{"id":212492,"date":"2023-12-18T11:40:46","date_gmt":"2023-12-18T10:40:46","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=212492"},"modified":"2024-02-22T09:56:26","modified_gmt":"2024-02-22T08:56:26","slug":"ukraine-lapres-guerre-commence-maintenant","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2023\/12\/18\/ukraine-lapres-guerre-commence-maintenant\/","title":{"rendered":"Ukraine : l\u2019apr\u00e8s-guerre commence maintenant"},"content":{"rendered":"\n
Est-il possible de penser l\u2019apr\u00e8s-guerre en Ukraine aujourd\u2019hui ? Ce projet n\u2019a rien d\u2019\u00e9vident, \u00e0 un moment o\u00f9 la guerre est dans une phase difficile<\/a>, et o\u00f9 il devient certain qu\u2019elle demandera aux Ukrainiens comme aux partenaires de l\u2019Ukraine du courage, des ressources et du temps, pour une dur\u00e9e qu\u2019il est impossible d\u2019anticiper aujourd\u2019hui.<\/p>\n\n\n\n Pourtant, r\u00e9fl\u00e9chir \u00e0 l\u2019apr\u00e8s-guerre, ce n\u2019est pas seulement penser l\u2019avenir de ce pays, c\u2019est aussi comprendre ce qui, dans le pr\u00e9sent, construit cet avenir. Penser l\u2019Ukraine de demain est donc une mani\u00e8re importante de soutenir celle d\u2019aujourd\u2019hui en comprenant mieux quelles sont ses fragilit\u00e9s et ses forces, ses h\u00e9ritages et ses transformations.<\/p>\n\n\n\n Le concept m\u00eame d\u2019apr\u00e8s-guerre, en apparence transparent, n\u2019est pas une r\u00e9alit\u00e9 empiriquement ais\u00e9e \u00e0 cerner. Les limites de la guerre sont ambigu\u00ebs, et les sciences sociales se sont saisies ces derni\u00e8res ann\u00e9es de cette ambigu\u00eft\u00e9 pour questionner la fronti\u00e8re entre la guerre et la paix. \u00c0 rebours des conflits racont\u00e9s par les manuels scolaires o\u00f9 l\u2019on peut d\u00e9limiter clairement un \u00e9tat de guerre et un \u00e9tat de paix, une d\u00e9claration de guerre qui fait office de moment z\u00e9ro et la signature d\u2019un document qui en marque l\u2019arr\u00eat, une p\u00e9riode de violence \u00e0 laquelle succ\u00e8de une p\u00e9riode de non-violence, un grand nombre de conflits arm\u00e9s, qu\u2019ils soient contemporains ou plus anciens, pr\u00e9sentent des configurations plus fluides. Tr\u00e8s souvent, l\u2019usage de la violence arm\u00e9e n\u2019est pas pr\u00e9c\u00e9d\u00e9 d\u2019une d\u00e9claration de guerre, d\u2019autant qu\u2019elle ne se limite pas forc\u00e9ment au temps de guerre. Les logiques et hi\u00e9rarchies sociales construites dans la guerre trouvent leur fondement dans la structure sociale d\u2019avant-guerre, et ne disparaissent pas dans l\u2019apr\u00e8s-guerre. Enfin, les situations de \u00ab ni guerre, ni paix \u00bb <\/span>1<\/sup><\/a><\/span><\/span>, qui sont des \u00e9tats sociaux \u00e0 la qualification incertaine, ont cess\u00e9 d\u2019\u00eatre consid\u00e9r\u00e9s comme anormales ou transitoires, pour \u00eatre questionn\u00e9es par les chercheurs dans la dur\u00e9e et dans leur configuration propre.<\/p>\n\n\n\n Tr\u00e8s souvent, l\u2019usage de la violence arm\u00e9e n\u2019est pas pr\u00e9c\u00e9d\u00e9 d\u2019une d\u00e9claration de guerre.<\/p>Anna Colin Lebedev<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n Dans le cas de l\u2019Ukraine, la d\u00e9limitation des fronti\u00e8res de la guerre est caract\u00e9ris\u00e9e par cette m\u00eame incertitude. Celle-ci porte avant tout sur le d\u00e9but de la guerre. Si, vue d\u2019Europe occidentale, l\u2019agression arm\u00e9e du 24 f\u00e9vrier 2022 peut \u00eatre incontestablement qualifi\u00e9e de d\u00e9claration de guerre d\u2019un \u00c9tat contre un autre \u00c9tat, pour les sp\u00e9cialistes de la soci\u00e9t\u00e9 ukrainienne, cette date n\u2019est pas forc\u00e9ment le point z\u00e9ro de la guerre men\u00e9e par la Russie \u2014 et encore moins pour les citoyens ukrainiens. Beaucoup renvoient \u00e0 l\u2019annexion de la Crim\u00e9e par la Russie en mars 2014 comme date de d\u00e9but de cette guerre<\/a>. D\u2019autres placent la guerre dans un continuum d\u2019hostilit\u00e9 de Moscou \u00e0 l\u2019\u00e9gard de l\u2019Ukraine qu\u2019ils font remonter \u00e0 la R\u00e9volution Orange de 2004, ou bien \u00e0 la Grande famine orchestr\u00e9e par le Kremlin dans les ann\u00e9es 1930, ou encore \u00e0 l\u2019hostilit\u00e9 de l\u2019Empire russe \u00e0 l\u2019\u00e9gard de toute volont\u00e9 d\u2019\u00e9mancipation de l\u2019Ukraine. Enfin, la diffusion du concept de \u00ab guerre hybride \u00bb <\/span>2<\/sup><\/a><\/span><\/span>, souvent utilis\u00e9 pour qualifier la politique belliqueuse de la Russie, et dont l\u2019usage est de plus en plus critiqu\u00e9 <\/span>3<\/sup><\/a><\/span><\/span>, a contribu\u00e9 \u00e0 brouiller la d\u00e9limitation des fronti\u00e8res temporelles, mais aussi spatiales de la guerre conduite par l\u2019\u00c9tat russe.<\/p>\n\n\n\n L\u2019apr\u00e8s-guerre est un concept tout aussi impr\u00e9cis. \u00c0 rebours des qualifications courantes qui voient la fin de la guerre comme une rupture radicale suivie d\u2019un av\u00e8nement de l\u2019\u00e9tat de paix, les sciences sociales soulignent les continuit\u00e9s entre \u00e9tat de guerre et \u00e9tat de paix : d\u2019un c\u00f4t\u00e9, les dynamiques sociales et politiques civiles ant\u00e9rieures au conflit continuent \u00e0 peser en temps de guerre, de l\u2019autre c\u00f4t\u00e9, des dynamiques enclench\u00e9es dans la guerre et des acteurs qui ont \u00e9merg\u00e9 de celle-ci op\u00e8rent et influencent l\u2019\u00e9volution des soci\u00e9t\u00e9s bien apr\u00e8s la d\u00e9claration officielle de fin du conflit arm\u00e9. La sortie de guerre et l\u2019apr\u00e8s-guerre sont plus des concepts op\u00e9rationnels, utiles aux communaut\u00e9s locales et aux bailleurs d\u2019aide internationaux, que des moments identifiables sur le terrain <\/span>4<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Sur le terrain, l\u2019apr\u00e8s-guerre s\u2019ancre dans le pr\u00e9sent.<\/p>\n\n\n\n Si la fin de la guerre en Ukraine est parfois difficile \u00e0 penser, ce n\u2019est pas uniquement en raison des fluctuations de la situation sur le front et de l\u2019\u00e9quilibre des forces, mais aussi de la difficult\u00e9 \u00e0 d\u00e9finir ce qui peut constituer une victoire ou une d\u00e9faite <\/span>5<\/sup><\/a><\/span><\/span>, et \u00e0 concevoir le point final de la guerre dans cette situation de fluidit\u00e9 de ses limites. La d\u00e9finition du moment o\u00f9 la guerre sera consid\u00e9r\u00e9e comme termin\u00e9e varie selon que l\u2019on se place du point de vue de l\u2019Ukraine, de celui de l\u2019agresseur russe, ou de celui de l\u2019un des soutiens de l\u2019Ukraine. Quand la guerre sera-t-elle per\u00e7ue comme termin\u00e9e par un habitant des territoires occup\u00e9s par la Russie en 2022 ? Par un habitant de la Crim\u00e9e ? Par un officier ukrainien engag\u00e9 sur le front depuis 2014 ? Par un Ukrainien exil\u00e9 dans un pays europ\u00e9en ? Par les intellectuels ukrainiens ? Par les responsables militaires russes ? Par le gouverneur d\u2019une r\u00e9gion russe frontali\u00e8re de l\u2019Ukraine ? Par un combattant russe mobilis\u00e9 ? Par un Russe ordinaire vivant \u00e0 des milliers des kilom\u00e8tres de Moscou ? Non seulement la r\u00e9ponse sera diff\u00e9rente pour chacun de ces acteurs, mais, pour un certain nombre d\u2019entre eux, elle variera dans le temps.<\/p>\n\n\n\n Sur le terrain, l\u2019apr\u00e8s-guerre s\u2019ancre dans le pr\u00e9sent.<\/p>Anna Colin Lebedev<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n Cependant, il n\u2019est pas besoin d\u2019une certitude sur la fin de la guerre pour penser l\u2019apr\u00e8s, car l\u2019apr\u00e8s-guerre se tisse sous nos yeux, jour apr\u00e8s jour. Des permanences, des fragilit\u00e9s, de nouvelles pratiques et de nouvelles attentes construisent d\u2019ores et d\u00e9j\u00e0 l\u2019Ukraine de demain.<\/p>\n\n\n\n Un clich\u00e9 tenace accompagne notre vision de la guerre : celui du chaos de la guerre. Les images diffus\u00e9es par les reporters construisent l\u2019imaginaire correspondant : la destruction de lieux de vie ; des populations jet\u00e9es sur les routes ; l\u2019insoutenable duret\u00e9 des combats. Tout ceci est vrai, et tout ceci est inacceptable. Cependant, cette vision de la guerre comme espace et moment de chaos social s\u2019accompagne parfois d\u2019une anticipation de d\u00e9structuration institutionnelle, de rupture totale de la vie quotidienne et, enfin, d\u2019une faiblesse de l\u2019\u00c9tat. <\/p>\n\n\n\n Or, la guerre, surtout lorsqu\u2019elle dure, est aussi un espace ordinaire de la vie sociale, avec ses acteurs politiques et \u00e9conomiques, ses opportunit\u00e9s et ses ressources, ses liens sociaux et ses hi\u00e9rarchies, ses valeurs et ses divisions <\/span>6<\/sup><\/a><\/span><\/span>. En observant la transformation de la soci\u00e9t\u00e9 ukrainienne dans et par la guerre depuis 2014, on comprend non seulement la r\u00e9silience qu\u2019elle a pu manifester face \u00e0 l\u2019agression massive de 2022, mais aussi les ressources qui sont les siennes pour continuer \u00e0 faire face \u00e0 la guerre et \u00e0 construire l\u2019apr\u00e8s-guerre.<\/p>\n\n\n\n La r\u00e9appropriation par les citoyens ukrainiens de leur \u00c9tat et leur attachement \u00e0 l\u2019\u00c9tat est l\u2019une des \u00e9volutions les plus saillantes des dix derni\u00e8res ann\u00e9es d\u2019agression arm\u00e9e \u2014 directe et indirecte \u2014 de la Russie contre l\u2019Ukraine.<\/p>\n\n\n\n Lorsque je conduisais en 2015-2017 une enqu\u00eate aupr\u00e8s des combattants de la guerre dans le Donbass, notamment ceux qui s\u2019\u00e9taient engag\u00e9s d\u00e8s le printemps 2014 pour combattre \u00e0 l\u2019Est du pays, beaucoup m\u2019expliquaient que ce qui leur avait fait prendre les armes, ce n\u2019\u00e9tait pas la volont\u00e9 de d\u00e9fendre leur \u00c9tat, mais l\u2019urgence de prot\u00e9ger leur pays. L\u2019\u00c9tat \u00e9tait jug\u00e9 gangr\u00e9n\u00e9 par la corruption et les jeux politiciens, la confiance dans les institutions politiques \u00e9tait au plus bas, et le constat de faiblesse des forces arm\u00e9es \u00e9tait largement partag\u00e9. L\u2019Ukraine sortait de la r\u00e9volution du Ma\u00efdan qui constituait une rupture politique majeure, mais qui avait aussi marqu\u00e9 le d\u00e9but d\u2019un engagement politique pour un certain nombre d\u2019Ukrainiens <\/span>7<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n Au d\u00e9but de la guerre dans le Donbass au printemps 2014, beaucoup ont redout\u00e9 un effondrement de l\u2019\u00c9tat ukrainien. C\u2019est le contraire qui s\u2019est produit : l\u2019imminence de la menace militaire et l\u2019attachement \u00e0 faire vivre les valeurs de la r\u00e9volution du Ma\u00efdan ont amen\u00e9 les citoyens \u00e0 se r\u00e9approprier leurs institutions publiques pour tenter de les changer de l\u2019int\u00e9rieur. Des combattants revenus du front ont accept\u00e9 de prendre des postes dans les minist\u00e8res et des administrations ; des repr\u00e9sentants de la \u00ab g\u00e9n\u00e9ration Ma\u00efdan \u00bb <\/span>8<\/sup><\/a><\/span><\/span> se sont engag\u00e9s dans la vie politique, d\u2019autres sont devenus conseillers dans les minist\u00e8res, d\u2019autres encore ont fond\u00e9 des ONG qui cherchaient \u00e0 mettre en place un contr\u00f4le social sur l\u2019\u00c9tat. Beaucoup de ces engagements se sont heurt\u00e9s \u00e0 la r\u00e9alit\u00e9 des institutions publiques souvent ankylos\u00e9es, et se sont sold\u00e9s par des ruptures. Cependant, la dynamique engag\u00e9e par la guerre dans le Donbass a bien \u00e9t\u00e9 celle d\u2019un rajeunissement des institutions \u00e9tatiques, de r\u00e9formes substantielles dans plusieurs secteurs, ainsi que du d\u00e9veloppement d\u2019un tissu associatif dense, actif et vigilant, pr\u00eat \u00e0 coop\u00e9rer avec l\u2019\u00c9tat ou \u00e0 s\u2019opposer \u00e0 celui-ci. <\/p>\n\n\n\n Au d\u00e9but de la guerre dans le Donbass au printemps 2014, beaucoup ont redout\u00e9 un effondrement de l\u2019\u00c9tat ukrainien. C\u2019est le contraire qui s\u2019est produit.<\/p>Anna Colin Lebedev<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n La force de la d\u00e9fiance \u00e0 l\u2019\u00e9gard des institutions politiques avant l\u2019agression arm\u00e9e de 2022 est un trait frappant de la situation politique ukrainienne <\/span>9<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Pour un certain nombre de commentateurs, cette d\u00e9fiance \u00e9tait le signe d\u2019un \u00c9tat fragile voire failli, d\u00e9connect\u00e9 de ses citoyens, au bord de la rupture. Aujourd\u2019hui, un certain nombre d\u2019appels \u00e0 arr\u00eater le soutien \u00e0 l\u2019Ukraine<\/a> reprennent la m\u00eame rh\u00e9torique.<\/p>\n\n\n\n Il est important cependant de ne pas faire de contresens sur le rapport des Ukrainiens \u00e0 leur \u00c9tat. S\u2019ils d\u00e9noncent vigoureusement des gouvernants jug\u00e9s indignes de leurs fonctions, s\u2019ils critiquent la pr\u00e9gnance des logiques corruptives et bureaucratiques, cela s\u2019accompagne d\u2019un attachement fort aux institutions elles-m\u00eames qu\u2019il s\u2019agit non pas de renverser, mais de redresser. Pour beaucoup d\u2019Ukrainiens, la transformation n\u2019est pas attendue des r\u00e9formes \u00ab par le haut \u00bb du syst\u00e8me politique et des institutions d\u00e9mocratiques, mais d\u2019une transformation par le bas, o\u00f9 le citoyen ordinaire pourrait jouer un r\u00f4le actif.<\/p>\n\n\n\n Si la confiance \u00e0 l\u2019\u00e9gard des institutions politiques est fragile, deux institutions b\u00e9n\u00e9ficient d\u2019un soutien sans faille des Ukrainiens : leurs forces arm\u00e9es et leurs mouvements associatifs, b\u00e9n\u00e9ficiant d\u2019un taux de confiance respectif de 72 et 68 % \u00e0 la veille de l\u2019invasion <\/span>10<\/sup><\/a><\/span><\/span>, qui est mont\u00e9 \u00e0 94 et 87 % en octobre 2023 <\/span>11<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n \u00ab L\u2019\u00c9tat, c\u2019est nous \u00bb, me disaient, d\u00e8s le d\u00e9but de la guerre dans le Donbass, mes interlocuteurs engag\u00e9s sur le front ou dans les ONG. Comment comprendre cette affirmation ? Construire une Ukraine meilleure, r\u00e9former l\u2019\u00c9tat et b\u00e2tir la d\u00e9fense du pays, m\u2019expliquaient-ils, relevait de leur responsabilit\u00e9 citoyenne. Paradoxalement, c\u2019est la faiblesse des forces arm\u00e9es ukrainiennes en 2014, d\u00e9munies en mat\u00e9riel, en comp\u00e9tence et en exp\u00e9rience, qui a \u00e9t\u00e9 le moteur d\u2019une \u00e9volution majeure. Puisque les forces arm\u00e9es n\u2019\u00e9taient pas capables d\u2019assurer la d\u00e9fense d\u2019une Ukraine attaqu\u00e9e, les civils se sont organis\u00e9s pour conduire la guerre : pour certains en partant sur le front ; pour d\u2019autres, beaucoup plus nombreux, en soutenant, en approvisionnant et en \u00e9quipant les unit\u00e9s combattantes. M\u00eame si, au bout de quelques mois, les forces arm\u00e9es r\u00e9guli\u00e8res ont progressivement repris la main sur la conduite de la guerre, le r\u00f4le des mouvements b\u00e9n\u00e9voles est rest\u00e9 central pour assurer ce que l\u2019\u00c9tat n\u2019\u00e9tait pas capable de faire <\/span>12<\/sup><\/a><\/span><\/span> : pourvoir \u00e0 certains besoins des combattants sur le front, prendre en charge les besoins des v\u00e9t\u00e9rans ou des bless\u00e9s <\/span>13<\/sup><\/a><\/span><\/span>, mais aussi offrir un soutien aux d\u00e9plac\u00e9s internes de la guerre. De taille variable, allant de grandes ONG nationales \u00e0 des groupes de quelques personnes collectant de l\u2019argent pour une unit\u00e9 militaire sp\u00e9cifique, ces initiatives ont gard\u00e9 une grande fluidit\u00e9, s\u2019adaptant rapidement aux besoins nouveaux. La diffusion des initiatives civiques, des fondations et des mouvements associatifs ne s\u2019est d\u2019ailleurs pas limit\u00e9e au domaine militaire, en irriguant la soci\u00e9t\u00e9 enti\u00e8re. <\/p>\n\n\n\n Dans un \u00c9tat o\u00f9 la protection sociale reste d\u00e9faillante, les mouvements b\u00e9n\u00e9voles ont tiss\u00e9 un filet de s\u00e9curit\u00e9 alternatif. Au-del\u00e0 de ce r\u00f4le, ils ont aussi d\u00e9velopp\u00e9 une expertise certaine sur leurs sujets d\u2019engagement, souvent nourrie de partenariats internationaux et ouverte \u00e0 l\u2019innovation.<\/p>\n\n\n\n L\u2019importance de faire de la soci\u00e9t\u00e9 civile le moteur de la reconstruction a \u00e9t\u00e9 soulign\u00e9e \u00e0 plusieurs reprises <\/span>14<\/sup><\/a><\/span><\/span>, tout comme la frustration des mouvements sociaux constatant qu\u2019ils continuaient \u00e0 \u00eatre exclus de la prise de d\u00e9cision sur les projets de reconstruction <\/span>15<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Le principe de \u00ab localisation \u00bb de l\u2019aide internationale, con\u00e7u pour redonner du poids aux acteurs locaux, est aujourd\u2019hui per\u00e7u comme inop\u00e9rant par les mouvements associatifs sur place <\/span>16<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Ainsi, pendant les premiers mois de la guerre, moins de 1 % de l\u2019aide humanitaire internationale est all\u00e9e directement aux ONG ukrainiennes nationales et locales, alors qu\u2019elles \u00e9taient celles qui s\u2019engageaient directement sur le terrain et en subissaient les risques. En 2022, seulement 0,36 % de l\u2019aide humanitaire fournie \u00e0 l\u2019Ukraine dans le cadre de l\u2019Ukraine flash appeal<\/em> a \u00e9t\u00e9 vers\u00e9e aux ONG ukrainiennes nationales et locales <\/span>17<\/sup><\/a><\/span><\/span>. M\u00eame si la distribution de l\u2019aide propos\u00e9e par les acteurs internationaux passe ensuite par des partenaires locaux, il est difficile pour ces mouvements sociaux souples, innovants, ajust\u00e9s aux besoins du terrain, d\u2019\u00eatre r\u00e9duits \u00e0 un statut d\u2019op\u00e9rateurs dans le courant de la guerre. C\u2019est aujourd\u2019hui que se construit leur place \u00e0 venir dans l\u2019apr\u00e8s-guerre ; mais \u00e0 travers ce groupe qui b\u00e9n\u00e9ficie d\u2019une immense confiance dans la population ukrainienne, c\u2019est la l\u00e9gitimit\u00e9 des politiques de l\u2019apr\u00e8s-guerre qui se d\u00e9cide aujourd\u2019hui.<\/p>\n\n\n\n L\u2019arm\u00e9e est incontestablement une institution qui compte dans la soci\u00e9t\u00e9 ukrainienne. Ceci est d\u2019autant plus saisissant qu\u2019il y a dix ans encore, les forces arm\u00e9es faisaient partie des institutions les plus d\u00e9cri\u00e9es. Elles \u00e9taient jug\u00e9es corrompues, impr\u00e9gn\u00e9es de logiques datant de l\u2019\u00e9poque sovi\u00e9tique, mais aussi inutiles dans un pays qui ne voyait pas de menaces de conflit arm\u00e9 \u00e0 venir sur son territoire. En 2012, deux tiers des Ukrainiens se d\u00e9claraient d\u00e9fiants \u00e0 l\u2019\u00e9gard de leurs forces arm\u00e9es. Mais \u00e0 la diff\u00e9rence des autres institutions \u00e9tatiques vis-\u00e0-vis de qui la d\u00e9ception est rest\u00e9e tenace, la confiance dans l\u2019arm\u00e9e n\u2019a cess\u00e9 de cro\u00eetre depuis 2014. Les Ukrainiens \u00e9taient 45 % \u00e0 faire confiance aux forces arm\u00e9es en 2015, 57 % en 2017, 66 % en 2020, 72 % en 2021, et 96 % en 2022. L\u2019image positive de l\u2019institution militaire s\u2019est construite dans et par la guerre.<\/p>\n\n\n\n Cependant, si les forces arm\u00e9es ont pu prendre une telle place dans l\u2019imaginaire politique des Ukrainiens, c\u2019est aussi parce que l\u2019arm\u00e9e est devenue une institution de jonction entre l\u2019\u00c9tat et la soci\u00e9t\u00e9. Aux 440 000 v\u00e9t\u00e9rans de la guerre dans le Donbass que comptait officiellement l\u2019Ukraine quelques mois avant l\u2019invasion, s\u2019ajoute un nombre de b\u00e9n\u00e9voles diversement engag\u00e9s aupr\u00e8s des forces arm\u00e9es difficile \u00e0 estimer, ainsi qu\u2019un nombre \u00e9galement inconnu de combattants volontaires n\u2019ayant pas obtenu le statut de v\u00e9t\u00e9rans. Le r\u00f4le actif jou\u00e9 par les citoyens ordinaires \u2013 combattants comme b\u00e9n\u00e9voles – dans la conduite de la guerre depuis 2014 a fait des forces arm\u00e9es une institution directement connect\u00e9e aux vies des citoyens. Les forces arm\u00e9es ont \u00e9galement \u00e9t\u00e9 un espace o\u00f9 les r\u00e9formes \u00e9taient tr\u00e8s attendues, mais aussi l\u00e0 o\u00f9 certaines questions de soci\u00e9t\u00e9 ont pu \u00eatre pos\u00e9es. C\u2019est par exemple autour de la question des femmes dans l\u2019arm\u00e9e que les sujets de l\u2019\u00e9galit\u00e9 des genres et des violences sexuelles ont \u00e9t\u00e9 abord\u00e9s dans la soci\u00e9t\u00e9 ukrainienne de ces dix derni\u00e8res ann\u00e9es <\/span>18<\/sup><\/a><\/span><\/span>. C\u2019est par l\u2019impulsion de la soci\u00e9t\u00e9 que l\u2019institution militaire s\u2019est transform\u00e9e.<\/p>\n\n\n\n \u00c0 la diff\u00e9rence des autres institutions ukrainiennes vis-\u00e0-vis de qui la d\u00e9ception est rest\u00e9e tenace, la confiance dans l\u2019arm\u00e9e n\u2019a cess\u00e9 de cro\u00eetre depuis 2014.<\/p>Anna Colin Lebedev<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n Les dix ann\u00e9es de guerre dans le Donbass ont \u00e9t\u00e9 caract\u00e9ris\u00e9es par une forte incertitude : sur le statut de la guerre qui n\u2019a jamais \u00e9t\u00e9 d\u00e9clar\u00e9e (les actions arm\u00e9es ont \u00e9t\u00e9 qualifi\u00e9es d\u2019\u00ab op\u00e9ration antiterroriste \u00bb puis d\u2019\u00ab op\u00e9ration des forces r\u00e9unies \u00bb) ; sur le statut des combattants et des b\u00e9n\u00e9voles engag\u00e9s ; enfin, sur la nature de la menace \u00e0 laquelle l\u2019Ukraine faisait face. Cette situation d\u2019incertitude a g\u00e9n\u00e9r\u00e9 de multiples interp\u00e9n\u00e9trations entre les logiques civiles et militaires et a jou\u00e9 un r\u00f4le transformateur sur la soci\u00e9t\u00e9. L\u2019incertitude sur la nature et les fronti\u00e8res de la guerre a maintenu un pan de la soci\u00e9t\u00e9 ukrainienne dans un \u00e9tat de qui-vive, situation sociale o\u00f9 les choix individuels et les pratiques collectives \u00e9taient ajust\u00e9s \u00e0 un horizon de la guerre. Ainsi, des anciens combattants, bien que revenus \u00e0 la vie civile, ont continu\u00e9 \u00e0 s\u2019engager dans des projets li\u00e9s au front, voire \u00e0 se former dans la perspective d\u2019une poursuite de la guerre ; des b\u00e9n\u00e9voles ont professionnalis\u00e9 et p\u00e9rennis\u00e9 leur action ; des citoyens ordinaires, enfin, ont d\u00e9velopp\u00e9 des savoir-faire et pratiques potentiellement utiles en temps de guerre. Dans cette Ukraine sur le qui-vive, l\u2019institution militaire a \u00e9t\u00e9 per\u00e7ue comme centrale pr\u00e9cis\u00e9ment parce que le pays faisait face \u00e0 l\u2019horizon de la menace.<\/p>\n\n\n\n Les politiques d\u2019accompagnement de la sortie de guerre comportent souvent un volet \u00ab d\u00e9sarmement \u2013 d\u00e9militarisation \u2013 r\u00e9int\u00e9gration \u00bb ou \u00ab DDR \u00bb, sp\u00e9cifiquement destin\u00e9 aux combattants du conflit arm\u00e9, bas\u00e9 sur des proc\u00e9dures formul\u00e9es par les Nations unies <\/span>19<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Ces politiques encadrent une transition par \u00e9tapes entre un statut de combattant et un statut de civil via des politiques de contr\u00f4le des armes, de prise en charge des anciens combattants et de leur r\u00e9int\u00e9gration dans la vie civile. Ancr\u00e9es dans une vision binaire d\u2019un \u00e9tat de guerre comme oppos\u00e9 \u00e0 un \u00e9tat de paix, elles voient le maintien d\u2019une certaine militarisation de la soci\u00e9t\u00e9 comme un signe d\u2019\u00e9chec des politiques de sortie de conflit arm\u00e9.<\/p>\n\n\n\n Face \u00e0 cette vision, le cas ukrainien pose des questions tout \u00e0 fait particuli\u00e8res. L\u2019interp\u00e9n\u00e9tration des logiques militaires et des logiques civiles, ainsi que l\u2019absence d\u2019un clivage clair entre civils et militaires dans les personnes engag\u00e9es dans la guerre, ont \u00e9t\u00e9 parmi les clefs de l\u2019agilit\u00e9 de l\u2019arm\u00e9e ukrainienne, mais aussi de la r\u00e9silience de la soci\u00e9t\u00e9 civile face \u00e0 l\u2019agression russe. Le soutien aux anciens combattants, mais aussi aux civils engag\u00e9s dans la guerre, est un besoin incontestable et continu qui n\u2019a pas \u00e0 \u00eatre corr\u00e9l\u00e9 \u00e0 une fin de la guerre. La question de la d\u00e9militarisation, quant \u00e0 elle, est fortement d\u00e9pendante des perceptions que les acteurs du terrain auront de la nature de la sortie de guerre, et notamment de la persistance d\u2019un horizon de la menace contre l\u2019Ukraine. Si l\u2019arr\u00eat des combats, quelle que soit la forme qu\u2019il prend, n\u2019est pas accompagn\u00e9 d\u2019une certitude de disparition de la menace, la soci\u00e9t\u00e9 ukrainienne risque de rester sur le qui-vive, refusant la qualification d\u2019apr\u00e8s-guerre, jugeant d\u00e9plac\u00e9es les politiques de retour \u00e0 la vie civile.<\/p>\n\n\n\n Dans cette Ukraine sur le qui-vive, l\u2019institution militaire a \u00e9t\u00e9 per\u00e7ue comme centrale pr\u00e9cis\u00e9ment parce que le pays faisait face \u00e0 l\u2019horizon de la menace.<\/p>Anna Colin Lebedev<\/cite><\/blockquote><\/figure>\n\n\n\n La guerre a aussi un effet transformateur sur les clivages et les conflictualit\u00e9s politiques. Dans les ann\u00e9es 1990 et 2000, la soci\u00e9t\u00e9 ukrainienne \u00e9tait d\u00e9crite, \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur comme \u00e0 l\u2019ext\u00e9rieur du pays, comme divis\u00e9e entre un Ouest et un Est, subjectivement et objectivement diff\u00e9rents. L\u2019Ouest \u00e9tait d\u00e9crit comme ukrainophone, rural, tendant \u00e0 s\u2019identifier avec les pays d\u2019Europe centrale et orientale et avec une histoire non-sovi\u00e9tique du pays. L\u2019Est, \u00e0 l\u2019inverse, \u00e9tait qualifi\u00e9 de russophone, industriel, fier de l\u2019histoire sovi\u00e9tique et regardant davantage vers le voisin russe <\/span>20<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Rapidement critiqu\u00e9e et nuanc\u00e9e \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur du pays, cette grille de lecture a cependant eu des effets de long terme dans les r\u00e9cits politiques ou acad\u00e9miques d\u00e9crivant et expliquant l\u2019Ukraine. Ainsi, la plupart des instituts d\u2019opinion publique ukrainiens continuent encore aujourd\u2019hui \u00e0 regrouper les r\u00e9sultats de leurs sondages par blocs \u00ab Est \u00bb, \u00ab Ouest \u00bb, \u00ab Centre \u00bb et \u00ab Sud \u00bb, aveugles \u00e0 des indicateurs plus fins, fabriquant une r\u00e9alit\u00e9 sociale qu\u2019ils entendent d\u00e9crire. Le r\u00e9cit d\u2019une Ukraine cliv\u00e9e dont certaines r\u00e9gions subissent une oppression en raison de leur sp\u00e9cificit\u00e9 a \u00e9t\u00e9 \u00e9galement une constante du discours du pouvoir russe, justifiant l\u2019annexion de la Crim\u00e9e, la guerre dans le Donbass, puis l\u2019invasion \u00e0 partir de f\u00e9vrier 2022.<\/p>\n\n\n\n D\u00e8s le d\u00e9but de la guerre en 2014, l\u2019inad\u00e9quation de la lecture binaire Est\/Ouest est devenue empiriquement \u00e9vidente. L\u2019encapsulement des positions pro-russes dans les territoires s\u00e9paratistes et en Crim\u00e9e, les d\u00e9placements internes de population de l\u2019est vers l\u2019ouest, ainsi que la perception croissante du voisin oriental comme source de menace, avaient d\u2019ores et d\u00e9j\u00e0 transform\u00e9 le paysage politique de l\u2019Ukraine. Si l\u2019unification nouvelle du paysage politique a souvent \u00e9t\u00e9 d\u00e9crite, il est important de prendre \u00e9galement en compte le facteur local qui joue un r\u00f4le important. Depuis la r\u00e9forme de d\u00e9centralisation lanc\u00e9e il y une dizaine d\u2019ann\u00e9es et per\u00e7ue positivement en Ukraine <\/span>21<\/sup><\/a><\/span><\/span>, la dimension locale, qui ne se limite pas \u00e0 un clivage est-ouest, est un aspect important de la politique ukrainienne. L\u2019entr\u00e9e de la guerre dans une phase de haute intensit\u00e9 introduit cependant de nouveaux clivages, dont la structuration n\u2019attend pas l\u2019apr\u00e8s-guerre, et se joue au jour le jour.<\/p>\n\n\n\n L\u2019exp\u00e9rience in\u00e9gale de la guerre est aujourd\u2019hui l\u2019un des facteurs de diff\u00e9renciation les plus importants. Un premier clivage imm\u00e9diatement visible et de plus en plus saillant est entre ceux qui s\u2019engagent dans la guerre, et ceux qui se mettent \u00e0 l\u2019\u00e9cart : d\u2019un c\u00f4t\u00e9 les combattants et les b\u00e9n\u00e9voles au service de l\u2019arm\u00e9e, de l\u2019autre ceux qui trouvent les moyens d\u2019\u00e9chapper \u00e0 la mobilisation, vigoureusement condamn\u00e9s dans les d\u00e9bats sociaux. Le clivage s\u2019\u00e9tend \u00e9galement \u00e0 d\u2019autres cat\u00e9gories de la population : ceux qui sont rest\u00e9s en Ukraine, dans les r\u00e9gions touch\u00e9es par la guerre, se per\u00e7oivent comme ayant une conscience de la guerre diff\u00e9rente de ceux qui se sont r\u00e9fugi\u00e9s dans les r\u00e9gions occidentales, et surtout de ceux qui ont quitt\u00e9 l\u2019Ukraine pour un autre pays.<\/p>\n\n\n\n Surtout, la diff\u00e9rence d\u2019exp\u00e9rience et de perception de la guerre risque de constituer un clivage important entre les r\u00e9gions ayant v\u00e9cu sous l\u2019occupation russe, et les autres. La question de la collaboration dans les territoires occup\u00e9es pendant une courte dur\u00e9e est d\u2019ores et d\u00e9j\u00e0 un probl\u00e8me pour l\u2019\u00c9tat ukrainien <\/span>22<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Le d\u00e9fi sera d\u2019une autre ampleur pour les r\u00e9gions toujours sous occupation aujourd\u2019hui, mais surtout pour celles contr\u00f4l\u00e9es par la Russie depuis 2014. Le temps long de la guerre, autant que les conditions de la d\u00e9soccupation, jouent ici un r\u00f4le central dans les clivages de l\u2019apr\u00e8s-guerre.<\/p>\n\n\n\n Penser l\u2019apr\u00e8s-guerre en Ukraine dans la complexit\u00e9 de ses dimensions politiques et sociales suppose de penser avant tout le d\u00e9roulement du conflit arm\u00e9 en prenant en compte la dimension temporelle et l\u2019incertitude sur les fronti\u00e8res de la guerre. Si la question de la sortie de guerre doit int\u00e9grer la question du temps long, ce n\u2019est pas tant pour se demander \u00ab quand est-ce qu\u2019on commence la reconstruction ? \u00bb que pour comprendre que guerre et apr\u00e8s-guerre ne sont pas des espaces d\u00e9limit\u00e9s, et que le quotidien de la guerre est la matrice de la soci\u00e9t\u00e9 de l\u2019apr\u00e8s-guerre. L\u2019apr\u00e8s-guerre en Ukraine se joue maintenant.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":" La guerre et la paix ne sont pas \u00e9tanches. Bien avant que Vladimir Poutine ne lance son invasion \u00e0 grande \u00e9chelle, l\u2019Ukraine \u00e9tait d\u00e9j\u00e0 d\u00e9finie par l\u2019\u00e9tat de guerre. Pour penser l\u2019apr\u00e8s-guerre en Ukraine, il faut int\u00e9grer les clivages propres \u00e0 ce temps long de la conflictualit\u00e9. Peut-on jamais sortir de la guerre ?<\/p>\n","protected":false},"author":2622,"featured_media":212536,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","sticky":false,"template":"templates\/post-studies.php","format":"standard","meta":{"_acf_changed":false,"_trash_the_other_posts":false,"footnotes":""},"categories":[3712],"tags":[],"geo":[1917],"class_list":["post-212492","post","type-post","status-publish","format-standard","hentry","category-ukraine-la-guerre-deux-ans-apres","staff-anna-colin-lebedev","geo-europe"],"acf":[],"yoast_head":"\nQu\u2019est-ce que l\u2019apr\u00e8s-guerre ?<\/strong><\/h2>\n\n\n\n
\r\n <\/picture>\r\n \n Un \u00c9tat r\u00e9appropri\u00e9<\/strong><\/h2>\n\n\n\n
Les mouvements sociaux, acteurs centraux de la soci\u00e9t\u00e9 ukrainienne<\/strong><\/h2>\n\n\n\n
\r\n <\/picture>\r\n \n Une interp\u00e9n\u00e9tration du civil et du militaire<\/strong><\/h2>\n\n\n\n
Une transformation des clivages<\/strong><\/h2>\n\n\n\n