{"id":14328,"date":"2018-10-28T22:00:22","date_gmt":"2018-10-28T21:00:22","guid":{"rendered":"https:\/\/lldl.eu\/?p=9421"},"modified":"2019-04-06T00:13:50","modified_gmt":"2019-04-05T22:13:50","slug":"jean-pierre-bemba-et-le-mlc-lelectron-libre-des-elections-presidentielles-congolaises","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2018\/10\/28\/jean-pierre-bemba-et-le-mlc-lelectron-libre-des-elections-presidentielles-congolaises\/","title":{"rendered":"Jean-Pierre Bemba et le MLC : l’\u00e9lectron libre des \u00e9lections pr\u00e9sidentielles congolaises"},"content":{"rendered":"\n

Kinshasa. <\/em>Le 17 septembre 2018, la Cour p\u00e9nale internationale de La Haye (Pays-Bas) a rendu un nouveau jugement contre Jean-Pierre Bemba, homme politique et seigneur de guerre, fondateur du Mouvement pour la lib\u00e9ration du Congo (Mlc), pour manipulation de t\u00e9moins lors de son proc\u00e8s. L’appel a \u00e9t\u00e9 rendu public par une circulaire de ses avocats. Bemba et ses avocats auraient corrompu au moins 14 t\u00e9moins (4<\/strong>). D\u00e9j\u00e0 condamn\u00e9 en 2016 \u00e0 18 ans de prison pour crimes de guerre et apr\u00e8s acquitt\u00e9 en appel, Jean-Pierre Bemba a \u00e9t\u00e9 exclu des \u00e9lections pr\u00e9vues le 23 d\u00e9cembre 2018 en R\u00e9publique d\u00e9mocratique du Congo \u00e0 la t\u00eate de son Mlc. Cette exclusion, annonc\u00e9e en ao\u00fbt 2018, pourrait dangereusement modifier l’\u00e9quilibre politique du pays, ouvrant de nouveaux sc\u00e9narios dans un avenir proche (1<\/strong>).<\/p>\n\n\n\n

Fils d’un homme d’affaires bien connu, Bemba \u00e9tait l’un des quatre vice-pr\u00e9sidents de Joseph Kabila, actuel pr\u00e9sident, \u00e0 la suite de l’accord de paix de Sun City (sign\u00e9 en Afrique du Sud en 2002) qui a mis fin, au moins officiellement, \u00e0 la deuxi\u00e8me guerre du Congo. Il s’est distingu\u00e9 de tous les candidats aux \u00e9lections pr\u00e9sidentielles de 2006, n’ayant perdu contre Kabila qu’au second tour. N\u00e9anmoins, lui et sa formation (le Mlc) ont obtenu la majorit\u00e9 des voix dans les grandes villes de l’ouest du pays, en particulier \u00e0 Kinshasa, rendant la d\u00e9faite moins lourde et cr\u00e9ant une situation plus volatile et fragile (2<\/strong>). Le d\u00e9but de son proc\u00e8s \u00e0 la Cour p\u00e9nale internationale de La Haye en 2008 pour des actes commis en R\u00e9publique Centrafricaine en 2002 a marqu\u00e9 la fin d’un homme politique qui n’a jamais b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 de la popularit\u00e9 et du soutien de la communaut\u00e9 internationale car il fut l’un des chefs de guerre les plus craints dans le contexte du conflit congolais de 1998-2003 (2<\/strong>). Les crimes qui lui sont reproch\u00e9s remontent aux \u00e9v\u00e9nements dramatiques de cette p\u00e9riode, dans laquelle la centralit\u00e9 du front oriental a permis \u00e0 Bemba, avec l’appui ougandais, de s’installer dans la province de l’\u00c9quateur, au nord-ouest de la R\u00e9publique d\u00e9mocratique du Congo, \u00e0 la conqu\u00eate d’un des centres les plus symboliquement et strat\u00e9giquement importants, Gbadolite (ancien symbole de la splendeur du r\u00e9gime mobutu) (1<\/strong>).<\/p>\n\n\n\n

Le Mouvement pour la Lib\u00e9ration du Congo (Mlc) a \u00e9t\u00e9 fond\u00e9 par une branche du Rassemblement Congolais pour la D\u00e9mocratie (Rcd) de Wamba dia Wamba, le principal p\u00f4le anti-gouvernemental dans le cadre de la Grande Guerre de l’Afrique. Imm\u00e9diatement apr\u00e8s la prise de Goma le 1er ao\u00fbt 1998, les pays des Grands Lacs (Ouganda, Rwanda et Burundi), principaux partisans de la ligne anti-Kabila, ont radicalement diff\u00e9renci\u00e9 leurs politiques militaires. Bemba et le Mlc sont devenus le pilier de Kampala dans le conflit congolais (3<\/strong>). Malgr\u00e9 la forte opposition de la communaut\u00e9 internationale, Bemba a \u00e9t\u00e9 coopt\u00e9 dans la lutte pour le pouvoir, ce qui a entra\u00een\u00e9 la transformation de sa milice, accus\u00e9e de crimes de guerre, en un parti politique r\u00e9guli\u00e8rement pr\u00e9sent au Parlement. Entrepreneur riche et reconnu, Bemba peut compter depuis des ann\u00e9es sur de solides r\u00e9seaux \u00e9conomiques et politiques dans les principales villes congolaises, dont Kinshasa. Cela soul\u00e8ve de s\u00e9rieuses questions sur le processus d\u00e9mocratique qui aura lieu en d\u00e9cembre 2018 (2<\/strong>).<\/p>\n\n\n\n

Le cas de Bemba est important pour comprendre comment la question de la souverainet\u00e9 de l’\u00c9tat congolais n’est pas seulement li\u00e9e au front oriental, mais est \u00e9galement pr\u00e9sente dans la partie nord-ouest du pays. Cette r\u00e9gion de la R\u00e9publique d\u00e9mocratique du Congo est devenue vitale en raison de la pr\u00e9sence de r\u00e9fugi\u00e9s de la R\u00e9publique centrafricaine. Le Mlc, d\u00e9sormais \u00e9tabli dans ces r\u00e9gions en tant que parti, tout en conservant sa nature paramilitaire, pourrait les utiliser comme une nouvelle voie de consensus, non seulement \u00e0 l’int\u00e9rieur du pays, mais aussi pour influencer la dynamique de la guerre en Afrique centrale, voire menacer la prise de Bangui. Selon de nombreux experts, le Mlc s’est toujours distingu\u00e9 des autres milices par sa capacit\u00e9 de vision diplomatique r\u00e9gionale, ayant jou\u00e9 un r\u00f4le important dans la transition politique au Burundi dans le cadre de la mont\u00e9e de Pierre Nkurunziza, en 2005 (3<\/strong>). Les missions de l’Onu au Burundi et en R\u00e9publique d\u00e9mocratique du Congo ont consid\u00e9r\u00e9 Bemba comme la principale menace dans le cadre des \u00e9lections pr\u00e9sidentielles de 2006, plus grande encore que celle de Laurent Nkunda et Bosco Ntaganda, commandants et fondateurs du Congr\u00e8s national pour la d\u00e9fense du peuple (Cndp), une milice \u00e9tablie au Kivu.<\/p>\n\n\n\n

Contrairement \u00e0 cette derni\u00e8re, le Mlc et Bemba ont d\u00fb \u00eatre pleinement impliqu\u00e9s dans le processus \u00e9lectoral, car il aurait \u00e9t\u00e9 risqu\u00e9 d’exclure un repr\u00e9sentant d’une grande partie de la classe moyenne et de la population congolaise des centres urbains (3<\/strong>). Telle semble cependant \u00eatre la situation d\u00e9crite dans la perspective des \u00e9lections pr\u00e9sidentielles du 23 d\u00e9cembre, qui font peser des risques incalculables sur le fragile processus \u00e9tatique congolais.<\/p>\n\n\n\n

Perspectives :<\/strong><\/h4>\n\n\n\n