{"id":13600,"date":"2019-01-29T14:51:59","date_gmt":"2019-01-29T13:51:59","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/?p=13600"},"modified":"2020-03-01T22:02:23","modified_gmt":"2020-03-01T21:02:23","slug":"geopolitique-de-la-memoire","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2019\/01\/29\/geopolitique-de-la-memoire\/","title":{"rendered":"G\u00e9opolitique de la m\u00e9moire de la Shoah"},"content":{"rendered":"\n

Depuis 2005, le 27 janvier est devenue la <\/em>Journ\u00e9e internationale d\u00e9di\u00e9e \u00e0 la m\u00e9moire des victimes de la Shoah, en vertu d\u2019une r\u00e9solution de l\u2019Organisation des Nations Unies (ONU). En partant d\u2019une analyse de la d\u00e9cision de l\u2019ONU et <\/em>des d\u00e9clarations des d\u00e9l\u00e9gations nationales <\/em><\/a>lors de l\u2019adoption de cette r\u00e9solution, <\/em>Archives et discours propose, en lien avec <\/em>l\u2019entretien de Carol Gluck<\/em><\/a> pour le Grand Continent, un panorama de la mobilisation politique de la Shoah dans les relations internationales.<\/em><\/p>\n\n\n\n

\u00ab Plus jamais plus cela \u00bb <\/h3>\n\n\n\n

Le 1er <\/sup>novembre 2005, l\u2019Assembl\u00e9e G\u00e9n\u00e9rale de l\u2019Organisation des Nations Unies adopte la r\u00e9solution \u00ab M\u00e9moire de l\u2019Holocauste \u00bb<\/a>. Elle fait du 27 janvier la Journ\u00e9e internationale d\u00e9di\u00e9e \u00e0 la m\u00e9moire des victimes de l\u2019Holocauste<\/em>. Si la date choisie est significative \u2013 c\u2019est le 27 janvier 1945 qu\u2019est lib\u00e9r\u00e9 le camp d\u2019extermination d\u2019Auschwitz \u2013, l\u2019ann\u00e9e de la r\u00e9solution n\u2019est pas non plus vide de sens. Soixante apr\u00e8s cet \u00e9v\u00e9nement, les Nations Unies r\u00e9affirment la pertinence et la n\u00e9cessit\u00e9 du projet politique onusien qui se fonde en partie sur le g\u00e9nocide juif.<\/p>\n\n\n\n

En effet, \u00e9viter les atrocit\u00e9s de la Seconde Guerre mondiale, au premier rang desquelles se trouve la Shoah, oriente depuis 1944 le projet de l\u2019ONU. <\/p>\n\n\n\n

Nous, peuples des Nations Unies, r\u00e9solus : <\/em><\/p>\n\n\n\n

\u00e0 pr\u00e9server les g\u00e9n\u00e9rations futures du fl\u00e9au de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a inflig\u00e9 \u00e0 l’humanit\u00e9 d’indicibles souffrances,<\/em><\/p>\n\n\n\n

\u00e0 proclamer \u00e0 nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignit\u00e9 et la valeur de la personne humaine, dans l’\u00e9galit\u00e9 de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites […]\u201d<\/em><\/p>\n\n\n\n

Pr\u00e9ambule de la Charte des Nations Unies.<\/a><\/p>\n\n\n\n

L\u2019Holocauste rev\u00eat ainsi une dimension politique au niveau onusien. D\u2019une part, il a particip\u00e9 \u00e0 la d\u00e9finition d\u2019une ligne rouge au del\u00e0 de laquelle l’institution peut intervenir et faire exister concr\u00e8tement sa dimension universelle. Ainsi, la Convention pour la pr\u00e9vention et la r\u00e9pression du crime de g\u00e9nocide<\/a><\/em> autorise l’action de la communaut\u00e9 internationale, y compris de fa\u00e7on pr\u00e9ventive, en cas de d\u00e9faillance de l’Etat. Cette intervention peut se faire en vertu de l’article 42 de la Charte des Nations Unies (actions militaires).<\/p>\n\n\n\n

Cette possibilit\u00e9 est explicit\u00e9e de fa\u00e7on particuli\u00e8rement claire par l’ONU, sur le site<\/a> de l\u2019United nations office on genocide prevention and the responsibility to protect<\/em>.<\/p>\n\n\n\n

D\u2019autre part, l’Holocauste est mobilis\u00e9 dans le discours des Nations Unies pour sa port\u00e9e symbolique. Son rappel s\u2019accompagne de l\u2019injonction, implicite ou explicite, du \u00ab plus jamais plus cela \u00bb. Donald Trump, par exemple, le 27 janvier 2019, en a fourni aussi un exemple<\/a>.<\/p>\n\n\n\n

Par exemple, dans cette d\u00e9claration d\u2019Ant\u00f3nio Guterres<\/a>, actuel Secr\u00e9taire, \u00e0 l\u2019occasion du 70e anniversaire de la D\u00e9claration des Droits de l\u2019Homme. L\u2019ONU n\u2019est pas la seule \u00e0 mobiliser l\u2019injonction du \u00ab plus jamais cela \u00bb. <\/p>\n\n\n\n

Cette dimension performative de la m\u00e9moire est bien pr\u00e9sente dans la r\u00e9solution M\u00e9moire de l\u2019Holocauste, <\/em>dont le second article \u00ab prie instamment les \u00c9tats Membres d\u2019\u00e9laborer des programmes \u00e9ducatifs qui graveront dans l\u2019esprit des g\u00e9n\u00e9rations futures les enseignements de l\u2019Holocauste afin d\u2019aider \u00e0 pr\u00e9venir les actes de g\u00e9nocide \u00bb<\/em>. La finalit\u00e9 de la comm\u00e9moration est donc bien active. Elle prolonge les fondements de la politique onusienne.
<\/p>\n\n\n\n

Les d\u00e9clarations que rapporte le communiqu\u00e9 de presse de la 42e<\/sup> s\u00e9ance pl\u00e9ni\u00e8re durant laquelle la r\u00e9solution M\u00e9moire de l\u2019Holocauste<\/em> a \u00e9t\u00e9 adopt\u00e9e font \u00e9tat de cette mobilisation du pr\u00e9c\u00e9dent de l\u2019Holocauste pour l\u00e9gitimer l\u2019intervention internationale. <\/p>\n\n\n\n

Extrait de la d\u00e9claration de M. Ronaldo Mota Sardenberg, pour la d\u00e9l\u00e9gation br\u00e9silienne<\/strong>. <\/h4>\n\n\n\n

Ce sera le plus important hommage rendu aux victimes de l\u2019Holocauste, a-t-il ajout\u00e9, remarquant par ailleurs qu\u2019en se souvenant de cette trag\u00e9die, la communaut\u00e9 internationale renouvelait non seulement son indignation, mais r\u00e9affirmait aussi son engagement \u00e0 lutter contre l\u2019oppression et les pr\u00e9jug\u00e9s o\u00f9 qu\u2019ils soient.
<\/p>\n\n\n\n

<\/p>\n\n\n\n

Extrait de la d\u00e9claration de M. Valeriy Kuchinsky, pour la d\u00e9l\u00e9gation ukrainienne.<\/strong> <\/h4>\n\n\n\n

On ne peut oublier la campagne d’extermination men\u00e9e \u00e0 l’encontre des Juifs, du peuple rom, de femmes, d’hommes, et d’enfants – sans oublier les centaines de milliers de victimes ukrainiennes. Il a indiqu\u00e9 qu’il ne fallait pas perdre de vue les campagnes d\u2019extermination contemporaines, notamment celles du Cambodge, de Srebrenica, du Rwanda et tout r\u00e9cemment de la r\u00e9gion du Darfour, au Soudan.<\/p>\n\n\n\n

<\/p>\n\n\n\n

Extrait de la d\u00e9claration de M. Shin Kak-Soo, pour la d\u00e9l\u00e9gation de la R\u00e9publique de Cor\u00e9e.<\/strong> <\/h4>\n\n\n\n

M. Shin Kak-Soo a d\u00e9clar\u00e9 que nous ne devons jamais permettre qu\u2019une trag\u00e9die aussi horrible que celle de l\u2019Holocauste ne se reproduise. Mais, \u00e0 notre honte, nous assistons aujourd\u2019hui encore \u00e0 trop de g\u00e9nocides et crimes contre l\u2019humanit\u00e9, de Srebrenica \u00e0 Kigali et au Darfour, a-t-il d\u00e9plor\u00e9. Le repr\u00e9sentant a observ\u00e9 que les r\u00e9cents g\u00e9nocides et crimes contre l\u2019humanit\u00e9 plus r\u00e9cents, et toujours frais dans les m\u00e9moires, avaient amen\u00e9 la communaut\u00e9 internationale \u00e0 redoubler ses efforts pour mettre en place un syst\u00e8me de s\u00e9curit\u00e9 collective efficace qui emp\u00eache ce type de crimes haineux et encourage la tol\u00e9rance et la compr\u00e9hension mutuelle. Il s\u2019est \u00e0 cet \u00e9gard f\u00e9licit\u00e9 de l\u2019importance accord\u00e9e \u00e0 la responsabilit\u00e9 de prot\u00e9ger dans le Document final du Sommet mondial de 2005, au cours duquel les dirigeants du monde s\u2019\u00e9taient notamment engag\u00e9s \u00e0 prot\u00e9ger les populations du g\u00e9nocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l\u2019humanit\u00e9 au cas o\u00f9 les autorit\u00e9s nationales \u00e9chouaient manifestement \u00e0 le faire.<\/p>\n\n\n\n

A cet \u00e9gard d\u2019ailleurs, la Journ\u00e9e <\/em>onusienne s\u2019inscrit dans la continuit\u00e9 de la journ\u00e9e de comm\u00e9moration cr\u00e9\u00e9e en Europe au d\u00e9but des ann\u00e9es 2000. En 2002, les ministres de l’\u00c9ducation des 48 pays signataires de la Convention culturelle du Conseil de l’Europe ont adopt\u00e9 une d\u00e9claration<\/a>instituant une Journ\u00e9e de la m\u00e9moire de l’Holocauste et de la pr\u00e9vention des crimes contre l’humanit\u00e9 dans les \u00e9coles<\/em>. La date pr\u00e9cise est laiss\u00e9e \u00e0 la discr\u00e9tion des \u00c9tats afin qu\u2019ils articulent cette journ\u00e9e de comm\u00e9moration et leur histoire nationale. Nombreux sont cependant ceux qui, \u00e0 l\u2019instar de la France, choisissent le 27 janvier.<\/p>\n\n\n\n

L’instauration de cette journ\u00e9e s’inscrit dans le processus de reconnaissance de la place de l’Holocauste dans l\u2019histoire et dans la culture mondiales engag\u00e9e depuis les ann\u00e9es 1970.<\/p>\n\n\n\n

Rousso, Henry. \u00ab Vers une mondialisation de la m\u00e9moire \u00bb<\/a>, Vingti\u00e8me Si\u00e8cle. Revue d’histoire<\/em>, vol. 2 (n\u00b094), pp. 3-10, 2007. Elle r\u00e9pond en outre \u00e0 une demande exprim\u00e9e<\/a> en 2000 par les repr\u00e9sentants des gouvernements au Forum International sur la Shoah d\u2019Helsinki et semble s\u2019accompagner d\u2019une volont\u00e9 performative.<\/p>\n\n\n\n

Xavier Darcos, dans un discours de 2002<\/a>, souligne de fa\u00e7on tr\u00e8s claire la dimension politique de la comm\u00e9moration : \u00ab Au del\u00e0 de l’indispensable reconnaissance de notre dette et des mesures d’indemnisation des victimes, il nous appartient d’enseigner l’extermination des Juifs d’Europe par un effort continu et permanent aupr\u00e8s de la jeunesse de France. Le ministre charg\u00e9 de l’enseignement scolaire que je suis est naturellement particuli\u00e8rement sensible \u00e0 cette obligation, m\u00eame si, comme l’a rappel\u00e9 Monsieur le Secr\u00e9taire G\u00e9n\u00e9ral du Conseil de l’Europe, il ne peut s’agir que d’une action globale d\u00e9passant largement le cadre proprement \u00e9ducatif. Ce th\u00e8me est bien pr\u00e9sent et, je crois, v\u00e9ritablement pris en compte dans nos programmes et dans les enseignements dispens\u00e9s aux jeunes gens. Il nous faut d’abord, pour \u00e9viter toute banalisation (car c’est l\u00e0, me semble t-il, que g\u00eet le principal danger, avant m\u00eame celui du r\u00e9visionnisme, totalement disqualifi\u00e9), faire appara\u00eetre le caract\u00e8re proprement inou\u00ef et irr\u00e9ductible de l’\u00e9v\u00e9nement que constitue la destruction programm\u00e9e des Juifs d’Europe. Le mal absolu existe, et nous savons qu’il est parfois difficile de le faire comprendre \u00e0 une jeunesse que le \u00ab tout est relatif entoure et peut s\u00e9duire. \u00bb<\/em>, que l’intitul\u00e9 m\u00eame de cette journ\u00e9e explicite, du fait de sa r\u00e9sonance avec un contexte de mont\u00e9e du nationalisme. La dimension symbolique de l\u2019Holocauste, comme spectre de l\u2019atrocit\u00e9 de la guerre et du fascisme, est ici aussi mobilis\u00e9e comme outil politique.<\/p>\n\n\n\n

En France, notamment, o\u00f9 l\u2019extr\u00eame-droite arrive la m\u00eame ann\u00e9e au second tour de l\u2019\u00e9lection pr\u00e9sidentielle. <\/p>\n\n\n\n

L’Holocauste, objet politique d’une diplomatie de la m\u00e9moire <\/h3>\n\n\n\n

Cette mobilisation politique de l\u2019Holocauste par les institutions internationales a contribu\u00e9 \u00e0 faire de cet \u00e9v\u00e9nement un symbole politique \u00e0 port\u00e9e universelle. Cette puissance symbolique, faisant consensus \u00e0 l\u2019\u00e9chelle internationale, place l\u2019Holocauste au coeur d\u2019enjeux politiques et diplomatiques.
<\/p>\n\n\n\n

Si toutes les d\u00e9clarations qui accompagnent la r\u00e9solution M\u00e9moire de l\u2019Holocauste <\/em>commencent par une affirmation unanime de la l\u00e9gitimit\u00e9 et de la valeur de ces comm\u00e9morations, le lecteur attentif ne peut s\u2019emp\u00eacher de percevoir les dissensions qui se r\u00e9v\u00e8lent par le biais de ces prises de parole. La convocation de r\u00e9f\u00e9rences d’autorit\u00e9s sup\u00e9rieures \u00e0 forte valeur symbolique, au premier rang desquelles la D\u00e9claration des Droits de l\u2019Homme, ne peut que souligner le contraste entre le consensus proclam\u00e9 et les tensions qui entourent en v\u00e9rit\u00e9 la r\u00e9solution.
<\/p>\n\n\n\n

L’exemple de la d\u00e9claration chinoise est \u00e0 cet \u00e9gard \u00e9loquent.<\/p>\n\n\n\n

Extrait de la d\u00e9claration de Mme Liu Zhongxin, pour la d\u00e9l\u00e9gation chinoise.<\/strong><\/h4>\n\n\n\n

Mme Liu Zhongxin (Chine) a d\u00e9clar\u00e9, dans son intervention au nom de son Ambassadeur M. Wang Guangya, que le jugement historique rendu par le Tribunal de Nuremberg contre les criminels du r\u00e9gime nazi avait d\u00e9fendu la justice internationale et la sauvegarde de la dignit\u00e9 humaine, refl\u00e9tant l\u2019aspiration commune pour la paix et la justice des peuples du monde entier. Elle a ajout\u00e9 que les agressions militaires de la Deuxi\u00e8me Guerre mondiale avaient fait 35 millions de victimes chinoises, parmi lesquelles 300 000 personnes tu\u00e9es durant le massacre de Nanjing en 1937. Comme le peuple juif, les peuples de l\u2019Asie n\u2019oublieront jamais ce chapitre de leur histoire, a-t-elle remarqu\u00e9.
<\/p>\n\n\n\n

Que le Japon exerce son droit de r\u00e9ponse \u2013 non pour d\u00e9mentir, le Japon reconna\u00eet les crimes commis pendant la guerre, mais pour mod\u00e9rer le chiffre des morts \u2013 t\u00e9moigne du caract\u00e8re crucial des enjeux qui se jouent dans cette d\u00e9claration. En effet, comme Carol Gluck l’explique dans un entretien au Grand Continent<\/a>, la mobilisation de la m\u00e9moire des crimes de guerre japonais participe d’une politique int\u00e9rieure visant \u00e0 raviver la ferveur patriotique, politique dont l’efficacit\u00e9, au vu de la haine anti japonaise qui se d\u00e9veloppe au Japon, a d\u00e9pass\u00e9 les volont\u00e9s du gouvernement chinois. Devant les Nations Unies, cette d\u00e9claration participe \u00e0 l\u00e9gitimer une politique m\u00e9morielle int\u00e9rieure, et positionne la Chine dans le concert des nations, du c\u00f4t\u00e9 des vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale. La prise de parole au nom des \u00ab peuples de l’Asie \u00bb t\u00e9moigne en outre que la Chine veut s\u2019affirmer comme puissance r\u00e9gionale.<\/p>\n\n\n\n

Mais plus encore, la comparaison \u2013 \u00ab comme le peuple juif \u00bb \u2013 est remarquable et constitue un om\u00e9ga de la d\u00e9claration m\u00e9morielle internationale. En effet, si la Chine pourrait sans \u00e9quivoque convoquer le \u00ab crime contre l’humanit\u00e9 \u00bb pour le massacre de Nankin, la volont\u00e9 de le rapprocher du g\u00e9nocide juif traduit un ph\u00e9nom\u00e8ne remarquable. L’Holocauste est devenu un point de r\u00e9f\u00e9rence dans les repr\u00e9sentations et la communication des conflits internationaux.
<\/p>\n\n\n\n

Ce ph\u00e9nom\u00e8ne n’est pas seulement visible du c\u00f4t\u00e9 de la diplomatie chinoise. Lasse Heerten, chercheur au Center for Global History \u00e0 Berlin, montre dans un article de 2011<\/a>, que nous ne d\u00e9sesp\u00e9rons pas de proposer un jour \u00e0 nos lecteurs en fran\u00e7ais, l’utilisation de la m\u00e9moire de l’Holocauste dans la volont\u00e9 d’internationalisation de la guerre du Biafra par le gouvernement s\u00e9cessionniste. La famine caus\u00e9e par le blocus des forces gouvernementales avait particuli\u00e8rement frapp\u00e9 l’opinion publique internationale quand des agences de communication, mandat\u00e9es par le gouvernement s\u00e9cessionniste, avaient diffus\u00e9 des images d’enfants malnutris. La comparaison entre les clich\u00e9s des enfants biafrais et les images des camps d’extermination \u00e9tait sciemment recherch\u00e9e. Ainsi, l’Holocauste, ligne rouge des relations internationales et paroxysme de la violence, devient un outil dans la diplomatie internationale ainsi qu\u2019une r\u00e9f\u00e9rence symbolique universellement partag\u00e9e et puissante.<\/p>\n\n\n\n

L’Holocauste, \u00e9talon de la reconnaissance juridique des g\u00e9nocides<\/h3>\n\n\n\n

Alors m\u00eame que la qualification juridique de \u00ab g\u00e9nocide \u00bb est historiquement li\u00e9e \u00e0 l\u2019Holocauste, elle est ensuite devenue l\u2019objet de disputes g\u00e9opolitiques, y compris pour des actes ant\u00e9rieurs \u00e0 la Shoah. Fond\u00e9 par le juriste polonais Raph\u00e4el Lemkin<\/a> (Axis Rule in Occupied Europe, <\/em>1944), \u00e0 l\u2019occasion des proc\u00e8s de Nuremberg, le concept de \u00ab g\u00e9nocide \u00bb ne fut pas retenu par les juges : inexistant avant la Seconde Guerre mondiale, il ne pouvait pas entrer dans les comp\u00e9tences du tribunal. Le concept est officiellement reconnu par l’Assembl\u00e9e G\u00e9n\u00e9rale des Nations-Unies en 1946. Il entre, en 1948, dans le droit positif international lors de la signature de la Convention pour la pr\u00e9vention et la r\u00e9pression du crime de g\u00e9nocide<\/a>. <\/em>La d\u00e9finition retenue dans cette Convention <\/em>est reprise en 1972 dans le Statut de Rome<\/a> qui fondent la Cour p\u00e9nale internationale (CPI) : le crime de g\u00e9nocide prend la valeur d’une norme imp\u00e9rative (jus cogens<\/em>), ce qui t\u00e9moigne encore une fois du caract\u00e8re normatif international qu\u2019a contribu\u00e9 \u00e0 fonder le pr\u00e9c\u00e9dent de l\u2019Holocauste.<\/p>\n\n\n\n

Le trait\u00e9 de Vienne (1969), \u00e0 l’article 53, d\u00e9finit ainsi la norme imp\u00e9rative : \u00ab aux fins de la pr\u00e9sente Convention, une norme imp\u00e9rative de droit international g\u00e9n\u00e9ral est une norme accept\u00e9e et reconnue par la communaut\u00e9 internationale des \u00c9tats dans son ensemble en tant que norme \u00e0 laquelle aucune d\u00e9rogation n’est permise et qui ne peut \u00eatre modifi\u00e9e que par une nouvelle norme du droit international g\u00e9n\u00e9ral ayant le m\u00eame caract\u00e8re. \u00bb<\/em><\/p>\n\n\n\n

Cette d\u00e9finition du crime de \u00ab g\u00e9nocide \u00bb est pr\u00e9cise :
<\/p>\n\n\n\n

\u00ab Aux fins du pr\u00e9sent Statut, on entend par crime de g\u00e9nocide l’un quelconque des actes ci-apr\u00e8s commis dans l’intention de d\u00e9truire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel :<\/em><\/p>\n\n\n\n

a) Meurtre de membres du groupe ;<\/em>
b) Atteinte grave \u00e0 l’int\u00e9grit\u00e9 physique ou mentale de membres du groupe ;<\/em>
c) Soumission intentionnelle du groupe \u00e0 des conditions d’existence devant entra\u00eener sa destruction physique totale ou partielle ;<\/em>
d) Mesures visant \u00e0 entraver les naissances au sein du groupe ;<\/em>
e) Transfert forc\u00e9 d’enfants du groupe \u00e0 un autre groupe. \u00bb<\/em><\/p>\n\n\n\n

Article VI du Statut de Rome<\/a> <\/p>\n\n\n\n

Le crime de g\u00e9nocide constitue donc un acte particulier et bien d\u00e9fini dans le droit international. Le Bureau de la pr\u00e9vention du g\u00e9nocide et de la responsabilit\u00e9 de prot\u00e9ger des Nations Unies (United Nations Office on genocide prevention and the responsibility to proctect<\/em>) explicite sur son site les \u00e9l\u00e9ments requis, qui se distinguent entre des \u00e9l\u00e9ments \u00ab moraux \u00bb (mentals<\/em>) (l’intention<\/em> de d\u00e9truire une communaut\u00e9) et \u00ab physiques \u00bb (les actes que la d\u00e9finition pr\u00e9cise de fa\u00e7on exhaustive). Le Bureau note avec justesse que :<\/p>\n\n\n\n

\u00ab L\u2019intention est l\u2019\u00e9l\u00e9ment le plus difficile \u00e0 qualifier. Pour qu\u2019il y ait g\u00e9nocide, il faut prouver que ses auteurs avaient l\u2019intention d\u2019an\u00e9antir physiquement un groupe national, ethnique, racial ou religieux. L\u2019an\u00e9antissement culturel ne suffit pas, ni la simple intention de d\u00e9sagr\u00e9ger un groupe. C\u2019est cette intention particuli\u00e8re, ou <\/em>dolus specialis, qui rend le crime de g\u00e9nocide si unique. De plus, la jurisprudence a associ\u00e9 l\u2019intention \u00e0 l\u2019existence d\u2019un plan ou d\u2019une politique men\u00e9 par un \u00c9tat ou une organisation, m\u00eame si la d\u00e9finition du g\u00e9nocide en droit international ne pr\u00e9voit pas ce crit\u00e8re.<\/em><\/p>\n\n\n\n

Surtout, les victimes d\u2019un g\u00e9nocide sont d\u00e9lib\u00e9r\u00e9ment (et non al\u00e9atoirement) cibl\u00e9es en raison de leur appartenance r\u00e9elle ou suppos\u00e9e \u00e0 l\u2019un des quatre groupes prot\u00e9g\u00e9s par la Convention (ce qui exclut les groupes politiques, par exemple). Cela signifie que la cible de l\u2019an\u00e9antissement doit \u00eatre le groupe en tant que tel, et non ses membres en tant qu\u2019individus. Un g\u00e9nocide peut \u00e9galement est commis contre une partie seulement de ce groupe, tant que cette partie est identifiable (y compris par le biais d\u2019une d\u00e9limitation g\u00e9ographique) et \u00ab substantielle \u00bb \u00bb.<\/em><\/span>1<\/sup><\/a><\/span><\/p>\n\n\n\n

Ainsi, l’arsenal l\u00e9gislatif international mettant \u00e0 disposition d’autres cat\u00e9gories, du crime contre l’humanit\u00e9 (art. 7 du Statut de Rome) aux crimes de guerre (art. 8), la caract\u00e9risation du g\u00e9nocide est tr\u00e8s difficile \u00e0 obtenir. Au point de vue du droit international, seuls cinq g\u00e9nocides sont officiellement reconnus par l’ONU. Les Nations-Unies n’ayant pas vocation \u00e0 caract\u00e9riser ces crimes mais uniquement \u00e0 s’employer \u00e0 les faire cesser et poursuivre, les qualifications sont retenues essentiellement par des tribunaux internationaux ad hoc <\/em> : la Shoah (tribunal de N\u00fcremberg), le g\u00e9nocide rwandais (tribunal p\u00e9nal international pour le Rwanda) et le g\u00e9nocide de Srebrenica (tribunal p\u00e9nal international pour l’ex-Yougoslavie). A ces trois g\u00e9nocides s’ajoute le g\u00e9nocide arm\u00e9nien, reconnu par adoption d’une r\u00e9solution par la Commission des Droits de l’Homme relative au rapport Whitaker, en 1985. En outre, r\u00e9cemment, les Chambres Extraordinaires au sein des Tribunaux Cambodgiens (CETC)<\/a>, parrain\u00e9es par l\u2019ONU et compos\u00e9es, non sans soulever de critiques, de magistrats cambodgiens et internationaux, ont d\u00e9clar\u00e9 coupables de g\u00e9nocide deux dirigeants Khmers rouges : depuis le 16 novembre 2018, le g\u00e9nocide cambodgien constitue donc le cinqui\u00e8me g\u00e9nocide reconnu<\/a> par l\u2019ONU. <\/p>\n\n\n\n

La reconnaissance du crime de g\u00e9nocide fait ainsi l’objet de batailles juridiques et diplomatiques, \u00e0 coups de jugements, de d\u00e9clarations et par voie de presse, ainsi qu’au sein des organes internationaux comme l’ONU. L’exemple de l’Holodomor, <\/em>dont la d\u00e9l\u00e9gation ukrainienne se fait l\u2019\u00e9cho en \u00e9voquant la Grande famine de 1932-1933, est r\u00e9v\u00e9lateur de ces enjeux. R\u00e9v\u00e9l\u00e9 au grand public occidental par Alexandre Soljenitsyne dans l’Archipel du Goulag, <\/em>l’Holodomor <\/em>est une famine qui toucha l’Ukraine et la r\u00e9gion du Kouban en 1932-1933 et qui fit plusieurs millions de morts. Cette famine est largement imput\u00e9e \u00e0 la politique sovi\u00e9tique, au point que nombreux sont ceux \u00e0 d\u00e9noncer le caract\u00e8re intentionnel de cette famine. Une guerre de d\u00e9clarations fait depuis rage pour tenter d’imposer le qualificatif de g\u00e9nocide. Les Etats-Unis, par le biais de la Chambre des Repr\u00e9sentants, ont ainsi adopt\u00e9 une r\u00e9solution<\/a> apposant ce qualificatif \u00e0 cette famine. A l’inverse, la Russie rejette l’intention \u00ab d\u00e9lib\u00e9r\u00e9e \u00bb<\/em> du gouvernement sovi\u00e9tique et, donc, la qualification de g\u00e9nocide. Le Parlement europ\u00e9en a lui opt\u00e9 pour la reconnaissance d’un \u00ab crime contre l’humanit\u00e9 \u00bb<\/em><\/span>2<\/sup><\/a><\/span>. Les connaisseurs de la doctrine du droit international ne s’\u00e9tonneront pas d’une telle bataille de d\u00e9clarations, dont l’ambition est performative : l’\u00e9mergence d’un consensus entre les Etats par le biais de d\u00e9clarations nationales renforce la possibilit\u00e9 que les instances internationales tranchent in fine<\/em> dans leur sens. <\/p>\n\n\n\n

La d\u00e9claration du Saint-Si\u00e8ge, o\u00f9 Mgr. Celestino Migliore affirme la valeur du pardon, semble \u00e9galement pouvoir se lire comme une prise de position g\u00e9n\u00e9rale du Vatican en faveur de la reconnaissance des g\u00e9nocides et crimes contre l\u2019humanit\u00e9.
<\/p>\n\n\n\n

Extrait de la d\u00e9claration de Mgr. Celestino Migliore, pour la d\u00e9l\u00e9gation vaticane<\/strong>. <\/h4>\n\n\n\n

L\u2019intervenant a rappel\u00e9 que le Pape Jean-Paul II, lors de sa visite en Terre sainte, s\u2019\u00e9tait rendu au M\u00e9morial de la Shoah, Yad Vashem. Au pied du Mur du temple, le Pape a pri\u00e9 pour le pardon et pour la conversion des c\u0153urs et des esprits, a-t-il soulign\u00e9. Demander pardon purifie la m\u00e9moire, a estim\u00e9 l\u2019Observateur, pr\u00e9cisant que se souvenir de l\u2019Holocauste nous donnait cette occasion de purification.<\/p>\n\n\n\n

\u00ab <\/em> Concurrence des victimes<\/em>  \u00bb<\/em> et critique de l’Occident<\/h3>\n\n\n\n

En outre, un dernier \u00e9l\u00e9ment semble remarquable dans la question de la mobilisation politique de l\u2019Holocauste. La premi\u00e8re ligne de ce communiqu\u00e9 la r\u00e9v\u00e8le dans toute son ampleur : \u00ab Il ne faut pas oublier les victimes d\u2019autres g\u00e9nocides, demandent plusieurs d\u00e9l\u00e9gations \u00bb<\/em> , et nombre de d\u00e9l\u00e9gation s\u2019en font le relai. <\/p>\n\n\n\n

Extrait de l’explication de position de la d\u00e9l\u00e9gation malaisienne.<\/strong> <\/h4>\n\n\n\n

La le\u00e7on \u00e0 tirer de l\u2019Holocauste est universelle, a-t-elle soulign\u00e9. Toutefois, la communaut\u00e9 internationale doit tirer cette le\u00e7on d\u2019autres \u00e9v\u00e9nements tout aussi tragiques, a-t-elle consid\u00e9r\u00e9, notant que sa d\u00e9l\u00e9gation aurait pr\u00e9f\u00e9r\u00e9 que le paragraphe 2 du dispositif soit \u00e9largi \u00e0 d\u2019autres faits de g\u00e9nocide comme les crimes de guerre ou les nettoyages ethniques.<\/p>\n\n\n\n

<\/p>\n\n\n\n

Extrait de l’explication de position de la d\u00e9l\u00e9gation indon\u00e9sienne.<\/strong> <\/h4>\n\n\n\n

L\u2019Holocauste, a-t-il dit, repr\u00e9sente un \u00e9pisode tr\u00e8s sombre de l\u2019Histoire, mais n\u2019est pas la seule trag\u00e9die humaine passant des messages aussi forts \u00e0 tous les peuples quant aux cons\u00e9quences de la haine et des pr\u00e9jug\u00e9s, a-t-il soulign\u00e9. Le repr\u00e9sentant a indiqu\u00e9 que sa d\u00e9l\u00e9gation aurait souhait\u00e9 que le texte contienne une r\u00e9f\u00e9rence \u00e0 d\u2019autres trag\u00e9dies humaines.<\/p>\n\n\n\n

On songe ici au concept de \u00ab concurrence des victimes <\/em> \u00bb que mobilise Jean-Michel Chaumont<\/span>3<\/sup><\/a><\/span> quand il observe de v\u00e9ritables conflits et mise en concurrence des massacres dans la volont\u00e9 de reconnaissance des victimes. La d\u00e9l\u00e9gation jordanienne se fait justement l\u2019\u00e9cho de ces pol\u00e9miques en affirmant que \u00ab l\u2019Holocauste est et demeure un g\u00e9nocide diff\u00e9rent \u00bb<\/em><\/span>4<\/sup><\/a><\/span>. D’ailleurs, l’ONU acc\u00e9dera \u00e0 cette demande de reconnaissance en 2015 en instituant, \u00e0 l’initiative de l’Arm\u00e9nie, une Journ\u00e9e internationale de comm\u00e9moration des victimes du crime de g\u00e9nocide, d\u2019affirmation de leur dignit\u00e9 et de pr\u00e9vention de ce crime<\/a><\/em> \u00e0 la date anniversaire de la Convention pour la pr\u00e9vention et la r\u00e9pression du crime de g\u00e9nocide <\/em>de 1948 (9 d\u00e9cembre). <\/p>\n\n\n\n

Pourtant, ce seul concept ne suffit pas \u00e0 \u00e9puiser la question quand elle se joue sur le plan des relations internationales. La reconnaissance d\u2019\u00e9v\u00e9nements traumatiques au rang de \u00ab g\u00e9nocides <\/em> \u00bb pourrait \u00e9galement se lire dans des enjeux de positionnement des \u00c9tats au niveau international, notamment vis-\u00e0-vis des puissances occidentales. La d\u00e9claration jordanienne, en rappelant \u00ab que ce crime [l\u2019Holocauste] avait \u00e9t\u00e9 commis sur la terre europ\u00e9enne, contre des Europ\u00e9ens par des Europ\u00e9ens \u00bb<\/em> semble d\u00e9noncer le d\u00e9ploiement normatif de l\u2019Holocauste au rang universel. De m\u00eame, les explications de position v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne et \u00e9gyptienne semblent vouloir renvoyer dans les cordes l\u2019Occident, en lui rappelant que les injonctions normatives ne sauraient s\u2019appliquer uniquement au reste du monde… <\/p>\n\n\n\n

Extrait de l’explication de position de la d\u00e9l\u00e9gation v\u00e9n\u00e9zu\u00e9lienne.<\/strong> <\/h4>\n\n\n\n

Elle a ensuite rappel\u00e9 qu’il \u00e9tait impossible de passer sous silence d’autres faits, tels l’an\u00e9antissement de Hiroshima ou de Nagasaki, ou ceux encore en cours de nombreux peuples du monde, par suite de mis\u00e8re, de faim, d’ignorance et la r\u00e9pression, qui \u00e9taient condamn\u00e9s \u00e0 une existence sans espoir, du fait de l’exploitation men\u00e9e par des \u00c9tats ou des \u00e9lites colonialistes, au nombre desquels figuraient certains acteurs principaux de la Deuxi\u00e8me Guerre mondiale. Elle a pr\u00e9cis\u00e9 que ces manifestations de terrorisme d’\u00c9tat qui avaient eu lieu \u00e0 l’encontre des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Am\u00e9rique latine devaient \u00eatre incorpor\u00e9es dans la m\u00e9moire collective des Nations Unies.<\/p>\n\n\n\n

Extrait de l’explication de position de la d\u00e9l\u00e9gation \u00e9gyptienne.<\/strong><\/h4>\n\n\n\n

Il a regrett\u00e9 cependant que le projet de r\u00e9solution n\u2019ait pas parl\u00e9 des responsabilit\u00e9s des soci\u00e9t\u00e9s dans lesquelles ce g\u00e9nocide avait \u00e9t\u00e9 perp\u00e9tr\u00e9. Il s\u2019est par ailleurs demand\u00e9 pourquoi la communaut\u00e9 internationale devait oublier d\u2019autres g\u00e9nocides commis contres les musulmans, les chr\u00e9tiens ou d\u2019autres peuples. Pourquoi \u00e9tablir un programme international sp\u00e9cial pour les victimes de l\u2019Holocauste tout en oubliant les autres et ne pas \u00e9tablir des programmes semblables ? s\u2019est-il interrog\u00e9, ajoutant que personne n\u2019avait le monopole de la souffrance.
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Comment la Shoah est-elle devenue un objet diplomatique  ? Archives et discours analyse pour vous les d\u00e9clarations des d\u00e9l\u00e9gations nationales \u00e0 l’ONU lors de l’instauration de la journ\u00e9e internationale d\u00e9di\u00e9e \u00e0 la m\u00e9moire des victimes de l’Holocauste. <\/p>\n","protected":false},"author":4,"featured_media":13634,"comment_status":"closed","ping_status":"open","sticky":false,"template":"templates\/post-speeches.php","format":"standard","meta":{"_acf_changed":false,"_trash_the_other_posts":false,"footnotes":""},"categories":[1731],"tags":[],"geo":[],"person":[],"acf":[],"yoast_head":"\nG\u00e9opolitique de la m\u00e9moire de la Shoah | Le Grand Continent<\/title>\n<meta name=\"robots\" content=\"index, follow, max-snippet:-1, max-image-preview:large, max-video-preview:-1\" \/>\n<link rel=\"canonical\" href=\"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2019\/01\/29\/geopolitique-de-la-memoire\/\" \/>\n<meta property=\"og:locale\" content=\"fr_FR\" \/>\n<meta property=\"og:type\" content=\"article\" \/>\n<meta property=\"og:title\" content=\"G\u00e9opolitique de la m\u00e9moire de la Shoah | Le Grand Continent\" \/>\n<meta property=\"og:description\" content=\"Comment la Shoah est-elle devenue un objet diplomatique ? 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