{"id":288364,"date":"2025-07-21T05:58:00","date_gmt":"2025-07-21T03:58:00","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=288364"},"modified":"2025-07-24T16:06:54","modified_gmt":"2025-07-24T14:06:54","slug":"grand-tour-nikos-aliagas","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2025\/07\/21\/grand-tour-nikos-aliagas\/","title":{"rendered":"\u00ab Je reviens \u00e0 Missolonghi comme un funambule en qu\u00eate de lumi\u00e8re \u00bb, Grand Tour avec Nikos Aliagas"},"content":{"rendered":"\n

Grand Tour<\/em><\/a>, notre historique s\u00e9rie d\u2019\u00e9t\u00e9, revient pour une nouvelle saison.<\/em><\/p>\n\n\n\n

Comme chaque ann\u00e9e, nous vous invitons \u00e0 explorer le rapport d\u2019affinit\u00e9 entre des personnalit\u00e9s et des espaces g\u00e9ographiques o\u00f9 ils ne sont pas n\u00e9s ou qu\u2019ils n\u2019ont pas vraiment habit\u00e9s \u2014 et qui ont pourtant jou\u00e9 un r\u00f4le crucial dans leur propre trajectoire intellectuelle ou artistique.<\/em><\/p>\n\n\n\n

Une fois n\u2019est pas coutume, c\u2019est en Gr\u00e8ce que tout commence.<\/em><\/p>\n\n\n\n

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Pour votre \u00ab Grand Tour<\/a> \u00bb vous avez choisi de parler de Missolonghi. Comment d\u00e9finiriez-vous votre rapport \u00e0 cette ville ?<\/h3>\n\n\n\n

Missolonghi est pour moi, au d\u00e9part, une terre h\u00e9rit\u00e9e par la g\u00e9n\u00e9alogie \u2014 la terre de mes anc\u00eatres. <\/p>\n\n\n\n

\u00c0 chaque fois que j\u2019arrive \u00e0 Missolonghi, je me dis que c’est cela, la Gr\u00e8ce.<\/p>\n\n\n\n

C\u2019est l\u2019histoire d\u2019un voyage en voiture avec mon p\u00e8re.<\/p>\n\n\n\n

C\u2019est-\u00e0-dire ?<\/h3>\n\n\n\n

Je vais vous raconter une histoire un peu personnelle.<\/p>\n\n\n\n

J’ai \u00e9t\u00e9 op\u00e9r\u00e9 il y a 56 ans, 15 jours seulement apr\u00e8s ma naissance. Je suis rest\u00e9 \u00e0 l’h\u00f4pital pendant environ 4 mois. Cela a \u00e9t\u00e9 une p\u00e9riode tr\u00e8s difficile, loin de ma m\u00e8re et de mon p\u00e8re et m\u00eame si on dit qu\u2019un b\u00e9b\u00e9 ne garde pas de souvenirs, mon corps s’en souvient. Mon invisible s’en souvient.<\/p>\n\n\n\n

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L\u2019arriv\u00e9e en Gr\u00e8ce signifiait une promesse de gu\u00e9rison  : me pr\u00e9senter aux anc\u00eatres et me baptiser pour me donner une protection. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Tr\u00e8s vite, j\u2019ai d\u00fb apprendre la survie. Par la suite, cela m\u2019a pouss\u00e9 \u00e0 entreprendre beaucoup de choses. Mon p\u00e8re a ce souvenir qu\u2019il m\u2019a racont\u00e9 quand je suis sorti de l\u2019h\u00f4pital. J’\u00e9tais un b\u00e9b\u00e9 \u00e2g\u00e9 de 4 mois, tr\u00e8s maigre, avec une tr\u00e8s grande cicatrice sur le ventre. <\/p>\n\n\n\n

Son premier r\u00e9flexe est de m\u2019embarquer dans la voiture et de prendre la direction de la Gr\u00e8ce. On traverse toute l’Italie, on descend \u00e0 Brindisi pour prendre le bateau et arriver \u00e0 Patras. Pour mes parents, m’emmener en Gr\u00e8ce, c’\u00e9tait une fa\u00e7on de me gu\u00e9rir. <\/p>\n\n\n\n

Dans l’inconscient collectif de ma famille, l\u2019arriv\u00e9e en Gr\u00e8ce signifiait une promesse de gu\u00e9rison : me pr\u00e9senter aux anc\u00eatres et me baptiser pour me donner une protection. Ce que je d\u00e9couvrirai plus tard est qu’\u00e0 Missolonghi, on ne gu\u00e9rit pas \u2014 on rena\u00eet.<\/p>\n\n\n\n

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\u00c0 chaque fois que j\u2019arrive \u00e0 Missolonghi, je me dis que c’est cela, la Gr\u00e8ce. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

C\u2019est ainsi que vous arrivez \u00e0 Missolonghi pour la premi\u00e8re fois ?<\/h3>\n\n\n\n

Absolument. Tout cela, je l’ai bien entendu appris beaucoup plus tard. <\/p>\n\n\n\n

Mais je contemple encore avec les m\u00eames yeux l’\u00e9tendue plate et miroitante de cette lagune o\u00f9 je vois mon \u00e2me se refl\u00e9ter. En r\u00e9alit\u00e9, il ne s\u2019agit pas de regarder Missolonghi, mais de devenir un avec ce que l\u2019on voit.<\/p>\n\n\n\n

\u00c0 Missolonghi, on ne gu\u00e9rit pas \u2014 on rena\u00eet.<\/p>Nikos Aliagas<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Le miroir de la lagune ne refl\u00e8te pas : il absorbe. <\/p>\n\n\n\n

Il prend tout ce qui existe en vous et le rend eau, vent et sel. J\u2019y grandis, chaque ann\u00e9e un peu plus, j’apprends \u00e0 faire du v\u00e9lo, \u00e0 courir, j’apprends le patois local, je d\u00e9couvre la beaut\u00e9 de la p\u00e9nombre dans les cryptes byzantines, je caresse les pierres mill\u00e9naires des th\u00e9\u00e2tres antiques. Pour moi, c’\u00e9tait d\u2019abord cela, la Gr\u00e8ce, une \u00e9tendue de lumi\u00e8re et de mer. Je me suis construit dans cet espace-temps, il y a certainement eu une forme de catharsis. Ce parcours initiatique m\u2019a permis de trouver ma place dans le monde et, surtout, de garder cet univers en moi comme une boussole.<\/p>\n\n\n\n

Comment d\u00e9cririez-vous cet ensemble qui est en vous ? <\/h3>\n\n\n\n

Ce sont les montagnes de sel, le regard des p\u00eacheurs \u00e0 la peau br\u00fbl\u00e9e, les mains, les filets, les oiseaux, les chardonnerets, la couleur de la montagne, la premi\u00e8re lueur du jour\u2026 Le ciel bas, comme un songe, touche la terre comme une main sur un front fi\u00e9vreux.<\/p>\n\n\n\n

Missolonghi n\u2019est pas seulement un lieu. C\u2019est une pluie qui se retient, un nom que l\u2019on prononce sans le dire, un pays qui vous reconna\u00eet m\u00eame si vous l\u2019avez oubli\u00e9.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

Tout cela est mon secret. <\/p>\n\n\n\n

C\u2019est Missolonghi. <\/p>\n\n\n\n

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Ce sont les montagnes de sel, le regard des p\u00eacheurs \u00e0 la peau br\u00fbl\u00e9e, les mains, les filets, les oiseaux, les chardonnerets, la couleur de la montagne, la premi\u00e8re lueur du jour\u2026 Le ciel bas, comme un songe, touche la terre comme une main sur un front fi\u00e9vreux. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Vous avez aussi un rapport singulier et tr\u00e8s fort avec la musique \u00e0 Missolonghi, n\u2019est-ce pas ? <\/h3>\n\n\n\n

Je devais avoir environ six ans quand une comm\u00e9moration, une f\u00eate traditionnelle \u2014 celle de Sainte Agathe \u2014 passe devant la maison au son des cornemuses stridentes et des tambours. Je connais ou plut\u00f4t je reconnais cette musique, alors qu\u2019\u00e0 ce moment-l\u00e0, je ne l\u2019ai jamais entendue. Elle est en moi. <\/p>\n\n\n\n

Je m\u2019\u00e9loigne subitement de mes parents et je cours rejoindre ce groupe de p\u00e8lerins sans trop savoir pourquoi.<\/p>\n\n\n\n

Je ressens ce qu\u2019ils chantent, ce qu\u2019ils dansent : je suis l\u2019un des leurs sans le savoir encore. Depuis, je ne l\u2019ai jamais quitt\u00e9.<\/p>\n\n\n\n

L\u2019ann\u00e9e suivante, j\u2019ai enfil\u00e9 le costume traditionnel et depuis je le fais tous les ans. Je connais la plupart des chansons traditionnelles du XIXe si\u00e8cle, celle de la guerre d\u2019ind\u00e9pendance. Je me suis connect\u00e9 \u00e0 quelque chose de plus fort qui existait d\u00e9j\u00e0 en moi \u00e0 mon insu. Comme un besoin de rester connect\u00e9 \u00e0 quelque chose de plus fort. Mon p\u00e8re n\u2019\u00e9tait pas trop concern\u00e9 par tout cela, mais chez moi c\u2019\u00e9tait une \u00e9vidence. Un besoin d\u2019appartenir \u00e0 une lign\u00e9e historique, sans aucun enjeu nationaliste ou pseudo-patriotique.<\/p>\n\n\n\n

En quel sens ? <\/h3>\n\n\n\n

Tout cela d\u00e9passe le XIXe si\u00e8cle, la R\u00e9volution, la pr\u00e9sence de Lord Byron \u00e0 Missolonghi.<\/p>\n\n\n\n

Quand on regarde la civilisation antique qui existait autour de Missolonghi, il y avait d\u00e9j\u00e0 des villes enti\u00e8res autour des remparts dans la montagne avec des th\u00e9\u00e2tres et des agoras, o\u00f9 les Grecs d\u2019alors construisaient leur cit\u00e9, honoraient d\u2019autres dieux pour d\u2019autres raisons mais dansaient avec les m\u00eames gestes et la m\u00eame ferveur que nous.<\/p>\n\n\n\n

Les dieux sont diff\u00e9rents. Les lieux sont peut-\u00eatre diff\u00e9rents. La raison de cette n\u00e9cessit\u00e9, de cette anabase de l’\u00e2me est diff\u00e9rente. Mais l’expression est la m\u00eame. <\/p>\n\n\n\n

C’est cette continuit\u00e9 entre visible et invisible de l’histoire connue et inconnue qui fait qui je suis. Ce qui me constitue vient de loin, il y a dans chacun d\u2019entre nous un \u00e9cho lointain qui est toujours pr\u00e9sent et qui r\u00e9git notre vie. Je suis un Missolonghite dans ma fa\u00e7on de concevoir le monde et ses \u00e9preuves, dans la r\u00e9sistance, dans la gestion de ce qu\u2019on appelle l\u2019\u00e9chec ou le succ\u00e8s. <\/p>\n\n\n\n

Libres et assi\u00e9g\u00e9s : Missolonghi, c\u2019est l\u2019ultime oxymore d\u2019un id\u00e9al port\u00e9 dans la chair jusqu\u2019\u00e0 la mort.<\/p>Nikos Aliagas<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Je ne suis pas parfait, loin de l\u00e0. Mais sans le savoir je transporte une \u00e2me de combattant. Je pr\u00e9f\u00e8re perdre en restant digne plut\u00f4t que gagner comme un moins que rien. Je n\u2019ai pas de m\u00e9rite, j\u2019ai h\u00e9rit\u00e9 de cela.<\/p>\n\n\n\n

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C’est cette continuit\u00e9 entre visible et invisible de l’histoire connue et inconnue qui fait qui je suis. Ce qui me constitue vient de loin. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Vous faites r\u00e9f\u00e9rence \u00e0 l\u2019histoire de Missolonghi ? <\/h3>\n\n\n\n

Les Missolonghites auraient pu dire sans aucun probl\u00e8me aux Turcs que cela faisait quatre si\u00e8cles qu’ils \u00e9taient assujettis et qu\u2019ils ne voulaient pas d\u2019histoire.<\/p>\n\n\n\n

Pourtant, quelque chose de plus fort qu\u2019eux les a pouss\u00e9s \u00e0 choisir la libert\u00e9.<\/p>\n\n\n\n

Les Missolonghites n\u2019ont pas collabor\u00e9. Il ne s\u2019agissait pas que de paysans, il y avait aussi des personnes que l\u2019on pourrait qualifier d\u2019intellectuels, qui avaient un certain niveau de vie. Ils connaissaient donc les valeurs de la libert\u00e9 et de la dignit\u00e9 si ch\u00e8res \u00e0 la r\u00e9volution fran\u00e7aise. Ils ont dit \u00ab non \u00bb \u00e0 l\u2019esclavage, non pas pour devenir des h\u00e9ros mais parce qu’ils en ont eu assez d’\u00eatre des sujets de l’Empire Ottoman.<\/p>\n\n\n\n

Ils savaient qu’ils allaient mourir et pourtant, ils y sont tous all\u00e9s. Cela me bouleverse. Rien qu\u2019en en parlant maintenant, j\u2019en ai la chair de poule. Il aurait \u00e9t\u00e9 tellement facile de se rendre. Mais ils ont suivi le chemin du sacrifice. Les libres assi\u00e9g\u00e9s \u00e9taient bombard\u00e9s de partout, mais ils ont tenu jusqu\u2019\u00e0 la mort pour un id\u00e9al de libert\u00e9. Comment rester insensible \u00e0 leur destin  ? Sans parler des philhell\u00e8nes venus les \u00e9pauler dans leur qu\u00eate d\u2019ind\u00e9pendance\u2026 <\/p>\n\n\n\n

Le courage de Missolonghi \u00e0 l’\u00e9poque \u00e9tait comme celui de Kiev aujourd’hui.<\/p>\n\n\n\n

Je crois que l\u2019histoire des philhell\u00e8nes vous int\u00e9resse tout particuli\u00e8rement dans cette s\u00e9quence. Pourquoi ?<\/h3>\n\n\n\n

\u00c0 un moment donn\u00e9, apparaissent certaines figures philhell\u00e8nes comme Johann Jakob Meyer, l\u2019Helv\u00e8te fou, qui va monter le premier h\u00f4pital alors qu’il n’est pas m\u00e9decin, qui va cr\u00e9er le premier journal des chroniques libres en grec, en fran\u00e7ais, en italien, qu\u2019il va envoyer partout en Europe.<\/p>\n\n\n\n

S’il n’y avait pas eu \u00ab des illumin\u00e9s \u00bb de la sorte qui avaient compris la raison d\u2019\u00eatre du peuple grec, des intellectuels comme Lord Byron qui a laiss\u00e9 son dernier souffle \u00e0 Missolonghi deux ans avant le massacre de la ville, l\u2019Histoire aurait peut-\u00eatre pris une autre tournure. Ces gens-l\u00e0 ont trouv\u00e9 des regards si empreints de braise et de v\u00e9rit\u00e9 qu’ils vont \u00e9pouser et \u00e9pauler la lutte des Grecs.<\/p>\n\n\n\n

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Les libres assi\u00e9g\u00e9s \u00e9taient bombard\u00e9s de partout, mais ils ont tenu jusqu\u2019\u00e0 la mort pour un id\u00e9al de libert\u00e9. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Comment expliquez-vous cet engagement de la part d\u2019intellectuels qui n\u2019h\u00e9sitent pas \u00e0 prendre dans certains cas les armes pour la Gr\u00e8ce ? <\/h3>\n\n\n\n

Malraux, par exemple, l’a fait en 1936 lorsqu’il est all\u00e9 en Espagne. Je crois qu’il y a toujours eu des intellectuels engag\u00e9s qui prennent les armes.<\/p>\n\n\n\n

Mais on peut se demander pourquoi la Gr\u00e8ce \u00e0 ce moment-l\u00e0 : parce que la Gr\u00e8ce qu’ils connaissent n’existe pas. Depuis la chute de Constantinople, la Gr\u00e8ce n\u2019existe plus en tant que territoire. C\u2019est une province de l\u2019Empire ottoman. J’ai lu r\u00e9cemment un volume fascinant, Lascaris<\/em> de l\u2019Acad\u00e9micien Villemain \u2014 deux petits tomes datant de 1826 qui parlent notamment de Missolonghi qui n’est pas encore tomb\u00e9 \u00e0 l\u2019\u00e9poque mais qui souffre d\u00e9j\u00e0. Il explique tr\u00e8s bien ce qui s\u2019est pass\u00e9. J’ai \u00e9t\u00e9 boulevers\u00e9. La Gr\u00e8ce revient comme un boomerang en Occident aux XVIIIe et XIXe si\u00e8cles apr\u00e8s plusieurs si\u00e8cles d\u2019hibernation forc\u00e9e.<\/p>\n\n\n\n

\u00c0 la chute de Constantinople, les gens ont perdu la t\u00eate.<\/p>\n\n\n\n

Les chr\u00e9tiens se font massacrer apr\u00e8s des ann\u00e9es de discorde entre Rome et Byzance, ils n’arrivaient pas \u00e0 s’entendre avec Rome et Byzance pour des raisons th\u00e9ologiques et commerciales, alors qu\u2019avec un peu de distance les diff\u00e9rences entre eux \u00e9taient minimes. <\/p>\n\n\n\n

Ils se d\u00e9testaient entre eux plus qu’ils ne d\u00e9testaient les Turcs. Le 29 mais 1453, apr\u00e8s un si\u00e8ge de plusieurs semaines, les troupes ottomanes du sultan Mehmet II entr\u00e8rent dans la ville, malgr\u00e9 la r\u00e9sistance acharn\u00e9e des d\u00e9fenseurs. L’empereur Constantin XI Pal\u00e9ologue, qui fut le dernier empereur byzantin, refusa de fuir. Il combattit jusqu\u2019au bout dans les rues avec ses soldats. Avec lui s\u2019\u00e9teignait mille ans d\u2019Empire romain d\u2019Orient et la civilisation grecque fut an\u00e9antie.<\/p>\n\n\n\n

Et qu\u2019en est-il de ceux qui arrivent \u00e0 fuir ?<\/h3>\n\n\n\n

Ceux qui arrivent \u00e0 partir emportent ce qu\u2019ils peuvent mais gardent surtout pr\u00e9cieusement l\u2019h\u00e9ritage des manuscrits : les palimpsestes des copistes, les textes byzantins certes mais aussi ceux des philosophes et po\u00e8tes de l\u2019antiquit\u00e9. <\/p>\n\n\n\n

Rappelons que nous sommes en 1453, \u00e0 l’\u00e9poque de l’arriv\u00e9e de l’imprimerie, et ils emportent les textes de l\u2019antiquit\u00e9, Aristote, les pr\u00e9-socratiques, la R\u00e9publique de Platon, etc. Ils prennent tout ce qu’ils consid\u00e9raient d’ailleurs comme pa\u00efen puisque c’est une th\u00e9ocratie byzantine chr\u00e9tienne. Mais ils savent que tous ces textes ont de la valeur et qu\u2019ils constituent une partie de leur ADN. <\/p>\n\n\n\n

\u00c0 la chute de Constantinople, les gens ont perdu la t\u00eate.<\/p>Nikos Aliagas<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Ils arrivent ainsi en Italie, en Sicile, \u00e0 Florence, \u00e0 Venise o\u00f9 on y retrouvera notamment des grands philhell\u00e8nes. Ils n\u2019ont plus de titre ou de pouvoir mais ils gardent leur h\u00e9ritage de pens\u00e9e comme un fer de lance. Se forme alors un creuset de culture dans le monde occidental, les arch\u00e9types de l\u2019h\u00e9ritage grec qui seront r\u00e9utilis\u00e9s notamment par Fran\u00e7ois Ier dans sa cour, avec des peintures, la mythologie, la philosophie, etc.<\/p>\n\n\n\n

Que se passe-t-il en Gr\u00e8ce pendant ce temps ? <\/h3>\n\n\n\n

Parall\u00e8lement, la Gr\u00e8ce n’a plus rien de tout cela. Elle essaye de r\u00e9sister tant bien que mal, mais elle sombre \u00e0 ce moment-l\u00e0 le chaos de la survie.<\/p>\n\n\n\n

Du moins jusqu\u2019au retour des Grecs de l\u2019\u00e9tranger.<\/p>\n\n\n\n

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La langue grecque est leur pens\u00e9e. La langue grecque est un concept. Quatre si\u00e8cles plus tard, quand ces Grecs sont de retour de l’Occident, la Gr\u00e8ce revient de l\u2019\u00e9tranger. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Comment cela se passe-t-il ? <\/h3>\n\n\n\n

Dans leur exil, les Grecs vont devoir se d\u00e9lester de beaucoup de choses \u2014 mais ils n\u2019oublieront jamais leur foi ni leur langue. La langue grecque est leur pens\u00e9e. La langue grecque est un concept. Quatre si\u00e8cles plus tard, quand ces Grecs sont de retour de l’Occident, la Gr\u00e8ce revient de l\u2019\u00e9tranger. <\/p>\n\n\n\n

Ils viennent retrouver P\u00e9ricl\u00e8s, mais ne le reconnaissent pas : ils trouvent seulement un paysan courageux et digne qui creuse la terre. Et tout ne va pas bien se passer. Les Turcs ont r\u00e9ussi \u00e0 faire en sorte \u00e0 s\u00e9parer les Grecs afin qu\u2019ils s\u2019entretuent. D\u2019o\u00f9 notamment les nombreuses guerres civiles\u2026<\/p>\n\n\n\n

Comment cr\u00e9ent-ils de la discorde entre les Grecs ?<\/h3>\n\n\n\n

Les Ottomans donnaient par exemple de l\u2019argent \u00e0 certains Grecs \u00e0 condition qu\u2019ils punissent leurs voisins. Ils allaient aussi dans les familles o\u00f9 il y avait plus de quatre enfants : ils prenaient le cinqui\u00e8me, ils en faisaient un soldat turc, un janissaire, ils l’emmenaient \u00e0 la Porte Sublime, ils lui faisaient un lavage de cerveau et trente ans plus tard, ils le ramenaient dans le village pour tuer sa propre famille. Je ne suis pas historien, bien entendu et c\u2019est important de le rappeler, mais ces histoires qu\u2019on entend me semblent fondamentales comme repr\u00e9sentations pour comprendre le chemin ardu de la reconstruction de la nation grecque. <\/p>\n\n\n\n

Il a fallu patience et sacrifice pour construire un \u00c9tat-nation.<\/p>\n\n\n\n

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Dans leur exil, les Grecs vont devoir se d\u00e9lester de beaucoup de choses \u2014 mais ils n\u2019oublieront jamais leur foi ni leur langue. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Vous parliez il y a un instant de la langue grecque comme un concept, pourrait-on voir une importance des symboles en g\u00e9n\u00e9ral dans la grande histoire que vous racontez ?<\/h3>\n\n\n\n

Oui, en vous parlant je pense notamment au grand chef de guerre Y\u00e1nnis Makriy\u00e1nnis.<\/p>\n\n\n\n

Quand il voyait ses compatriotes vendre des bouts de statues aux Fran\u00e7ais et aux Italiens, il leur disait : \u00ab Tu ne connais pas la valeur de cette statue, moi non plus sur le plan commercial, mais je sais qu’elle est en moi. On se bat pour ces bouts de pierre et de marbre. Ne les donne jamais : c\u2019est tout ce que nous avons. \u00bb <\/p>\n\n\n\n

Son but \u00e9tait qu\u2019ego<\/em> devienne un nous. Il pensait que ce n\u2019est qu\u2019\u00e0 partir de l\u00e0 qu\u2019il serait possible de gagner la r\u00e9volution. En un mot, il a cr\u00e9\u00e9 une conscience grecque, chez les Grecs eux-m\u00eames.<\/p>\n\n\n\n

C’est la force et la magie de cette langue, qui est d’abord une id\u00e9e. Ce n’est pas une histoire de nationalit\u00e9, de religion, de Dieu, de l’Antiquit\u00e9, etc. \u00catre Grec, c\u2019est avant tout une fa\u00e7on de penser. Une aspiration \u00e0 la libert\u00e9 qui met l\u2019\u00eatre humain face au miroir de sa conscience au centre de l\u2019univers. Ils avaient beaucoup d\u2019avance sur nous. <\/p>\n\n\n\n

Est-ce notamment cette fa\u00e7on de penser \u2014 et pour la d\u00e9fendre \u2014 que les Missilonghites r\u00e9sisteront ? <\/h3>\n\n\n\n

C\u2019est certain. <\/p>\n\n\n\n

Les Missolonghites disent non \u00e0 l\u2019invasion parce qu’ils ont compris que c’est l\u00e0 o\u00f9 r\u00e9side la libert\u00e9, celle de la pens\u00e9e et de sa valeur. <\/p>\n\n\n\n

Ils comprennent \u00e0 ce moment-l\u00e0 que la dignit\u00e9 humaine n\u2019est pas cela. <\/p>\n\n\n\n

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\u00catre Grec, c\u2019est avant tout une fa\u00e7on de penser. Une aspiration \u00e0 la libert\u00e9 qui met l\u2019\u00eatre humain face au miroir de sa conscience au centre de l\u2019univers. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Le po\u00e8te Solomos a entendu leur voix depuis l\u2019\u00eele de Zante, quand ces \u00e2mes esseul\u00e9es furent encercl\u00e9es par le cynisme d\u2019un empire \u00e0 l\u2019agonie. Il transforma leur supplice en po\u00e8me, en litanie mystique, une blessure offerte au ciel, un cri devenu r\u00e9demption. Libres et assi\u00e9g\u00e9s : l\u2019ultime oxymore d\u2019un id\u00e9al port\u00e9 dans la chair jusqu\u2019\u00e0 la mort. La libert\u00e9 ou le tr\u00e9pas, \u00e0 Missolonghi, il n\u2019y a pas d\u2019autre issue. M\u00eame l\u2019enfant qui fait voler son cerf-volant face aux salines, le sait. Il \u00e9l\u00e8ve son \u00eatre au-dessus du fracas. <\/p>\n\n\n\n

On peut toujours trouver des petits arrangements avec notre conscience. Mais il est ensuite plus difficile de se regarder dans le miroir de cette derni\u00e8re, d\u2019autant plus que Missolonghi est un miroir\u2026 <\/p>\n\n\n\n

Est-ce ainsi que vous comprenez le fait que m\u00eame quand il a fallu se rendre, les Missilonghites ont pr\u00e9f\u00e9r\u00e9 mourir ? <\/h3>\n\n\n\n

Il faut bien comprendre que Missolonghi est une terre de sang. Le 10 avril 1826, dimanche des Rameaux, les Ottomans entrent dans Missolonghi et massacrent tout le monde. Les derniers survivants d\u00e9cident de se suicider : ils se regroupent dans les \u00e9glises, ils appellent les Turcs et d\u00e8s qu\u2019ils sont assez nombreux, ils font tout exploser. <\/p>\n\n\n\n

Il n\u2019y avait pas d\u2019autres choix. Les survivants qui se trouvaient en bonne sant\u00e9 sont faits esclaves ; ceux qui sont bless\u00e9s ont \u00e9t\u00e9 crucifi\u00e9s.<\/p>\n\n\n\n

Dans cette ville de deuil et de vie, les mots n\u2019osent pas parler trop fort. Le silence des p\u00eacheurs, les cristaux de sel dans leurs rides, en disent davantage. Leur regard garde l\u2019essentiel. Ceux-l\u00e0 savent ce que c\u2019est : r\u00e9sister sans fanfare, plier sans rompre, sacrifier sans renier.<\/p>\n\n\n\n

Missolonghi est un miroir.<\/p>Nikos Aliagas<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Trouve-t-on encore des descendants de survivants \u00e0 Missolonghi ? <\/h3>\n\n\n\n

Il y a un homme tr\u00e8s vieux, \u00e2g\u00e9 de 90 ans, que j’ai film\u00e9 parce que j’ai envie de faire un documentaire l\u00e0-bas l’ann\u00e9e prochaine. Il porte les m\u00eames v\u00eatements traditionnels du XIXe si\u00e8cle lors des c\u00e9r\u00e9monies depuis qu’il est enfant et il est tout le temps \u00e9mu. Il a toujours les larmes aux yeux : il conna\u00eet le prix de l\u2019id\u00e9al de libert\u00e9.<\/p>\n\n\n\n

Son arri\u00e8re-grand-m\u00e8re avait \u00e9t\u00e9 vendue et elle \u00e9tait revenue.<\/p>\n\n\n\n

\n \n \r\n \r\n \r\n \r\n \r\n <\/picture>\r\n \n
La libert\u00e9 ou le tr\u00e9pas, \u00e0 Missolonghi, il n\u2019y a pas d\u2019autre issue. M\u00eame l\u2019enfant qui fait voler son cerf-volant face aux salines, le sait. Il \u00e9l\u00e8ve son \u00eatre au-dessus du fracas. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

En avril 2026 La Gr\u00e8ce sur les ruines de Missolonghi<\/em> de Delacroix sera expos\u00e9e au mus\u00e9e arch\u00e9ologique de la ville.<\/p>\n\n\n\n

Quand le tableau arrivera \u00e0 Missolonghi, je veux que ce monsieur soit la premi\u00e8re personne \u00e0 le voir. <\/p>\n\n\n\n

Filmerez-vous cette sc\u00e8ne ? <\/h3>\n\n\n\n

Je l\u2019esp\u00e8re ! Je l’ai film\u00e9 alors qu’il mettait ses v\u00eatements chez lui pour se rendre \u00e0 la parade fun\u00e8bre qui se tient \u00e0 Missolonghi, dont le pas rythm\u00e9 est sp\u00e9cifique. Des milliers de personnes viennent de toute la Gr\u00e8ce pour y participer en portant des v\u00eatements traditionnels. <\/p>\n\n\n\n

Comment d\u00e9cririez-vous cette parade ? <\/h3>\n\n\n\n

Les soirs de printemps, la procession fun\u00e8bre vous garde \u00e9veill\u00e9. Son rythme hypnotique et r\u00e9p\u00e9titif n\u2019appartient \u00e0 aucun genre connu, parce qu\u2019il est, en soi, un genre \u00e0 part enti\u00e8re. Ce n\u2019est pas un ensemble musical folklorique qui d\u00e9ambule : c\u2019est l\u2019\u00e2me d\u2019une \u00e9pitaphe collective qui circule \u00e0 ciel ouvert dans les ruelles aux maisons de p\u00eacheurs.<\/p>\n\n\n\n

Au son des tambours et des pipizes, ces petites cornemuses stridentes, vous \u00eates port\u00e9 par une pulsion dionysiaque, une joie farouche, un deuil qui devient vie. L\u2019imposante statue de Markos Botsaris n\u2019est pas celle d\u2019un commandeur. C\u2019est l\u2019ombre d\u2019un h\u00e9ros qui ne vous juge pas. <\/p>\n\n\n\n

Dans le jardin des H\u00e9ros, les racines d\u2019un olivier se m\u00ealent aux battements de c\u0153ur de Byron. Parce qu\u2019ici, les po\u00e8tes se battent jusqu\u2019au dernier souffle. Leurs mots pansent les maux \u2014 mais jamais ne r\u00e9p\u00e8tent \u00ab jamais \u00bb. Comme le flux incessant de la mer, qui transforme le sable noir en glaise de la cr\u00e9ation originelle. Les ic\u00f4nes aux visages lac\u00e9r\u00e9s par la haine de la barbarie me regardent sans trembler, elles portent les stigmates de ce que nous sommes. Victimes ou bourreaux, des mortels perdus dans nos m\u00e9andres \u00e9ph\u00e9m\u00e8res.<\/p>\n\n\n\n

Ici, les po\u00e8tes se battent jusqu\u2019au dernier souffle.<\/p>Nikos Aliagas<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Pourrait-on dire que c\u2019est le rendez-vous annuel d\u2019une nation qui s\u2019y retrouve ? <\/h3>\n\n\n\n

Oui, mais sans \u00eatre nationaliste ; je parlerais plut\u00f4t de patriotisme. On a d\u00e9j\u00e0 vu, bien entendu, des individus qui essayent de r\u00e9cup\u00e9rer politiquement cette parade \u2014 en vain. \u00c0 Missolonghi, on aime les \u00e2mes libres paix les opportunistes. <\/p>\n\n\n\n

On y interdit aux politiques de s’approprier quoi que ce soit. Parce que c’est un tombeau \u00e0 ciel ouvert. C’est une ville martyre.<\/p>\n\n\n\n

C’est la seule ville sacr\u00e9e dans la constitution grecque. C\u2019est un cimeti\u00e8re absolu. Tout le monde se rend, par exemple, au parc des h\u00e9ros. C\u2019est le lieu de p\u00e8lerinage par excellence.<\/p>\n\n\n\n

\n \n \r\n \r\n \r\n \r\n \r\n <\/picture>\r\n \n
Les ic\u00f4nes aux visages lac\u00e9r\u00e9s par la haine de la barbarie me regardent sans trembler, elles portent les stigmates de ce que nous sommes. Victimes ou bourreaux, des mortels perdus dans nos m\u00e9andres \u00e9ph\u00e9m\u00e8res. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Comment expliquez-vous que tant de personnes viennent chaque ann\u00e9e ?<\/h3>\n\n\n\n

Il s\u2019agit de ne pas oublier ce qui s\u2019est pass\u00e9. On ne veut pas que l\u2019oubli emporte ces personnes courageuses qui ont lutt\u00e9 et ont ensuite pr\u00e9f\u00e9r\u00e9 mourir plut\u00f4t que de vivre comme des esclaves plut\u00f4t que de se compromettre.<\/p>\n\n\n\n

Au fond, c\u2019est un hommage rendu \u00e0 la vraie histoire. Parce que c’est cela, la vraie histoire. C’est une histoire d’\u00e9thique et non une histoire d’h\u00e9ro\u00efsme. Quand vous \u00eates l\u00e0-bas, un vent ti\u00e8de vous fr\u00f4le, charg\u00e9 d\u2019embruns. Ce n\u2019est pas une odeur, c\u2019est un souvenir : il traverse les g\u00e9n\u00e9rations sans faire de bruit. Quelque chose d\u2019amniotique, une moiteur primitive qui vous fait croire que vous \u00eates n\u00e9 ici, ou que vous y avez aim\u00e9 avant m\u00eame de na\u00eetre.<\/p>\n\n\n\n

Je reviens sur la terre de mes anc\u00eatres pour \u00e9couter leurs murmures, un soir de jeudi saint p\u00e9tri dans la cire et la complainte.<\/p>Nikos Aliagas<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Et vous particuli\u00e8rement, pourquoi y retournez-vous chaque ann\u00e9e ? <\/h3>\n\n\n\n

Je porte en moi chaque parcelle de larmes et de joie de cette terre oubli\u00e9e de la mer Ionienne.<\/p>\n\n\n\n

Sur les pav\u00e9s de la ville, les pas des assi\u00e9g\u00e9s n\u2019ont jamais cess\u00e9. Ils sont l\u00e0, toujours, v\u00eatus de leur costume d\u2019ombre et de lumi\u00e8re : un gilet noir brod\u00e9 de patience, une \u03c6\u03bf\u03c5\u03c3\u03c4\u03b1\u03bd\u03ad\u03bb\u03b1 blanche comme la derni\u00e8re pri\u00e8re, et cette ceinture tiss\u00e9e de jasmins et de serments, serr\u00e9e comme une promesse faite aux morts.<\/p>\n\n\n\n

\n \n \r\n \r\n \r\n \r\n \r\n <\/picture>\r\n \n
Missolonghi ne promet rien, elle nous regarde pour ce que nous sommes depuis le premier jour  : de fragiles figurines d\u2019un th\u00e9\u00e2tre d\u2019ombres. \u00a9 Nikos Aliagas<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Je reviens toujours \u00e0 Missolonghi comme un funambule en qu\u00eate de lumi\u00e8re, pour retenir ce qui reste encore debout dans les d\u00e9combres de mes certitudes. <\/p>\n\n\n\n

Je reviens sur la terre de mes anc\u00eatres pour \u00e9couter leurs murmures, un soir de jeudi saint p\u00e9tri dans la cire et la complainte.<\/p>\n\n\n\n

Missolonghi ne promet rien, elle nous regarde pour ce que nous sommes depuis le premier jour : de fragiles figurines d\u2019un th\u00e9\u00e2tre d\u2019ombres.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

Un secret, une bataille et une blessure de jeunesse.<\/p>\n

Missolonghi est surtout oxymore  : rester libre alors qu\u2019on est assi\u00e9g\u00e9.<\/p>\n

Depuis qu\u2019elle l\u2019a vu rena\u00eetre, Nikos Aliagas y revient tous les ans.<\/p>\n

Pour ouvrir la saison 2026 de Grand Tour, il nous ouvre les portes de son miroir des si\u00e8cles  : une ville qui nous regarde pour ce que nous sommes.<\/p>\n","protected":false},"author":10,"featured_media":287810,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","sticky":false,"template":"templates\/post-interviews.php","format":"standard","meta":{"_acf_changed":true,"_trash_the_other_posts":false,"footnotes":""},"categories":[2984],"tags":[],"geo":[543],"class_list":["post-288364","post","type-post","status-publish","format-standard","hentry","category-grand-tour","staff-andrea-marcolongo","geo-mediterranee"],"acf":[],"yoast_head":"\nNikos Aliagas \u00e0 Missolonghi : les mots et les images de la Gr\u00e8ce<\/title>\n<meta name=\"robots\" content=\"index, follow, max-snippet:-1, max-image-preview:large, max-video-preview:-1\" \/>\n<link rel=\"canonical\" href=\"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2025\/07\/21\/grand-tour-nikos-aliagas\/\" \/>\n<meta property=\"og:locale\" content=\"fr_FR\" \/>\n<meta property=\"og:type\" content=\"article\" \/>\n<meta property=\"og:title\" content=\"Nikos Aliagas \u00e0 Missolonghi : les mots et les images de la Gr\u00e8ce\" \/>\n<meta property=\"og:description\" content=\"Un secret, une bataille et une blessure de jeunesse. 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