militaire n\u2019est qu\u2019un instrument \u2014 certes d\u00e9cisif \u2014 au service d\u2019une volont\u00e9 souveraine, visant par l\u2019action violente \u00e0 contraindre une autre politie \u00e0 reconna\u00eetre un certain ordre de pacification. Le strat\u00e8ge militaire n\u2019est pas un acteur autonome : il est l\u2019ex\u00e9cutant sup\u00e9rieur d\u2019un dessein politique, dont la l\u00e9gitimit\u00e9 d\u00e9pend du r\u00e9gime auquel il appartient, et non de la seule logique interne de l\u2019engagement guerrier.<\/p>\n\n\n\n

Concr\u00e8tement, pour nous Modernes, si une d\u00e9mocratie lib\u00e9rale n\u2019a nullement le loisir de faire l\u2019\u00e9conomie d\u2019une pens\u00e9e et d\u2019une conduite strat\u00e9giques unifi\u00e9es, \u00e0 la mesure des d\u00e9fis contemporains, celles-ci ne sauraient \u00eatre absorb\u00e9es par la seule rationalit\u00e9 militaire : elles doivent demeurer pleinement compatibles avec les normes juridiques, \u00e9thiques et politiques qui fondent son identit\u00e9 politique et conditionnent le soutien de la soci\u00e9t\u00e9 civile \u2014 nationale comme transnationale. \u00ab La violence que l\u2019on oppose \u00e0 la violence ne doit \u00eatre ni d\u00e9risoire ni immorale car c\u2019est le projet politique propos\u00e9 lui-m\u00eame qui en p\u00e2tirait. \u00bb (p. 45).<\/p>\n\n\n\n

La guerre : \u00ab conflit violent entre au moins deux polities \u00bb<\/h2>\n\n\n\n

La sociologie historique compar\u00e9e et l\u2019anthropologie sociale du politique montrent que la guerre n\u2019est nullement propre au monde moderne de l\u2019\u00c9tat, bureaucratis\u00e9 et militaris\u00e9 <\/span>12<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Il convient donc d\u2019en scruter aussi la logique \u00ab dans les soci\u00e9t\u00e9s n\u2019ayant pas encore atteint une organisation \u00e9tatique solide \u00bb (p. 122). C\u2019est pr\u00e9cis\u00e9ment afin d\u2019\u00e9viter les biais analytiques li\u00e9s \u00e0 une conception trop \u00e9tatis\u00e9e de la strat\u00e9gie militaire que Dabila s\u2019appuie sur des notions formellement neutres et empiriquement transversales, telles que celles d\u2019\u00ab unit\u00e9s politiques \u00bb (Raymond Aron) ou de \u00ab polities \u00bb (Jean Baechler).<\/p>\n\n\n\n

Le strat\u00e8ge militaire n\u2019est pas un acteur autonome : il est l\u2019ex\u00e9cutant sup\u00e9rieur d\u2019un dessein politique, dont la l\u00e9gitimit\u00e9 d\u00e9pend du r\u00e9gime auquel il appartient<\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Une politie, ou unit\u00e9 politique, se d\u00e9finit selon une double dimension (p. 55). Sur le plan interne, elle constitue un espace social de pacification tendancielle, ordonn\u00e9 par une formule de justice mise en \u0153uvre \u00e0 travers un ensemble de r\u00e8gles institu\u00e9es, dont l\u2019application peut requ\u00e9rir le recours \u00e0 la coercition. Sur le plan externe, toute politie \u2014 quels que soient son niveau d\u2019organisation sociale, son \u00e9poque ou son horizon culturel \u2014 \u00e9volue dans un espace d\u2019interactions entre unit\u00e9s politiques o\u00f9, en l\u2019absence de m\u00e9canismes sup\u00e9rieurs de r\u00e9gulation, tout diff\u00e9rend peut d\u00e9g\u00e9n\u00e9rer en violence militaris\u00e9e. La face interne d\u00e9finit le p\u00e9rim\u00e8tre de l\u2019\u00ab endopolitique \u00bb (intra-politique, c\u2019est-\u00e0-dire la politique domestique) propre au r\u00e9gime de la politie ; la face externe correspond, quant \u00e0 elle, au champ de l\u2019\u00ab exopolitique \u00bb (inter-politique ou \u00ab transpolitique \u00bb, c\u2019est-\u00e0-dire la politique ext\u00e9rieure) qui r\u00e9git ses relations avec les autres communaut\u00e9s politiques territorialement constitu\u00e9es.<\/p>\n\n\n\n

Cette dynamique externe d\u2019interaction s\u2019exprime selon Dabila \u00e0 travers ce qu\u2019il nomme la \u00ab propagation transpolitique \u00bb. Ce concept englobe l\u2019ensemble des actions ext\u00e9rieures d\u2019une politie, puisant dans ses ressources endopolitiques pour assumer les trois fonctions fondamentales de toute strat\u00e9gie : \u00ab dissuader \u00bb, \u00ab d\u00e9fendre \u00bb et \u00ab attaquer \u00bb. Il se substitue utilement aux cat\u00e9gories plus classiques de \u00ab grande strat\u00e9gie \u00bb ou de \u00ab strat\u00e9gie int\u00e9grale \u00bb, en ce qu\u2019il refuse d\u2019\u00e9riger la strat\u00e9gie \u2014 trop souvent r\u00e9duite \u00e0 sa seule dimension militaire \u2014 en principe central de la libert\u00e9 d\u2019action de toute communaut\u00e9 politique.<\/p>\n\n\n\n

Trois \u00e9l\u00e9ments indissociables constituent, dans ce cadre, le ph\u00e9nom\u00e8ne \u00e9minemment social de la guerre : une discorde initiale, le recours \u00e0 la violence et l\u2019inscription de cette violence dans un cadre politique. L\u2019entr\u00e9e en guerre transforme un litige en une \u00ab \u00e9preuve de force \u00bb dot\u00e9e de sa propre logique. Dabila en pr\u00e9cise les niveaux de r\u00e9alit\u00e9 (p. 43) : l\u2019objet du conflit (l\u2019enjeu g\u00e9n\u00e9ral), les finalit\u00e9s politiques (non militaires), les objectifs strat\u00e9giques (traduction militaire de l\u2019ordre politique poursuivi post bellum<\/em>) et les buts tactiques (traduction concr\u00e8te en engagements arm\u00e9s s\u00e9quenc\u00e9s).<\/p>\n\n\n\n

Cette cha\u00eene de traduction n\u2019est jamais m\u00e9canique : elle suppose un acte d\u2019interpr\u00e9tation, confi\u00e9 \u00e0 la strat\u00e9gie militaire, d\u00e9finie comme \u00ab l\u2019interpr\u00e9tation d\u2019un dessein politique \u00bb (p. 21). Interpr\u00e9ter, ici, c\u2019est \u00e0 la fois traduire, donner sens et repr\u00e9senter. Les strat\u00e8ges ne se contentent pas de transmettre une intention politique : ils la reformulent en fonction des rapports de force, des intentions adverses, des contraintes h\u00e9rit\u00e9es et des moyens disponibles. La \u00ab propagation transpolitique \u00bb d\u00e9signe le cadre o\u00f9 s\u2019\u00e9labore cette m\u00e9diation interpr\u00e9tative entre volont\u00e9 politique et conduite de la guerre.<\/p>\n\n\n\n

Grammaire g\u00e9n\u00e9rale : \u00ab clavier tactique \u00bb, \u00ab plan de guerre \u00bb, \u00ab \u00e9quation de paix \u00bb<\/h2>\n\n\n\n

Pour rendre possible la comparaison analytique de conflits issus de contextes h\u00e9t\u00e9rog\u00e8nes, Dabila propose une grammaire strat\u00e9gique fond\u00e9e sur trois instruments compl\u00e9mentaires, articul\u00e9s en un syst\u00e8me coh\u00e9rent allant de l\u2019action tactique \u00e9l\u00e9mentaire \u00e0 la d\u00e9cision politique de paix : le \u00ab clavier tactique \u00bb, le \u00ab plan de guerre \u00bb et l\u2019\u00ab \u00e9quation de paix \u00bb. Le \u00ab clavier tactique \u00bb, inspir\u00e9 du \u00ab clavier strat\u00e9gique \u00bb de Beaufre mais recentr\u00e9 sur l\u2019\u00e9chelon appropri\u00e9 (la tactique, et non la strat\u00e9gie), offre un vocabulaire \u00e9l\u00e9mentaire permettant de d\u00e9composer toute op\u00e9ration militaire en une s\u00e9rie d\u2019actions g\u00e9n\u00e9riques, d\u00e9finies non par leurs intentions mais par leurs effets dans l\u2019interaction : attaquer, surprendre, tromper, fatiguer, rompre ou menacer. Ces touches combinables, expos\u00e9es dans un tableau synth\u00e9tique (pp. 96-97), permettent de composer des s\u00e9quences op\u00e9ratoires selon la logique d\u2019une gamme musicale, et non pas en toute certitude m\u00e9caniste, reproductible more geometricum<\/em>. <\/p>\n\n\n\n

La sociologie historique compar\u00e9e et l\u2019anthropologie sociale du politique montrent que la guerre n\u2019est nullement propre au monde moderne de l\u2019\u00c9tat, bureaucratis\u00e9 et militaris\u00e9.<\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Le \u00ab plan de guerre \u00bb assure ensuite la coh\u00e9rence verticale entre lignes politique, strat\u00e9gique et tactique, par un m\u00e9canisme adaptatif de diagnostic, de coordination et de r\u00e9vision continue \u2014 chaque niveau devant rester r\u00e9visable \u00e0 la lumi\u00e8re de celui qui le surplombe.<\/p>\n\n\n\n

Enfin, l\u2019\u00ab \u00e9quation de paix \u00bb (p. 106), prolongement direct de la \u00ab loi d\u2019esp\u00e9rance politico-strat\u00e9gique \u00bb de Lucien Poirier <\/span>13<\/sup><\/a><\/span><\/span> (p. 104), formalise les conditions cognitives et psychiques de l\u2019acceptation de la d\u00e9faite : la guerre cesse non lorsqu\u2019un camp est militairement an\u00e9anti, mais lorsque le d\u00e9cideur \u2014 compte tenu de son centre de gravit\u00e9 bris\u00e9 \u2014 estime que la poursuite du conflit co\u00fbterait davantage que ce qu\u2019il reste \u00e0 esp\u00e9rer. La guerre est ainsi pens\u00e9e non comme un pur affrontement m\u00e9canique, mais comme un processus o\u00f9 la perception des co\u00fbts, la lucidit\u00e9 strat\u00e9gique et la r\u00e9silience morale du groupe combattant \u2014 y compris celle de l\u2019arri\u00e8re \u2014 jouent un r\u00f4le central. Ce triptyque analytique \u2014 clavier tactique, plan de guerre, \u00e9quation de paix \u2014 permet \u00e0 Dabila de relier l\u2019\u00e9chelle des man\u0153uvres concr\u00e8tes, la coh\u00e9rence des plans op\u00e9ratoires et les finalit\u00e9s politiques dans une \u00ab syntaxe strat\u00e9gique \u00bb compl\u00e8te (pp. 50, 95, 111), apte \u00e0 rendre comparables des s\u00e9quences historiques de guerre en apparence dissemblables.<\/p>\n\n\n\n

L\u2019\u00c9chiquier des seize modes strat\u00e9gico-tactiques<\/h2>\n\n\n\n

L\u2019analytique g\u00e9n\u00e9rale de Dabila aboutit \u00e0 un \u00e9chiquier combinatoire de seize \u00ab modes strat\u00e9gico-tactiques \u00bb (p. 91), d\u00e9duits de trois couples fondamentaux : offensive\/d\u00e9fensive, tactique\/strat\u00e9gique, directe\/indirecte. Cette matrice typologique compl\u00e8te permet de d\u00e9crypter la conduite strat\u00e9gique selon diff\u00e9rents r\u00e9gimes d\u2019action militaire possibles. Chaque mode peut \u00eatre activ\u00e9 ou corrompu en fonction des contextes, des doctrines, des configurations politico-institutionnelles et des r\u00e9gimes de commandement.<\/p>\n\n\n\n

Les strat\u00e8ges ne se contentent pas de transmettre une intention politique : ils la reformulent en fonction des rapports de force, des intentions adverses, des contraintes h\u00e9rit\u00e9es et des moyens disponibles.<\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Pour appliquer cette matrice \u00e0 l\u2019analyse historique, Dabila propose enfin trois crit\u00e8res empiriquement observables, permettant de classer typologiquement les cas : <\/p>\n\n\n\n

\u2014 L\u2019objectif strat\u00e9gique global de la campagne \u2014 au niveau des finalit\u00e9s politiques \u2014 est-il de pr\u00e9server un ordre \u00e9tabli (conservatisme) ou de le transformer (r\u00e9visionnisme strat\u00e9gique) ?<\/p>\n\n\n\n

\u2014 Sur le plan tactique, l\u2019acteur prend-il l\u2019initiative de l\u2019engagement militaire ou organise-t-il sa d\u00e9fense ?<\/p>\n\n\n\n

\u2014 L\u2019approche op\u00e9ratoire consiste-t-elle \u00e0 frapper le centre de gravit\u00e9 adverse, ou bien \u00e0 le contourner par des man\u0153uvres de diversion, de surprise ou d\u2019encerclement ?<\/p>\n\n\n\n

La r\u00e9ponse \u00e0 ces trois questions princeps<\/em> permet de coder la s\u00e9quence selon les seize configurations possibles de l\u2019\u00e9chiquier strat\u00e9gique.<\/p>\n\n\n\n

Loin d\u2019une simple manie taxinomique d\u00e9nu\u00e9e d\u2019enjeu cognitif et pratique, cette typologie vise \u00e0 rendre identifiables et comparables des op\u00e9rations issues de contextes historiques, technologiques ou culturels tr\u00e8s h\u00e9t\u00e9rog\u00e8nes, en r\u00e9duisant leur complexit\u00e9 op\u00e9ratoire \u00e0 un sch\u00e9ma d\u2019ensemble intelligible. Elle fournit ainsi \u00e0 <\/em>l\u2019analyste un levier pour diagnostiquer la forme strat\u00e9gique dominante d\u2019un affrontement donn\u00e9, et au praticien une grammaire d\u2019action pour choisir, \u00e0 chaque \u00e9tape d\u2019une campagne, parmi les formes disponibles de conduite de la guerre \u2014 dont aucune, toutefois, n\u2019est ad\u00e9quate ou efficace \u00e0 tous les coups.<\/p>\n\n\n\n

La mise \u00e0 l\u2019\u00e9preuve comparative : un large \u00e9chantillon historique de cas<\/h2>\n\n\n\n

Dans la seconde partie de L\u2019\u00c9chiquier strat\u00e9gique<\/em>, Dabila d\u00e9ploie avec rigueur une galerie de cas historiques qui d\u00e9montrent empiriquement la robustesse de sa grille analytique. Cette approche combinatoire \u2014 fond\u00e9e sur les couples strat\u00e9gie offensive\/strat\u00e9gie d\u00e9fensive, tactique offensive\/d\u00e9fensive et approche directe\/indirecte \u2014 permet une lecture transhistorique des s\u00e9quences de guerre, tout en respectant les singularit\u00e9s contextuelles.<\/p>\n\n\n\n

Chaque \u00ab mode strat\u00e9gico-tactique \u00bb donne lieu \u00e0 une mise en situation dans des p\u00e9riodes historiques et aires civilisationnelles contrast\u00e9es : du monde grec antique \u00e0 l\u2019Empire ottoman, de la Chine des Royaumes combattants aux gu\u00e9rillas des XXe-XXIe si\u00e8cles, Dabila recompose une cartographie comparative des formes concr\u00e8tes de la guerre.<\/p>\n\n\n\n

La strat\u00e9gie d\u00e9fensive directe appuy\u00e9e sur une tactique d\u00e9fensive directe se retrouve par exemple, de mani\u00e8re paradigmatique, dans l\u2019h\u00e9ro\u00efsme sacrificiel des Thermopyles (480 av. J.-C.) ou la d\u00e9fense de Verdun (1916), o\u00f9 l\u2019on \u00ab choisit de laisser l\u2019avantage \u00e0 l\u2019adversaire et [de] le laisse[r] lancer ses forces sur ses r\u00e9sistances \u00bb (p. 233). Ce mode d\u2019attrition rel\u00e8ve d\u2019une logique de temporisation politique sous contrainte de puissance, o\u00f9 la victoire r\u00e9side moins dans la conqu\u00eate que dans la capacit\u00e9 \u00e0 emp\u00eacher l\u2019ennemi d\u2019atteindre ses propres objectifs. Il permet \u00e0 Dabila de r\u00e9\u00e9valuer des s\u00e9quences classiquement per\u00e7ues comme des \u00e9checs tactiques en victoires strat\u00e9giques diff\u00e9r\u00e9es ou symboliques (au niveau de l\u2019\u00e9nergie morale du groupe bellig\u00e9rant d\u2019alors et de ses r\u00e9activations m\u00e9morielles jusqu’\u00e0 nous, pour tenir<\/em>).<\/p>\n\n\n\n

La guerre est pens\u00e9e non comme un pur affrontement m\u00e9canique, mais comme un processus o\u00f9 la perception des co\u00fbts, la lucidit\u00e9 strat\u00e9gique et la r\u00e9silience morale du groupe combattant jouent un r\u00f4le central.<\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

L\u2019analyse de cas issus de soci\u00e9t\u00e9s segmentaires \u2014 d\u00e9pourvues d\u2019\u00c9tat s\u00e9dentaire \u00e0 l\u00e9gitimit\u00e9 rationnelle-l\u00e9gale, comme en Occident \u2014, tels que certaines campagnes mont\u00e9es des Nuer, des Mongols ou des chefferies zouloues, permet de tester la robustesse de la grille jusque dans des configurations de conflictualit\u00e9 infra-\u00e9tatiques ou alter-\u00e9tatiques ; en effet, on sait d\u00e9sormais que les Mongols ont bien dispos\u00e9 d\u2019une forme redoutable d\u2019\u00c9tat itin\u00e9rant <\/span>14<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Citant Polyen (IIe si\u00e8cle ap. J.-C.) \u00e0 propos des peuples alentour (notamment les Parthes) faisant la guerre tout autrement que les \u00ab cit\u00e9s \u00bb gr\u00e9co-romaines, a fortiori<\/em> que l\u2019empire de Marc-Aur\u00e8le, Dabila insiste \u00e0 juste titre sur l\u2019importance de ne pas \u00ab m\u00e9priser comme des hommes sans finesse ni malice \u00bb (p. 123) ces polities ac\u00e9phales, dont la ruse et la mobilit\u00e9 forcent \u00e0 requalifier des tactiques souvent jug\u00e9es primitives comme relevant en r\u00e9alit\u00e9 de strat\u00e9gies conscientes, bien qu\u2019indirectes. <\/p>\n\n\n\n

La perc\u00e9e heuristique de la table des \u00e9l\u00e9ments strat\u00e9gico-tactiques propos\u00e9e par Dabila repose ainsi sur sa capacit\u00e9 \u00e0 int\u00e9grer aussi bien les combats m\u00e9canis\u00e9s voire num\u00e9ris\u00e9s des XXe-XXIe si\u00e8cles que les embuscades segmentaires du N\u00e9olithique ; elle permet ainsi de r\u00e9v\u00e9ler, au-del\u00e0 de la diversit\u00e9 de ces conflits, une combinatoire transhistorique des formes de la guerre, finie et structur\u00e9e et d\u00e9nombrable.<\/p>\n\n\n\n

Le comparatisme historique propos\u00e9, \u00e9tendu au temps long et aux divers espaces de l\u2019histoire humaine, met ainsi \u00e0 l\u2019\u00e9preuve l\u2019analytique g\u00e9n\u00e9rale \u00e9labor\u00e9e par Dabila dans la premi\u00e8re partie de l\u2019ouvrage, au niveau des \u00ab formes \u00e9l\u00e9mentaires \u00bb (p. 9) de la \u00ab grammaire strat\u00e9gique \u00bb (p. 51). \u00c0 la lecture des exemples, minutieusement restitu\u00e9s et analys\u00e9s, le lecteur voit peu \u00e0 peu se d\u00e9gager des logiques strat\u00e9giques, l\u00e0 o\u00f9 il ne percevait jusqu\u2019alors qu\u2019un encha\u00eenement de cas isol\u00e9s, trait\u00e9s comme de pures singularit\u00e9s dans le style souvent besogneux des narrations historiques traditionnelles. Celles-ci \u00e9taient incapables de faire appara\u00eetre le choix strat\u00e9gique effectivement op\u00e9r\u00e9 par les protagonistes d\u2019alors parmi les possibles disponibles de la gamme p\u00e9renne. Ce sont les facteurs d\u00e9terminants de ces choix, ainsi que leurs cons\u00e9quences, que le \u00ab clavier tactique \u00bb construit par Dabila permet de r\u00e9v\u00e9ler, en rendant visible l\u2019architecture op\u00e9ratoire des d\u00e9cisions militaires, jusque-l\u00e0 dissoute dans la contingence du r\u00e9cit.<\/p>\n\n\n\n

Pourquoi les acteurs d\u2019alors choisissent-ils tel ou tel \u00ab mode strat\u00e9gico-tactique \u00bb ? Avec quels effets, quel succ\u00e8s ou quel \u00e9chec du \u00ab plan de guerre \u00bb (p. 98 et 109) ? Autrement dit, avec quelle capacit\u00e9 d\u2019adaptation \u00e0 la r\u00e9action ajust\u00e9e de l\u2019ennemi, lui-m\u00eame anticipant les anticipations de l\u2019autre ? C\u2019est cette logique \u00ab inter-r\u00e9actionnelle \u00bb sans fin que Dabila (p. 53).<\/p>\n\n\n\n

Sociologiser l\u2019histoire des id\u00e9es strat\u00e9giques<\/h2>\n\n\n\n

Toutes ces dimensions sont analys\u00e9es \u00e0 l\u2019occasion de chaque exemple d\u2019affrontement arm\u00e9. <\/p>\n\n\n\n

Dans la section \u00ab Auteurs \u00bb propre \u00e0 chacun des seize modes strat\u00e9gico-politiques mis en exemple, Dabila examine la mani\u00e8re dont l\u2019exp\u00e9rience v\u00e9cue, ou l\u2019observation minutieuse des engagements, a modifi\u00e9 apr\u00e8s coup la pens\u00e9e des strat\u00e9gistes \u2014 c\u2019est-\u00e0-dire des auteurs de doctrines. De m\u00eame que la philosophie politique, selon l\u2019image c\u00e9l\u00e8bre de Hegel, ne d\u00e9ploie ses ailes qu\u2019au cr\u00e9puscule des \u00e9v\u00e9nements qu\u2019elle th\u00e9matise, la pens\u00e9e strat\u00e9gique ne se d\u00e9veloppe, elle aussi, qu\u2019apr\u00e8s la f\u00eate, \u00e0 partir d\u2019exp\u00e9riences historiques d\u00e9j\u00e0 advenues. <\/p>\n\n\n\n

Le g\u00e9n\u00e9ral de Gaulle d\u00e9non\u00e7ait la tentation de transformer un mode d\u2019action ponctuellement victorieux en une \u00ab m\u00e9taphysique absolue de l\u2019action \u00bb \u2014 posture vou\u00e9e \u00e0 l\u2019\u00e9chec, d\u00e8s lors qu\u2019elle f\u00e9tichise un succ\u00e8s pass\u00e9 en l\u2019\u00e9rigeant en mod\u00e8le ind\u00e9passable.<\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Ces exp\u00e9riences lentement d\u00e9cant\u00e9es donnent naissance \u00e0 des doctrines strat\u00e9giques successives, souvent en conflit les unes avec les autres ; en effet, les strat\u00e9ges se lisent, se r\u00e9pondent et s\u2019opposent. Ainsi, Basil H. Liddell Hart <\/span>15<\/sup><\/a><\/span><\/span>, ardent promoteur de la strat\u00e9gie \u00ab indirecte \u00bb, vouait aux g\u00e9monies la tradition clausewitzienne, accus\u00e9e d\u2019avoir inspir\u00e9 par sa glorification de la strat\u00e9gie directe et de la mont\u00e9e aux extr\u00eames les \u00e9tats-majors aveugles, responsables de la boucherie de 1914-1918.<\/p>\n\n\n\n

En mobilisant une large constellation d\u2019auteurs issus de la tradition strat\u00e9gique \u2014 de l\u2019Antiquit\u00e9 chinoise ou gr\u00e9co-romaine \u00e0 la pens\u00e9e classique et moderne europ\u00e9enne, de Sun Tzu \u00e0 Joly de Maizeroy (inventeur des termes \u00ab la strat\u00e9gique \u00bb en 1770 et \u00ab la strat\u00e9gie \u00bb en 1777 <\/span>16<\/sup><\/a><\/span><\/span>), de Jacques de Guibert \u00e0 Clausewitz, Jomini ou Liddell Hart \u2014 Dabila propose une relecture structur\u00e9e de l\u2019histoire de la pens\u00e9e strat\u00e9gique \u00e0 partir de sa propre analytique des seize modes strat\u00e9gico-tactiques.<\/p>\n\n\n\n

Si cette grille typologique s\u2019av\u00e8re conceptuellement exhaustive et empiriquement discernable dans les conflits arm\u00e9s document\u00e9s, elle autorise alors \u00e0 reconfigurer l\u2019historiographie des doctrines classiques, en sugg\u00e9rant de les envisager d\u00e9sormais non plus comme th\u00e9ories g\u00e9n\u00e9rales autosuffisantes, mais comme autant d\u2019explicitations partielles, historiquement situ\u00e9es, de certains modes op\u00e9ratoires sp\u00e9cifiques. \u00c0 y bien regarder, en effet, chaque strat\u00e9giste tend \u00e0 privil\u00e9gier un type de guerre, identifiable par sa structure strat\u00e9gique et tactique dominante, et souvent r\u00e9ductible \u00e0 un ou quelques modes de l\u2019\u00e9chiquier \u2014 parfois m\u00eame \u00e0 un seul \u2014 qu\u2019il \u00e9rige en paradigme de l\u2019efficacit\u00e9 guerri\u00e8re : \u00ab Les grands auteurs militaires ont, pour la plupart, conseill\u00e9 un type de guerre, qui peut se ramener \u00e0 quelques modes strat\u00e9gico-tactiques et parfois m\u00eame \u00e0 un seul \u00bb (p. 123). Ce sont ensuite ces doctrines, ainsi pol\u00e9miquement constitu\u00e9es, qui reconfigurent \u2014 partiellement ou en profondeur \u2014 les dispositifs de formation et de reprogrammation interg\u00e9n\u00e9rationnelle du raisonnement strat\u00e9gique, au sein des appareils militaires ou politiques des polities. \u00c0 ce titre, les sections \u00ab Auteurs \u00bb de Dabila ne rel\u00e8vent ni d\u2019une simple histoire ni d\u2019une paraphrase \u00e9rudite des id\u00e9es strat\u00e9giques : elles esquissent une sociologie historique compar\u00e9e des doctrines et des pratiques, attentive \u00e0 leurs conditions d\u2019\u00e9mergence, \u00e0 leurs effets de cadrage op\u00e9ratoire, comme \u00e0 leurs angles morts structurants.<\/p>\n\n\n\n

Th\u00e9\u00e2tres de guerre contemporains : ultime mise \u00e0 l\u2019\u00e9preuve des outils d\u2019analyse op\u00e9ratoire<\/h2>\n\n\n\n

Dans la section sur la \u00ab r\u00e9surrection de Bellone \u00bb qui conclut son ouvrage (pp. 347-374), Dabila applique sa matrice \u00e0 seize cases aux th\u00e9\u00e2tres contemporains majeurs pour d\u00e9montrer la robustesse op\u00e9ratoire de son mod\u00e8le. La guerre d\u2019Ukraine illustre d\u2019abord une strat\u00e9gie offensive avec tactique offensive directe (attaque massive et frontale d\u00e8s f\u00e9vrier 2022), rapidement r\u00e9orient\u00e9e par la Russie vers une strat\u00e9gie offensive avec tactique d\u00e9fensive indirecte (repli organis\u00e9, fortifications, saturation logistique), signe d\u2019un \u00e9chec de la charge initiale. En face, l\u2019Ukraine combine une strat\u00e9gie d\u00e9fensive avec tactique d\u00e9fensive directe dans les premiers mois (tenue de terrain, protection des villes), puis d\u00e9veloppe une tactique offensive indirecte \u2014 frappes \u00e0 longue port\u00e9e, usage de drones, ciblage des n\u0153uds logistiques \u2014 tout en conservant une posture strat\u00e9gique d\u00e9fensive.<\/p>\n\n\n\n

L\u2019agir<\/em> strat\u00e9gique suppose toujours une d\u00e9cision ad hoc<\/em> \u2014 sous contrainte, dans l\u2019incertitude des circonstances comme des cons\u00e9quences, et face \u00e0 un bellig\u00e9rant qui anticipe d\u00e9j\u00e0 les options probables de son adversaire.<\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Dans le Haut-Karabakh, le conflit de 2020 voit l\u2019Azerba\u00efdjan mobiliser une strat\u00e9gie offensive avec tactique offensive indirecte : reconqu\u00eate m\u00e9thodique par saturation, usage intensif des drones turcs Bayraktar, ciblage des lignes de ravitaillement et des centres de commandement. Inversement \u2014 \u00e0 l\u2019instar de la France de 1940, fustig\u00e9e par de Gaulle \u2014, l\u2019Arm\u00e9nie reste fig\u00e9e dans une strat\u00e9gie d\u00e9fensive avec tactique d\u00e9fensive directe, tenant ses positions sans adaptation au nouveau paradigme technologique. Dabila y voit une sorte d\u2019ossification politique par d\u00e9faut d\u2019actualisation de la conduite strat\u00e9gique.<\/p>\n\n\n\n

En Syrie, le th\u00e9\u00e2tre se structure selon une pluralit\u00e9 de modes dissemblables : le r\u00e9gime Assad adopte une strat\u00e9gie d\u00e9fensive avec tactique offensive indirecte, misant sur l\u2019usure des poches rebelles ; les Kurdes pratiquent une strat\u00e9gie d\u00e9fensive avec tactique d\u00e9fensive indirecte (esquive, retraits, contr\u00f4le de couloirs) ; la Turquie intervient selon une strat\u00e9gie offensive avec tactique indirecte (frappes cibl\u00e9es, zones tampons, proxies), illustrant un environnement strat\u00e9gico-tactique o\u00f9 aucun mode ne devient h\u00e9g\u00e9monique.<\/p>\n\n\n\n

Enfin, dans le conflit opposant Isra\u00ebl \u00e0 l\u2019\u00ab arc chiite \u00bb, Dabila voit un affrontement permanent \u00e0 seuil d\u2019escalade modulable. Isra\u00ebl d\u00e9ploie une strat\u00e9gie d\u00e9fensive avec tactique offensive indirecte : frappes pr\u00e9ventives contre les infrastructures du Hezbollah ou les convois iraniens, cyberattaques, \u00e9liminations cibl\u00e9es, \u00e9limination du Hamas dans la bande de Gaza en r\u00e9action \u00e0 l\u2019attaque du 7 octobre 2023 \u2014 le tout sans volont\u00e9 de conqu\u00eate territoriale mais afin de desserrer l\u2019\u00e9tau de l\u2019axe dit \u00ab de la R\u00e9sistance \u00bb.<\/p>\n\n\n\n

En miroir, l\u2019Iran poursuit une strat\u00e9gie offensive adoss\u00e9e \u00e0 une tactique d\u00e9fensive indirecte \u2014 r\u00e9seau de proxies, encerclement graduel, saturation p\u00e9riph\u00e9rique \u2014 relevant d\u2019une combinatoire de modes visant moins la conqu\u00eate que l\u2019\u00e9rosion de la libert\u00e9 d\u2019action adverse. Le th\u00e9\u00e2tre qui en r\u00e9sulte est celui d\u2019une conflictualit\u00e9 continue et non d\u00e9clar\u00e9e, o\u00f9 les effets sont calibr\u00e9s pour g\u00e9rer le seuil d\u2019escalade, maintenir une pression strat\u00e9gique durable, et m\u00e9nager des fen\u00eatres de bascule vers des s\u00e9quences tactiques offensives. Cette d\u00e9monstration finale de Dabila confirme sans \u00e9quivoque que ses seize combinaisons typologiques ne constituent pas des mod\u00e8les rigides, mais bien des rep\u00e8res analytiques tangibles, permettant de d\u00e9crypter les conflits contemporains au-del\u00e0 de leur plasticit\u00e9 strat\u00e9gique et de leur hybridation technologique croissante.<\/p>\n\n\n\n

L\u2019\u00ab agir \u00bb strat\u00e9gique contre <\/em>la \u00ab corruption \u00bb des modes strat\u00e9gico-tactiques<\/h3>\n\n\n\n

On insistera pour finir sur le fait que chaque chapitre consacr\u00e9 aux seize modes strat\u00e9gico-tactiques se referme par une section intitul\u00e9e \u00ab Corruption \u00bb. Il y a \u00e0 cela une raison de fond, inh\u00e9rente \u00e0 l\u2019analytique de la conduite strat\u00e9gique, d\u00e9ploy\u00e9e dans la premi\u00e8re partie. En effet, Dabila montre que si toutes les \u00ab formes g\u00e9n\u00e9rales \u00bb et \u00ab \u00e9l\u00e9mentaires \u00bb de la \u00ab syntaxe strat\u00e9gique \u00bb (p. 111) sont, par nature, imm\u00e9diatement concevables par chaque protagoniste suffisamment lucide quant \u00e0 l\u2019existence de ces possibles op\u00e9ratoires \u2014 \u00e0 l\u2019image des coups disponibles dans une partie d\u2019\u00e9checs \u2014, ceci n\u2019implique nullement qu\u2019un mode donn\u00e9 constitue une martingale valide en toute situation. Autrement dit, aucun r\u00e9gime strat\u00e9gique n\u2019est, en soi, garant ni de la justesse des objectifs politiques, ni de l\u2019efficacit\u00e9 strat\u00e9gico-tactique de la conduite de guerre : il est structurellement ind\u00e9termin\u00e9, aussi bien du point de vue des finalit\u00e9s poursuivies par la politie que de la comp\u00e9tence de son \u00e9tat-major.<\/p>\n\n\n\n

De m\u00eame que la philosophie politique, selon l\u2019image c\u00e9l\u00e8bre de Hegel, ne d\u00e9ploie ses ailes qu\u2019au cr\u00e9puscule des \u00e9v\u00e9nements qu\u2019elle th\u00e9matise, la pens\u00e9e strat\u00e9gique ne se d\u00e9veloppe, elle aussi, qu\u2019apr\u00e8s la f\u00eate, \u00e0 partir d\u2019exp\u00e9riences historiques d\u00e9j\u00e0 advenues. <\/p>Alexandre Escudier<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Le g\u00e9n\u00e9ral de Gaulle avait pleinement conscience de ce point clef lorsqu\u2019il d\u00e9non\u00e7ait la tentation de transformer un mode d\u2019action ponctuellement victorieux en une \u00ab m\u00e9taphysique absolue de l\u2019action \u00bb (cit\u00e9 p. 138) \u2014 posture rigide, vou\u00e9e \u00e0 l\u2019\u00e9chec d\u00e8s lors qu\u2019elle f\u00e9tichise un succ\u00e8s pass\u00e9 en l\u2019\u00e9rigeant en mod\u00e8le ind\u00e9passable. C\u2019est pr\u00e9cis\u00e9ment ce moment de bascule qui d\u00e9finit la \u00ab corruption \u00bb d\u2019un r\u00e9gime strat\u00e9gique : lorsqu\u2019une politie, \u00e0 travers ses dirigeants politiques et militaires, cesse d\u2019ajuster sa conduite \u00e0 la singularit\u00e9 de la situation pour reconduire m\u00e9caniquement une forme d\u2019action jadis efficace, croyant tirer sa l\u00e9gitimit\u00e9 du pr\u00e9c\u00e9dent historique plut\u00f4t que de l\u2019analyse dynamique des inter-r\u00e9actions guerri\u00e8res du moment \u2014 que ce soit au niveau de la bataille, de la campagne ou de la s\u00e9quence strat\u00e9gique d\u2019ensemble. A contrario<\/em>, une conduite strat\u00e9gique r\u00e9ellement efficace se doit d\u2019\u00eatre multi-modale, adaptative, c\u2019est-\u00e0-dire en capacit\u00e9 \u2014 cognitive et<\/em> op\u00e9rationnelle \u2014 de pivoter \u00e0 tout moment en fonction des dynamiques mouvantes du conflit.<\/p>\n\n\n\n

Ces qualit\u00e9s, la conduite strat\u00e9gique doit les incorporer, car l\u2019agir<\/em> strat\u00e9gique suppose toujours une d\u00e9cision ad hoc<\/em> \u2014 sous contrainte, dans l\u2019incertitude des circonstances comme des cons\u00e9quences, et face \u00e0 un bellig\u00e9rant qui anticipe d\u00e9j\u00e0 les options probables de son adversaire et met en \u0153uvre des contre-strat\u00e9gies qu\u2019il faut deviner sans pouvoir les pr\u00e9dire, dans l\u2019espoir de maximiser son propre \u00ab plan de guerre \u00bb et de forcer une certaine \u00ab \u00e9quation de paix \u00bb. Cette dynamique rend la strat\u00e9gie irr\u00e9ductible \u00e0 un savoir clos (homo sapiens<\/em>) acad\u00e9miquement transmissible, \u00e0 un plan parfait ou une recette garantie (homo faber<\/em>). Elle engage une rationalit\u00e9 du conflit fond\u00e9e sur l\u2019incertitude de l\u2019\u00ab agir \u00bb (homo agens<\/em>) <\/span>17<\/sup><\/a><\/span><\/span>, o\u00f9 la pertinence d\u2019un mode strat\u00e9gico-tactique ne se juge qu\u2019\u00e0 l\u2019aune du rapport mouvant entre finalit\u00e9s politiques, configurations concr\u00e8tes du th\u00e9\u00e2tre de guerre et encha\u00eenement contingent des \u00ab inter-r\u00e9actions \u00bb strat\u00e9giques.<\/p>\n\n\n\n

Le nouveau Grand D\u00e9bat<\/em> des d\u00e9mocraties lib\u00e9rales du XXIe si\u00e8cle<\/h3>\n\n\n\n

Alors que les d\u00e9mocraties lib\u00e9rales, ainsi que la proto-f\u00e9d\u00e9ration inachev\u00e9e qu\u2019est l\u2019Union europ\u00e9enne, red\u00e9couvrent avec stupeur les contraintes g\u00e9opolitiques pesant sur la promesse moderne d\u2019\u00e9mancipation \u2014 \u00e9gale dignit\u00e9 humaine, dans la s\u00e9curit\u00e9, la prosp\u00e9rit\u00e9 et les libert\u00e9s politiques et sociales, L\u2019\u00c9chiquier strat\u00e9gique<\/em> de Dabila ram\u00e8ne au premier plan, \u00e9pur\u00e9e, la table des \u00e9l\u00e9ments de la \u00ab conduite strat\u00e9gique \u00bb et de la \u00ab strat\u00e9gie militaire \u00bb \u00e0 travers les \u00e2ges. Sa pol\u00e9mologie constitue, \u00e0 ce titre, l\u2019un des fondements les plus assur\u00e9s d\u2019une doctrine unifi\u00e9e de la r\u00e9silience d\u00e9mocratique (externe\/interne), \u00e0 l\u2019heure de la mont\u00e9e conjugu\u00e9e des p\u00e9rils autocratiques domestiques et n\u00e9o-imp\u00e9riaux.<\/p>\n\n\n\n

Toute la question maintenant lancinante est de savoir si les d\u00e9s\u00e9quilibres devenus flagrants de nos d\u00e9mocraties lib\u00e9rales \u2014 d\u00e9s\u00e9quilibres sociaux, fiscaux, budg\u00e9taires, identitaires et, partant, politiques \u2014 permettront de hisser le d\u00e9bat public \u00e0 la hauteur de ce nouveau Grand D\u00e9bat du XXIe si\u00e8cle<\/em> sur la conduite strat\u00e9gique. <\/p>\n\n\n\n

Qu\u2019on s\u2019y adonne ou s\u2019y refuse, ce Grand D\u00e9bat a d’ores et d\u00e9j\u00e0 lieu sous nos yeux, moyennant la triple contrainte conjugu\u00e9e des autocraties n\u00e9o-imp\u00e9riales continentales, des p\u00e9rils climatiques et environnementaux de l\u2019Anthropoc\u00e8ne, et de l\u2019ingouvernabilit\u00e9 chronique des r\u00e9gimes d\u00e9mocratiques. La difficult\u00e9 majeure tient \u00e0 ce que ces r\u00e9gimes de prosp\u00e9rit\u00e9 et de libert\u00e9, si durablement d\u00e9shabitu\u00e9s aux enjeux de s\u00e9curit\u00e9 et aux mis\u00e8res concr\u00e8tes de la guerre sur leur propre sol, peinent d\u00e9sormais \u00e0 hi\u00e9rarchiser leurs objectifs politiques internes et externes. Cette incapacit\u00e9 s\u2019aggrave du fait que ces objectifs entrent en concurrence pour l\u2019allocation de marges de man\u0153uvre budg\u00e9taires d\u00e9sormais fortement contraintes \u2014 comme en t\u00e9moigne la prolif\u00e9ration de mouvements sociaux d\u00e9sencastr\u00e9s des traditions syndicales, dont la gestion absorbe \u00e0 son tour une part non n\u00e9gligeable des capacit\u00e9s budg\u00e9taires et s\u00e9curitaires de l\u2019\u00c9tat. On se trouve dans un cercle vicieux. Le risque syst\u00e9mique, pour les d\u00e9mocraties, est d\u00e8s lors qu\u2019elles \u00e9chouent \u00e0 penser la conduite strat\u00e9gique de leur politie<\/em> \u2014 et de leur syst\u00e8me d\u2019alliance \u2014 soit parce qu\u2019elles demeurent paralys\u00e9es de l\u2019int\u00e9rieur par une hyperconflictualit\u00e9 structurelle, soit parce qu\u2019elles ne parviennent plus \u00e0 appr\u00e9hender leur environnement international autrement qu\u2019avec les coordonn\u00e9es de l\u2019humanitarisme moral, qui ne suffisent plus \u00e0 penser la situation : non pas la penser \u00e9thiquement, bien s\u00fbr, mais op\u00e9rationnellement et dans l\u2019urgence.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

Comment penser la guerre \u00e0 nouveaux frais alors qu’elle est de retour dans des soci\u00e9t\u00e9s qui l’avaient longtemps refoul\u00e9e  ?<\/p>\n

Comment nommer les nouvelles formes de conflit et les nouvelles figures de la violence \u00e0 l’\u00e8re de l’IA et des drones  ?<\/p>\n

Antony Daliba montre qu\u2019une typologie de la guerre est toujours concevable  : derri\u00e8re la vari\u00e9t\u00e9 apparente des affrontements, les moyens des bellig\u00e9rants sont finalement toujours limit\u00e9s.<\/p>\n

Alexandre Escudier recense un ouvrage ambitieux qui propose rien moins qu’un mod\u00e8le th\u00e9orique de la guerre au XXIe si\u00e8cle.<\/p>\n","protected":false},"author":5931,"featured_media":300728,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","sticky":false,"template":"templates\/post-reviews.php","format":"standard","meta":{"_acf_changed":true,"_trash_the_other_posts":false,"footnotes":""},"categories":[1732],"tags":[],"geo":[1917],"class_list":["post-300702","post","type-post","status-publish","format-standard","hentry","category-guerre","staff-alexandre-escudier","geo-europe"],"acf":[],"yoast_head":"\n\u00c0 l\u2019ombre de Mars : penser la diversit\u00e9 des guerres | Le Grand Continent<\/title>\n<meta name=\"robots\" content=\"index, follow, max-snippet:-1, max-image-preview:large, max-video-preview:-1\" \/>\n<link rel=\"canonical\" href=\"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2025\/10\/08\/a-lombre-de-mars-penser-la-diversite-des-guerres\/\" \/>\n<meta property=\"og:locale\" content=\"fr_FR\" \/>\n<meta property=\"og:type\" content=\"article\" \/>\n<meta property=\"og:title\" content=\"\u00c0 l\u2019ombre de Mars : penser la diversit\u00e9 des guerres | Le Grand Continent\" \/>\n<meta property=\"og:description\" content=\"Comment penser la guerre \u00e0 nouveaux frais alors qu'elle est de retour dans des soci\u00e9t\u00e9s qui l'avaient longtemps refoul\u00e9e ? 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