{"id":287168,"date":"2025-07-11T12:42:16","date_gmt":"2025-07-11T10:42:16","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=287168"},"modified":"2025-07-11T15:04:22","modified_gmt":"2025-07-11T13:04:22","slug":"doctrine-trump-caldwell-kavanagh","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2025\/07\/11\/doctrine-trump-caldwell-kavanagh\/","title":{"rendered":"Apr\u00e8s l\u2019Ukraine, des experts am\u00e9ricains appellent Trump \u00e0 ne pas d\u00e9fendre directement Ta\u00efwan. Texte int\u00e9gral de la proposition de Caldwell et Kavanagh"},"content":{"rendered":"\n

Quatre ans pour revenir en arri\u00e8re ?\u00a0R\u00e9tablir la pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine telle qu\u2019elle \u00e9tait avant le 11 septembre au Moyen-Orient, et avant l\u2019invasion russe de 2014 en Europe : ce sont les objectifs que fixent Jennifer Kavanagh et Dan Caldwell pour la revue globale de la posture des forces arm\u00e9es am\u00e9ricaines (Global Posture Review<\/em>) sous le mandat Trump.<\/p>\n\n\n\n

Sur le continent europ\u00e9en, ils pr\u00f4nent notamment une r\u00e9duction drastique de la pr\u00e9sence de l\u2019US Army, visant moins de 20 000 soldats am\u00e9ricains pr\u00e9sents \u2014 contre plus de 100 000 aujourd\u2019hui \u2014 et une r\u00e9duction de moiti\u00e9 de la puissance a\u00e9rienne et navale. <\/p>\n\n\n\n

De la m\u00eame mani\u00e8re, ils d\u00e9fendent un retrait total des forces am\u00e9ricaines d\u2019Irak et de Syrie, mais aussi de Jordanie et du Kowe\u00eft. En Europe comme au Moyen-Orient, ce sont pour eux les \u00ab alli\u00e9s \u00bb des \u00c9tats-Unis dans la r\u00e9gion qui devraient prendre en charge la s\u00e9curit\u00e9, lib\u00e9rant ainsi les moyens am\u00e9ricains pour un red\u00e9ploiement, lui aussi limit\u00e9, vers le th\u00e9\u00e2tre indo-pacifique.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

Au nom d\u2019une doctrine America First pouss\u00e9e \u00e0 l\u2019extr\u00eame<\/a>, les recommandations sont enti\u00e8rement focalis\u00e9es sur ce qui pourrait le plus directement toucher le territoire am\u00e9ricain \u2014 en ce sens, ni la guerre de Poutine en Europe, ni la perspective d\u2019une nucl\u00e9arisation de l\u2019Iran, pas plus que les mouvements insurrectionnels au Moyen-Orient ou la perturbation du trafic maritime en mer Rouge ne sont vus ou pr\u00e9sent\u00e9s comme des menaces.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

Les moyens et l\u2019attention devraient ainsi se concentrer uniquement sur deux th\u00e9\u00e2tres, seules r\u00e9gions du monde r\u00e9ellement sous la menace : le sol am\u00e9ricain et, dans un second temps, le Pacifique.<\/p>\n\n\n\n

En apparence, ce discours \u00ab prioritizer<\/em> \u00bb pourrait passer pour une forme radicale de l\u2019isolationnisme, qui trouverait enfin, apr\u00e8s Obama et apr\u00e8s le retrait d\u2019Afghanistan sous Biden, la fin d\u00e9finitive du cycle des guerre sans fin promis par Trump. Cons\u00e9quence logique de cette nouvelle \u00e8re, la pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine dans le monde \u2014 la \u00ab posture<\/em> \u00bb des forces qui est au c\u0153ur de cet article (et que nous traduisons aussi pour certaines occurrences par \u00ab dispositif \u00bb, par souci de clart\u00e9) \u2014 devrait \u00eatre consid\u00e9rablement r\u00e9duite, allant m\u00eame jusqu\u2019\u00e0 un retrait total dans certaines r\u00e9gions.<\/p>\n\n\n\n

Mais il faut aussi savoir lire ce document a contrario<\/em>.<\/p>\n\n\n\n

S\u2019il n\u2019exprime que l\u2019opinion de ses auteurs, il laisse en fait une place r\u00e9elle aux ambitions imp\u00e9riales plusieurs fois exprim\u00e9es par Donald Trump et des membres de son administration, notamment en Europe. <\/p>\n\n\n\n

Dans un paragraphe consacr\u00e9 \u00e0 la protection de la \u00ab s\u00e9curit\u00e9 \u00e9conomique des \u00c9tats-Unis \u00bb, on peut lire par exemple ceci : \u00ab nous partons du principe que les \u00c9tats-Unis ne proc\u00e9deront \u00e0 aucune nouvelle acquisition territoriale. \u00bb On sait que Trump poursuit l\u2019objectif g\u00e9opolitique d\u2019une annexion du Groenland avec pour argument principal qu\u2019il aurait une importance \u00ab vitale \u00bb pour les \u00c9tats-Unis<\/a>. Aussi cette phrase qui en apparence \u00e9carte l\u2019hypoth\u00e8se d\u2019une guerre d\u2019agression est-elle suivie par une autre qui laisse en fait ouvert un grand nombre de sc\u00e9narios : \u00ab Cela n’exclut pas la possibilit\u00e9 d’un renforcement de la posture militaire \u00e0 des fins strat\u00e9giques essentielles. \u00bb<\/p>\n\n\n\n

Si la ligne d\u2019un retrait quasi-total en Europe et au Moyen-Orient au motif de la minimisation des menaces est coh\u00e9rente avec un certain nombre de d\u00e9clarations exprim\u00e9es par Trump et son administration depuis janvier, le positionnement pr\u00f4n\u00e9 dans le Pacifique constitue peut-\u00eatre la rupture la plus \u00e9tonnante. <\/p>\n\n\n\n

Arguant que Ta\u00efwan serait une \u00ab petite \u00eele \u00bb sans importance strat\u00e9gique \u2014\u00a0ailleurs dans le document, l\u2019Ukraine est elle aussi pr\u00e9sent\u00e9e comme un \u00ab petit pays \u00bb \u2014 les auteurs affirment qu\u2019il ne serait pas dans l\u2019int\u00e9r\u00eat des \u00c9tats-Unis de d\u00e9fendre Taipei en cas d\u2019invasion chinoise. Consid\u00e9rant que la Cor\u00e9e du Nord n\u2019est pas une menace directe pour Washington, ils recommandent aussi de se retirer compl\u00e8tement de la p\u00e9ninsule en laissant S\u00e9oul assurer seule sa s\u00e9curit\u00e9<\/p>\n\n\n\n

Jennifer Kavanagh, qui n\u2019a jamais directement travaill\u00e9 dans l\u2019administration am\u00e9ricaine, a fait sa carri\u00e8re en tant qu\u2019experte de la s\u00e9curit\u00e9 et de la politique de d\u00e9fense des \u00c9tats-Unis au sein des think-tanks RAND Corporation et Carnegie Endowment for International Peace, avant de rejoindre Defense Priorities<\/em> \u2014 un groupe de r\u00e9flexion connu pour son orientation \u00ab restrainer<\/em> \u00bb ou anti-interventionniste. <\/p>\n\n\n\n

Dan Caldwell est une figure plus connue. Il \u00e9tait l\u2019un des conseillers du secr\u00e9taire \u00e0 la D\u00e9fense Pete Hegseth,  mis en lumi\u00e8re par l\u2019Affaire Signal, qui avait rendue publique une conversation de tr\u00e8s haut niveau pr\u00e9alable au lancement d\u2019une attaque am\u00e9ricaine contre les Houthis au Y\u00e9men<\/a>. Dans ces messages, il \u00e9tait mentionn\u00e9 par Pete Hegseth comme \u00e9tant le \u00ab meilleur point de contact \u00bb de son \u00e9quipe pour participer \u00e0 la coordination des op\u00e9rations. Apr\u00e8s cette affaire, il est mis en cong\u00e9 administratif, puis licenci\u00e9 en avril 2025. <\/p>\n\n\n\n

Co-signer ce document serait peut-\u00eatre une tentative de la part de Caldwell de conserver une certaine influence sur l\u2019orientation de la politique militaire de l\u2019administration Trump. Dans un Pentagone divis\u00e9 et en proie au factionnalisme, Caldwell incarne une ligne proche de celle du Sous-secr\u00e9taire \u00e0 la planification Elbridge Colby, en guerre notamment contre le CENTCOMM qu\u2019il accuse depuis des ann\u00e9es de d\u00e9vorer les ressources capacitaires. Au milieu d\u2019une \u00ab campagne anti-Colby \u00bb marqu\u00e9e au sein du mouvement MAGA, ce texte est \u00e9galement \u00e0 comprendre comme un positionnement tr\u00e8s ferme dans cette lutte bureaucratique interne.<\/p>\n\n\n\n

En creux, ce rapport pr\u00e9sente d\u2019ailleurs une cartographie clef pour \u00e9tudier les groupes de pens\u00e9e qui structurent actuellement la r\u00e9flexion doctrinale dans les cercles strat\u00e9giques am\u00e9ricains : \u00e0 c\u00f4t\u00e9 de la tr\u00e8s trumpiste Heritage Foundation, la RAND Corporation, Carnegie mais aussi le m\u00e9dia War on the Rocks<\/em> sont ici abondamment cit\u00e9s.<\/p>\n\n\n\n

Alors que la Global Posture Review<\/em> officielle de l\u2019administration Trump n\u2019est pas encore connue, Kavanagh et Caldwell font ici une proposition qui tente d\u2019infl\u00e9chir une ligne. Le site de publications, Defense Priorities<\/em>, fait partie d\u2019une nouvelle galaxie de think tanks anti-interventionnistes \u00e0 Washington, en partie financ\u00e9s par les fr\u00e8res Koch. Comme le r\u00e9sume l\u2019autrice sur X : \u00ab En attendant que le Pentagone ach\u00e8ve sa Global Posture Review<\/em>, Dan Caldwell et moi-m\u00eame proposons nos propres recommandations pour aligner la pr\u00e9sence militaire sur les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains. Nous soutenons qu’une r\u00e9duction significative des forces \u00e0 l’ext\u00e9rieur est possible et n\u00e9cessaire. \u00bb<\/p>\n\n\n\n

Aligner la posture militaire mondiale sur les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains<\/h2>\n\n\n\n

Qu’est-ce que la Global Posture Review<\/em> ?<\/h3>\n\n\n\n

L’arm\u00e9e am\u00e9ricaine est une puissance mondiale. En 2025, plus de 200 000 soldats, marins, Marines et aviateurs am\u00e9ricains \u00e9taient d\u00e9ploy\u00e9s dans des centaines de bases militaires am\u00e9ricaines \u00e0 travers le monde <\/span>1<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n

Pour de nombreux d\u00e9cideurs politiques, cette puissance militaire d\u00e9ploy\u00e9e \u00e0 l’\u00e9tranger est un outil essentiel de la politique \u00e9trang\u00e8re am\u00e9ricaine. Les partisans d’une pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine importante et active \u00e0 l’\u00e9tranger affirment que les troupes am\u00e9ricaines op\u00e9rant \u00e0 l’\u00e9tranger maintiennent la stabilit\u00e9 mondiale, rassurent les alli\u00e9s, prot\u00e8gent le commerce international et pr\u00e9viennent les agressions qui menacent les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains <\/span>2<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Ils affirment \u00e9galement que le personnel am\u00e9ricain bas\u00e9 \u00e0 l’\u00e9tranger acquiert de l’exp\u00e9rience en travaillant avec des alli\u00e9s et des partenaires, renforce l’interop\u00e9rabilit\u00e9 et peut r\u00e9agir plus rapidement aux crises que s’il \u00e9tait stationn\u00e9 aux \u00c9tats-Unis <\/span>3<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n

Les critiques de la pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine dans le monde voient les choses diff\u00e9remment. Ils affirment que l’arm\u00e9e am\u00e9ricaine est trop \u00e9tendue et que les d\u00e9ploiements apportent peu d’avantages tout en cr\u00e9ant des situations d\u2019intrication qui risquent d’entra\u00eener les \u00c9tats-Unis dans des guerres inutiles qui ne servent pas les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains <\/span>4<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Ce groupe est plus sceptique quant \u00e0 la valeur dissuasive des forces militaires am\u00e9ricaines. Il fait valoir que, dans tous les cas, les \u00c9tats-Unis n’ont pas besoin d’une pr\u00e9sence militaire d\u00e9ploy\u00e9e importante pour assurer leur s\u00e9curit\u00e9, car ils sont entour\u00e9s par de l\u2019eau de part et d\u2019autre et disposent de voisins faibles au nord et au sud <\/span>5<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n

De plus, dans presque tous les conflits futurs auxquels les \u00c9tats-Unis et leurs alli\u00e9s pourraient \u00eatre confront\u00e9s, ils prot\u00e9geraient le statu quo<\/em> et pourraient ainsi tirer parti des nombreux avantages de la guerre d\u00e9fensive \u2014 notamment des besoins r\u00e9duits en mati\u00e8re de forces arm\u00e9es <\/span>6<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Les critiques sugg\u00e8rent qu\u2019une importante protection am\u00e9ricaine transforme les alli\u00e9s et partenaires en profiteurs qui n’investissent pas suffisamment dans leur propre d\u00e9fense.<\/p>\n\n\n\n

Outre ses avantages, ses risques et ses co\u00fbts, le dispositif militaire avanc\u00e9 des \u00c9tats-Unis peut \u00eatre difficile \u00e0 modifier. Une fois les forces envoy\u00e9es \u00e0 l’\u00e9tranger, les \u00c9tats-Unis sont souvent lents \u00e0 les rapatrier, m\u00eame lorsque la menace ou la mission qui a motiv\u00e9 leur d\u00e9ploiement initial a pris fin. Il est donc fr\u00e9quent que le nombre de forces am\u00e9ricaines stationn\u00e9es \u00e0 l’\u00e9tranger augmente avec le temps, la posture offensive de d\u00e9part devenant peu \u00e0 peu le nouveau statu quo<\/em>. Cela peut rapidement conduire \u00e0 un d\u00e9s\u00e9quilibre fondamental entre la pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine et les int\u00e9r\u00eats strat\u00e9giques et de s\u00e9curit\u00e9 nationale des \u00c9tats-Unis.<\/p>\n\n\n\n

Afin de peser ces diff\u00e9rents facteurs et consid\u00e9rations, quand de nouveaux dirigeants arrivent au Pentagone \u00e0 la suite d’un changement d’administration pr\u00e9sidentielle, ils lancent g\u00e9n\u00e9ralement une Global Posture Review<\/em> (GPR). <\/p>\n\n\n\n

La GPR vise \u00e0 porter un examen sur le positionnement g\u00e9ographique et le nombre des forces militaires am\u00e9ricaines stationn\u00e9es \u00e0 l’\u00e9tranger et \u00e0 proc\u00e9der \u00e0 des ajustements sur la base d’une \u00e9valuation actualis\u00e9e des menaces et de la lecture que la nouvelle administration fait des int\u00e9r\u00eats et des priorit\u00e9s des \u00c9tats-Unis. <\/p>\n\n\n\n

Si les r\u00e9sultats de cette revue sont g\u00e9n\u00e9ralement classifi\u00e9s, un r\u00e9sum\u00e9 non classifi\u00e9 est habituellement publi\u00e9, en particulier lorsque des changements majeurs sont pr\u00e9vus.<\/p>\n\n\n\n

La derni\u00e8re Global Posture Review<\/em> a \u00e9t\u00e9 publi\u00e9e en novembre 2021, environ dix mois apr\u00e8s l’entr\u00e9e en fonction du pr\u00e9sident Joe Biden. <\/p>\n\n\n\n

Pour de nombreux observateurs, la revue de 2021 a \u00e9t\u00e9 une d\u00e9ception, car elle n’a pas r\u00e9pondu aux changements dans l’\u00e9quilibre mondial des pouvoirs ni refl\u00e9t\u00e9 les limites et les contraintes \u00e9mergentes de la puissance militaire am\u00e9ricaine. Apr\u00e8s une forte m\u00e9diatisation, le document concluait que le dispositif militaire am\u00e9ricain \u00e9tait globalement conforme aux besoins et aux int\u00e9r\u00eats des \u00c9tats-Unis et ne recommandait que peu de changements majeurs <\/span>7<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Plus important encore pour les d\u00e9tracteurs de la revue, l’\u00e9quipe Biden n’a pas r\u00e9ussi \u00e0 renforcer de mani\u00e8re notable la posture am\u00e9ricaine en Asie, manquant ainsi l’un de ses premiers engagements politiques.<\/p>\n\n\n\n

Comme sur les sujets \u00e9conomiques et sociaux, en mati\u00e8re militaire, c\u2019est le rejet des politiques conduites par l\u2019administration Biden qui semble avant tout faire converger les partisans de Trump. Elle est ici accus\u00e9e de n\u2019avoir pas poursuivi suffisamment le \u00ab pivot vers l\u2019Asie \u00bb de l\u2019arm\u00e9e am\u00e9ricaine, pourtant initi\u00e9 par Obama d\u00e8s les ann\u00e9es 2010. <\/p>\n\n\n\n

En dehors du GPR de Biden, au cours des quatre ann\u00e9es de son mandat, le dispositif mondial des \u00c9tats-Unis est devenu plus lourd et plus d\u00e9s\u00e9quilibr\u00e9. <\/p>\n\n\n\n

Apr\u00e8s son arriv\u00e9e au pouvoir, l’administration a annul\u00e9 le retrait de 12 000 soldats d’Allemagne qui avait \u00e9t\u00e9 pr\u00e9vu sous la premi\u00e8re administration Trump et a renforc\u00e9 la pr\u00e9sence am\u00e9ricaine en Europe de 20 000 soldats suppl\u00e9mentaires apr\u00e8s l’invasion russe de l’Ukraine <\/span>8<\/sup><\/a><\/span><\/span>. \u00c0 la suite de l’attaque du Hamas contre Isra\u00ebl le 7 octobre 2023, Biden a lanc\u00e9 une s\u00e9rie de mesures visant \u00e0 renforcer le dispositif am\u00e9ricain au Moyen-Orient, notamment en envoyant des moyens navals, de d\u00e9fense a\u00e9rienne et des moyens a\u00e9riens tactiques suppl\u00e9mentaires dans la r\u00e9gion <\/span>9<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Le Pentagone de Biden a \u00e9galement augment\u00e9 le nombre de soldats am\u00e9ricains d\u00e9ploy\u00e9s en rotation en Afrique pour soutenir les op\u00e9rations de contre-terrorisme et les missions de formation et d’aide <\/span>10<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n

En comparaison, les changements faits en Asie ont \u00e9t\u00e9 mineurs. L’\u00e9quipe Biden a sign\u00e9 l’accord AUKUS \u2014 qui ne modifiera le positionnement strat\u00e9gique que sur le long terme \u2014, a obtenu l’acc\u00e8s \u00e0 quatre bases suppl\u00e9mentaires aux Philippines et a rendu permanents certains d\u00e9ploiements auparavant rotatifs en Cor\u00e9e du Sud <\/span>11<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n

Dans le cadre de la revue de son dispositif, l’administration Trump a l’occasion de r\u00e9aligner l’empreinte militaire mondiale des \u00c9tats-Unis sur les int\u00e9r\u00eats nationaux am\u00e9ricains, en corrigeant les erreurs commises sous Biden et les s\u00e9quelles persistantes de la guerre mondiale contre le terrorisme. <\/p>\n\n\n\n

Le pr\u00e9sent rapport vise \u00e0 aider les responsables du Pentagone \u00e0 mener \u00e0 bien leur Posture Review<\/em> et \u00e0 d\u00e9cider de la mani\u00e8re dont ils vont remodeler la posture militaire am\u00e9ricaine au cours des quatre prochaines ann\u00e9es. Il formule des recommandations en mati\u00e8re de positionnement strat\u00e9gique qui sont conformes aux priorit\u00e9s d\u00e9clar\u00e9es de l’administration Trump en mati\u00e8re de s\u00e9curit\u00e9 nationale et qui servent les int\u00e9r\u00eats fondamentaux des \u00c9tats-Unis en r\u00e9duisant les engagements militaires am\u00e9ricains et en s’orientant vers une strat\u00e9gie globale fond\u00e9e sur la retenue (\u00ab restraint<\/em> \u00bb).<\/p>\n\n\n\n

Un peu sous la forme du Project 2025<\/em> de la Heritage Foundation<\/a> \u2014 dont les travaux sont d\u2019ailleurs cit\u00e9s par le rapport \u00e0 plusieurs reprises \u2014 qui a consid\u00e9rablement orient\u00e9 la direction des politiques de Trump pour son retour \u00e0 la Maison Blanche en janvier 2025, ce rapport se donne pour objectif explicite d\u2019\u00eatre une feuille de route pour les officiels de l\u2019administration en place.<\/p>\n\n\n\n

Il se pr\u00e9sente comme une synth\u00e8se entre les orientations des \u00ab prioritizers<\/em> \u00bb \u2014 dont Elbridge Colby avait notamment formalis\u00e9 la doctrine sous la premi\u00e8re administration Trump \u2014 et des \u00ab restrainers<\/em> \u00bb, ou partisans d\u2019une \u00ab strat\u00e9gie de retenue \u00bb, \u00e0 savoir d\u2019un d\u00e9sengagement militaire maximal des \u00c9tats-Unis dans le monde.<\/p>\n\n\n\n

La section suivante du rapport pr\u00e9sente les priorit\u00e9s qui ont guid\u00e9 notre examen et nos recommandations, ainsi que nos hypoth\u00e8ses. <\/p>\n\n\n\n

Nous consacrons ensuite une section \u00e0 chacune des trois grandes r\u00e9gions \u2014 l’Europe, le Moyen-Orient et l’Asie \u2014 et une section aux autres missions mondiales. Dans chaque section, nous examinons la posture actuelle des \u00c9tats-Unis, puis les changements que nous recommandons et les raisons qui les motivent.<\/p>\n\n\n\n

L\u2019Afrique n\u2019est pas inclue dans les \u00ab grandes r\u00e9gions \u00bb, alors m\u00eame que les int\u00e9r\u00eats des autres grandes puissances rivales des \u00c9tats-Unis (Russie, Chine) y sont en constante croissance.<\/p>\n\n\n\n

Ce d\u00e9sint\u00e9r\u00eat manifeste pour le continent africain avait \u00e9t\u00e9 assez caract\u00e9ristique de la premi\u00e8re administration Trump.<\/p>\n\n\n\n

Nous concluons en r\u00e9sumant et en d\u00e9crivant les implications des changements de posture que nous proposons pour la s\u00e9curit\u00e9 nationale des \u00c9tats-Unis.<\/p>\n\n\n\n

Priorit\u00e9s et hypoth\u00e8ses<\/h3>\n\n\n\n

Les orientations propos\u00e9es dans le cadre de la Posture Review<\/em> de 2025 devraient servir les int\u00e9r\u00eats vitaux des \u00c9tats-Unis et correspondre aux priorit\u00e9s de l’administration en mati\u00e8re de s\u00e9curit\u00e9 nationale. L’administration Trump a clairement indiqu\u00e9 que sa politique \u00e9trang\u00e8re donnerait la priorit\u00e9 aux int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains, viserait \u00ab la paix par la force \u00bb et adh\u00e9rerait aux principes de r\u00e9alisme et de retenue dans ses engagements \u00e0 l’\u00e9tranger <\/span>12<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n

Le vice-pr\u00e9sident J. D. Vance a d\u00e9clar\u00e9 aux dipl\u00f4m\u00e9s de l’Acad\u00e9mie navale en mai 2025 : \u00ab Nous revenons \u00e0 une strat\u00e9gie fond\u00e9e sur le r\u00e9alisme et la protection de nos int\u00e9r\u00eats nationaux fondamentaux… Cela ne signifie pas que nous ignorons les menaces, mais que nous les abordons avec discipline et que lorsque nous envoyons [l’arm\u00e9e am\u00e9ricaine] en guerre, nous le faisons avec des objectifs tr\u00e8s pr\u00e9cis en t\u00eate. \u00bb <\/span>13<\/sup><\/a><\/span><\/span> <\/p>\n\n\n\n

Trump et son \u00e9quipe pour la s\u00e9curit\u00e9 nationale ont d\u00e9fini les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains de mani\u00e8re plus restrictive que ses pr\u00e9d\u00e9cesseurs r\u00e9cents. L’administration a clairement indiqu\u00e9 que la s\u00e9curit\u00e9 int\u00e9rieure \u00e9tait la priorit\u00e9 num\u00e9ro un, devant les menaces et les missions \u00e0 l’\u00e9tranger <\/span>14<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Elle a \u00e9galement \u00e9tabli une distinction claire entre les int\u00e9r\u00eats des \u00c9tats-Unis et ceux de leurs alli\u00e9s (m\u00eame proches) et adopt\u00e9 une vision diff\u00e9rente de celle de l’administration Biden quant aux menaces auxquelles les \u00c9tats-Unis sont confront\u00e9s. Elle a, par exemple, accept\u00e9 une \u00e9valuation plus favorable de la menace conventionnelle que repr\u00e9sente la Russie pour les \u00c9tats-Unis et a d\u00e9prioris\u00e9 les op\u00e9rations contre les groupes terroristes qui ne peuvent pas frapper directement le territoire am\u00e9ricain <\/span>15<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n

Pour la pr\u00e9sidence imp\u00e9riale<\/a> de Donald Trump, la remise au centre du territoire am\u00e9ricain est constamment explicit\u00e9e.<\/p>\n\n\n\n

Cette priorisation de la \u00ab s\u00e9curit\u00e9 int\u00e9rieure \u00bb se traduit notamment par le d\u00e9ploiement des forces arm\u00e9es directement sur le territoire, en particulier dans la lutte contre l\u2019immigration, avec des emplois in\u00e9dits comme on a pu le constater \u00e0 Los Angeles<\/a>.<\/p>\n\n\n\n

Les recommandations contenues dans ce rapport refl\u00e8tent notre \u00e9valuation de la mani\u00e8re dont l’administration peut utiliser les changements de posture pour poursuivre ses objectifs. <\/p>\n\n\n\n

D’une mani\u00e8re g\u00e9n\u00e9rale, nous recommandons au Pentagone de revoir la posture des \u00c9tats-Unis afin de la rendre plus coh\u00e9rente avec une strat\u00e9gie globale r\u00e9aliste et mod\u00e9r\u00e9e, qui r\u00e9orienterait les engagements militaires am\u00e9ricains d\u2019une p\u00e9rennisation de la primaut\u00e9 mondiale des \u00c9tats-Unis vers le maintien d’\u00e9quilibres de pouvoir favorables dans des r\u00e9gions cl\u00e9s. <\/p>\n\n\n\n

En pratique, cela impliquerait que les alli\u00e9s assument davantage de responsabilit\u00e9s dans les r\u00f4les de d\u00e9fense de premi\u00e8re ligne, tandis que la pr\u00e9sence militaire mondiale des \u00c9tats-Unis serait r\u00e9duite et se concentrerait sur la d\u00e9fense des int\u00e9r\u00eats fondamentaux des \u00c9tats-Unis et le soutien aux alli\u00e9s <\/span>16<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n

Afin de faire progresser cette vision de politique \u00e9trang\u00e8re, nous d\u00e9finissons quatre priorit\u00e9s principales en mati\u00e8re de s\u00e9curit\u00e9 nationale qui guident nos recommandations de posture. <\/p>\n\n\n\n

\u2014 D\u00e9fendre le territoire national<\/em> : L’administration a fait de la d\u00e9fense du territoire national sa priorit\u00e9 absolue, y compris la d\u00e9fense de l’espace a\u00e9rien et des c\u00f4tes des \u00c9tats-Unis, ainsi que de leurs fronti\u00e8res nord et sud. Les d\u00e9cisions prises par les \u00c9tats-Unis en mati\u00e8re de positionnement strat\u00e9gique national et international doivent soutenir cet objectif, en garantissant que des forces et des ressources suffisantes sont disponibles pour la d\u00e9fense des \u00c9tats-Unis, de leurs c\u00f4tes et de leur espace a\u00e9rien <\/span>17<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n

L’id\u00e9e que les \u00c9tats-Unis pourraient manquer de ressources militaires (\u00ab scarcity of resources<\/em> \u00bb) pour d\u00e9fendre leur territoire, ou \u00eatre \u00e0 m\u00eame d\u2019assurer leurs enjeux strat\u00e9giques, car ils se sont focalis\u00e9s sur l\u2019Europe ou le Moyen-Orient sans en avoir les moyens est notamment d\u00e9velopp\u00e9e par Elbridge Colby, l\u2019actuel Sous-secr\u00e9taire \u00e0 la D\u00e9fense charg\u00e9 de la planification, d\u00e8s 2021 dans The Strategy of Denial<\/em>. C\u2019est Colby qui aurait \u00e9t\u00e9 \u00e0 l\u2019origine de l\u2019arr\u00eat des livraisons d\u2019armes \u00e0 l\u2019Ukraine<\/a> \u2014\u00a0une d\u00e9cision depuis renvers\u00e9e par Trump.<\/p>\n\n\n\n

\u2014 Emp\u00eacher l’\u00e9mergence d’un h\u00e9g\u00e9mon r\u00e9gional en Asie, en Europe ou au Moyen-Orient<\/em> : Afin de maintenir un \u00e9quilibre des pouvoirs favorable dans les r\u00e9gions cl\u00e9s du monde, les \u00c9tats-Unis devront emp\u00eacher l’\u00e9mergence d’une puissance h\u00e9g\u00e9monique r\u00e9gionale rivale en Eurasie, c’est-\u00e0-dire d\u2019un \u00c9tat capable d’accumuler une pr\u00e9pond\u00e9rance de puissance en Asie, en Europe ou au Moyen-Orient et d’utiliser cette puissance pour contester ou restreindre les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains <\/span>18<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n

En Europe et au Moyen-Orient, les perspectives d’\u00e9mergence d’une nouvelle puissance r\u00e9gionale dominante sont lointaines. En Asie, la Chine n’a pas encore trouv\u00e9 la voie vers l’h\u00e9g\u00e9monie r\u00e9gionale, mais elle dispose d’une puissance suffisante pour emp\u00eacher les \u00c9tats-Unis de maintenir leur domination exclusive dans la r\u00e9gion. Les \u00c9tats-Unis devraient adopter une posture qui renforcent leur capacit\u00e9 \u00e0 contrebalancer la puissance de leurs rivaux r\u00e9gionaux, en particulier la Chine <\/span>19<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Cela pourrait inclure le renforcement de la pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine dans des endroits strat\u00e9giques tels que le Japon, le long de la deuxi\u00e8me cha\u00eene d’\u00eeles en Asie, ou dans des points d’\u00e9tranglement maritimes cl\u00e9s au Moyen-Orient ou en Europe du Nord. <\/p>\n\n\n\n

Ta\u00efwan n\u2019est pas mentionn\u00e9e dans ce paragraphe, mais la menace chinoise sur ce territoire est sugg\u00e9r\u00e9e en creux dans la mention de la \u00ab strat\u00e9gie de cha\u00eene d\u2019\u00eeles \u00bb. Formalis\u00e9e pour la premi\u00e8re fois pendant la guerre de Cor\u00e9e, cette strat\u00e9gie am\u00e9ricaine visant d\u2019abord \u00e0 contenir l\u2019Union sovi\u00e9tique est aujourd\u2019hui r\u00e9activ\u00e9e face \u00e0 la Chine.<\/p>\n\n\n\n

\u2014 Transfert de responsabilit\u00e9 vers les alli\u00e9s et les partenaires<\/em> : M\u00eame s’ils poursuivent une strat\u00e9gie d’\u00e9quilibre des pouvoirs, les \u00c9tats-Unis devraient exiger de leurs alli\u00e9s et partenaires qu’ils assument une plus grande responsabilit\u00e9, voire la responsabilit\u00e9 totale, de leur propre d\u00e9fense. <\/p>\n\n\n\n

Cela n\u00e9cessitera de transf\u00e9rer aux alli\u00e9s la charge de la d\u00e9fense qui p\u00e8se actuellement sur les \u00c9tats-Unis et de ne maintenir les forces am\u00e9ricaines que l\u00e0 o\u00f9 elles sont n\u00e9cessaires pour garantir et prot\u00e9ger les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains. Les \u00c9tats-Unis devraient \u00eatre en mesure de r\u00e9duire leur pr\u00e9sence militaire \u00e0 l’\u00e9tranger \u00e0 mesure qu’ils se d\u00e9chargent de leurs responsabilit\u00e9s, parfois de mani\u00e8re significative. 
Les \u00c9tats-Unis n’ont pas besoin que leurs alli\u00e9s aient d\u00e9j\u00e0 rattrap\u00e9 leur retard avant de se retirer, mais ils devraient proposer aux alli\u00e9s un calendrier clair et transparent pour leur retrait. La nature et l’ampleur du transfert de responsabilit\u00e9s peuvent varier selon les r\u00e9gions <\/span>
20<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n

\u2014 Prot\u00e9ger la s\u00e9curit\u00e9 \u00e9conomique des \u00c9tats-Unis<\/em> : La s\u00e9curit\u00e9 \u00e9conomique est un \u00e9l\u00e9ment essentiel de la s\u00e9curit\u00e9 nationale et les \u00c9tats-Unis devraient \u00eatre pr\u00eats \u00e0 utiliser leur puissance militaire, y compris leur pr\u00e9sence avanc\u00e9e si n\u00e9cessaire, pour prot\u00e9ger l’acc\u00e8s des \u00c9tats-Unis aux voies navigables et aux ressources naturelles essentielles. <\/p>\n\n\n\n

Outre ces priorit\u00e9s, nous adoptons une s\u00e9rie d’hypoth\u00e8ses pour orienter notre Posture Review<\/em>. <\/p>\n\n\n\n

Premi\u00e8rement, nous partons du principe que le budget du Pentagone restera globalement inchang\u00e9. La premi\u00e8re proposition de budget \u00ab all\u00e9g\u00e9 \u00bb de Trump pr\u00e9voyait un budget pratiquement inchang\u00e9 pour le minist\u00e8re de la D\u00e9fense, et m\u00eame si le \u00ab reconciliation bill \u00bb \u2014 s’il est adopt\u00e9 \u2014 accordera \u00e0 l’arm\u00e9e 150 milliards de dollars suppl\u00e9mentaires r\u00e9partis sur cinq ans, il devrait s’agir d’une augmentation ponctuelle <\/span>21<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n

Deuxi\u00e8mement, nous ne prenons en consid\u00e9ration que les changements qui peuvent \u00eatre r\u00e9alis\u00e9s au cours du mandat de Trump afin de garantir que nos recommandations sont r\u00e9alistes et tiennent compte des d\u00e9fis bureaucratiques et des contraintes de bande passante. Apr\u00e8s tout, une administration ne peut pas tout faire. Outre le temps n\u00e9cessaire pour prendre les d\u00e9cisions et les mettre en \u0153uvre, des enjeux logistiques existent, tels que la n\u00e9cessit\u00e9 de trouver des locaux pour les forces red\u00e9ploy\u00e9es de l’\u00e9tranger vers les \u00c9tats-Unis et de d\u00e9manteler les unit\u00e9s qui sont compl\u00e8tement supprim\u00e9es. <\/p>\n\n\n\n

Enfin, nous partons du principe que les \u00c9tats-Unis ne proc\u00e9deront \u00e0 aucune nouvelle acquisition territoriale. Cela n’exclut pas la possibilit\u00e9 d’un renforcement de la posture militaire \u00e0 des fins strat\u00e9giques essentielles, mais exclut le type de renforcement qui serait n\u00e9cessaire si les \u00c9tats-Unis d\u00e9cidaient d’\u00e9tendre leurs fronti\u00e8res.<\/p>\n\n\n\n

La mention explicite de l\u2019absence d\u2019une acquisition territoriale par les \u00c9tats-Unis au cours des quatre prochaines ann\u00e9es, formul\u00e9e comme une hypoth\u00e8se plut\u00f4t que comme un postulat \u00e9vident, tend \u00e0 confirmer que cette option est en fait v\u00e9ritablement envisag\u00e9e. En effet, la distinction op\u00e9r\u00e9e par les auteurs et l\u2019\u00e9vocation d\u2019un \u00ab renforcement de la posture militaire \u00e0 des fins strat\u00e9giques essentielles \u00bb laisse ouverte la possibilit\u00e9 d\u2019une mobilisation des forces militaires pour atteindre des objectifs d\u00e9j\u00e0 clairement et r\u00e9guli\u00e8rement \u00e9nonc\u00e9s par Trump \u2014\u00a0comme l\u2019annexion d\u2019une partie du territoire d\u2019un proche alli\u00e9 au Groenland.<\/p>\n\n\n\n

Changements de posture en Europe : un retour \u00e0 2014<\/h3>\n\n\n\n

La pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine actuelle en Europe comprend environ 90 000 soldats et aviateurs, ainsi que sept escadrons de chasse et leurs unit\u00e9s de soutien, des moyens de renseignement, de surveillance et de reconnaissance, et une pr\u00e9sence navale qui inclut cinq destroyers bas\u00e9s \u00e0 Rota, en Espagne. 
L’Allemagne accueille actuellement environ 39 000 militaires et un escadron de chasse, ce qui repr\u00e9sente la plus forte concentration de forces am\u00e9ricaines sur le continent europ\u00e9en. Les forces am\u00e9ricaines sont \u00e9galement bas\u00e9es en Italie (13 000 militaires et deux escadrons de chasse), en Roumanie (5 000), en Pologne (14 000) et au Royaume-Uni (10 000 et quatre escadrons de chasse). Les \u00c9tats-Unis maintiennent \u00e9galement des d\u00e9ploiements rotatifs plus modestes dans les \u00c9tats baltes. D’autres renforcements sont pr\u00e9vus \u00e0 court terme, notamment le d\u00e9ploiement en f\u00e9vrier 2026 d’une force op\u00e9rationnelle interarm\u00e9es (MDTF) de 500 personnes et d’un sixi\u00e8me destroyer de la marine. Cette pr\u00e9sence a parfois \u00e9t\u00e9 compl\u00e9t\u00e9e par des groupes a\u00e9ronavals en mer M\u00e9diterran\u00e9e <\/span>
22<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n

Bien s\u00fbr, cette posture est nettement inf\u00e9rieure \u00e0 celle de la guerre froide, lorsque les \u00c9tats-Unis disposaient de centaines de milliers de soldats bas\u00e9s en Europe, mais elle repr\u00e9sente une augmentation consid\u00e9rable par rapport aux quelques 60 000 soldats pr\u00e9sents dans la r\u00e9gion en 2013, avant la premi\u00e8re invasion de l’Ukraine par la Russie. <\/p>\n\n\n\n

Sous Biden, environ 20 000 soldats suppl\u00e9mentaires de l’arm\u00e9e am\u00e9ricaine ont \u00e9t\u00e9 d\u00e9ploy\u00e9s dans la r\u00e9gion, ainsi que des forces a\u00e9riennes suppl\u00e9mentaires, \u00e0 la suite de l’invasion totale de l’Ukraine par la Russie en 2022. Cette pr\u00e9sence renforc\u00e9e reste largement maintenue dans la r\u00e9gion \u00e0 ce jour.<\/p>\n\n\n\n

Les probl\u00e8mes li\u00e9s \u00e0 la posture actuelle en Europe<\/h4>\n\n\n\n

La posture actuelle des \u00c9tats-Unis en Europe pose quatre probl\u00e8mes majeurs. <\/p>\n\n\n\n

Premi\u00e8rement, elle est trop importante au regard d’une \u00e9valuation objective des menaces provenant de la r\u00e9gion. La pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine en Europe a toujours \u00e9t\u00e9 motiv\u00e9e principalement par la menace per\u00e7ue que repr\u00e9sente la Russie (\u00e0 l’origine l’Union sovi\u00e9tique) pour les alli\u00e9s de l’OTAN et pour les \u00c9tats-Unis eux-m\u00eames. Les forces avanc\u00e9es stationn\u00e9es ont donc g\u00e9n\u00e9ralement eu un double r\u00f4le : dissuader et d\u00e9fendre contre les attaques visant les alli\u00e9s ; former un p\u00e9rim\u00e8tre de s\u00e9curit\u00e9 emp\u00eachant la Russie de repr\u00e9senter une menace directe pour les \u00c9tats-Unis.<\/p>\n\n\n\n

Cependant, l’attitude de la Russie en Ukraine sugg\u00e8re qu’elle ne repr\u00e9sente pas une menace militaire conventionnelle significative pour les \u00c9tats-Unis et qu’elle ne constitue qu’une menace mod\u00e9r\u00e9e pour les alli\u00e9s de l’OTAN <\/span>23<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Bien s\u00fbr, cette menace varie \u00e0 travers le continent europ\u00e9en, \u00e9tant plus aigu\u00eb pour les \u00c9tats les plus proches de la Russie sur le flanc oriental de l’OTAN. Compte tenu de la lenteur de ses progr\u00e8s en Ukraine \u2014 un petit pays qui lutte, en manque d’armes \u2014 il est peu probable que la Russie puisse, par exemple, mener une campagne capable de prendre le contr\u00f4le de vastes portions du territoire europ\u00e9en avant d’\u00eatre stopp\u00e9e par les forces europ\u00e9ennes.<\/p>\n\n\n\n

Gr\u00e2ce aux avantages de la guerre d\u00e9fensive, notamment la possibilit\u00e9 de pr\u00e9parer le terrain \u00e0 l’avance avec des barri\u00e8res et des champs de mines, d’exploiter les avantages g\u00e9ographiques pour la surveillance et le d\u00e9ploiement des forces, et d’utiliser des technologies peu co\u00fbteuses comme les drones pour limiter les progr\u00e8s de l’adversaire, l’Europe dispose probablement aujourd’hui (m\u00eame avant le r\u00e9armement) des capacit\u00e9s militaires n\u00e9cessaires pour emp\u00eacher des gains militaires russes importants si Moscou attaquait un membre de l’OTAN <\/span>24<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Une vision lucide de la menace russe sugg\u00e8re que les \u00c9tats-Unis n’ont pas besoin d’une pr\u00e9sence importante pour garantir leur propre s\u00e9curit\u00e9 ou celle de l’Europe.<\/p>\n\n\n\n

Ces paragraphes d\u00e9roulent un argumentaire suppos\u00e9 justifier un retrait am\u00e9ricain de l\u2019Europe sans mettre en jeu l\u2019alliance transatlantique.<\/p>\n\n\n\n

La r\u00e9f\u00e9rence de la r\u00e9sistance de l\u2019Ukraine (\u00ab petit pays en manque d\u2019armes \u00bb) comme preuve d\u2019une surestimation de la menace russe, alors que l\u2019Ukraine a justement besoin des armements am\u00e9ricains pour se battre, peut difficilement \u00eatre consid\u00e9r\u00e9 comme un argument solide. La repr\u00e9sentation comme un pays faible et de petite taille reprend des \u00e9l\u00e9ments de langage du Kremlin : l\u2019Ukraine est le pays \u00e0 la plus grande superficie sur le territoire europ\u00e9en et son arm\u00e9e est aujourd\u2019hui unanimement consid\u00e9r\u00e9e comme l\u2019une des plus performantes au combat.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

En amoindrissant, enfin, l\u2019intensit\u00e9 de la guerre d\u2019Ukraine, les auteurs pr\u00e9sentent la Russie de Poutine comme une menace inexistante pour les \u00c9tats-Unis et \u00ab mod\u00e9r\u00e9e \u00bb pour les Europ\u00e9ens et les pays de l\u2019OTAN.<\/p>\n\n\n\n

Deuxi\u00e8mement, la pr\u00e9sence militaire actuelle des \u00c9tats-Unis est disproportionn\u00e9e par rapport \u00e0 leurs int\u00e9r\u00eats en Europe. Les \u00c9tats-Unis ont longtemps utilis\u00e9 leur pr\u00e9sence militaire pour emp\u00eacher l’\u00e9mergence d’une h\u00e9g\u00e9monie europ\u00e9enne, prot\u00e9ger leurs int\u00e9r\u00eats \u00e9conomiques en Europe et renforcer leur influence sur leurs alli\u00e9s europ\u00e9ens. Aujourd’hui, il n’est pas certain qu’une pr\u00e9sence importante en Europe aide Washington \u00e0 atteindre ces objectifs.<\/p>\n\n\n\n

Le risque de voir \u00e9merger une h\u00e9g\u00e9monie europ\u00e9enne est faible, avec ou sans la pr\u00e9sence des forces am\u00e9ricaines. Il semble peu probable qu’un pays europ\u00e9en puisse \u00e9tablir une position dominante dans la r\u00e9gion compte tenu des divisions internes, et tout aussi peu probable que la Russie puisse se battre pour obtenir une large sph\u00e8re d’influence en Europe. Dans le m\u00eame temps, rien ne prouve qu’une pr\u00e9sence militaire importante soit le meilleur moyen, voire le seul, de prot\u00e9ger les int\u00e9r\u00eats \u00e9conomiques des \u00c9tats-Unis en Europe ou qu’elle offre aux d\u00e9cideurs politiques le levier qu’ils recherchent. Les dirigeants europ\u00e9ens agissent de mani\u00e8re ind\u00e9pendante sur de nombreuses questions politiques, malgr\u00e9 la forte pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine.<\/p>\n\n\n\n

Troisi\u00e8mement, la pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine en Europe encourage les alli\u00e9s des \u00c9tats-Unis \u00e0 sous-investir et \u00e0 profiter du syst\u00e8me, laissant Washington payer la facture de la s\u00e9curit\u00e9 europ\u00e9enne, alors m\u00eame qu’une Europe riche et technologiquement avanc\u00e9e a les moyens de se d\u00e9fendre <\/span>25<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n

Non seulement cet arrangement expose les \u00c9tats-Unis au risque d’\u00eatre entra\u00een\u00e9s dans les guerres et les crises s\u00e9curitaires europ\u00e9ennes m\u00eame si leurs propres int\u00e9r\u00eats ne sont pas en jeu, mais il les oblige \u00e0 d\u00e9penser des ressources limit\u00e9es d’une mani\u00e8re qui n’est pas toujours conforme \u00e0 leurs int\u00e9r\u00eats fondamentaux. D\u00e8s le premier jour, l’administration Trump a clairement indiqu\u00e9 qu’elle attendait de l’Europe qu’elle d\u00e9pense et fasse davantage dans le domaine de la s\u00e9curit\u00e9 afin que les \u00c9tats-Unis puissent d\u00e9penser et faire moins, l’objectif \u00e9tant que l’Europe assume l’enti\u00e8re responsabilit\u00e9 de sa propre s\u00e9curit\u00e9. Cela serait pr\u00e9f\u00e9rable pour les \u00c9tats-Unis, car cela permettrait de pr\u00e9server leurs ressources et de r\u00e9duire les risques, mais cela serait \u00e9galement pr\u00e9f\u00e9rable pour l’Europe, qui serait ainsi autonome sur le plan g\u00e9opolitique.<\/p>\n\n\n\n

Enfin, une pr\u00e9sence militaire importante en Europe absorbe des ressources qui sont n\u00e9cessaires dans des th\u00e9\u00e2tres d’op\u00e9rations plus prioritaires, notamment en Asie, o\u00f9 les \u00c9tats-Unis font face \u00e0 leur plus grand concurrent, et sur le territoire am\u00e9ricain <\/span>26<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Une pr\u00e9sence militaire importante en Europe a donc un co\u00fbt d’opportunit\u00e9 \u00e9lev\u00e9 compte tenu des autres engagements et priorit\u00e9s militaires des \u00c9tats-Unis.<\/p>\n\n\n\n

Dans certains cas, ces arbitrages sont directs. Chaque soldat d\u00e9ploy\u00e9 en Europe est un soldat qui ne peut pas \u00eatre utilis\u00e9 dans les missions de l’administration pour d\u00e9fendre le territoire national. Chaque syst\u00e8me de d\u00e9fense a\u00e9rienne ou escadron de chasseurs d\u00e9ploy\u00e9 en Europe est un syst\u00e8me ou un escadron qui n’est pas imm\u00e9diatement disponible en cas de crise en Asie. <\/p>\n\n\n\n

D’autres arbitrages sont indirects. Les dollars d\u00e9pens\u00e9s pour les capacit\u00e9s de guerre terrestre principalement destin\u00e9es au th\u00e9\u00e2tre europ\u00e9en, par exemple, ne peuvent pas \u00eatre investis dans de nouveaux navires et sous-marins n\u00e9cessaires pour soutenir les op\u00e9rations dans la r\u00e9gion indo-pacifique. <\/p>\n\n\n\n

L’existence de ces arbitrages augmente le co\u00fbt d’opportunit\u00e9 des actifs et des capacit\u00e9s d\u00e9ploy\u00e9s en Europe et souligne l’importance de redimensionner l’engagement am\u00e9ricain en Europe afin de l’adapter aux menaces actuelles et aux int\u00e9r\u00eats des \u00c9tats-Unis.<\/p>\n\n\n\n

Le concept des \u00ab tradeoffs<\/em> \u00bb \u2014 arbitrages, ou compromis \u2014 est un argument cl\u00e9 pour le groupe des \u00ab prioritizers<\/em> \u00bb : postulat d\u2019un manque de ressources de l\u2019arm\u00e9e am\u00e9ricaine, qui seraient aujourd\u2019hui \u00ab absorb\u00e9es \u00bb par l\u2019Europe, il implique une redistribution vers les th\u00e9\u00e2tres essentiels \u2014 le territoire national et l\u2019Asie.<\/p>\n\n\n\n

Principes pour guider une r\u00e9vision de la posture am\u00e9ricaine en Europe<\/h4>\n\n\n\n

Une r\u00e9vision de la posture am\u00e9ricaine en Europe serait guid\u00e9e par quatre principes. <\/p>\n\n\n\n

Premi\u00e8rement, et avant toute chose, l’objectif de cette r\u00e9vision serait de passer d’une architecture de s\u00e9curit\u00e9 r\u00e9gionale centr\u00e9e sur les \u00c9tats-Unis \u00e0 une architecture de s\u00e9curit\u00e9 dirig\u00e9e par les \u00c9tats membres de l’Union europ\u00e9enne. Pour y parvenir, il faudrait maintenir en Europe uniquement les forces am\u00e9ricaines n\u00e9cessaires \u00e0 la sauvegarde des int\u00e9r\u00eats des \u00c9tats-Unis et transf\u00e9rer toutes les autres responsabilit\u00e9s aux alli\u00e9s et partenaires.<\/p>\n\n\n\n

Cette transition devrait avoir lieu m\u00eame si l’Europe n’est pas en mesure de remplacer imm\u00e9diatement les capacit\u00e9s militaires am\u00e9ricaines red\u00e9ploy\u00e9es, mais elle devra probablement se faire progressivement \u2014 non pas pour faciliter la t\u00e2che de l’Europe, mais pour donner au Pentagone le temps de prendre des d\u00e9cisions en mati\u00e8re de rotation, de stationnement et de structure des forces, alors qu’un grand nombre de soldats am\u00e9ricains rentrent au pays. Toutefois, l’un des premiers changements \u00e0 apporter consiste \u00e0 transf\u00e9rer les r\u00f4les de d\u00e9fense de premi\u00e8re ligne aux alli\u00e9s europ\u00e9ens, laissant aux \u00c9tats-Unis le soin de se concentrer sur les capacit\u00e9s de soutien au combat et les r\u00f4les d\u00e9fensifs.<\/p>\n\n\n\n

Deuxi\u00e8mement, les changements de posture viseraient \u00e0 lib\u00e9rer les ressources actuellement bas\u00e9es en Europe qui pourraient \u00eatre importantes dans une guerre indo-pacifique ou pour d\u00e9fendre le territoire national. Cela pourrait inclure la d\u00e9fense a\u00e9rienne, certaines ressources navales, des escadrons de chasseurs et m\u00eame des unit\u00e9s terrestres n\u00e9cessaires pour soutenir le d\u00e9ploiement actuel de l’arm\u00e9e \u00e0 la fronti\u00e8re am\u00e9ricaine.<\/p>\n\n\n\n

Troisi\u00e8mement, reconnaissant que toute campagne militaire men\u00e9e contre la Russie en Europe serait d\u00e9fensive, les changements de posture devraient viser \u00e0 exploiter l’avantage du d\u00e9fenseur dans la guerre moderne.<\/p>\n\n\n\n

Outre la r\u00e9duction des effectifs n\u00e9cessaires \u00e0 une campagne r\u00e9ussie, l’accent mis sur les op\u00e9rations d\u00e9fensives et les avantages d\u00e9fensifs r\u00e9duirait le besoin et l’utilit\u00e9 de certains types de syst\u00e8mes offensifs tels que les armes de frappe \u00e0 longue port\u00e9e et les avions de combat avanc\u00e9s. Au lieu de d\u00e9ployer ces moyens en Europe, la posture r\u00e9vis\u00e9e des \u00c9tats-Unis serait principalement compos\u00e9e de forces de soutien, notamment logistiques, de soutien, de renseignement et de maintenance, ainsi que de certaines forces terrestres plus lourdes capables de servir de p\u00e9rim\u00e8tre d\u00e9fensif.<\/p>\n\n\n\n

Enfin, une posture r\u00e9vis\u00e9e devrait tenir compte de la valeur des ressources et du personnel bas\u00e9s en Europe pour la projection de puissance dans d’autres th\u00e9\u00e2tres, par exemple les activit\u00e9s de renseignement et de reconnaissance en mer Noire ou les op\u00e9rations de r\u00e9ponse aux crises au Moyen-Orient.<\/p>\n\n\n\n

\n \n \r\n \r\n \r\n \r\n \r\n \r\n \r\n \r\n <\/picture>\r\n \n
Test a\u00e9rodynamique sur la piste d’essai \u00e0 grande vitesse de Holloman, au Nouveau-Mexique. \u00a9 USAF<\/figcaption>\n <\/a>\n<\/figure>\n\n\n

Recommandations<\/h4>\n\n\n\n

Les changements de posture que nous recommandons pour l’Europe r\u00e9duiraient en fin de compte le nombre de forces terrestres d’environ 30 000 hommes et les forces a\u00e9riennes et navales de moiti\u00e9 par rapport \u00e0 leurs niveaux actuels. Cela ram\u00e8nerait la posture militaire am\u00e9ricaine dans la r\u00e9gion \u00e0 son niveau de 2013, c’est-\u00e0-dire \u00e0 ce qu’\u00e9tait la pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine en Europe avant la premi\u00e8re invasion de l’Ukraine par la Russie en 2014. <\/p>\n\n\n\n

Cela ne devrait pas \u00eatre le point final du retrait militaire am\u00e9ricain en Europe. <\/p>\n\n\n\n

Au cours de la prochaine d\u00e9cennie, \u00e0 mesure que l’Europe renforcera ses capacit\u00e9s de d\u00e9fense, la pr\u00e9sence militaire am\u00e9ricaine dans la r\u00e9gion devrait encore diminuer, pour atteindre peut-\u00eatre quelque 20 000 soldats au sol et une pr\u00e9sence a\u00e9rienne et navale r\u00e9duite. Mais les changements d\u00e9crits ici constituent des objectifs r\u00e9alistes pour les quatre prochaines ann\u00e9es.<\/p>\n\n\n\n

En ce qui concerne les forces terrestres, nous recommandons de retirer trois brigades de combat (BCT) (soit environ 5 000 personnes par BCT, y compris la BCT elle-m\u00eame et les forces de soutien associ\u00e9es) d’Europe et de les renvoyer aux \u00c9tats-Unis, y compris la brigade de combat en Roumanie et soit deux BCT de Pologne, soit une de Allemagne et une de Pologne. Il resterait alors deux BCT stationn\u00e9es en Europe, dont la 173e brigade a\u00e9roport\u00e9e stationn\u00e9e en Italie. <\/p>\n\n\n\n

En outre, nous recommandons de retirer une brigade d’aviation de combat (CAB), le quartier g\u00e9n\u00e9ral de la division situ\u00e9 en Roumanie et les forces de soutien associ\u00e9es. Il convient de noter que ces changements mettraient \u00e9galement fin \u00e0 la contribution am\u00e9ricaine au renforcement de la protection des forces dans les \u00c9tats baltes, qui provient g\u00e9n\u00e9ralement des BCT stationn\u00e9es en Pologne et en Allemagne.<\/p>\n\n\n\n

Parmi ces forces, les unit\u00e9s en rotation pourraient \u00eatre retir\u00e9es rapidement. Une fois rentr\u00e9es au pays, elles ne seraient tout simplement pas remplac\u00e9es. Le retrait des unit\u00e9s bas\u00e9es en permanence en Europe prendrait plus de temps, car il faudrait trouver de l’espace dans les bases am\u00e9ricaines pour le personnel associ\u00e9, \u00e0 moins que ces unit\u00e9s ne soient enti\u00e8rement supprim\u00e9es afin de r\u00e9duire la structure des forces de l’arm\u00e9e. Cela pourrait se faire plus rapidement, mais m\u00eame dans ce cas, le personnel restant devrait \u00eatre r\u00e9affect\u00e9.<\/p>\n\n\n\n

La logique qui sous-tend ces changements est simple. <\/p>\n\n\n\n

Premi\u00e8rement, la volont\u00e9 des \u00c9tats-Unis de transf\u00e9rer de responsabilit\u00e9 exige que les alli\u00e9s europ\u00e9ens prennent l’initiative de leur propre d\u00e9fense, notamment en ce qui concerne les op\u00e9rations de combat terrestre et la d\u00e9fense de la fronti\u00e8re Est de l’OTAN. Le retrait imm\u00e9diat des unit\u00e9s de combat terrestre am\u00e9ricaines incite et pousse l’Europe \u00e0 prendre le relais et \u00e0 combler cette lacune en constituant ses propres brigades de combat et en ajustant son dispositif collectif dans les \u00c9tats membres de l’OTAN situ\u00e9s en premi\u00e8re ligne.<\/p>\n\n\n\n

Deuxi\u00e8mement, comme d\u00e9j\u00e0 indiqu\u00e9, l’administration Trump a correctement \u00e9valu\u00e9 que la Russie ne repr\u00e9sente gu\u00e8re une menace directe pour les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains, et qu’elle ne repr\u00e9sente certainement pas une menace plus grande pour les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains qu’en 2014. Ni la premi\u00e8re ni la deuxi\u00e8me invasion de l’Ukraine par la Russie n’ont chang\u00e9 la nature ou l’ampleur de la menace conventionnelle que la Russie fait peser sur le territoire am\u00e9ricain, et les inqui\u00e9tudes accrues concernant la menace russe pour l’Europe \u2013 qui ont motiv\u00e9 l’envoi de 20 000 soldats suppl\u00e9mentaires sous la pr\u00e9sidence de Joe Biden \u2013 auraient d\u00fb se dissiper apr\u00e8s les performances m\u00e9diocres de la Russie sur le champ de bataille. Il est donc peu logique que les \u00c9tats-Unis maintiennent cinq brigades de combat en Europe, d’autant plus que toute op\u00e9ration militaire am\u00e9ricaine sur le continent europ\u00e9en serait probablement de nature d\u00e9fensive.<\/p>\n\n\n\n

Outre le retrait des brigades de combat et d’aviation, nous recommandons d’annuler le d\u00e9ploiement pr\u00e9vu en f\u00e9vrier 2026 de la MDTF et de ses capacit\u00e9s de missiles \u00e0 port\u00e9e interm\u00e9diaire en Allemagne. Ce d\u00e9ploiement n’est pas conforme \u00e0 l’\u00e9valuation de la menace russe par l’administration Trump ni \u00e0 sa volont\u00e9 de r\u00e9duire le r\u00f4le des \u00c9tats-Unis dans la s\u00e9curit\u00e9 europ\u00e9enne. La MDTF et ses missiles \u00e0 longue port\u00e9e ne constituent pas des capacit\u00e9s d\u00e9fensives et sont plus susceptibles de provoquer la Russie que de la dissuader, car ils sont capables de frapper profond\u00e9ment \u00e0 l’int\u00e9rieur du territoire russe. Si l’intention des \u00c9tats-Unis est de se retirer d’Europe et de laisser l’Europe g\u00e9rer sa propre d\u00e9fense, il n’est gu\u00e8re logique de d\u00e9ployer en m\u00eame temps dans la r\u00e9gion une nouvelle plate-forme de missiles agressive et d\u00e9stabilisante.<\/p>\n\n\n\n

En ce qui concerne les forces a\u00e9riennes, nous recommandons de r\u00e9duire le nombre d’escadrons de chasse am\u00e9ricains bas\u00e9s en Europe de sept \u00e0 quatre, pour revenir au niveau de 2014 environ. Lors d’une audition devant le Congr\u00e8s en mai 2025, des responsables de l’arm\u00e9e de l’air ont annonc\u00e9 leur intention de retirer deux escadrons de chasseurs F-15 du Royaume-Uni et de les renvoyer aux \u00c9tats-Unis pour une p\u00e9riode de repos et de remise en \u00e9tat. Cette d\u00e9cision refl\u00e8te probablement les efforts du Pentagone pour retirer d’Europe des moyens qui pourraient \u00eatre n\u00e9cessaires en Asie, afin de leur donner le temps d’\u00eatre r\u00e9par\u00e9s et modernis\u00e9s si n\u00e9cessaire.<\/p>\n\n\n\n

L’arm\u00e9e de l’air n’avait alors pas pr\u00e9cis\u00e9 ce qui remplacerait les escadrons de F-15. Selon nos recommandations, ils ne seraient pas remplac\u00e9s et le personnel associ\u00e9 serait \u00e9galement retir\u00e9, ne laissant que les deux escadrons de F-35 et divers \u00e9l\u00e9ments de soutien au Royaume-Uni, ainsi qu’environ 7 500 militaires. En plus de ce changement, nous recommandons de retirer un escadron de chasseurs F-16 d’Italie. Il resterait alors quatre escadrons de chasseurs au total en Europe. Nous r\u00e9duirions \u00e9galement de 50 % les unit\u00e9s de soutien a\u00e9rien (maintenance, avions ravitailleurs, etc.), qui seraient rapatri\u00e9es aux \u00c9tats-Unis o\u00f9 elles pourraient \u00eatre pr\u00e9par\u00e9es pour de futurs d\u00e9ploiements si n\u00e9cessaire.
Comme dans le cas des forces terrestres, le niveau actuel de la puissance a\u00e9rienne am\u00e9ricaine d\u00e9ploy\u00e9e en Europe d\u00e9passe largement les besoins. Non seulement les pays europ\u00e9ens disposent de leurs propres avions de combat, mais plusieurs d’entre eux ont proc\u00e9d\u00e9 \u00e0 des achats importants afin d’\u00e9largir leur flotte d’avions \u00e0 r\u00e9action am\u00e9ricains et europ\u00e9ens \u00e0 court terme. <\/p>\n\n\n\n

Au contraire, les \u00c9tats-Unis devraient r\u00e9duire leur puissance a\u00e9rienne d\u00e9ploy\u00e9e en Europe par rapport \u00e0 2014. Non seulement la menace russe est rest\u00e9e largement inchang\u00e9e du point de vue am\u00e9ricain, mais les \u00c9tats-Unis ne sont plus engag\u00e9s dans des op\u00e9rations de grande envergure contre l’\u00c9tat islamique et n’ont plus besoin d’utiliser les bases a\u00e9riennes europ\u00e9ennes pour projeter leur puissance au Moyen-Orient dans la m\u00eame mesure. Si les inqui\u00e9tudes li\u00e9es \u00e0 la guerre entre Isra\u00ebl et l’Iran peuvent entra\u00eener une augmentation temporaire de la puissance a\u00e9rienne am\u00e9ricaine en Europe, zone de transit vers le Moyen-Orient, ces forces devraient elles aussi \u00eatre rapatri\u00e9es d\u00e8s que la situation se stabilisera.
La puissance navale am\u00e9ricaine en Europe devrait \u00e9galement \u00eatre r\u00e9duite de moiti\u00e9, passant des six destroyers actuellement pr\u00e9vus \u00e0 Rota aux trois destroyers qui y \u00e9taient bas\u00e9s avant 2014. Le renforcement de la pr\u00e9sence navale am\u00e9ricaine au cours de la derni\u00e8re d\u00e9cennie visait \u00e0 renforcer les d\u00e9fenses antimissiles balistiques de l’Europe apr\u00e8s l’invasion de l’Ukraine par la Russie, mais m\u00eame si des d\u00e9fenses a\u00e9riennes suppl\u00e9mentaires \u00e9taient n\u00e9cessaires \u00e0 un moment donn\u00e9, une attaque a\u00e9rienne russe contre l’Europe semble aujourd’hui tr\u00e8s improbable. <\/p>\n\n\n\n

De plus, les moyens de d\u00e9fense a\u00e9rienne font partie des capacit\u00e9s les plus rares de l’arsenal am\u00e9ricain et des syst\u00e8mes qui seraient les plus essentiels dans un conflit indo-pacifique. La r\u00e9duction du d\u00e9ploiement de la puissance navale am\u00e9ricaine \u00e0 trois destroyers lib\u00e9rerait des ressources pour les op\u00e9rations am\u00e9ricaines dans le th\u00e9\u00e2tre indo-pacifique, qui est davantage prioritaire.<\/p>\n\n\n\n

Outre l’ajustement du nombre de destroyers d\u00e9ploy\u00e9s en Europe, nous recommandons de r\u00e9duire les d\u00e9ploiements futurs pr\u00e9vus de groupes a\u00e9ronavals en mer M\u00e9diterran\u00e9e. Le nombre de partenaires am\u00e9ricains bordant cette zone maritime (Espagne, France, Italie et Turquie) montre clairement l’importance de la puissance navale alli\u00e9e dans la r\u00e9gion. Il s’agit l\u00e0 d’une occasion unique de r\u00e9aliser un transfert de responsabilit\u00e9s. Ces alli\u00e9s devraient \u00eatre capables d’assurer la s\u00e9curit\u00e9 dans cette zone maritime strat\u00e9gique avec un soutien am\u00e9ricain nettement inf\u00e9rieur. <\/p>\n\n\n\n

Dans tous les cas, puisque les \u00c9tats-Unis d\u00e9pendent peu du commerce transitant par le canal de Suez, ils seraient relativement \u00e0 l’abri de perturbations \u00e9ventuelles. Ce changement augmenterait la disponibilit\u00e9 des porte-avions pour des op\u00e9rations ailleurs, notamment en Asie, ou pour la modernisation et les r\u00e9parations en vue de besoins futurs.<\/p>\n\n\n\n

Dans l’ensemble, les r\u00e9ductions que nous recommandons pour la pr\u00e9sence am\u00e9ricaine en Europe seraient donc les suivantes :<\/p>\n\n\n\n

    \n
  • Supprimer trois brigades de combat terrestre, une brigade de combat a\u00e9rien, une unit\u00e9 de commandement et le d\u00e9ploiement pr\u00e9vu de la MDTF.<\/li>\n\n\n\n
  • R\u00e9duire d’environ 50 % la puissance a\u00e9rienne et navale am\u00e9ricaine dans la r\u00e9gion.<\/li>\n<\/ul>\n\n\n\n

    Ensemble, ces changements r\u00e9duiraient la pr\u00e9sence globale des \u00c9tats-Unis en Europe de 40 \u00e0 50 % en quatre ans et ram\u00e8neraient la posture am\u00e9ricaine \u00e0 son niveau d’avant 2014. Les ajustements que nous recommandons permettraient de transf\u00e9rer une part importante de la charge vers les alli\u00e9s, de maintenir des ressources essentielles en mati\u00e8re de renseignement et de projection de puissance, de red\u00e9ployer des capacit\u00e9s tr\u00e8s demand\u00e9es qui pourraient \u00eatre n\u00e9cessaires en Asie ou pour la d\u00e9fense du territoire national, et de mieux aligner les engagements des \u00c9tats-Unis en Europe sur le niveau et le type de menace que repr\u00e9sente la Russie pour les int\u00e9r\u00eats am\u00e9ricains.<\/p>\n\n\n\n

    Les r\u00e9ductions pr\u00e9vues pourraient se faire de mani\u00e8re progressive, certaines unit\u00e9s de combat terrestre et a\u00e9riennes quittant imm\u00e9diatement le continent europ\u00e9en et d’autres se retirant ult\u00e9rieurement selon un calendrier convenu. Toutefois, les \u00c9tats-Unis ne devraient pas attendre que l’Europe soit en mesure de remplacer les capacit\u00e9s am\u00e9ricaines avant de mettre en \u0153uvre les changements d\u00e9crits ici.<\/p>\n\n\n\n

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