{"id":13250,"date":"2019-03-10T22:00:27","date_gmt":"2019-03-10T21:00:27","guid":{"rendered":"https:\/\/lldl.eu\/?p=13250"},"modified":"2019-04-05T08:54:52","modified_gmt":"2019-04-05T07:54:52","slug":"le-8-mars-en-amerique-latine-quels-droits-pour-les-femmes-de-la-region","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2019\/03\/10\/le-8-mars-en-amerique-latine-quels-droits-pour-les-femmes-de-la-region\/","title":{"rendered":"Le 8 mars en Am\u00e9rique latine : quels droits pour les femmes de la r\u00e9gion ?"},"content":{"rendered":"\n

Santiago du Chili. <\/em>Le 8 mars est une date consacr\u00e9e \u00e0 la d\u00e9fense des droits des femmes dans le monde. Instaur\u00e9e en 1975 par l\u2019Organisation des Nations-Unies, la premi\u00e8re conf\u00e9rence sur les femmes s\u2019est tenue \u00e0 cette date au Mexique. Cependant, malgr\u00e9 des progr\u00e8s notables pour la condition de la femme dans la soci\u00e9t\u00e9, les in\u00e9galit\u00e9s, le manque d\u2019opportunit\u00e9s et la violence \u00e0 l\u2019\u00e9gard de celles-ci persistent, surtout en Am\u00e9rique latine, une r\u00e9gion particuli\u00e8rement violente. Depuis quelques ann\u00e9es d\u00e9j\u00e0, pour plus de 300 millions de femmes en Am\u00e9rique latine, le 8 mars n’est plus un jour de c\u00e9l\u00e9bration, mais de comm\u00e9moration et de manifestations. En 2015, en Argentine, berceau du f\u00e9minisme sud-am\u00e9ricain, les femmes ont manifest\u00e9 de mani\u00e8re in\u00e9dite en scandant \u00ab Ni Una Menos \u00bb (\u201cPlus une seule\u201d) et ont ouvert la voie aux revendications et au d\u00e9veloppement du f\u00e9minisme latino-am\u00e9ricain.<\/p>\n\n\n\n

Vendredi 8 mars 2019, des manifestations ont eu lieu non seulement dans les capitales des diff\u00e9rents pays de la r\u00e9gion mais, aussi bien, dans d’autres villes secondaires. Au Chili, plus de cinquantes villes ont confirm\u00e9 l’organisation de manifestations, tandis qu’\u00e0 Santiago du Chili, la Police Nationale a compt\u00e9 190 000 personnes : il s\u2019agit de l\u2019une des manifestations les plus importantes de ces derni\u00e8res ann\u00e9es. Une mobilisation de plus en plus importante car l\u2019Am\u00e9rique latine est l\u2019une des r\u00e9gions o\u00f9 il y a eu le plus de f\u00e9minicides ces derni\u00e8res ann\u00e9es. D\u2019apr\u00e8s la Commission \u00c9conomique pour l’Am\u00e9rique latine et les Cara\u00efbes (CEPALC), en 2017, il y a eu 2 795 cas jug\u00e9s pour f\u00e9minicides, commis majoritairement par les compagnons des victimes. Au Mexique, 3 580 meurtres ont \u00e9t\u00e9 commis en 2018 : une femme est assassin\u00e9e toutes les 160 minutes dans ce pays.<\/p>\n\n\n\n

Certains pays de la r\u00e9gion ont d\u00e9j\u00e0 mis en place des r\u00e9formes juridiques pour endiguer ce type d’agression. Le Costa Rica est le premier pays \u00e0 avoir pr\u00eat\u00e9 attention \u00e0 ce ph\u00e9nom\u00e8ne gr\u00e2ce aux politiques publiques qui sanctionnent le f\u00e9minicide depuis 2007. Au Mexique, le S\u00e9nat a approuv\u00e9 en 2012 l\u2019augmentation de la peine de 40 \u00e0 60 ans de prison pour quiconque commettrait un f\u00e9minicide. Le Guatemala (2008), le Chili et le Salvador (2010), l’Argentine et le Nicaragua (2012), la Bolivie, le Honduras, le Panama et le P\u00e9rou (2013), l’\u00c9quateur, la R\u00e9publique dominicaine et le Venezuela (2014), le Br\u00e9sil et la Colombie (2015), le Paraguay (2016) et l\u2019Uruguay (2017) sont d\u00e9j\u00e0 dot\u00e9s d’une l\u00e9gislation sur les f\u00e9minicides. Toutefois, ni la criminalisation ni la visibilit\u00e9 statistique ont \u00e9t\u00e9 suffisantes pour \u00e9radiquer ces crimes.<\/p>\n\n\n\n

De plus, les disparit\u00e9s dans les domaines de l’\u00e9ducation, du travail et de la famille sont le talon d’Achille de la r\u00e9gion. D\u2019apr\u00e8s la Banque Mondiale, seuls les trois quarts des droits reconnus aux hommes sont reconnus aux femmes dans le monde, ce qui limite leur capacit\u00e9 \u00e0 trouver un emploi, \u00e0 cr\u00e9er une entreprise ou \u00e0 prendre des d\u00e9cisions \u00e9conomiques plus b\u00e9n\u00e9fiques pour elles et leurs familles. Selon la CEPAL, bien que l\u2019\u00e9cart salarial ait diminu\u00e9 depuis les ann\u00e9es 1990, les femmes latino-am\u00e9ricaines gagnent en moyenne 16,1 % de moins que les hommes, alors que le nombre d\u2019ann\u00e9es d\u2019\u00e9tudes de la population active f\u00e9minine (9,6 en moyenne) est sup\u00e9rieur \u00e0 celui de la population masculine. Paradoxalement, plus le niveau d\u2019\u00e9ducation des femmes en Am\u00e9rique latine est \u00e9lev\u00e9, plus leurs salaires sont inf\u00e9rieurs \u00e0 ceux des hommes. En 2017, l’\u00e9cart salarial entre les femmes et les hommes ayant 13 ans ou plus d\u2019\u00e9tudes est de 21,2 %. Dans le cas des femmes ayant jusqu\u2019\u00e0 5 ann\u00e9es d\u2019\u00e9tudes, cet \u00e9cart n\u2019est \u201cque\u201d de 6,9 %. De plus, selon la Banque de D\u00e9veloppement d\u2019Am\u00e9rique latine (CAF), sur 10 travailleurs \u00e2g\u00e9s de 25 \u00e0 54 ans, seulement 4 sont des femmes. Celles-ci travaillent en moyenne quarante heures par semaine, soit huit de moins que les hommes, sans compter les heures de travail non r\u00e9mun\u00e9r\u00e9es.<\/p>\n\n\n\n

Concernant leur participation \u00e0 la vie politique, les donn\u00e9es les plus r\u00e9centes montrent que les femmes ne repr\u00e9sentent qu\u2019un quart des ministres d\u2019\u00c9tat et que leur participation est plut\u00f4t concentr\u00e9e dans des portefeuilles de nature sociale et culturelle, et non pas au sujet des questions \u00e9conomiques. Au Br\u00e9sil, seulement deux des vingt-deux minist\u00e8res sont dirig\u00e9s par des femmes, ce qui est consid\u00e9r\u00e9 comme \u00ab \u00e9quilibr\u00e9 \u00bb par le pr\u00e9sident Jair Bolsonaro, puisque \u00ab chacune d\u2019elles valent dix hommes \u00bb (3<\/strong>).<\/p>\n\n\n\n

Les in\u00e9galit\u00e9s s\u2019\u00e9tendent \u00e9galement au secteur de la sant\u00e9, o\u00f9 les femmes payent plus, et aux pensions, o\u00f9 les retraites per\u00e7ues sont moins \u00e9lev\u00e9es. Selon les donn\u00e9es de la CEPAL, la persistance de la division sexuelle du travail explique que les taux d\u2019activit\u00e9 \u00e9conomique des femmes dans la r\u00e9gion ont stagn\u00e9s aux alentours de 50 %. Parmi celles qui parviennent \u00e0 acc\u00e9der au march\u00e9 du travail, la moiti\u00e9 occupe des emplois \u00e0 faible productivit\u00e9 et seulement 18,6 % d\u2019entre elles sont affili\u00e9es \u00e0 un syst\u00e8me de s\u00e9curit\u00e9 sociale et de retraites.<\/p>\n\n\n\n

Enfin, mis \u00e0 part en Uruguay et \u00e0 Cuba, pionniers de la r\u00e9gion, le d\u00e9bat sur l’avortement \u00e9tait tabou jusqu’\u00e0 r\u00e9cemment. L’\u00e9picentre de la revendication f\u00e9ministe s’est d\u00e9roul\u00e9 en 2018 en Argentine, o\u00f9 la question a \u00e9t\u00e9 soumise au Congr\u00e8s pour la premi\u00e8re fois (2<\/strong>), ce qui a massivement mobilis\u00e9 l\u2019opinion publique o\u00f9 le pour comme le contre se sont largement exprim\u00e9s. Apr\u00e8s le rejet du projet par le S\u00e9nat, le pays a maintenu une loi de 1921 qui permet l\u2019IVG en cas de viol ou de risque pour la m\u00e8re, des disposition qui ont \u00e9t\u00e9 plus r\u00e9cemment mises en place dans des pays comme le Chili. Au contraire, le Salvador maintient l\u2019interdiction absolue d’avorter, toute changement de l\u00e9gislation \u00e9tant refus\u00e9 par les milieux conservateurs.<\/p>\n\n\n\n

Perspectives :<\/strong><\/h4>\n\n\n\n