{"id":234968,"date":"2024-06-25T06:45:00","date_gmt":"2024-06-25T04:45:00","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=234968"},"modified":"2024-06-25T08:57:09","modified_gmt":"2024-06-25T06:57:09","slug":"dissolution-et-clarification-strategique-les-options-de-la-france","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2024\/06\/25\/dissolution-et-clarification-strategique-les-options-de-la-france\/","title":{"rendered":"Dissolution et clarification strat\u00e9gique : les options de la France"},"content":{"rendered":"\n
Depuis 2019, nous avons aid\u00e9 plus de 25 millions de personnes \u00e0 comprendre l\u2019Europe. Ce travail a un co\u00fbt. Pour le soutenir et contribuer au d\u00e9veloppement de la revue,\u00a0abonnez-vous au Grand Continent<\/a><\/em><\/p>\n\n\n\n La dissolution de l\u2019assembl\u00e9e nationale<\/a> et la tenue d\u2019\u00e9lections l\u00e9gislatives anticip\u00e9es<\/a> ouvre une p\u00e9riode d\u2019incertitude profonde pour la France. Loin de se cantonner \u00e0 un enjeu de politique int\u00e9rieure, cet \u00e9v\u00e9nement s\u2019inscrit dans un contexte strat\u00e9gique en mutation rapide depuis f\u00e9vrier 2022 et qui a percol\u00e9 dans le d\u00e9bat politique. La position fran\u00e7aise d\u2019\u00eele strat\u00e9gique sans menaces \u00e0 ses fronti\u00e8res, au c\u0153ur d\u2019une Europe en paix, explique largement l\u2019absence des enjeux militaires et g\u00e9opolitiques dans le d\u00e9bat public depuis la fin des ann\u00e9es 1990. La posture strat\u00e9gique fran\u00e7aise \u00e9volue depuis plus de trente ans dans un espace politique national qui, de la part de l\u2019opinion et des forces politiques, semble moins tenir du consensus que du d\u00e9sint\u00e9r\u00eat. Les choix de priorit\u00e9s strat\u00e9giques et de mod\u00e8les de forces ont largement \u00e9t\u00e9 d\u00e9l\u00e9gu\u00e9s \u00e0 la technostructure et s\u2019inscrivaient dans une ambition de \u00ab continuit\u00e9 raisonnable \u00bb qui consistait en une pr\u00e9servation des acquis statutaires de l\u2019ordre issu de la Guerre froide, \u00e0 moindre co\u00fbt : \u00c9tat dot\u00e9 de l\u2019arme nucl\u00e9aire, membre permanent du Conseil de s\u00e9curit\u00e9, pourvoyeur de s\u00e9curit\u00e9 en Afrique et acteur secondaire mais omnipr\u00e9sent dans de nombreuses coalitions de gestion de crise, il s\u2019agissait pour la France de maintenir ses positions, dans un contexte marqu\u00e9 par la mondialisation des \u00e9changes, la d\u00e9mon\u00e9tisation de l\u2019usage de la force et son corollaire : la diminution tendancielle de l\u2019effort de d\u00e9fense. <\/p>\n\n\n\n Depuis la charni\u00e8re de 2015 et l\u2019irruption sur son sol du terrorisme islamiste de masse conjugu\u00e9 \u00e0 l\u2019agression russe de l\u2019Ukraine, la France vit dans un questionnement renouvel\u00e9 qui s\u2019accompagne d\u2019un paradoxe : alors m\u00eame que la compr\u00e9hension des probl\u00e9matiques internationales semble imposer un effort majeur de remont\u00e9e en puissance, Paris voit d\u2019une part ses marges de man\u0153uvre se restreindre sur le plan \u00e9conomique et d\u2019autre part son mod\u00e8le de forces \u00eatre \u00e9cartel\u00e9 entre plusieurs directions possibles que le pouvoir politique ne semble pas vouloir \u2014 ou pouvoir \u2014 arbitrer<\/a>. H\u00e9ritant d\u2019ambitions tous azimuts dans plusieurs zones \u2014 l\u2019Europe de l\u2019Est, la M\u00e9diterran\u00e9e orientale, l\u2019Afrique et le Moyen Orient, l\u2019Indopacifique \u2014 la France h\u00e9site. La derni\u00e8re actualisation de la revue strat\u00e9gique, en 2022, prenait acte de l\u2019invasion de l\u2019Ukraine par la Russie qui assumait la confrontation directe par les armes. Elle fixait dix objectifs strat\u00e9giques qui avaient le m\u00e9rite de la coh\u00e9rence et d\u2019une vision syst\u00e9mique des enjeux, mais donnaient l\u2019impression que la France \u2014 comme souvent \u2014 voulait \u00eatre \u00ab un peu partout \u00bb, comme si aucun sujet n\u2019\u00e9tait prioritaire, comme si les moyens n\u2019\u00e9taient pas compt\u00e9s. Or, derri\u00e8re l\u2019antienne classique du mod\u00e8le \u00ab complet \u00bb qu\u2019elle entend maintenir, la France oscille en fait entre plusieurs mod\u00e8les de forces, alors qu\u2019elle ne pourra plus, \u00e0 l\u2019avenir, n\u2019investir que dans un seul. La r\u00e9cente loi de programmation militaire, in\u00e9dite par l\u2019ampleur de l\u2019effort qu\u2019elle repr\u00e9sente depuis la chute du mur de Berlin, suffit de fait \u00e0 peine \u00e0 \u00ab payer pour le mod\u00e8le que nous avons \u00bb, en assumant une transformation sans accroissement des moyens et des effectifs. La crise politique int\u00e9rieure actuelle et les cons\u00e9quences \u00e9conomiques qu\u2019elle pourrait avoir sur la LPM imposeront sans doute une clarification strat\u00e9gique, des choix qui seront des renoncements et, en cons\u00e9quence, une nouvelle orientation des mod\u00e8les de force. Le pire, sans doute, serait une fois encore de ne rien choisir vraiment et de n\u2019utiliser que le rabot pour des r\u00e9ductions homoth\u00e9tiques de moyens dans notre \u00ab arm\u00e9e bonsa\u00ef \u00bb pour reprendre l\u2019expression de Jean-Dominique Merchet. \u00c0 la diff\u00e9rence du confort strat\u00e9gique des ann\u00e9es 2000, les changements sont l\u00e0 \u2014 brutaux, rapides, proches, intenses. L\u2019invasion russe de l\u2019Ukraine est sans doute l’\u00e9v\u00e9nement qui modifie le plus profond\u00e9ment le contexte strat\u00e9gique fran\u00e7ais. M\u00eame si notre territoire national reste une \u00eele strat\u00e9gique au c\u0153ur de l\u2019Europe, sans menace directe \u00e0 ses fronti\u00e8res, les grandes cons\u00e9quences du conflit fa\u00e7onnent de nouvelles permanences.<\/p>\n\n\n\n