{"id":259677,"date":"2025-01-21T17:02:40","date_gmt":"2025-01-21T16:02:40","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=259677"},"modified":"2025-01-21T17:19:00","modified_gmt":"2025-01-21T16:19:00","slug":"se-preparer-a-lempire-curtis-yarvin-prophete-des-lumieres-noires","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2025\/01\/21\/se-preparer-a-lempire-curtis-yarvin-prophete-des-lumieres-noires\/","title":{"rendered":"\u00ab Se pr\u00e9parer \u00e0 l\u2019Empire \u00bb : Curtis Yarvin, proph\u00e8te des Lumi\u00e8res noires"},"content":{"rendered":"\n
Derri\u00e8re des raisonnements historiques cavaliers et souvent incoh\u00e9rents, Curtis Yarvin imagine une soci\u00e9t\u00e9 o\u00f9 les chefs d\u2019entreprise du num\u00e9rique r\u00e8gnent en ma\u00eetres absolus des destin\u00e9es du monde, o\u00f9 les citoyens ordinaires sont d\u00e9poss\u00e9d\u00e9s de leurs droits et o\u00f9 les individus jug\u00e9s non productifs sont enferm\u00e9s dans des caves, distraits par une r\u00e9alit\u00e9 virtuelle. Le \u00ab techno-monarchisme \u00bb de Curtis Yarvin conduit \u00e0 une justification du pouvoir sans limite des oligarques du num\u00e9rique et de l\u2019eug\u00e9nisme au nom du bien commun. <\/p>\n\n\n\n
De tels raisonnements pourraient pr\u00eater \u00e0 sourire si le vice-pr\u00e9sident des \u00c9tats-Unis J. D. Vance<\/a> ne citait pas Curtis Yarvin comme une r\u00e9f\u00e9rence, et si ce dernier n\u2019\u00e9tait pas au c\u0153ur d\u2019une galaxie r\u00e9actionnaire qui compte influer sur la future administration Trump, de Peter Thiel \u00e0 Elon Musk, et faire encore plus basculer vers des politiques radicales un parti r\u00e9publicain que Yarvin a toujours consid\u00e9r\u00e9 comme \u00ab progressiste \u00bb. <\/p>\n\n\n\n Curtis Yarvin na\u00eet en 1973 d\u2019un p\u00e8re diplomate am\u00e9ricain, dont les parents \u00e9taient des Juifs communistes am\u00e9ricains, et d\u2019une m\u00e8re protestante. Apr\u00e8s une scolarit\u00e9 dans des \u00e9coles progressistes d\u2019\u00e9lite, il \u00e9tudie la science informatique \u00e0 l\u2019universit\u00e9 Brown puis \u00e0 Berkeley avant de rejoindre une entreprise num\u00e9rique. En 2002, il cr\u00e9e une plateforme de serveurs informatiques d\u00e9centralis\u00e9e Urbit<\/em> puis en 2013 une entreprise visant \u00e0 la d\u00e9velopper, Tl\u00f6n Corp, avec des investissements de Peter Thiel.<\/p>\n\n\n\n Curtis Yarvin commence \u00e0 publier sur des blogs sous le pseudonyme de Mencius Moldbug <\/span>1<\/sup><\/a><\/span><\/span>, dont notamment un manifeste intitul\u00e9 \u00ab The Mencius vision \u00bb en 2007 sur le blog 2 Blowhards<\/em>, o\u00f9 il d\u00e9fend le \u00ab formalisme \u00bb en se r\u00e9clamant d\u2019auteurs comme Jouvenel, Kuehnelt-Leddihn, Leoni, Burnham et Nock <\/span>2<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Il lance \u00e0 cette p\u00e9riode son propre blog, Unqualified Reservations<\/em>, sur lequel il d\u00e9veloppe sa th\u00e9orie \u00ab n\u00e9o-r\u00e9actionnaire \u00bb qu\u2019il d\u00e9finit comme \u00ab l\u2019union de deux forces : l\u2019esprit d\u2019ing\u00e9nierie moderne, et le grand h\u00e9ritage historique de la pens\u00e9e pr\u00e9-d\u00e9mocratique de l\u2019Antiquit\u00e9, de la p\u00e9riode classique et de l\u2019\u00e8re victorienne \u00bb <\/span>3<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Il cr\u00e9e enfin une page Substack<\/em> appel\u00e9e Grey Mirror<\/em> en 2020, o\u00f9 il d\u00e9veloppe l\u2019id\u00e9e que la d\u00e9mocratie serait une exp\u00e9rience politique rat\u00e9e \u00e0 laquelle il faut mettre fin.<\/p>\n\n\n\n Il fait partie des premiers commentateurs identifi\u00e9s comme n\u00e9o-r\u00e9actionnaires, avant que le terme ne se popularise et soit revendiqu\u00e9 par d\u2019autres blogueurs, \u00e0 l\u2019instar d\u2019Anomaly UK, du professeur britannique Nick Land, inventeur du concept de \u00ab Lumi\u00e8res sombres \u00bb (Dark Enlightenment<\/em>) et de Michael Anissimov. Cette galaxie est influenc\u00e9e par des penseurs r\u00e9actionnaires comme Hans-Hermann Hoppe, professeur \u00e9m\u00e9rite \u00e0 l\u2019universit\u00e9 du Nevada et auteur du livre Democracy : The God That Failed<\/em> en 2001, qui a profond\u00e9ment influenc\u00e9 Curtis <\/span>4<\/sup><\/a><\/span><\/span> ; ou Steve Sailer, \u00e9ditorialiste associ\u00e9 au supr\u00e9macisme blanc. Ils se r\u00e9f\u00e8rent \u00e9galement \u00e0 des penseurs plus classiques, comme Thomas Carlyle (1795-1891), historien \u00e9cossais conservateur, connu entre autres pour son histoire de la R\u00e9volution fran\u00e7aise et Julius Evola (1898-1974), essayiste italien traditionaliste, aristocratique et imp\u00e9rialiste, favorable au fascisme italien et par la suite source d\u2019inspiration des mouvements n\u00e9o-fascistes d\u2019apr\u00e8s-guerre. <\/p>\n\n\n\n L\u2019imaginaire de Curtis Yarvin est un \u00e9tonnant m\u00e9lange de r\u00e9f\u00e9rences classiques et de culture geek<\/em> contemporaine. S\u2019inspirant de Matrix<\/em>, il invite \u2014 dans un article intitul\u00e9 \u00ab Un argumentaire contre la d\u00e9mocratie : dix pilules rouges \u00bb \u2014 ses lecteurs \u00e0 prendre une \u00ab pilule rouge \u00bb en r\u00e9f\u00e9rence \u00e0 celle qui, dans le film, permet de prendre conscience des illusions impos\u00e9es par la Matrice aux \u00eatres humains, et, dans le monde de Curtis Yarvin, permettrait de dissiper un certain nombre d\u2019id\u00e9es re\u00e7ues sur les bienfaits de la d\u00e9mocratie. Cette utilisation m\u00e9taphorique du film Matrix <\/em>a \u00e9t\u00e9 \u00e9galement reprise par Elon Musk en mai 2020. <\/p>\n\n\n\n Yarvin se surnomme \u00e9galement le \u00ab seigneur sith \u00bb de la pens\u00e9e n\u00e9o-r\u00e9actionnaire, sugg\u00e9rant ainsi qu\u2019il \u0153uvre \u00e0 l\u2019\u00e9dification d\u2019un Empire, de la m\u00eame mani\u00e8re que le personnage de fiction Palpatine instaure un Empire galactique \u00e0 la suite d\u2019un coup d\u2019\u00c9tat dans la s\u00e9rie de films Star Wars<\/em>, gr\u00e2ce \u00e0 sa ma\u00eetrise du c\u00f4t\u00e9 obscur de la Force. <\/p>\n\n\n\n Cette critique radicale de la d\u00e9mocratie et l\u2019invitation \u00e0 cr\u00e9er un empire-startup r\u00e9actionnaire, issue des rangs d\u2019ing\u00e9nieurs informaticiens de la Silicon Valley pourrait pr\u00eater \u00e0 sourire si elle n\u2019avait pas une influence directe et grandissante sur l\u2019administration Trump qui est depuis hier aux commandes de la premi\u00e8re puissance mondiale<\/a>. <\/p>\n\n\n\n En effet, non seulement Curtis Yarvin est un gourou de la techright<\/em> et de l\u2019altright<\/em> \u2014 le site Breitbart<\/em> le place en haut de ses influences intellectuelles <\/span>5<\/sup><\/a><\/span><\/span> \u2014 mais il est \u00e9galement influent aupr\u00e8s de figures de l\u2019administration Trump, dont J. D. Vance qui le cite r\u00e9guli\u00e8rement, comme dans le podcast conservateur Jack Murphy Live<\/em>, o\u00f9 il mentionne Curtis Yarvin comme une source pour justifier la n\u00e9cessit\u00e9 de supprimer un grand nombre de fonctionnaires dans l\u2019hypoth\u00e8se d\u2019une seconde administration Trump <\/span>6<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Cette influence se construit par l\u2019interm\u00e9diaire de Peter Thiel<\/a>, qui le consid\u00e8re comme un \u00ab historien int\u00e9ressant \u00bb, et qui l\u2019a fait participer aux c\u00f4t\u00e9s de J. D. Vance aux conf\u00e9rences du mouvement national-conservateur de Yoram Hazony \u2014 \u00e9galement architecte des rapprochements entre droites identitaires europ\u00e9ennes<\/a>. <\/p>\n\n\n\n Les fantasmes de Curtis Yarvin ne sont donc plus les \u00e9lucubrations inoffensives d\u2019ing\u00e9nieurs passionn\u00e9s de science-fiction et d\u2019histoire m\u00e9di\u00e9vale : ils constituent l\u2019imaginaire politique d\u2019un nombre croissant de membres et de soutiens majeurs de l\u2019administration Trump. Pour l\u2019historien David Bell, les grands milliardaires am\u00e9ricains se nourrissent de ces pens\u00e9es n\u00e9o-r\u00e9actionnaires<\/a> et \u00ab derri\u00e8re leur promotion du libertarianisme, de la conqu\u00eate spatiale ou de \u00ab l\u2019antiwokisme \u00bb, ont un objectif fondamental : renverser la d\u00e9mocratie am\u00e9ricaine \u00bb. <\/p>\n\n\n\n L\u2019entretien avec le New York Times<\/em> que nous traduisons a \u00e9t\u00e9 r\u00e9alis\u00e9 quelques jours avant l\u2019investiture de Donald Trump. Passant en revue les diff\u00e9rentes \u00ab th\u00e8ses \u00bb de Yarvin, il est un point d\u2019entr\u00e9e clef vers son univers, ses r\u00e9f\u00e9rences et les principales id\u00e9es qu\u2019il d\u00e9fend. Il met \u00e9galement en sc\u00e8ne la mani\u00e8re dont Yarvin pr\u00e9sente ses arguments et r\u00e9pond aux critiques, en utilisant des d\u00e9tours et des digressions mais sans d\u00e9vier de son but ultime \u2014 porter l’ombre au c\u0153ur du pouvoir.<\/p>\n\n\n\n Permettez-moi de r\u00e9pondre \u00e0 cette question d\u2019une mani\u00e8re relativement accessible aux lecteurs d’un journal mainstream<\/em>. Vous avez probablement entendu parler d’un homme nomm\u00e9 Franklin Delano Roosevelt (FDR). Je cite parfois les dix derniers paragraphes du premier discours inaugural de FDR, dans lequel FDR dit essentiellement au peuple am\u00e9ricain : \u00ab donnez-moi le pouvoir absolu ou je le prendrai de toute fa\u00e7on \u00bb.<\/p>\n\n\n\n FDR a-t-il vraiment pris ce niveau de pouvoir ? Oui, il l’a fait. J’ai envoy\u00e9 ce texte \u00e0 certaines personnes que je connais et qui sont impliqu\u00e9es dans la transition vers la nouvelle administration. <\/p>\n\n\n\n Dans son discours inaugural du 4 mars 1933, Franklin Delano Roosevelt demande en effet que le Congr\u00e8s soit pr\u00eat \u00e0 lui confier des pouvoirs exceptionnels, compte tenu de la crise dans laquelle se trouve le pays et le monde. Il dit pr\u00e9cis\u00e9ment : \u00ab Mais au cas o\u00f9 le Congr\u00e8s ne parviendrait pas \u00e0 adopter l’une de ces deux solutions, et au cas o\u00f9 l’urgence nationale serait toujours critique, je ne me soustrairai pas \u00e0 la t\u00e2che \u00e9vidente qui m’attendra alors. Je demanderai au Congr\u00e8s le seul instrument restant pour faire face \u00e0 la crise : un pouvoir ex\u00e9cutif \u00e9tendu pour mener une guerre contre l’urgence, aussi grand que celui qui me serait accord\u00e9 si nous \u00e9tions effectivement envahis par un ennemi \u00e9tranger \u00bb <\/span>7<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Curtis Yarvin se r\u00e9approprie, tout au long de ses publications en g\u00e9n\u00e9ral et de cet entretien en particulier, la figure de Franklin Delano Roosevelt comme outil de justification de l\u2019autoritarisme \u2014 en s\u2019\u00e9loignant parfois assez largement de la v\u00e9racit\u00e9 historique.<\/p>\n\n\n\n Marc Andreessen. Je lui ai envoy\u00e9 un article qui contient un extrait du journal de Harold Ickes, le secr\u00e9taire \u00e0 l’int\u00e9rieur de FDR. Cet extrait de journal d\u00e9crit une r\u00e9union du cabinet en 1933. Au cours de cette r\u00e9union, Frances Perkins, secr\u00e9taire au travail, pr\u00e9sente une liste de projets. FDR prend personnellement la liste, examine les projets et d\u00e9clare que tout est \u00ab merdique \u00bb, humiliant ainsi Frances Perkins. Cela donne l’image d’un FDR agissant comme un chef d’entreprise.<\/p>\n\n\n\n FDR \u00e9tait-il un dictateur, et que signifie \u00eatre un dictateur ? Que signifie vraiment ce terme p\u00e9joratif ? Je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est que les Am\u00e9ricains de tous bords \u2014 d\u00e9mocrates, r\u00e9publicains et tous ceux qui se situent entre les deux, \u00e0 l’exception de quelques r\u00e9publicains de droite \u2014 v\u00e9n\u00e8rent fondamentalement FDR, or FDR a g\u00e9r\u00e9 le New Deal comme une startup.<\/p>\n\n\n\n Marc Andreessen, fondateur du premier navigateur web en 1993, Mosaic, milliardaire et investisseur, auteur en 2023 d\u2019un \u00ab Manifeste techno-optimiste \u00bb, est une figure centrale de la tech right<\/em> am\u00e9ricaine. Il explique, dans un entretien avec Bari Weiss de The Free Press <\/em>que \u00ab les entreprises [d\u2019IA] sont n\u00e9es woke<\/em>. Elles sont n\u00e9es comme des machines de censure [\u2026] \u00bb <\/span>8<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Lors d\u2019une interview avec le podcasteur Joe Rogan en novembre 2024, il explique \u00e9galement que \u00ab sous la pr\u00e9sidence de Joe Biden, la technologie est devenue mal\u00e9fique \u00bb. Il a logiquement apport\u00e9 son soutien \u00e0 Donald Trump en 2024, alors qu\u2019il avait pourtant soutenu Barack Obama en 2008. <\/p>\n\n\n\n Si vous regardez l’administration de George Washington, vous voyez que ce qui est mis en place ressemble \u00e0 une start-up. Cela ressemble tellement \u00e0 une startup que ce type, Alexander Hamilton, qui est clairement un techbro<\/em>, dirige l’ensemble du gouvernement. Il est en quelque sorte le Larry Page de cette r\u00e9publique. <\/p>\n\n\n\n Pour faire court, qu’on appelle Georges Washington, Abraham Lincoln et FDR des \u00ab dictateurs \u00bb ou non, ce qu’ils \u00e9taient, c’\u00e9tait des PDG nationaux. Ils \u00e9taient des PDG nationaux et dirigeaient le gouvernement comme une entreprise, de fa\u00e7on tr\u00e8s verticale.<\/p>\n\n\n\n Ce n’est pas que la d\u00e9mocratie soit mauvaise. Simplement, elle est tr\u00e8s faible. Le fait qu’elle soit tr\u00e8s faible se voit au fait que des politiques tr\u00e8s impopulaires comme l’immigration de masse persistent malgr\u00e9 de fortes majorit\u00e9s qui s’y opposent. <\/p>\n\n\n\n Quand vous dites \u00e0 des lecteurs du New York Times<\/em> que la d\u00e9mocratie est mauvaise, ils sont un peu choqu\u00e9s. Mais lorsque vous leur dites \u00ab le populisme est mauvais \u00bb, ils sont d’accord. Si vous voulez dire que la d\u00e9mocratie n’est pas un bon syst\u00e8me de gouvernement, il suffit de faire le lien avec le populisme. Dites que les politiques et les lois devraient \u00eatre d\u00e9finies par des experts avis\u00e9s, des juges, des avocats et des professeurs. Vous vous rendrez alors compte que ce que vous soutenez en r\u00e9alit\u00e9, c’est l’aristocratie plut\u00f4t que la d\u00e9mocratie.<\/p>\n\n\n\n Curtis Yarvin dessine les contours d\u2019un \u00ab gouvernement des \u00e9clair\u00e9s \u00bb, o\u00f9 les d\u00e9cisions ne seraient pas prises par la majorit\u00e9, mais par ceux qui passent pour les plus qualifi\u00e9s. Il est en cela proche de Richard Hanania, avec qui il d\u00e9battait en f\u00e9vrier 2024, et qui est lui-m\u00eame proche de Peter Thiel. Richard Hanania, auteur de Les Origines du wokisme<\/em>, promu par l\u2019Institut Claremont en Californie, d\u00e9fend la \u00ab tech right \u00bb qu\u2019il d\u00e9finit comme \u00ab un mouvement qui croit en l\u2019exploitation de la technologie et de l\u2019innovation pour rendre le monde meilleur, s\u2019opposant \u00e0 ce que l\u2019humanit\u00e9 soit frein\u00e9e par un \u00e9galitarisme d\u00e9plac\u00e9 ou une tradition irr\u00e9fl\u00e9chie \u00bb.<\/p>\n\n\n\n L\u2019acc\u00e9l\u00e9ration r\u00e9actionnaire<\/a> th\u00e9oris\u00e9e par Lorenzo Castellani dans nos pages trouve une formule politique : non plus l\u2019influence des g\u00e9ants de la tech<\/em> sur le gouvernement, mais l\u2019exercice direct du pouvoir par les chefs d\u2019entreprises du num\u00e9rique.<\/p>\n\n\n\n Ma r\u00e9ponse honn\u00eate serait que ce n’est pas encore le moment. Vous savez, personne ne devrait lire cet article, paniquer, et penser que je suis sur le point de devenir le dictateur secret de l’Am\u00e9rique. Je ne pense m\u00eame pas aller \u00e0 l’inauguration.<\/p>\n\n\n\n Curtis Yarvin a d\u00e9velopp\u00e9 et diffus\u00e9 ses th\u00e9ories sur le podcast de Michael Anton, qui va devenir le nouveau directeur du policy planning<\/em> \u2014 l\u2019\u00e9quivalent d\u2019un think tank interne au Secr\u00e9tariat d\u2019\u00c9tat am\u00e9ricain \u2014 poste occup\u00e9 par le pass\u00e9 par Georges Kennan, th\u00e9oricien du containment<\/em> et par Jake Sullivan<\/a> de 2011 \u00e0 2013. Michael Anton exerce \u00e9galement une influence sur les droites radicales \u2014 il a \u00e9t\u00e9 l\u2019enseignant de Sarah Knafo au Claremont Institute <\/span>9<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n Non, pas du tout. Je suis un outsider<\/em>, un intellectuel, et mes id\u00e9es circulent principalement par l’interm\u00e9diaire de collaborateurs et de jeunes individus qui s’engagent activement en ligne et nagent dans cette sorte de soupe, qui existe essentiellement sur Internet. Pour distinguer mes id\u00e9es plus radicales des \u00e9volutions actuelles \u00e0 Washington, je dirais qu’il y a un effort \u00e9vident pour r\u00e9tablir la Maison Blanche en tant qu’organe d’autorit\u00e9 qui gouverne la branche ex\u00e9cutive.<\/p>\n\n\n\n Le probl\u00e8me, c’est que si vous allez \u00e0 Washington et que vous dites \u00e0 toute personne professionnellement impliqu\u00e9e dans les affaires de Washington que cela fonctionnerait tr\u00e8s bien, voire mieux, sans Maison Blanche du tout, elle vous r\u00e9pondra probablement que le pouvoir ex\u00e9cutif travaille pour le Congr\u00e8s. Par cons\u00e9quent, il y a des \u00e9lecteurs qui croient avoir vot\u00e9 pour une r\u00e9volution. Ils ont \u00e9lu Donald Trump, peut-\u00eatre le PDG le plus comp\u00e9tent du monde…<\/p>\n\n\n\n Il peut bloquer des choses. Il peut perturber. Il peut cr\u00e9er le chaos et la turbulence ou autre chose. Mais il ne peut pas vraiment changer ce qui est. <\/p>\n\n\n\nSi j’ai bien compris, l’un de vos principaux arguments est que l’Am\u00e9rique devrait surmonter sa \u00ab phobie des dictateurs \u00bb et que la d\u00e9mocratie am\u00e9ricaine est un leurre. Il faudrait d\u00e9passer la d\u00e9mocratie et avoir un dirigeant monarque, PDG ou dictateur. Pourquoi la d\u00e9mocratie est-elle si mauvaise ? Pourquoi un dictateur r\u00e9soudrait-il le probl\u00e8me ?<\/h3>\n\n\n\n
Nommez-en un.<\/h3>\n\n\n\n
Votre argument, au fond, est que nous aurions d\u00e9j\u00e0 eu l\u2019\u00e9quivalent d\u2019un dictateur dans l’histoire am\u00e9ricaine, et qu’il n’y aurait donc pas lieu d’en avoir peur aujourd’hui.<\/h3>\n\n\n\n
Pourquoi la d\u00e9mocratie est-elle si mauvaise ?<\/h3>\n\n\n\n
Vos id\u00e9es ont \u00e9t\u00e9 reprises par des personnes occupant des positions de pouvoir au sein du parti r\u00e9publicain. Je pense qu’on a probablement exag\u00e9r\u00e9 la mesure dans laquelle vous et J. D. Vance \u00eates amis, mais il vous a nomm\u00e9 publiquement et a fait r\u00e9f\u00e9rence \u00e0 des \u00ab id\u00e9es de d\u00e9-wokification \u00bb qui sont tr\u00e8s similaires aux v\u00f4tres. Vous avez particip\u00e9 au podcast de Michael Anton, qui a \u00e9t\u00e9 choisi par Trump pour occuper un poste \u00e9lev\u00e9 au d\u00e9partement d’\u00c9tat, et vous avez discut\u00e9 avec lui de la mani\u00e8re d’installer un C\u00e9sar am\u00e9ricain<\/a>. Peter Thiel, un important donateur r\u00e9publicain<\/a>, a d\u00e9clar\u00e9 que vous \u00e9tiez un penseur int\u00e9ressant. Si des personnes occupant des postes de pouvoir vous disaient qu’elles veulent ce que vous pr\u00e9conisez, quelles mesures prendraient-elles pour transformer la d\u00e9mocratie am\u00e9ricaine en une sorte de monarchie ?<\/h3>\n\n\n\n
Avez-vous \u00e9t\u00e9 invit\u00e9 ? <\/h3>\n\n\n\n
Votre argument est qu’il ne peut pas, de la mani\u00e8re dont le syst\u00e8me est \u00e9tabli, changer les choses.<\/h3>\n\n\n\n