{"id":188757,"date":"2023-06-20T11:06:13","date_gmt":"2023-06-20T09:06:13","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/?p=188757"},"modified":"2023-06-21T16:34:22","modified_gmt":"2023-06-21T14:34:22","slug":"la-guerre-etendue-vue-de-washington-1","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2023\/06\/20\/la-guerre-etendue-vue-de-washington-1\/","title":{"rendered":"La guerre \u00e9tendue vue de Washington"},"content":{"rendered":"\n
Entre 2017 et 2019, Fiona Hill fut membre du Conseil de s\u00e9curit\u00e9 nationale am\u00e9ricain, o\u00f9 elle \u00e9tait sp\u00e9cifiquement charg\u00e9e de l\u2019Europe et de la Russie. Depuis les ann\u00e9es 1990, elle s\u2019est impos\u00e9e comme l\u2019une des meilleures sp\u00e9cialistes du monde post-sovi\u00e9tique. Apr\u00e8s avoir fait un \u00e9change en Union sovi\u00e9tique en 1987, lorsqu\u2019elle \u00e9tait encore \u00e9tudiante \u00e0 l\u2019Universit\u00e9 de Saint Andrews (\u00c9cosse), elle s\u2019est ensuite sp\u00e9cialis\u00e9e en histoire russe, consacrant sa th\u00e8se aux repr\u00e9sentations que les \u00e9lites post-sovi\u00e9tiques avaient de la Russie pr\u00e9-r\u00e9volutionnaire. Au cours de sa carri\u00e8re, elle n\u2019a cess\u00e9 d\u2019\u00e9voluer entre la recherche acad\u00e9mique, les think tanks et le service public, travaillant notamment pour les administrations Bush et Obama. Depuis quelques ann\u00e9es, elle fait partie des voix les plus pessimistes quant \u00e0 l\u2019\u00e9volution de la situation en Russie, allant jusqu\u2019\u00e0 argumenter, quelques jours apr\u00e8s l\u2019invasion de l\u2019Ukraine, que la Troisi\u00e8me Guerre mondiale avait d\u00e9j\u00e0 <\/em>commenc\u00e9 \u2014 et qu\u2019il \u00e9tait temps d\u2019en prendre conscience. <\/p>\n\n\n\n Le 13 mai 2023, Fiona Hill a donn\u00e9 une le\u00e7on dans le cadre des conf\u00e9rences Lennart Meri (du nom du Pr\u00e9sident estonien entre 1992 et 2001) organis\u00e9 par le International Centre for Defence and Security<\/em> (ICDS), un think tank cr\u00e9\u00e9 en Estonie en 2006 pour promouvoir la r\u00e9flexion strat\u00e9gique sur la s\u00e9curit\u00e9 \u00e9t la d\u00e9fense dans la r\u00e9gion. Tr\u00e8s attendue, sa prise de parole portait sur les tensions que l\u2019invasion de l\u2019Ukraine avait fait surgir entre l\u2019Ouest et le reste du monde (\u00ab the West and the rest<\/em> \u00bb pour reprendre une expression consacr\u00e9e). L\u2019agression de Vladimir Poutine aurait d\u00e9finitivement fait r\u00e9\u00e9merger un camp des non-align\u00e9s. Pour la plupart situ\u00e9s dans le Sud global, ceux-ci veulent se tenir \u00e0 distance de la guerre qui a \u00e9clat\u00e9 en Europe. Plus g\u00e9n\u00e9ralement, d\u00e9termin\u00e9s \u00e0 conserver leur autonomie, ils ne veulent pas \u00eatre pris dans l\u2019affrontement qui se pr\u00e9pare entre les \u00c9tats-Unis et la Russie. En r\u00e9alit\u00e9, Fiona Hill va encore plus loin pr\u00e9sentant ces r\u00e9actions \u00e0 la guerre en Ukraine, comme une \u00ab r\u00e9bellion par procuration contre l\u2019h\u00e9g\u00e9monie am\u00e9ricaine \u00bb (\u00ab a proxy rebellion against the U.S.<\/em> \u00bb). L\u2019un des aspects d\u00e9cisifs du contentieux qui oppose les \u00c9tats-Unis et, dans une moindre mesure, leurs alli\u00e9s europ\u00e9ens \u2014 ce qu\u2019elle appelle aussi la \u00ab communaut\u00e9 transatlantique \u00bb \u2014 au reste du monde, tient \u00e9galement \u00e0 l\u2019impression que l\u2019Ouest, tr\u00e8s rapide \u00e0 se mobiliser en faveur l\u2019Ukraine (en 2022 du moins), est incapable de venir au secours des pays du Sud. Il est ainsi frappant de constater que le \u00ab Sommet pour un nouveau pacte financier mondial \u00bb, pourtant pr\u00e9sent\u00e9 comme un moment clef au cours du dernier G7 \u00e0 Hiroshima, est largement d\u00e9laiss\u00e9 par les puissances occidentales : des membres du G7, seules la France, qui accueille le Sommet, et l\u2019Allemagne ont pour l\u2019instant annonc\u00e9 leur participation. <\/p>\n\n\n\n Dans cette le\u00e7on, Fiona Hill jette ainsi les bases d\u2019une diplomatie du kayak, une m\u00e9taphore qu\u2019elle d\u00e9ploie au fil de ce texte. En creux, elle propose aux Am\u00e9ricains d\u2019op\u00e9rer un d\u00e9centrement de leur regard pour transformer leur doctrine strat\u00e9gique et diplomatique. C\u2019est une lecture essentielle au moment o\u00f9 les \u00c9tats-Unis paraissent souvent pris dans une impasse g\u00e9opolitique, pris au pi\u00e8ge de leur puissance et de la mani\u00e8re dont ils en ont us\u00e9 depuis 1945. <\/p>\n\n\n\n Plus d’un an apr\u00e8s l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la guerre brutale d\u00e9clench\u00e9e par Vladimir Poutine s’est transform\u00e9e, comme le font souvent les grands conflits r\u00e9gionaux, en une guerre aux ramifications mondiales. Il ne s’agit pas, comme le pr\u00e9tendent Vladimir Poutine et d’autres, d’une guerre par procuration entre les \u00c9tats-Unis, ou l’\u00ab Occident collectif \u00bb (les \u00c9tats-Unis et leurs alli\u00e9s, europ\u00e9ens ou non), et la Russie. Dans l’ar\u00e8ne g\u00e9opolitique actuelle, la guerre dans laquelle nous sommes offre un tableau renvers\u00e9 \u2014 une guerre par procuration pour une r\u00e9bellion de la Russie et du \u00ab reste du monde \u00bb contre les \u00c9tats-Unis. La guerre en Ukraine est peut-\u00eatre l’\u00e9v\u00e9nement qui rend la disparition de la pax americana<\/em> \u00e9vidente pour tout le monde.<\/p>\n\n\n\n Dans sa poursuite de la guerre, la Russie a habilement exploit\u00e9 une r\u00e9sistance internationale profond\u00e9ment ancr\u00e9e, et dans certains cas des contestations ouvertes au maintien du leadership am\u00e9ricain sur les institutions mondiales. La Russie n’est pas la seule \u00e0 vouloir pousser les \u00c9tats-Unis sur la touche en Europe, et la Chine \u00e0 vouloir minimiser et contenir la pr\u00e9sence militaire et \u00e9conomique des \u00c9tats-Unis en Asie, afin qu’elles puissent toutes deux s\u00e9curiser leurs sph\u00e8res d’influence respectives. D’autres pays traditionnellement consid\u00e9r\u00e9s comme des \u00ab puissances moyennes \u00bb ou des \u00ab \u00e9tats pivots \u00bb (\u00ab swing states<\/em> \u00bb) \u2014 ce que l’on appelle le \u00ab reste \u00bb, pour le distinguer de l\u2019Ouest \u2014 cherchent \u00e0 r\u00e9duire l\u2019influence des \u00c9tats-Unis et \u00e0 exercer une plus grande influence sur les affaires mondiales. Ils veulent d\u00e9cider, et non se faire dicter ce qui est dans leur int\u00e9r\u00eat. En bref, en 2023, nous entendons un non retentissant \u00e0 la domination am\u00e9ricaine et constatons un app\u00e9tit marqu\u00e9 pour un monde sans h\u00e9g\u00e9monie.<\/p>\n\n\n\n Dans ce contexte, la prochaine it\u00e9ration du syst\u00e8me mondial de s\u00e9curit\u00e9, de politique et d’\u00e9conomie ne sera pas encadr\u00e9e par les seuls \u00c9tats-Unis. La r\u00e9alit\u00e9 est d\u00e9j\u00e0 autre. Il ne s’agit pas d’un \u00ab ordre \u00bb, qui renvoie intrins\u00e8quement \u00e0 une hi\u00e9rarchie, ni m\u00eame d’un \u00ab d\u00e9sordre \u00bb. Toute une s\u00e9rie de pays poussent et tirent en fonction de leurs propres priorit\u00e9s pour produire de nouveaux accords. Au sein de la communaut\u00e9 transatlantique, nous devrons peut-\u00eatre d\u00e9velopper une nouvelle terminologie et adapter nos approches en mati\u00e8re de politique \u00e9trang\u00e8re pour faire face \u00e0 des r\u00e9seaux horizontaux de structures qui se chevauchent et parfois se concurrencent. Nous sommes entr\u00e9s dans ce que Samir Saran, pr\u00e9sident de l’Observer Research Foundation en Inde, a appel\u00e9 l’\u00e8re des \u00ab partenariats \u00e0 responsabilit\u00e9 limit\u00e9e \u00bb. La r\u00e9gionalisation de la s\u00e9curit\u00e9, du commerce et des alliances politiques complique nos strat\u00e9gies de s\u00e9curit\u00e9 nationale et la planification de nos politiques, mais elle peut aussi recouper nos priorit\u00e9s de mani\u00e8re utile si nous savons faire preuve de souplesse et de cr\u00e9ativit\u00e9, au lieu de nous contenter de r\u00e9sister et de r\u00e9agir lorsque les choses prennent une direction qui ne nous pla\u00eet pas. Comme l’a sugg\u00e9r\u00e9 l’expert britannique en s\u00e9curit\u00e9 Neil Melvin, nous devrions adopter l’id\u00e9e d’un \u00ab minilat\u00e9ralisme \u00bb.<\/p>\n\n\n\n Distinct du bilat\u00e9ralisme ou du multilat\u00e9ralisme (souvent favoris\u00e9 par les Europ\u00e9ens) le minilat\u00e9ralisme se r\u00e9f\u00e8re \u00e0 la diplomatie entre de petits groupes d’\u00c9tats dans la poursuite d’objectifs communs dans le cadre d’organisations multilat\u00e9rales.<\/p>\n\n\n\n Lennart Meri, que nous c\u00e9l\u00e9brons et comm\u00e9morons avec cette conf\u00e9rence, a fait preuve de flexibilit\u00e9 et de cr\u00e9ativit\u00e9 \u00e0 un moment tout aussi perturbant, \u00e0 la fin de la guerre froide, comme on pouvait s’y attendre de la part d’un polyglotte, d’un \u00e9crivain et d’un cin\u00e9aste de talent, qui, en tant qu’homme politique, a \u00e9t\u00e9 \u00e0 la fois ministre des affaires \u00e9trang\u00e8res et Pr\u00e9sident. En r\u00e9alit\u00e9, nous pourrions m\u00eame sugg\u00e9rer que Lennart Meri a pr\u00e9figur\u00e9 notre \u00e9poque actuelle. Dans les ann\u00e9es 1990, le Pr\u00e9sident Meri a d\u00e9fendu l’id\u00e9e que le fait de devenir un Europ\u00e9en ou un transatlantiste ne signifiait pas qu’il fallait se d\u00e9barrasser de son identit\u00e9 estonienne distincte ou ignorer son contexte r\u00e9gional sp\u00e9cifique. Historien de formation, il comprenait ce contexte au plus profond de lui-m\u00eame. Le Pr\u00e9sident Meri a cherch\u00e9 \u00e0 d\u00e9velopper de multiples perspectives r\u00e9gionales et mondiales pour l’Estonie. Il a donn\u00e9 la priorit\u00e9 aux relations avec les voisins imm\u00e9diats et l’Europe, avec les \u00c9tats-Unis et avec les Nations unies. Les relations avec les \u00c9tats-Unis \u00e9taient cruciales pour lui, car Washington n’a jamais reconnu l’occupation sovi\u00e9tique des \u00c9tats baltes apr\u00e8s la Seconde Guerre mondiale et a facilit\u00e9 la libert\u00e9 de l’Estonie apr\u00e8s 1991. Mais Meri a \u00e9galement adopt\u00e9 une approche r\u00e9solument balte dans l’\u00e9laboration de la politique de l’Estonie. Il n’a jamais subordonn\u00e9 l’Estonie \u00e0 une puissance plus importante. Le pr\u00e9sident Meri savait parfaitement ce qu’un petit pays pouvait accomplir et pourquoi. Comme il l’a fait remarquer dans un commentaire c\u00e9l\u00e8bre sur la proximit\u00e9 \u00e9vidente de l’Estonie avec la Russie et son histoire avec elle : \u00ab Compar\u00e9e \u00e0 la Russie, l’Estonie est comme un kayak inuit. Un supertanker met 16 milles nautiques pour faire demi-tour, mais l’Inuit peut faire un virage \u00e0 180 degr\u00e9s en un clin d’\u0153il \u00bb.<\/p>\n\n\n\n Lennart Meri (1929-2006), qui donne son nom \u00e0 la conf\u00e9rence dans laquelle s\u2019exprime Fiona Hill, fut Pr\u00e9sident de l\u2019Estonie entre 1992 et 2001 apr\u00e8s avoir \u00e9t\u00e9 son ministre des affaires \u00e9trang\u00e8res entre 1990 et 1992. Issu d\u2019une famille de notables estoniens, Meri fut d\u2019abord \u00e9duqu\u00e9 \u00e0 l\u2019\u00e9tranger pendant les ann\u00e9es 1930. Il \u00e9tait en Estonie en 1940, lorsque l\u2019Union sovi\u00e9tique annexa le pays. Tr\u00e8s vite, il fut d\u00e9port\u00e9 avec sa famille en Sib\u00e9rie. Apr\u00e8s la guerre, il fut rapatri\u00e9 dans son pays o\u00f9 il \u00e9tudia l\u2019histoire, une discipline qu\u2019il n\u2019eut n\u00e9anmoins pas le droit d\u2019enseigner. Il se tourna alors vers le cin\u00e9ma et la litt\u00e9rature, r\u00e9alisant des films et \u00e9crivant des livres de voyage. La plupart de ses \u0153uvres furent en partie censur\u00e9es ou compl\u00e8tement interdites. \u00c0 partir des ann\u00e9es 1970, il obtient ponctuellement le droit de quitter l\u2019Union sovi\u00e9tique et profite de voyages en Finlande pour commencer \u00e0 faire entendre la voix de la dissidence estonienne, qui se cristallise particuli\u00e8rement dans la lutte contre des projets d\u2019extraction de phosphate. En 1988, il adh\u00e8re au Front populaire d\u2019Estonie \u2014 une r\u00e9f\u00e9rence directe \u00e0 la mobilisation antifasciste dans les pays baltes dans les ann\u00e9es 1930. Deux ans plus tard, apr\u00e8s les \u00e9lections libres de mars 1990, il devient ministre des affaires \u00e9trang\u00e8res, avant d\u2019\u00eatre \u00e9lu Pr\u00e9sident de la R\u00e9publique, comme candidat de Pro-patria, une plateforme politique r\u00e9unissant d\u00e9mocrates-chr\u00e9tiens, conservateurs et nationalistes. Apr\u00e8s un deuxi\u00e8me mandat pr\u00e9sidentiel, il prend sa retraite et meurt d\u2019un cancer du cerveau quelques ann\u00e9es plus tard. Aujourd\u2019hui encore, il est une figure de l\u2019ind\u00e9pendance estonienne et de l\u2019ouverture vers l\u2019Ouest. <\/p>\n\n\n\n S’il \u00e9tait pr\u00e9sent aujourd’hui, je pense que le pr\u00e9sident Meri reconna\u00eetrait que la guerre en Ukraine est une guerre qui change le monde ou le syst\u00e8me. Elle a fait dispara\u00eetre les d\u00e9tails superficiels et a mis en \u00e9vidence les failles et les lignes de fracture de l’ordre international. Il ne s’agit pas d’un conflit du XXIe si\u00e8cle. C’est une guerre r\u00e9trograde \u2014 ce que nous esp\u00e9rons \u00eatre le spasme terminal des convulsions europ\u00e9ennes qui ont secou\u00e9 le reste du monde au XXe si\u00e8cle en raison de la domination mercantiliste et des conqu\u00eates imp\u00e9riales de l’Europe. Poutine et Moscou se battent en Ukraine pour reprendre le contr\u00f4le d’anciens territoires coloniaux abandonn\u00e9s \u00e0 la fin du XXe si\u00e8cle.<\/p>\n\n\n\n Poutine estime que la Russie n’est pas seulement l’\u00c9tat successeur de l’Empire russe et de l’Union sovi\u00e9tique, mais un \u00c9tat dans la continuit\u00e9 de ceux-ci. C’est d’ailleurs ainsi que nous avons tous reconnu la Russie apr\u00e8s la dissolution de l’URSS en d\u00e9cembre 1991. Ce fait explique en grande partie le pr\u00e9sent. La Russie est le dernier empire continental en Europe. Au cours du XXe si\u00e8cle, la Premi\u00e8re Guerre mondiale a mis \u00e0 bas les empires ottoman et austro-hongrois, ainsi que l’empereur allemand et le tsar russe. Les bolcheviks reconstituent la Russie sous la forme de l’Union sovi\u00e9tique et conservent par la force de nombreuses possessions territoriales contigu\u00ebs de Moscou. La Seconde Guerre mondiale marque la fin du colonialisme europ\u00e9en et entra\u00eene la d\u00e9sint\u00e9gration de l’Empire britannique d’outre-mer, mais l’Union sovi\u00e9tique s’\u00e9tend \u00e0 nouveau. En effet, l’URSS reprend l’Estonie et les autres \u00c9tats baltes, et tente de reprendre la Finlande. Les Sovi\u00e9tiques ont \u00e9galement exerc\u00e9 une nouvelle domination sur l’Europe de l’Est apr\u00e8s la Seconde Guerre mondiale. Le z\u00e8le expansionniste de l’URSS l’a ensuite entra\u00een\u00e9e dans une confrontation de pr\u00e8s d’un demi-si\u00e8cle avec les \u00c9tats-Unis, ancienne colonie britannique. L’Union sovi\u00e9tique, l’empire russe, s’est finalement effondr\u00e9e \u00e0 la fin de cette p\u00e9riode, la guerre froide, mais pas dans l’esprit de Vladimir Poutine et de sa cohorte.<\/p>\n\n\n\n Depuis 1991, les \u00c9tats-Unis semblent \u00eatre demeur\u00e9s la seule superpuissance mondiale. Mais aujourd’hui, apr\u00e8s une p\u00e9riode troubl\u00e9e de deux d\u00e9cennies marqu\u00e9e par des interventions militaires men\u00e9es par les Am\u00e9ricains et un engagement direct dans des guerres r\u00e9gionales, la guerre en Ukraine met en \u00e9vidence le d\u00e9clin des \u00c9tats-Unis eux-m\u00eames. Ce d\u00e9clin est relatif sur le plan \u00e9conomique et militaire, mais grave en termes d’autorit\u00e9 morale. Malheureusement, comme l’avait pr\u00e9vu Oussama ben Laden, les r\u00e9actions et les actions des \u00c9tats-Unis ont \u00e9rod\u00e9 leur position depuis les attaques terroristes d\u00e9vastatrices du 11 septembre. La \u00ab fatigue de l’Am\u00e9rique \u00bb et la d\u00e9sillusion quant \u00e0 son r\u00f4le h\u00e9g\u00e9monique mondial sont largement r\u00e9pandues. Cela vaut \u00e9galement pour les \u00c9tats-Unis eux-m\u00eames, comme en t\u00e9moignent les d\u00e9bats au Congr\u00e8s, dans les m\u00e9dias et dans les groupes de r\u00e9flexion. Pour certains, les \u00c9tats-Unis sont un acteur international imparfait qui doit s’occuper de ses propres probl\u00e8mes int\u00e9rieurs. Pour d’autres, les \u00c9tats-Unis sont une nouvelle forme d’\u00c9tat imp\u00e9rial qui ignore les pr\u00e9occupations des autres et qui fait peser son poids militaire.<\/p>\n\n\n\n \u00c0 court terme, cette situation est particuli\u00e8rement pr\u00e9judiciable \u00e0 l’Ukraine. Globalement, la guerre en Ukraine est consid\u00e9r\u00e9e comme l’un des nombreux \u00e9v\u00e9nements dramatiques survenus depuis 2001 sous l’impulsion des \u00c9tats-Unis. La conduite muscl\u00e9e de la \u00ab guerre contre la terreur \u00bb a ali\u00e9n\u00e9 une grande partie du monde musulman. L’invasion am\u00e9ricaine de l’Irak en 2003, dans la foul\u00e9e de l’Afghanistan, a raviv\u00e9 les horreurs des interventions am\u00e9ricaines de la guerre froide en Cor\u00e9e et au Vi\u00eat Nam. L’inaction des \u00c9tats-Unis dans des conflits comme celui du Y\u00e9men et ses interventions s\u00e9lectives en Libye et en Syrie ont soulign\u00e9 l’incoh\u00e9rence de la politique \u00e9trang\u00e8re am\u00e9ricaine. La crise financi\u00e8re de 2008-2010 et la Grande R\u00e9cession, suivies des bouleversements int\u00e9rieurs am\u00e9ricains et de l’\u00e9lection de Donald Trump en 2016, ont affaibli le pouvoir qu\u2019avait l’exemple d\u00e9mocratique am\u00e9ricain. Le m\u00e9pris de Trump pour les accords internationaux et sa mauvaise gestion flagrante de la pand\u00e9mie mondiale, ainsi que, plus r\u00e9cemment, le retrait b\u00e2cl\u00e9 de l’Afghanistan par l’administration Biden, ont jet\u00e9 un doute suppl\u00e9mentaire sur la capacit\u00e9 des \u00c9tats-Unis \u00e0 jouer un r\u00f4le de premier plan \u00e0 l’\u00e9chelle mondiale<\/p>\n\n\n\n Cela ne signifie pas que l’invasion de l’Ukraine par la Russie soit per\u00e7ue de mani\u00e8re positive. Les principes fondamentaux du droit international constituent toujours un ordre ou un principe d’ordre universel, en particulier pour les petits \u00c9tats. Les pays du monde entier ont largement reconnu et condamn\u00e9 les faits de l’agression russe, notamment par de multiples votes \u00e0 l’Assembl\u00e9e g\u00e9n\u00e9rale des Nations unies. La Cour internationale de justice, la Cour p\u00e9nale internationale et d’autres d\u00e9cisions internationales ont soulign\u00e9 que l’Ukraine avait la haute main non seulement sur le plan moral, mais aussi sur le plan juridique dans cette guerre. La conduite brutale et les atrocit\u00e9s commises par Moscou, ainsi que ses maladresses et ses \u00e9checs militaires, ont affaibli la position de la Russie<\/a>. Mais la fa\u00e7on dont la plupart des \u00c9tats et des commentateurs per\u00e7oivent les \u00c9tats-Unis constitue leur prisme d’\u00e9valuation des actions de la Russie.<\/p>\n\n\n\n L’Ukraine est essentiellement jug\u00e9e coupable par association pour avoir b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 du soutien direct des \u00c9tats-Unis dans ses efforts pour se d\u00e9fendre et lib\u00e9rer son territoire. En effet, dans certains forums internationaux, mais aussi aux \u00c9tats-Unis, les discussions sur l’Ukraine d\u00e9g\u00e9n\u00e8rent rapidement en controverses sur le comportement pass\u00e9 des \u00c9tats-Unis. Les actions de la Russie sont abord\u00e9es de mani\u00e8re superficielle. \u00ab Oui, la Russie a renvers\u00e9 le principe fondamental d’apr\u00e8s 1945 de l’interdiction de la guerre et du recours \u00e0 la force, inscrit dans l’article 2 de la Charte des Nations unies… Mais les \u00c9tats-Unis ont d\u00e9j\u00e0 port\u00e9 atteinte \u00e0 ce principe lorsqu’ils ont envahi l’Irak il y a 20 ans. \u00bb<\/p>\n\n\n\n Ce genre d\u2019argumentaire n’est pas seulement une caract\u00e9ristique de la rh\u00e9torique russe. L’invasion am\u00e9ricaine de l’Irak a universellement sap\u00e9 la cr\u00e9dibilit\u00e9 des \u00c9tats-Unis et continue de le faire. Pour de nombreux d\u00e9tracteurs des \u00c9tats-Unis, l’Irak est le plus r\u00e9cent exemple d’une s\u00e9rie de p\u00e9ch\u00e9s am\u00e9ricains remontant au Vi\u00eat Nam et le pr\u00e9curseur des \u00e9v\u00e9nements actuels. M\u00eame si une petite poign\u00e9e d’\u00c9tats s’est rang\u00e9e du c\u00f4t\u00e9 de la Russie dans les r\u00e9solutions successives de l’Assembl\u00e9e g\u00e9n\u00e9rale des Nations unies, d’importantes abstentions, notamment de la part de la Chine et de l’Inde, t\u00e9moignent du m\u00e9contentement \u00e0 l’\u00e9gard des \u00c9tats-Unis. Par cons\u00e9quent, la double t\u00e2che vitale de restaurer l’interdiction de la guerre et du recours \u00e0 la force en tant que pierre angulaire des Nations unies et du syst\u00e8me international, et de d\u00e9fendre la souverainet\u00e9 et l’int\u00e9grit\u00e9 territoriale de l’Ukraine, se perd dans le marasme du scepticisme et de la suspicion \u00e0 l’\u00e9gard des \u00c9tats-Unis.<\/p>\n\n\n\n Dans ce que l’on appelle le \u00ab Sud global \u00bb et ce que j’appelle vaguement le \u00ab reste du monde \u00bb, les \u00c9tats-Unis ne sont pas per\u00e7us comme un \u00c9tat vertueux. Les perceptions de l’orgueil d\u00e9mesur\u00e9 et de l’hypocrisie des \u00c9tats-Unis sont largement r\u00e9pandues. La confiance dans le syst\u00e8me internationau que les \u00c9tats-Unis ont contribu\u00e9 \u00e0 inventer et qu’ils ont pr\u00e9sid\u00e9 depuis la Seconde Guerre mondiale a disparu depuis longtemps. Les \u00e9lites et les populations de nombre de ces pays estiment que ce syst\u00e8me leur a \u00e9t\u00e9 impos\u00e9 \u00e0 un moment de faiblesse, alors qu’ils venaient \u00e0 peine d’assurer leur ind\u00e9pendance. M\u00eame si les \u00e9lites et les populations ont g\u00e9n\u00e9ralement b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 de la pax americana<\/em>, elles estiment que les \u00c9tats-Unis et le bloc de pays constituant l’Occident collectif en ont b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 bien davantage. Pour eux, cette guerre vise \u00e0 prot\u00e9ger les avantages et l’h\u00e9g\u00e9monie de l’Occident, et non \u00e0 d\u00e9fendre l’Ukraine.<\/p>\n\n\n\n L\u2019Occident collectif<\/strong><\/a> est une expression de Vladimir Poutine pour d\u00e9signer ce qu\u2019il d\u00e9crit comme la collusion des \u00c9tats-Unis et de l\u2019Europe pour abattre la nation russe et ses traditions. R\u00e9guli\u00e8rement invoqu\u00e9 dans ses discours<\/strong><\/a> et dans ceux de ses alli\u00e9s, l\u2019Occident collectif a pris valeur d\u2019anti-Russie, charg\u00e9 de toutes les valeurs qui signalent l\u2019Ouest comme un espace d\u00e9cadent et mena\u00e7ant dont l\u2019ambition serait de d\u00e9truire la Russie moralement et g\u00e9ographiquement. <\/p>\n\n\n\n Les faux r\u00e9cits de la Russie sur son invasion de l’Ukraine et sur les \u00c9tats-Unis r\u00e9sonnent et s’enracinent dans le monde entier parce qu’ils tombent sur un sol fertile. La d\u00e9sinformation russe ressemble davantage \u00e0 de l’information \u2014 elle est conforme aux \u00ab faits \u00bb tels que d’autres les per\u00e7oivent. Les \u00e9lites non occidentales partagent la m\u00eame conviction que certains analystes occidentaux, \u00e0 savoir que la Russie a \u00e9t\u00e9 provoqu\u00e9e ou pouss\u00e9e \u00e0 la guerre par les \u00c9tats-Unis et l’expansion de l’OTAN. Elles s’indignent de la puissance du dollar am\u00e9ricain et de l’utilisation fr\u00e9quente de sanctions financi\u00e8res par Washington<\/a>. Elles n’ont pas \u00e9t\u00e9 consult\u00e9es par les \u00c9tats-Unis sur cette s\u00e9rie de sanctions contre la Russie ; elles consid\u00e8rent que les sanctions occidentales limitent leur approvisionnement en \u00e9nergie et en denr\u00e9es alimentaires et font grimper les prix ; elles imputent le blocus russe de la mer Noire et la perturbation d\u00e9lib\u00e9r\u00e9e des exportations mondiales de c\u00e9r\u00e9ales aux \u00c9tats-Unis, et non au v\u00e9ritable responsable, Vladimir Poutine ; elles soulignent que personne n’a insist\u00e9 pour sanctionner les \u00c9tats-Unis lorsqu’ils ont envahi l’Afghanistan puis l’Irak, quand bien m\u00eame ces \u00e9lites \u00e9taient oppos\u00e9s \u00e0 l’intervention am\u00e9ricaine \u2014 pourquoi donc le feraient-elles aujourd’hui pour la Russie ?<\/p>\n\n\n\n La r\u00e9sistance des pays du Sud aux appels \u00e0 la solidarit\u00e9 des \u00c9tats-Unis et de l’Europe sur l’Ukraine est une r\u00e9bellion ouverte. Il s’agit d’une mutinerie contre ce qu’ils consid\u00e8rent comme l’Occident collectif qui domine le discours international et rejette ses probl\u00e8mes sur tous les autres, tout en \u00e9cartant leurs priorit\u00e9s en mati\u00e8re de compensation du changement climatique, de d\u00e9veloppement \u00e9conomique et d’all\u00e8gement de la dette. Les pays du Sud se sentent constamment marginalis\u00e9s dans les affaires mondiales. En fait, pourquoi les qualifier (comme je le fais dans ce discours) de \u00ab Sud mondial \u00bb, alors qu’on les appelait auparavant le tiers monde ou le monde en d\u00e9veloppement ? Pourquoi sont-ils m\u00eame le \u00ab reste du monde \u00bb ? Ils sont le monde, repr\u00e9sentant 6,5 milliards de personnes. Notre terminologie reste bien colonialiste.<\/p>\n\n\n\n Cette attitude du \u00ab Sud Global \u00bb peut \u00eatre illustr\u00e9e par la politique internationale du Pr\u00e9sident Lula. Concernant l\u2019Invasion russe de l\u2019Ukraine, sa ligne diplomatique est tr\u00e8s \u00e9loign\u00e9e de celle de \u00ab l\u2019Occident global \u00bb. le Pr\u00e9sident br\u00e9silien a ainsi affirm\u00e9 que les responsabilit\u00e9s \u00e9taient partag\u00e9es par les deux parties au conflit et a avanc\u00e9 que les Etats-Unis jouaient un r\u00f4le d\u00e9l\u00e9t\u00e8re visant \u00e0 prolonger la dur\u00e9e du conflit. Il se fait \u00e9galement tr\u00e8s critique envers le poids du dollars dans les relations \u00e9conomiques et financi\u00e8res internationales et souhaite que le \u00ab Sud Global \u00bb se dote de ses propres instruments pour sortir de cette d\u00e9pendance : une monnaie commune sud-am\u00e9ricaine et des institutions financi\u00e8res alternatives au Fmi et \u00e0 la banque mondiale, \u00e0 l\u2019instar de la nouvelle banque de d\u00e9veloppement des BRICS<\/a>. <\/p>\n\n\n\n Le mouvement des non-align\u00e9s de l’\u00e9poque de la guerre froide est r\u00e9apparu, s’il avait jamais disparu. \u00c0 l’heure actuelle, il s’agit moins d’un mouvement coh\u00e9sif que d’un d\u00e9sir de distance, d’\u00eatre tenu \u00e0 l’\u00e9cart du d\u00e9sordre europ\u00e9en autour de l’Ukraine. Mais il s’agit \u00e9galement d’une r\u00e9action n\u00e9gative tr\u00e8s claire \u00e0 la propension am\u00e9ricaine \u00e0 d\u00e9finir l’ordre mondial et \u00e0 forcer les pays \u00e0 prendre parti. Un interlocuteur indien s’est r\u00e9cemment exclam\u00e9 \u00e0 propos de l’Ukraine : \u00ab C’est votre conflit ! … Nous avons d’autres questions urgentes, nos propres probl\u00e8mes … Sur nos propres terres, nous avons nos propres orientations \u00e0 prendre… O\u00f9 \u00eates-vous quand les choses tournent mal pour nous ? \u00bb<\/p>\n\n\n\n La plupart des pays, y compris de nombreux pays europ\u00e9ens, rejettent la conception am\u00e9ricaine actuelle d’une nouvelle \u00ab comp\u00e9tition entre grandes puissances \u00bb \u2014 un bras de fer g\u00e9opolitique entre les \u00c9tats-Unis et la Chine. Les \u00c9tats et les \u00e9lites s’insurgent contre l’id\u00e9e am\u00e9ricaine selon laquelle \u00ab vous \u00eates soit avec nous, soit contre nous \u00bb, ou que vous \u00eates \u00ab du bon ou du mauvais c\u00f4t\u00e9 de l’histoire \u00bb dans une lutte \u00e9pique entre les d\u00e9mocraties et les autocraties. Peu de personnes en dehors de l’Europe acceptent cette d\u00e9finition de la guerre en Ukraine ou des enjeux g\u00e9opolitiques. Ils ne veulent pas \u00eatre assign\u00e9s \u00e0 de nouveaux blocs artificiellement impos\u00e9s ; personne parmi eux ne veut \u00eatre pris dans un affrontement titanesque entre les \u00c9tats-Unis et la Chine. Contrairement aux \u00c9tats-Unis, ainsi qu’\u00e0 d’autres pays comme le Japon, la Cor\u00e9e du Sud et l’Inde, la plupart des pays ne consid\u00e8rent pas la Chine comme une menace militaire ou s\u00e9curitaire directe. Ils peuvent avoir de s\u00e9rieux doutes sur le comportement \u00e9conomique et politique brutal de la Chine et sur ses violations flagrantes des droits de l’homme, mais ils reconnaissent toujours la valeur de la Chine en tant que partenaire commercial et d’investissement pour leur d\u00e9veloppement futur. Les \u00c9tats-Unis et l’Union europ\u00e9enne n’offrent pas suffisamment d’alternatives pour que les pays se d\u00e9tournent de la Chine, y compris dans le domaine de la s\u00e9curit\u00e9 <\/a>\u2014 et m\u00eame au sein de l’Europe, le sentiment de l’importance des enjeux pour les pays individuels dans le syst\u00e8me international au sens large et dans les relations avec la Chine varie.<\/p>\n\n\n\n En dehors de l’Europe, l’int\u00e9r\u00eat pour de nouveaux ordres r\u00e9gionaux est plus prononc\u00e9. Dans ce contexte, les BRICS \u2014 qui offrent \u00e0 leurs membres une alternative au G7 et au G20 \u2014 sont d\u00e9sormais attrayants pour d’autres. Dix-neuf pays, dont l’Arabie saoudite et l’Iran, auraient manifest\u00e9 leur int\u00e9r\u00eat \u00e0 rejoindre l’organisation avant son r\u00e9cent sommet d’avril 2023. Les pays consid\u00e8rent les BRICS (et d’autres entit\u00e9s similaires comme l’Organisation de coop\u00e9ration de Shanghai ou OCS) comme offrant des arrangements diplomatiques flexibles et de nouvelles alliances strat\u00e9giques possibles, ainsi que des opportunit\u00e9s commerciales diff\u00e9rentes au-del\u00e0 des \u00c9tats-Unis et de l’Europe. Les membres et les candidats des BRICS ont toutefois des int\u00e9r\u00eats tr\u00e8s disparates. Nous devons en tenir compte lorsque nous nous effor\u00e7ons de trouver une solution \u00e0 la guerre en Ukraine et lorsque nous envisageons les types de structures et de r\u00e9seaux avec lesquels nous devrons composer \u00e0 l’avenir.<\/p>\n\n\n\n Je vais passer en revue certains des facteurs les plus pertinents pour r\u00e9fl\u00e9chir \u00e0 l’Ukraine dans le contexte des BRICS.<\/p>\n\n\n\n Poutine et la Russie esp\u00e8rent certainement que la guerre a \u00e9branl\u00e9 l’ancienne \u00e9quation mondiale de l’apr\u00e8s-1945. Moscou a l’intention de sortir de la guerre en se concentrant sur l’expansion de son r\u00f4le et de son influence dans les organisations multilat\u00e9rales telles que les BRICS, dont les \u00c9tats-Unis et l’Occident collectif sont exclus. Mais il convient de noter qu’au sein du groupe des BRICS, pr\u00e9cis\u00e9ment \u00e0 cause de la guerre, la Russie est consid\u00e9r\u00e9e comme de plus en plus d\u00e9pendante de la Chine et comme un acteur mondial de moins en moins autonome.<\/p>\n\n\n\nLa r\u00e9bellion du reste du monde contre les \u00c9tats-Unis<\/strong><\/h2>\n\n\n\n