{"id":242072,"date":"2024-08-12T07:00:00","date_gmt":"2024-08-12T05:00:00","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=242072"},"modified":"2024-08-11T19:31:21","modified_gmt":"2024-08-11T17:31:21","slug":"florence-avant-instagram-grand-tour-avec-vanni-santoni","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2024\/08\/12\/florence-avant-instagram-grand-tour-avec-vanni-santoni\/","title":{"rendered":"Florence avant Instagram, Grand Tour avec Vanni Santoni"},"content":{"rendered":"\n

Nous parvenons \u00e0 intercepter Vanni Santoni \u2014 le prolifique \u00e9crivain globe-trotter \u2014 alors qu’il revient d’une pr\u00e9sentation \u00e0 Udine. Il est en tourn\u00e9e pour son dernier livre, <\/em>Dilaga ovunque, publi\u00e9 par Laterza et finaliste du prix Campiello 2024. Nous nous retrouvons dans un bar bruyant de la Via Gioberti, \u00e0 Florence, pr\u00e8s de la Piazza Beccaria.<\/em><\/p>\n\n\n\n

Cela tombe bien : c\u2019est de Florence qu\u2019on va parler.<\/em><\/p>\n\n\n\n

Ce petit local n\u2019est pas du Panth\u00e9on personnel de Santoni \u2014 un \u00e9crivain qui aime travailler dans les caf\u00e9s nocturnes et les biblioth\u00e8ques universitaires \u2014 mais il nous sert de solution de repli pour \u00e9viter que la chaleur \u00e9touffante de Florence ne nous accable.<\/em><\/p>\n\n\n\n

Vous \u00eates originaire de Montevarchi, dans le Valdarno. Comment arrivez-vous \u00e0 Florence ?<\/h3>\n\n\n\n

Pour \u00eatre pr\u00e9cis, j’avais v\u00e9cu \u00e0 Florence de z\u00e9ro \u00e0 trois ans, Via Masaccio, une rue o\u00f9 Cristina Campo <\/span>1<\/sup><\/a><\/span><\/span> a v\u00e9cu pendant un certain temps. J’aime \u00e0 penser que peut-\u00eatre, enfant, lorsque ma m\u00e8re me portait dans ma poussette jusqu’\u00e0 la Piazza Savonarola, j’ai re\u00e7u la caresse posthume de Cristina Campo \u2014 qui est tout aussi chr\u00e9tienne mais certainement pr\u00e9f\u00e9rable \u00e0 celle du pape. Mes parents se sont ensuite install\u00e9s dans le Valdarno, o\u00f9 ils avaient d\u00e9j\u00e0 des racines : le Valdarno du c\u00f4t\u00e9 de mon p\u00e8re, le Valdambra du c\u00f4t\u00e9 de ma m\u00e8re \u2014 la r\u00e9gion qui se situe entre le Valdarno et Sienne. En r\u00e9alit\u00e9, je crois que le fait d’avoir grandi \u00e0 Montevarchi, une petite ville de 25 000 habitants qui \u00e9tait d\u00e9j\u00e0 importante sur le plan industriel au d\u00e9but du XXe si\u00e8cle et qui a ensuite irr\u00e9m\u00e9diablement d\u00e9clin\u00e9, vous donne une autre perspective sur Florence. Une perspective que j’ai essay\u00e9 de rendre dans le livre que j’ai \u00e9crit sur la ville, Se fossi fuoco arderei Firenze<\/em>. En g\u00e9n\u00e9ral, le Florentin n\u00e9 et \u00e9lev\u00e9 \u00e0 Florence \u2014 surtout dans le quartier historique \u2014 vit dans un syndrome hallucinatoire bizarre qui lui fait croire que Florence est encore le centre du monde. Pour le Florentin d’aujourd’hui \u2014 \u00e0 un niveau plus ou moins inconscient \u2014 Florence est toujours ce qu’elle \u00e9tait au XVe si\u00e8cle.<\/p>\n\n\n\n

La Toscane est en quelque sorte une fractale de l\u2019esprit de clocher.<\/p>Vanni Santoni<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Cette croyance n’est pas totalement d\u00e9nu\u00e9e de fondement, car la gloire de Florence est de fait tr\u00e8s ancienne et p\u00e9renne. On sait par exemple, car les recherches l\u2019ont montr\u00e9, que les vingt familles les plus riches de Florence aujourd’hui sont les m\u00eames qu’il y a 600 ans. Il n’est donc pas totalement faux de dire que Florence est rest\u00e9e inchang\u00e9e ; il est simplement dommage que le reste du monde ait chang\u00e9. Car le monde n’est plus exactement le m\u00eame qu\u2019il y a 600 ans. Pr\u00e9cisons toutefois que le syndrome en question touche tous les habitants des villes qui, \u00e0 un moment de leur histoire, ont \u00e9t\u00e9 au centre du monde : les Parisiens sont convaincus qu’aujourd’hui encore, Paris est le centre du monde \u2014 pas seulement de la France… Les New-Yorkais sont convaincus que New York est le centre du monde \u2014 et ils ont d\u00e9j\u00e0 quelques raisons suppl\u00e9mentaires de le croire. Mais lorsque l\u2019axe du monde aura chang\u00e9 de direction, le New-Yorkais d\u2019aujourd\u2019hui sera un Florentin d\u2019hier… <\/p>\n\n\n\n

Grandir dans ce que l’on appelle le contado<\/em>, la campagne, <\/em>permet une observation plus critique, plus d\u00e9tach\u00e9e, plus d\u00e9senchant\u00e9e de ce qu’est Florence. D’autant plus que le Valdarno est situ\u00e9 entre Florence, Sienne et Arezzo, m\u00eame si ses habitants regardent plut\u00f4t en direction de Florence en raison de la liaison ferroviaire. Mais le fait d’\u00eatre entre trois p\u00f4les toscans diff\u00e9rents nous donne aussi une plus grande possibilit\u00e9 de lire la Toscane sans tomber dans un esprit de clocher. Car la Toscane est en quelque sorte une fractale de l\u2019esprit de clocher : Florence d\u00e9teste Pise ou Sienne, et Pise d\u00e9teste Livourne, etc. mais si vous allez dans le Valdarno, il y a la rivalit\u00e9 entre Montevarchi et San Giovanni. Si vous allez \u00e0 Montevarchi, il y a la rivalit\u00e9 entre la Ginestra et le Pestello. Et si vous allez dans le Pestello, il y a la rivalit\u00e9 entre le  Pestello alto<\/em> et le Pestello basso<\/em>. On peut donc supposer qu’il existe \u00e9galement une rivalit\u00e9 entre les diff\u00e9rentes rues du Pestello basso<\/em>. D’ailleurs, en y r\u00e9fl\u00e9chissant, j’ai toujours regard\u00e9 avec m\u00e9fiance ceux de la Via Scrivia…<\/p>\n\n\n\n

Vous avez pris des positions publiques sur Florence ces derni\u00e8res ann\u00e9es. La ville s’est-elle d\u00e9t\u00e9rior\u00e9e depuis que vous avez commenc\u00e9 \u00e0 la fr\u00e9quenter ?<\/h3>\n\n\n\n

Commen\u00e7ons par une pr\u00e9misse. Nous sommes tous deux de grands admirateurs de Giovanni Papini <\/span>2<\/sup><\/a><\/span><\/span>. \u00c0 plusieurs reprises, lorsque nous avons parl\u00e9 de la situation de cette ville, nous avons \u00e9voqu\u00e9 un c\u00e9l\u00e8bre texte de Papini qui semble avoir \u00e9t\u00e9 hier : il d\u00e9crit une ville qui vit de l’ext\u00e9rieur et qui lutte pour redevenir le berceau du g\u00e9nie. De toute \u00e9vidence, certaines de nos impressions sur la ville sont vraies depuis son d\u00e9clin apr\u00e8s la Renaissance. C’est pourquoi j’essaie toujours d’\u00eatre prudent lorsqu\u2019on parle de \u00ab d\u00e9t\u00e9rioration \u00bb. Dans mes livres, je traite \u00e9galement de sous-cultures et de contre-cultures, dont certaines sont tr\u00e8s diff\u00e9rentes les unes des autres \u2014 les rave party<\/em> dans Muro di casse<\/em>, les jeux de r\u00f4le dans La stanza profonda <\/em>ou les graffitis dans Dilaga ovunque<\/em>. Or dans toute sous-culture, qu’elle ait ou non un niveau contre-culturel ou politique, vous trouverez des gens pour vous dire que \u00ab ce n’est plus ce que c’\u00e9tait \u00bb. Ceux-l\u00e0 sont des nostalgiques d’un \u00e2ge d’or qu\u2019ils n\u2019ont en fait, souvent, jamais v\u00e9cu.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

Cette tendance est particuli\u00e8rement pr\u00e9sente dans la vie florentine : on regrette l’\u00e9poque o\u00f9 Batistuta jouait \u00e0 la Fiorentina, on regrette la Florence des ann\u00e9es 1980, capitale du rock. Mais ceux qui vivaient dans la capitale du rock regrettaient une Florence ind\u00e9termin\u00e9e des ann\u00e9es 70, une Florence psych\u00e9d\u00e9lique dans laquelle, dit-on, \u00e0 Space Electronic on passait la musique de Vanilla Fudge pendant qu\u2019on assistait \u00e0 des happenings<\/em> visionnaires inimaginables\u2026 Petit \u00e0 petit, on remonte toujours sur le m\u00eame mode, jusqu\u2019au courtisan de la Renaissance qui, soyons-en s\u00fbrs, disait sans doute que tout \u00e9tait mieux au Moyen-\u00c2ge.<\/p>\n\n\n\n

Il faut donc faire attention \u00e0 ne pas tomber dans cet \u00e9cueil car derri\u00e8re ce syndrome du \u00ab ce n\u2019est plus ce que c\u2019\u00e9tait \u00bb se cachent parfois des gens nostalgiques de leurs vingt ans et donc une incapacit\u00e9 \u00e0 voir le contexte d’une mani\u00e8re qui ne soit pas conditionn\u00e9e par leurs propres filtres personnels. Malgr\u00e9 les contraintes de temps que l’\u00e9criture m’impose, j’ai pour ma part toujours continu\u00e9 \u00e0 fr\u00e9quenter la sc\u00e8ne rave<\/em>, et je n’ai pas eu l’impression que le teknival<\/em> de 2021 ait \u00e9t\u00e9 tellement moins bien que celui de 2007 ou de 1998. Bien s\u00fbr, si j’y vais \u00e0 45 ans, mon attitude vis-\u00e0-vis d’une rave <\/em>sera diff\u00e9rente de celle que j’aurais pu avoir \u00e0 20 ans.<\/p>\n\n\n\n

Il est clair que l’exp\u00e9rience d’\u00e9tudier \u00e0 Florence est indissociable du fait d’\u00eatre au milieu des pierres de Florence.<\/p>Vanni Santoni<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Cela \u00e9tant dit, il ne faut pas se voiler la face : dans la p\u00e9riode r\u00e9cente, \u00e0 certains \u00e9gards, Florence a bel et bien chang\u00e9.<\/p>\n\n\n\n

Le plus difficile est de trouver les causes pr\u00e9cises ou du moins les n\u0153uds de causalit\u00e9 de ces changements. Car il s’agit tr\u00e8s souvent de processus historiques tr\u00e8s distribu\u00e9s et assez al\u00e9atoires : un jour, vous vous r\u00e9veillez, vous sortez de chez vous et, au lieu d’un kiosque \u00e0 journaux, il y a une bisteccheria<\/em> <\/span>3<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Il s’est pass\u00e9 quelque chose, certes, mais il n’y a pas de protocole secret pour remplacer tous les kiosques \u00e0 journaux par des bisteccherie<\/em>. Tout cela s\u2019inscrit dans un changement syst\u00e9mique beaucoup plus important. Si l\u2019on voulait identifier un \u00e9v\u00e9nement sinon d\u00e9clencheur du moins paradigmatique, il pourrait s’agir de cette erreur historique, \u00e9norme selon moi : la volont\u00e9 de d\u00e9placer certaines des plus importantes facult\u00e9s universitaires florentines vers le quartier p\u00e9riph\u00e9rique de Novoli.<\/p>\n\n\n\n

J’ai \u00e9tudi\u00e9 les sciences politiques, j’ai donc suivi tout mon cursus universitaire Via Laura, dans le centre historique. J\u2019ai ensuite compl\u00e9t\u00e9 ma th\u00e8se au campus de Novoli ; j’y allais le moins possible, mais j’\u00e9tais parfois \u00e0 Via delle Pandette. On pourrait certes arguer que les sciences sociales florentines m\u00e9ritaient un espace d\u00e9di\u00e9, plus pratique, et donc en banlieue. Mais pendant que l’universit\u00e9 florentine partait pour Novoli, les universit\u00e9s am\u00e9ricaines, qui n’ont jamais cess\u00e9 d’investir dans la ville, achetaient ou louaient des b\u00e2timents historiques dans le centre.<\/p>\n\n\n\n

Pourquoi ?<\/h3>\n\n\n\n

C\u2019est \u00e9vident : l’exp\u00e9rience \u00e9tudiante \u00e0 Florence est indissociable du fait de se trouver au milieu des pav\u00e9s de la ville.<\/p>\n\n\n\n

La logique du campus universitaire extra-urbain d\u00e9coule d’une approche am\u00e9ricaine qui a ses raisons sociologiques et urbanistiques propres. Les villes am\u00e9ricaines sont construites diff\u00e9remment des villes europ\u00e9ennes et le campus est n\u00e9 dans le cadre de processus historiques tr\u00e8s pr\u00e9cis et tr\u00e8s diff\u00e9rents des n\u00f4tres. Nos universit\u00e9s, qui sont parmi les plus anciennes du monde, faisaient quant \u00e0 elles \u00e9videmment partie du tissu historique de la ville : les d\u00e9placer en banlieue a \u00e9t\u00e9 une grave erreur. Mais ce n’est pas le seul probl\u00e8me, car si c’\u00e9tait le cas, ce ne serait pr\u00e9judiciable que pour les \u00e9tudiants et les enseignants. Non, le probl\u00e8me concerne aussi la valeur de la ville : si une ville se garde ses universit\u00e9s dans son centre historique, elle renvoie un certain type d’image qu’elle n’exprime \u00e9videmment pas si elle ne se pr\u00e9sente qu’avec des bisteccherie<\/em> ou des schiacciaterie<\/em> <\/span>4<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Aujourd’hui, tout le monde se plaint du surtourisme, mais il est \u00e9vident que la pr\u00e9sence des \u00e9tudiants, des facult\u00e9s et donc des services aux \u00e9tudiants \u2014 librairies, caf\u00e9s, bars, logements lou\u00e9s pour les \u00e9tudiants, peut-\u00eatre dans des b\u00e2timents anciens \u2014 \u00ab prot\u00e9geait \u00bb le centre historique en garantissant au moins un certain degr\u00e9 de r\u00e9alit\u00e9<\/em>.<\/p>\n\n\n\n

D’un point de vue cyniquement \u00e9conomique, le fait de les avoir d\u00e9plac\u00e9s a produit un effet induit \u00e9vident : d’une part le centre a \u00e9t\u00e9 r\u00e9serv\u00e9 aux portefeuilles touristiques, et d’autre part la valeur des appartements \u00e0 Novoli, Isolotto ou dans d’autres banlieues a augment\u00e9. Je ne suis pas na\u00eff au point de ne pas voir qu’il y a des raisons qui apportent un gain \u00e0 court terme, mais je pense qu’elles conduisent aussi \u00e0 un appauvrissement culturel \u00e0 long terme. Pour moi, c’est l\u00e0 qu\u2019est le probl\u00e8me.<\/p>\n\n\n\n

Aujourd’hui, tout le monde se plaint du surtourisme, mais il est \u00e9vident que la pr\u00e9sence des \u00e9tudiants \u00ab prot\u00e9geait \u00bb le centre historique en garantissant au moins un certain degr\u00e9 de r\u00e9alit\u00e9<\/em>.<\/p>Vanni Santoni<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Lorsque je suis arriv\u00e9 en 2002-2003 pour m\u2019installer d\u00e9finitivement \u00e0 Florence, j’ai trouv\u00e9 une ville extr\u00eamement vivante au plan culturel. Un petit \u2014 mais tr\u00e8s important\u00a0 \u2014 changement de g\u00e9n\u00e9ration s\u2019\u00e9tait produit au sein de la mouvance militante sociale et politique. La nouvelle g\u00e9n\u00e9ration se d\u00e9tachait des anciens espaces et des anciennes logiques, s’orientant davantage vers des dimensions purement culturelles. Un espace comme l\u2019Elettro+ <\/span>5<\/sup><\/a><\/span><\/span> \u00e9tait un hub, un v\u00e9ritable acc\u00e9l\u00e9rateur culturel \u2014 contrairement aux \u00ab acc\u00e9l\u00e9rateurs \u00bb ou aux \u00ab incubateurs \u00bb de start-ups qu’on essaie de nous vendre aujourd’hui. Dans cette Florence-l\u00e0, je trouvais des espaces int\u00e9ressants. Je trouvais des revues, je commen\u00e7ais \u00e0 \u00e9crire, je participais \u00e0 l’organisation d’\u00e9v\u00e9nements de musique \u00e9lectronique underground<\/em>, et il y avait tellement d’effervescence qu’\u00e0 un moment donn\u00e9, avec quelques amis, nous avons m\u00eame cr\u00e9\u00e9 une agence de publicit\u00e9 sociale. Entre-temps, je travaillais \u00e0 mon compte dans le monde de l’\u00e9ducation, j’avais une auto-entreprise. Dans ce bouillonnement d\u2019activit\u00e9s, Florence \u00e9tait une ville tr\u00e8s r\u00e9ceptive.\u00a0<\/p>\n\n\n\n

Cette vitalit\u00e9 de la Florence des ann\u00e9es 2002-2003 au plan culturel a \u00e9t\u00e9 enti\u00e8rement, ou presque, le r\u00e9sultat de l’autogestion ou le fruit d’initiatives personnelles. Elle n’a jamais \u00e9t\u00e9 l\u2019effet d’une quelconque volont\u00e9 de l’administration. C\u2019est m\u00eame le contraire. Lorsque, en l’espace de quelques ann\u00e9es, a commenc\u00e9 \u00e0 se s\u00e9dimenter ce que l’on a appel\u00e9 plus tard la \u00ab nouvelle sc\u00e8ne litt\u00e9raire florentine \u00bb, qui a produit tant d’auteurs, de revues, de festivals et d’initiatives devenues iconiques dans les ann\u00e9es suivantes, j’ai toujours \u00e9t\u00e9 \u00e9tonn\u00e9 de l’extraordinaire surdit\u00e9 de la ville. Quelque chose naissait qui avait clairement de la valeur \u2014 une valeur reconnue dans toute l’Italie et dont toute l’Italie parlait \u2014 mais la ville faisait comme si de rien n\u2019\u00e9tait. Je ne crois pas qu’elle l’ait snob\u00e9 d\u00e9lib\u00e9r\u00e9ment : elle est simplement pass\u00e9 \u00e0 c\u00f4t\u00e9 et n\u2019a jamais r\u00e9ussi \u00e0 capter ce bourdonnement culturel spontan\u00e9, consid\u00e9r\u00e9 presque avec suspicion soit parce qu’il \u00e9tait li\u00e9 \u00e0 toute la culture de l\u2019autogestion, et donc au monde de l’autonomie et de la gauche extraparlementaire<\/em> \u2014 pour parler comme dans les ann\u00e9es 1970 \u2014 soit parce qu’il naissait d’initiatives priv\u00e9es qui n’\u00e9taient pas li\u00e9es \u00e0 des syst\u00e8mes d\u00e9termin\u00e9s et donc identifiables.<\/p>\n\n\n\n

Cette \u00e9poque dor\u00e9e de la sc\u00e8ne litt\u00e9raire florentine s’est \u00e9panouie pendant une dizaine d’ann\u00e9es. Elle a produit beaucoup de belles choses avant que ceux qui en faisaient partie ne trouvent un \u00e9diteur \u00e0 Rome ou \u00e0 Milan \u2014 quand ils ne sont pas partis \u00e0 l’\u00e9tranger pour poursuivre leurs activit\u00e9s individuellement ou avec d’autres groupes qu’ils ont rencontr\u00e9s ailleurs \u2014 ce qui est tr\u00e8s bien aussi. Mais quelque chose a \u00e9t\u00e9 perdu, ou manqu\u00e9, quelque chose d’important.<\/p>\n\n\n\n

Cette vitalit\u00e9 de la Florence des ann\u00e9es 2002-2003 au plan culturel a \u00e9t\u00e9 enti\u00e8rement, ou presque, le r\u00e9sultat de l’autogestion ou le fruit d’initiatives personnelles.<\/p>Vanni Santoni<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Ceux qui avaient plus de force ou plus de chance \u2014 ou les deux \u2014 ont trouv\u00e9 leur voie. Cela s’est produit pour plusieurs d’entre nous. Mais si une sc\u00e8ne s’enracine vraiment, si un \u00e9cosyst\u00e8me se forme qui non seulement fonctionne mais aussi dialogue avec des structures plus \u00ab officielles \u00bb, alors m\u00eame ceux qui ne parviennent pas \u00e0 s’imposer au d\u00e9but pourront s\u2019enraciner pour cr\u00e9er quelque chose de valable plus tard, en leur temps. Une sc\u00e8ne litt\u00e9raire implant\u00e9e cr\u00e9e une continuit\u00e9. Peut-\u00eatre que tout le monde ne r\u00e9ussira pas \u00e0 publier dans une grande maison d’\u00e9dition, mais un nouveau venu fera na\u00eetre une revue ; un autre une maison d’\u00e9dition ind\u00e9pendante, etc. C\u2019est \u00e0 partir de l\u00e0 que se produisent en g\u00e9n\u00e9ral les passages de t\u00e9moin g\u00e9n\u00e9rationnels. \u00c0 Florence, c\u2019est ce qui nous a partiellement manqu\u00e9.<\/p>\n\n\n\n

Aujourd’hui, l\u2019\u00e9poque dor\u00e9e de la nouvelle sc\u00e8ne florentine \u00e0 laquelle je fais r\u00e9f\u00e9rence est un fait historicis\u00e9 : elle correspond \u00e0 une p\u00e9riode qui va de 2004-2005 \u00e0 2014-2015.<\/p>\n\n\n\n

Si l\u2019on prolonge la r\u00e9flexion, ce qui a manqu\u00e9 pour consolider la sc\u00e8ne litt\u00e9raire florentine, c’est aussi l’absence d’un \u00e9diteur de premier plan dans la ville. Il y a Giunti, bien s\u00fbr, et depuis que Giunti a achet\u00e9 Bompiani, la maison est \u00e9videmment devenue un \u00e9diteur de premier plan. Mais le groupe n’a jamais eu de vocation sp\u00e9cifiquement florentine \u2014 peut-\u00eatre par d\u00e9sir de revendiquer un profil national (ce genre de crainte de para\u00eetre provincial serait assez typique de la Florence contemporaine). En tout \u00e9tat de cause, Giunti n’a jamais \u00e9t\u00e9 tr\u00e8s int\u00e9ress\u00e9 par ce qui se passait dans l’underground<\/em> litt\u00e9raire de la ville. Quand une maison est si grande, elle peut sans doute s\u2019en passer… mais \u00e0 bien y regarder, Einaudi, locomotive turinoise de l\u2019\u00e9dition, compte un peu plus d’auteurs turinois que la moyenne. Mondadori ou Feltrinelli ont un peu plus d’auteurs milanais que la moyenne. Et Laterza a un peu plus d’auteurs romains. Il aurait \u00e9t\u00e9 int\u00e9ressant, je crois, de voir ce qui se serait pass\u00e9 si, \u00e0 l’\u00e9poque, Giunti s’\u00e9tait davantage int\u00e9ress\u00e9 aux auteurs issus de la sc\u00e8ne florentine. Je ne dis pas qu’ils auraient eu un grand succ\u00e8s, mais peut-\u00eatre que la sc\u00e8ne aurait \u00e9t\u00e9 plus enracin\u00e9e.<\/p>\n\n\n\n

La v\u00e9rit\u00e9 est peut-\u00eatre qu’il manquait un Minimum Fax <\/span>6<\/sup><\/a><\/span><\/span> florentin. Les choses auraient \u00e9t\u00e9 diff\u00e9rentes s’il y avait eu une structure de taille interm\u00e9diaire \u2014 pas aussi petite que certaines petites ou tr\u00e8s petites maisons d’\u00e9dition mais pas aussi grande que Giunti-Bompiani \u2014 comme Minimum Fax dans son \u00e2ge d’or. Entre, disons, 2003 et 2013, Minimum Fax a non seulement r\u00e9v\u00e9l\u00e9 de nombreuses voix qui sont devenues indispensables par la suite, mais la maison a \u00e9galement \u00e9t\u00e9 un v\u00e9ritable acc\u00e9l\u00e9rateur pour la sc\u00e8ne litt\u00e9raire et culturelle romaine, d’o\u00f9 sont sortis des gens qui ont ensuite jou\u00e9 des r\u00f4les importants, qui ont form\u00e9 d’autres personnes, qui ont en somme servi de courroie de transmission entre l’underground<\/em> et le mainstream<\/em>.<\/p>\n\n\n\n

Pour revenir \u00e0 ce que je disais, au-del\u00e0 du seul monde de l\u2019\u00e9dition, le fait d’avoir d\u00e9plac\u00e9 les universit\u00e9s en banlieue a nui \u00e0 la possibilit\u00e9 m\u00eame que ce terreau se forme : lorsque je suis arriv\u00e9 en 2003, j’ai rencontr\u00e9 la revue Mostro<\/em> qui organisait des r\u00e9unions au circolino<\/em> de Borgo San Jacopo. D’autres r\u00e9unions avaient lieu au bar occup\u00e9 de Lettere. Il y avait le Bandone, via Maragliano, le Collettivo Politico, via Laura, les anarchistes du vicolo del Panico… Bref, quand on venait \u00e0 Florence, si on s’int\u00e9ressait \u00e0 la culture, ou si m\u00eame simplement on cherchait \u00e0 faire quelque chose, <\/em>mais \u00e0 sa mani\u00e8re, on trouvait des possibilit\u00e9s imm\u00e9diates, situ\u00e9es. Ces rivages sont aujourd’hui in\u00e9vitablement dispers\u00e9s \u2014 m\u00eame si des \u00eelots culturels r\u00e9sistent, comme la Polveriera, via Santa Reparata.<\/p>\n\n\n\n

Nous nous sommes rencontr\u00e9s plusieurs fois \u00e0 2 heures du matin dans des bars o\u00f9 vous vous \u00e9tiez arr\u00eat\u00e9 pour \u00e9crire. Peut-on dire que Vanni Santoni est un \u00e9crivain nocturne ?<\/h3>\n\n\n\n

\u00c0 2 heures, mais aussi \u00e0 3 heures au Caf\u00e9 Notte… et m\u00eame \u00e0 4h30 quand Danilo, l’ancien propri\u00e9taire, \u00e9tait l\u00e0. Le probl\u00e8me, c’est que ces endroits ferment d\u00e9sormais plus t\u00f4t. C’est aussi une cons\u00e9quence du tourisme : les anciens repaires, o\u00f9 il y avait des vieux qui jouaient aux cartes et buvaient du schnaps jusqu\u2019au lever du soleil, n\u2019existent plus. On pr\u00e9f\u00e8re capitaliser sur la soir\u00e9e du touriste : son aperitivo<\/em>, son d\u00eener \u2014 et fermer ensuite.<\/p>\n\n\n\n

J’ai toujours eu une vocation nocturne ou en tout cas post-m\u00e9ridienne. L’apr\u00e8s-midi, je vais \u00e0 la biblioth\u00e8que. Je suis de ceux qui fr\u00e9quentent assid\u00fbment l’un des derniers lieux de rencontre ouverts dans la ville, m\u00eame s’il est moins ouvert qu’avant \u2014 avec l’excuse du Covid, des portiques ont \u00e9t\u00e9 install\u00e9s, qui devaient \u00eatre enlev\u00e9s mais quin bien s\u00fbr, sont toujours l\u00e0 \u2014 la biblioth\u00e8que de litt\u00e9rature Brunelleschi, o\u00f9 je vais encore \u00e9crire l’apr\u00e8s-midi. J\u2019aime le style tr\u00e8s ann\u00e9es soixante et soixante-dix de ces vieilles salles un peu d\u00e9fra\u00eechies. Je vais dans les salles de germanistique et de slavistique, que j\u2019aime beaucoup. La biblioth\u00e8que des Oblate <\/span>7<\/sup><\/a><\/span><\/span>, \u00e0 l\u2019inverse, m\u00eame si c’est une belle biblioth\u00e8que et, centrale qui plus est, est trop lisse, trop brillante. Il n’y a pas non plus beaucoup de place.<\/p>\n\n\n\n

Le soir, l’\u00e9crivain a besoin de trouver un endroit o\u00f9 boire n’est pas trop cher et qui reste ouvert jusqu’\u00e0 une heure tardive.<\/p>Vanni Santoni<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Tr\u00e8s souvent, ces nouvelles biblioth\u00e8ques ne sont d\u2019ailleurs pas con\u00e7ues comme avant, dans une logique qui consistait \u00e0 faire entrer dans les salles de lecture le plus de si\u00e8ges et de tables possible. On privil\u00e9gie des solutions architecturales pour que la biblioth\u00e8que soit la plus belle possible, mais pas forc\u00e9ment la plus utilisable possible. <\/em>Ainsi, aux Oblate, il arrive que l’on ne trouve pas de place. Quand on sort de chez soi avec l’esprit d\u00e9j\u00e0 tourn\u00e9 vers un livre \u00e0 \u00e9crire, il ne faut pas avoir ce genre de tracas. Il faut trouver un lieu pour \u00e9crire. Imm\u00e9diatement. C’est pour cela que je vais \u00e0 Brunelleschi.<\/p>\n\n\n\n

Le soir, en revanche, l’\u00e9crivain a besoin de trouver un endroit o\u00f9 boire n’est pas trop cher et qui reste ouvert jusqu’\u00e0 une heure tardive. Depuis des ann\u00e9es, mes lieux de pr\u00e9dilection ont \u00e9t\u00e9 le Caff\u00e8 Notte et La Cit\u00e9 \u2014 tous deux situ\u00e9s sur la rive sud de l’Arno. Le Caff\u00e8 Notte se trouve dans les profondeurs de l’Oltrarno et \u00e9tait traditionnellement fr\u00e9quent\u00e9 par une client\u00e8le populaire et artisanale de Florence ; la Cit\u00e9 est n\u00e9e de la vague de cette p\u00e9riode de militantisme culturel que j’ai rejointe en 2002-2003. Des personnes issues des exp\u00e9riences Bandone et Elettro+, ainsi que d’autres sites d\u2019autogestion et d\u2019occupations florentines, ont remport\u00e9 un appel d’offres, elles se sont r\u00e9unies et ont ouvert La Cit\u00e9, une caf\u00e9-librairie. On peut dire que le Caff\u00e8 Notte est issu de l’underground<\/em> florentin des ann\u00e9es 1980 et La Cit\u00e9 de l’underground<\/em> florentin des ann\u00e9es 1990. <\/p>\n\n\n\n

Moi-m\u00eame, Gregorio Magini et le regrett\u00e9 Sergio Nelli \u00e9tions toujours fourr\u00e9s dans ces lieux, qui sont devenus de petits acc\u00e9l\u00e9rateurs culturels. \u00c0 La Cit\u00e9, nous avons commenc\u00e9 \u00e0 organiser des pr\u00e9sentations, parce qu’il y avait la librairie. Au Caf\u00e9 Notte, nous avons commenc\u00e9 \u00e0 faire des lectures. Aujourd’hui, il n’y a plus de pr\u00e9sentations \u00e0 La Cit\u00e9 ni de lectures au Caf\u00e9 Notte, m\u00eame si \u2014 heureusement \u2014 ils existent encore et sont toujours des lieux de rencontre pour une Florence litt\u00e9raire underground<\/em>, mais beaucoup moins intens\u00e9ment qu’avant. Plus r\u00e9cemment, un endroit que j\u2019affectionnais \u00e9tait Pi\u00f9 liberi pi\u00f9 libri, Via San Gallo, qui a toutefois chang\u00e9 de direction. Avec son jardin, malgr\u00e9 la chaleur, c’\u00e9tait assez agr\u00e9able pour \u00e9crire en fin d’apr\u00e8s-midi… Que reste-t-il maintenant pour boire et \u00e9crire le soir ? Le Torrino di Santa Rosa, ou le Circolo La Rondinella. Pourvu que \u00e7a dure.<\/p>\n\n\n\n

Et pour manger ?<\/h3>\n\n\n\n

Deux trattorie<\/em> sont paradigmatiques de la sc\u00e8ne litt\u00e9raire florentine : Le Mossacce, Via del Proconsolo et Sabatino, Porta San Frediano. J\u2019ai davantage fr\u00e9quent\u00e9 ce dernier parce qu’il \u00e9tait assez proche de La Cit\u00e9 ou du Caff\u00e8 Notte. Nourriture authentique et bon march\u00e9. Le probl\u00e8me, c’est que Florence change aussi \u00e0 cause d\u2019Instagram et des influenceurs, qui ont rendu viraux les menus tr\u00e8s bon march\u00e9 de Sabatino, toujours tap\u00e9s sur une vieille machine \u00e0 \u00e9crire Olivetti. Aujourd\u2019hui, si l’on essaye d’aller chez Sabatino pour manger un vitello steccato<\/em> et un raviolo<\/em> aux pommes de terre, on trouve une file d’attente qui n’existait pas m\u00eame au Ministry of Sound <\/span>8<\/sup><\/a><\/span><\/span> en 1998. La queue s’\u00e9tend m\u00eame jusqu’au coin de la rue. Les propri\u00e9taires font ce qu’ils peuvent : s’ils nous voient, qu\u2019ils nous identifient, ils peuvent parfois nous trouver une table. Mais tout cela complique un certain mode de vie qui \u00e9tait consubstantiel \u00e0 la production litt\u00e9raire : on restait toute la journ\u00e9e \u00e0 La Cit\u00e9, puis on faisait une pr\u00e9sentation, on sortait et on allait chez Sabatino, o\u00f9 l\u2019on trouvait tout de suite une place. On mangeait rapidement et on continuait au Caff\u00e8 Notte pour recommencer \u00e0 \u00e9crire.<\/p>\n\n\n\n

C’est dans ce flux quotidien qu’est n\u00e9e la production litt\u00e9raire et donc la sc\u00e8ne litt\u00e9raire florentine. <\/p>\n\n\n\n

Pour montrer \u00e0 quel point les choses ont chang\u00e9, je mentionnerais un autre endroit qui est devenu c\u00e9l\u00e8bre. <\/p>\n\n\n\n

Il y a quelques ann\u00e9es \u2014 une dizaine je crois \u2014 est parue une anthologie intitul\u00e9e Toscani maledetti<\/em> \u2014 un titre qui d\u00e9tourne celui du c\u00e9l\u00e8bre Maledetti toscani <\/em>de Malaparte, originaire de Prato. Il s’agissait d’un recueil \u00e9dit\u00e9 par Raoul Bruni pour les \u00e9ditions Piano B qui rassemblait plus ou moins toutes les voix de cette sc\u00e8ne florentine, enrichie \u00e9galement de quelques noms toscans, pas n\u00e9cessairement florentins, tels que Fabio Genovesi, Francesca Matteoni ou Luca Ricci. C\u2019\u00e9tait une belle anthologie. On y trouve une nouvelle tr\u00e8s dr\u00f4le sign\u00e9e Gregorio Magini, un autre membre de la communaut\u00e9 litt\u00e9raire florentine, intitul\u00e9e Il Giacallo<\/em>. <\/p>\n\n\n\n

Deux trattorie<\/em> sont paradigmatiques de la sc\u00e8ne litt\u00e9raire florentine : Le Mossacce, Via del Proconsolo et Sabatino, Porta San Frediano.<\/p>Vanni Santoni<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

C\u2019est l\u2019histoire d\u2019une crapule, obs\u00e9d\u00e9 sexuel, fan de la Fiorentina, qui d\u00e9blat\u00e8re \u00e0 longueur de journ\u00e9e des th\u00e9ories sur tout et rien. Il pense \u00eatre un grand amant, un grand tombeur, alors que c\u2019est un b\u00eata. Et il d\u00e9bite ses th\u00e8ses en buvant des vinellini<\/em> et en mangeant des crostini<\/em> \u00e0 l’Antico Vinaio. Or aujourd’hui, tout le monde sait que l’Antico Vinaio est devenu une gigantesque usine. Tellement de gens y travaillent qu’on a l\u2019impression d\u2019\u00eatre face \u00e0 une sorte de cha\u00eene de montage de la schiacciata<\/em>. La file d\u2019attente via dei Neri est encore plus longue que pour aller manger chez Sabatino. Pourtant, il y a dix ans \u00e0 peine, l’Antico Vinaio \u00e9tait un endroit o\u00f9 l’on allait vers 18 heures, o\u00f9 il y avait du vin au verre, o\u00f9 l’on se servait soi-m\u00eame, o\u00f9 il y avait des crostini<\/em> \u00e0 un euro cinquante et o\u00f9 l\u2019on trouvait toute une soci\u00e9t\u00e9 de Florentins qui bavardaient tranquillement. Aujourd’hui, c’est devenu un endroit o\u00f9 des milliers de personnes par heure entrent, prennent une schiacciata<\/em> et sortent. C\u2019est un changement radical.<\/p>\n\n\n\n

De quelle Florence parlez-vous dans vos livres ?<\/h3>\n\n\n\n

Dans mon premier roman, \u00e9crit principalement dans la ville, Gli interessi in comune<\/em>, qui est sorti en 2008 et a \u00e9t\u00e9 \u00e9crit, je pense, entre 2005 et 2007, Florence est d\u00e9lib\u00e9r\u00e9ment tenue \u00e0 l’\u00e9cart du centre de la sc\u00e8ne. L\u2019histoire se d\u00e9roule dans le Valdarno, o\u00f9 un groupe de marginaux se retrouvent dans un bar et traversent une s\u00e9rie d\u2019aventures et de m\u00e9saventures. Puis ils se tournent in\u00e9vitablement vers Florence. Parce que c’est l\u00e0 qu’ils iront \u00e0 l’universit\u00e9, qu’ils iront travailler, qu’ils iront parfois passer la nuit. Dans des endroits o\u00f9 peut-\u00eatre plus de g\u00e9n\u00e9rations avant la mienne sont all\u00e9es, mais o\u00f9 nous sommes all\u00e9s aussi quand nous \u00e9tions enfants.<\/p>\n\n\n\n

Florence est une sorte d’horizon possible pour les protagonistes de ce livre. Lorsqu\u2019ils y arrivent enfin, ils d\u00e9couvrent qu’il s’agit en fait d’une province comme les autres. <\/p>\n\n\n\n

J’ai d\u00e9velopp\u00e9 cette id\u00e9e dans le livre que j’ai mentionn\u00e9 pr\u00e9c\u00e9demment, Se fossi foco arderei Firenze<\/em>, dans lequel je devais raconter Florence \u00e0 travers un r\u00e9cit. J’\u00e9tais alors plus un sociologue qu’un narrateur : j\u2019ai s\u00e9lectionn\u00e9 des figures possibles dans divers endroits de Florence qui me permettraient de raconter l’histoire de Florence aujourd’hui et en m\u00eame temps de regarder un peu en arri\u00e8re. J’ai choisi de parler surtout des gens qui sont venus ici avec une vocation artistico-culturelle. Florence, probablement en raison du poids gigantesque de son pass\u00e9, les attire encore. Il y a des gens qui veulent \u00eatre artistes, architectes, po\u00e8tes ou peintres et qui viennent \u00e0 Florence. Peut-\u00eatre pas un musicien, car les \u00e9chos de la Florence des ann\u00e9es 1980, du rock, de la new wave et du post-punk ont disparu. Mais pour ce qui est des autres arts, Florence attire toujours.<\/p>\n\n\n\n

Lorsqu\u2019on y arrive, on est vite confront\u00e9 au fait que la ville est au fond un peu asphyxi\u00e9e et qu’elle a un peu br\u00fbl\u00e9 son potentiel. Florence attire ces gens mais regarde toujours en arri\u00e8re : elle ne voit pas et n’intercepte pas les choses nouvelles. Elle finit donc par \u00eatre une ville de passage, o\u00f9 les gens viennent, restent souvent longtemps \u2014 m\u00eame plus longtemps qu’ils ne le pensent \u2014 mais finissent toujours par partir et ne s’enracinent pas, faute de structures culturelles \u00e0 m\u00eame de canaliser leurs vocations et de s\u00e9dimenter leurs talents en une v\u00e9ritable profession. Lorsque vous arrivez \u00e0 Florence, les ombres des g\u00e9ants sont l\u00e0 ; si vous \u00e9crivez, vous devez vous comparer \u00e0 Dante, si vous peignez \u00e0 Botticelli, si vous voulez \u00eatre architecte, vous devez vous comparer \u00e0 Brunelleschi ou \u00e0 Michel-Ange. Alors, in\u00e9vitablement, vous y perdez quelques plumes. Cela m’avait sembl\u00e9 \u00eatre un aspect int\u00e9ressant de la ville ; un aspect qui, \u00e0 plus d’un titre, est toujours pr\u00e9sent. Je pense donc, une fois encore, que le fait d’avoir d\u00e9plac\u00e9 l’universit\u00e9 en banlieue est un geste d’une grande pr\u00e9somption de la part de la municipalit\u00e9. Une pr\u00e9somption plus ou moins consciente. Elle ne peut que d\u00e9couler de l’id\u00e9e que Florence attirerait les cerveaux ind\u00e9pendamment de l’universit\u00e9, ce qui est faux : Florence attire des touristes, mais si elle attire des cerveaux, c’est d\u2019abord parce qu’on y vient pour \u00e9tudier. Certes, il est clair que ceux qui viennent \u00e9tudier y viennent aussi parce que c’est la ville de Dante et de Brunelleschi. Mais le renouvellement intellectuel passe par l’universit\u00e9. Elle devrait donc \u00eatre la premi\u00e8re pr\u00e9occupation de ceux qui administrent Florence, \u00eatre am\u00e9lior\u00e9e de toutes les mani\u00e8res possibles \u2014 et \u00eatre, \u00e9videmment, maintenue au centre.<\/p>\n\n\n\n

Florence finit par \u00eatre une ville de passage, o\u00f9 les gens viennent, restent souvent longtemps \u2014 m\u00eame plus longtemps qu’ils ne le pensent \u2014 mais finissent toujours par partir.<\/p>Vanni Santoni<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Pour revenir \u00e0 votre question de d\u00e9part : dans mes livres, j’ai tendance \u00e0 aborder un th\u00e8me, \u00e0 le presser jusqu’\u00e0 la fin, puis \u00e0 ne plus y revenir. Si Florence est revenue dans d’autres romans, elle n’a jamais \u00e9t\u00e9 aussi centrale. J\u2019en parle un peu par exemple dans La verit\u00e0 su tutto,<\/em> o\u00f9 <\/em>le cadre est ponctu\u00e9 par les d\u00e9partements de sciences politiques ou par la biblioth\u00e8que de Brunelleschi. Je ne les avais pas encore utilis\u00e9s et ils se pr\u00eataient \u00e0 certaines r\u00e9flexions. Ailleurs, dans Fratelli Michelangelo<\/em>, je me suis d\u00e9plac\u00e9 dans d’autres r\u00e9gions de la province de Florence qui me sont ch\u00e8res, bien que plus excentr\u00e9es, comme Vallombrosa et Saltino, dans les montagnes environnantes. Mais c\u2019est un terrain tout \u00e0 fait diff\u00e9rent.<\/p>\n\n\n\n

Florence est-elle pour vous un proc\u00e9d\u00e9 litt\u00e9raire utile pour parler d’autre chose ?<\/h3>\n\n\n\n

Lorsque j\u2019ai parl\u00e9 exclusivement de Florence dans Se fossi fuoco arderei Firenze, <\/em>j’\u00e9tais vraiment oblig\u00e9 de parler de la ville. Mais m\u00eame ce livre \u00e9tait une \u00e9vasion. Au d\u00e9part, il \u00e9tait cens\u00e9 ressembler \u00e0 tous les livres de la collection Contromano de Laterza, dans laquelle l’auteur met sa casquette de guide et, d’une mani\u00e8re histrionique et ironique, conduit les lecteurs \u00e0 travers une ville de son choix. De nombreux livres de cette s\u00e9rie qui ont bien fonctionn\u00e9 ont \u00e9t\u00e9 con\u00e7us de cette mani\u00e8re. C’est d\u2019ailleurs ce que j’ai fait au d\u00e9but. Mais la directrice \u00e9ditoriale de Laterza, Anna Gialluca, m’a dit que le livre que je venais d\u2019\u00e9crire n’avait pas la m\u00eame verve que Interessi in comune<\/em>, qu’elle avait lu et pour lequel, d\u2019ailleurs, elle m\u2019avait appel\u00e9. Comme je n’ai heureusement jamais souffert du syndrome du g\u00e9nie incompris, je me suis dit : \u00ab Si elle n’aime pas, c’est que c’est mauvais \u00bb. J’ai donc tout mis \u00e0 la poubelle et j’ai recommenc\u00e9 de z\u00e9ro \u2014 non plus \u00e0 la premi\u00e8re personne mais avec un syst\u00e8me \u00ab d\u00e9tourn\u00e9 \u00bb ; un r\u00e9cit choral en rond. C\u2019est une technique que j’ai retrouv\u00e9e, plus tard, dans Dieu, les hommes et les anges <\/em>d’Olga Tokarczuk. Il existe probablement un noble pr\u00e9d\u00e9cesseur \u00e0 qui nous avons tous deux emprunt\u00e9 cette m\u00e9thode, mais dont, pour ma part, je ne me souviens pas.<\/p>\n\n\n\n

Quand on conna\u00eet bien un lieu, on peut trouver ce petit d\u00e9tail sur lequel se construit la cr\u00e9dibilit\u00e9 d’une sc\u00e8ne et, \u00e0 partir de l\u00e0, celle du personnage qui s’y meut.<\/p>Vanni Santoni<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n

Le format est le suivant : il y a des personnages, il y a une sc\u00e8ne, l’un des co-protagonistes de cette sc\u00e8ne devient le protagoniste principal de la sc\u00e8ne suivante, et ainsi de suite jusqu’\u00e0 ce que l\u2019histoire se referme dans une sorte d’Ouroboros ou de ruban de M\u00f6bius. Dans le cas de Se fossi fuoco…<\/em>, je devais raconter Florence \u2014 c’\u00e9tait la t\u00e2che \u00e0 laquelle j’\u00e9tais appel\u00e9. <\/p>\n\n\n\n

Dans d’autres cas, pour moi, la ville est toujours rest\u00e9e \u00e0 l’arri\u00e8re-plan, ou a servi de d\u00e9clencheur. M\u00eame dans La verit\u00e0 su tutto<\/em>, que j\u2019\u00e9voquais, un livre dont les principaux \u00e9v\u00e9nements ne se d\u00e9roulent pourtant pas \u00e0 Florence, part toujours de lieux comme la biblioth\u00e8que Brunelleschi, la Piazza Savonarola, des d\u00e9partements de la Via Giusti ou de la Via Laura\u2026. Quand on conna\u00eet bien un lieu, on peut trouver ce petit d\u00e9tail sur lequel se construit la cr\u00e9dibilit\u00e9 d’une sc\u00e8ne et, \u00e0 partir de l\u00e0, celle du personnage qui s’y meut. La cr\u00e9dibilit\u00e9 litt\u00e9raire, dans les lieux, ne repose pas tant sur une analyse d\u00e9taill\u00e9e ou m\u00e9ticuleuse, mais plut\u00f4t sur la capacit\u00e9 \u00e0 saisir instinctivement un d\u00e9tail tr\u00e8s sp\u00e9cifique \u2014 ce que seul quelqu’un qui a r\u00e9ellement v\u00e9cu ce lieu peut faire. Tout le reste en d\u00e9coule.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

\u00ab  Quand on conna\u00eet bien un lieu, on peut trouver ce petit d\u00e9tail sur lequel se construit la cr\u00e9dibilit\u00e9 d’une sc\u00e8ne et, \u00e0 partir de l\u00e0, celle du personnage qui s’y meut.  \u00bb<\/p>\n

En nous emmenant de bars nocturnes en biblioth\u00e8ques en passant par de petits restaurants cach\u00e9s, Vanni Santoni fait l’histoire nostalgique d’un \u00e9cosyst\u00e8me intellectuel inou\u00ef  : la Florence des ann\u00e9es 2000.<\/p>\n","protected":false},"author":10,"featured_media":242074,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","sticky":false,"template":"templates\/post-interviews.php","format":"standard","meta":{"_acf_changed":true,"_trash_the_other_posts":false,"footnotes":""},"categories":[2984],"tags":[],"geo":[1917],"class_list":["post-242072","post","type-post","status-publish","format-standard","hentry","category-grand-tour","staff-david-allegranti","geo-europe"],"acf":[],"yoast_head":"\nFlorence avant Instagram, Grand Tour avec Vanni Santoni | Le Grand Continent<\/title>\n<meta name=\"robots\" content=\"index, follow, max-snippet:-1, max-image-preview:large, max-video-preview:-1\" \/>\n<link rel=\"canonical\" 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