{"id":10880,"date":"2018-06-23T12:23:04","date_gmt":"2018-06-23T11:23:04","guid":{"rendered":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/?p=10880"},"modified":"2019-10-25T00:18:58","modified_gmt":"2019-10-24T22:18:58","slug":"10-points-sur-les-elections-turques","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/legrandcontinent.eu\/fr\/2018\/06\/23\/10-points-sur-les-elections-turques\/","title":{"rendered":"10 points sur les \u00e9lections turques"},"content":{"rendered":"\n
Les \u00e9lections approchent en Turquie, o\u00f9 une bataille \u00e9lectorale est engag\u00e9e depuis le mois de mai. L\u2019enjeu est crucial : le suffrage consacrera le passage au syst\u00e8me ex\u00e9cutif hyper-pr\u00e9sidentiel, qui a \u00e9t\u00e9 propos\u00e9 par le Parti de la justice et du d\u00e9veloppement (Adalet ve Kalk\u0131nma Partisi<\/em> : AKP) et approuv\u00e9 lors du r\u00e9f\u00e9rendum constitutionnel du 16 avril 2017. \u00c0 l\u2019issue de ces \u00e9lections, la fonction du Premier ministre dispara\u00eetra et les pouvoirs du pr\u00e9sident, d\u00e9sormais seul chef de l\u2019ex\u00e9cutif, seront nettement \u00e9largis aux d\u00e9pens de ceux du Parlement. Ce r\u00e9gime s\u2019oppose aux valeurs constitutives de la R\u00e9publique de Turquie. Fond\u00e9e sous l’impulsion de Mustafa Kemal Atat\u00fcrk sur les ruines de l’Empire ottoman et proclam\u00e9e par la Grande Assembl\u00e9e nationale de Turquie (T\u00fcrkiye B\u00fcy\u00fck Millet Meclisi<\/em> : TBMM) le 29 octobre 1923, elle \u00e9tait rest\u00e9e jusqu’\u00e0 aujourd’hui un r\u00e9gime parlementaire. Les r\u00e9sultats des \u00e9lections sont importants pour l\u2019Europe, qui devra traiter de la crise migratoire avec l\u2019hyper-pr\u00e9sident nouvellement \u00e9lu. <\/p>\n\n\n\n La Turquie avait d\u00e9j\u00e0 connu des \u00e9lections r\u00e9gionales en 2014 et des \u00e9lections l\u00e9gislatives en juin 2015, puis de nouveau en novembre 2015, suite \u00e0 l\u2019incapacit\u00e9 de l\u2019AKP, mis en minorit\u00e9 en juin, \u00e0 former un gouvernement. Depuis, le climat politique turc n’a cess\u00e9 de se durcir. Le coup d’\u00c9tat manqu\u00e9 de juillet 2016 a provoqu\u00e9 de vastes troubles politiques avec l’arrestation de nombreux g\u00fclenistes – un groupe qui suit le chef religieux Fethullah G\u00fclen accus\u00e9 d\u2019\u00eatre responsable de la tentative de coup d’\u00c9tat – ainsi que d\u2019autres opposants au r\u00e9gime. La r\u00e9pression s\u2019est \u00e9galement appliqu\u00e9e \u00e0 museler la presse et la soci\u00e9t\u00e9 civile. <\/p>\n\n\n\n Le pays a \u00e9t\u00e9 d\u00e9clar\u00e9 en \u00e9tat d’urgence le 21 juillet 2016 Pour la septi\u00e8me fois en avril 2018, il a \u00e9t\u00e9 prolong\u00e9 pour les trois mois \u00e0 venir <\/span>1<\/sup><\/a><\/span><\/span>, ce qui implique que les \u00e9lections anticip\u00e9es du 24 juin 2018 auront lieu dans un contexte d’\u00e9tat d’urgence. C’\u00e9tait d\u00e9j\u00e0 le cas pour le r\u00e9f\u00e9rendum constitutionnel de 2017 concernant le passage au syst\u00e8me pr\u00e9sidentiel. Les \u00e9lections de 24 juin 2018 associent les \u00e9lections l\u00e9gislatives et la pr\u00e9sidentielle qui, \u00e0 la suite du r\u00e9f\u00e9rendum de 2017 et donc pour la premi\u00e8re fois, imposera un deuxi\u00e8me tour le 8 juillet si aucun candidat pr\u00e9sidentiel n’obtient plus de la moiti\u00e9 des voix d\u00e8s le premier tour. Le Haut Conseil \u00e9lectoral (Y\u00fcksek Se\u00e7im Kurulu <\/em> : YSK) a d\u2019ailleurs restructur\u00e9 la g\u00e9ographie des bureaux de votes dans dix-neuf villes situ\u00e9es dans les zones majoritairement kurdes, ce qui, selon le parti pro-kurde HDP (Halklar\u0131n Demokratik Partisi<\/em>), pourrait potentiellement rendre plus difficile le voyage et le vote des \u00e9lecteurs kurdes <\/span>3<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n Une autre controverse a \u00e9t\u00e9 provoqu\u00e9e par une d\u00e9cision de derni\u00e8re minute du YSK lors du r\u00e9f\u00e9rendum constitutionnel de 2017 et concerne le d\u00e9pouillement des bulletins qui ne portent pas le sceau d’approbation normalement appos\u00e9 par les bureaux de vote. Bien que la d\u00e9cision a \u00e9t\u00e9 contest\u00e9e par les partis d\u2019opposition et a \u00e9galement \u00e9t\u00e9 saisie par la Cour europ\u00e9enne de justice, le 20 juin 2018, le YSK publiait ses r\u00e8glements pour les prochaines \u00e9lections, et indiquait que les votes qui avaient le filigrane de YSK et le sceau d’approbation du Conseil \u00e9lectoral d\u00e9partemental seraient inclus dans le d\u00e9pouillement, m\u00eame s’ils n’ont pas le sceau d’approbation du bureau de vote <\/span>4<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Six candidats \u00e0 la pr\u00e9sidence s\u2019affronteront le 24 juin. Pour s’opposer \u00e0 Recep Tayyip Erdo\u011fan, deux noms ressortent : Muharrem \u0130nce \u00e0 gauche et Meral Ak\u015fener \u00e0 droite.<\/p>\n\n\n\n Le candidat du principal parti d\u2019opposition, le Parti r\u00e9publicain du peuple (Cumhuriyet Halk Partisi<\/em> : CHP), est Muharrem \u0130nce. Contrairement \u00e0 Erdo\u011fan, qui avait mal v\u00e9cu l’obligation, pr\u00e9vue par la Constitution, de couper ses liens avec son parti lorsqu\u2019il a \u00e9t\u00e9 \u00e9lu pr\u00e9sident en 2014, et qu’il avait contourn\u00e9e par une r\u00e9forme constitutionnelle pour r\u00e9int\u00e9grer son parti en 2017, il s\u2019engage \u00e0 \u00eatre impartial. Pour devenir le \u00ab pr\u00e9sident des 81 millions de Turcs \u00bb, il a \u00f4t\u00e9 l\u2019\u00e9pingle du CHP de sa veste – un geste symbolique <\/span>5<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n \u0130nce essaye de trouver un compromis et promet de ne marginaliser aucun groupe ethnique ou religieux. S\u2019il est \u00e9lu pr\u00e9sident, a-t-il assur\u00e9, il ne s\u2019opposera pas au port du voile, qui \u00e9tait interdit dans les universit\u00e9s et dans la fonction publique, et r\u00e9soudra le \u00ab probl\u00e8me kurde \u00bb (k\u00fcrt sorunu<\/em>) en d\u00e9battant ouvertement de ce sujet encore tabou, au Parlement comme \u00e0 la t\u00e9l\u00e9vision publique. Par ailleurs, \u0130nce n\u2019avait pas h\u00e9sit\u00e9 \u00e0 s\u2019opposer aux autres d\u00e9put\u00e9s du CHP en 2016, lorsqu\u2019il avait vot\u00e9 contre la proposition pr\u00e9voyant la lev\u00e9e de l\u2019immunit\u00e9 parlementaire, mesure qui a conduit plus tard \u00e0 l\u2019emprisonnement de Selahattin Demirta\u015f, le leader et candidat du parti pro-kurde Parti d\u00e9mocratique des peuples (Halklar\u0131n Demokratik Partisi<\/em> : HDP), qui m\u00e8ne actuellement une campagne atypique depuis sa cellule de prison <\/span>6<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n Une autre personne qui est capable de d\u00e9fier le pr\u00e9sident Erdo\u011fan aux \u00e9lections pr\u00e9sidentielles est Meral Ak\u015fener. Lorsque le Parti d\u2019action nationaliste (Milliyet\u00e7i Hareket Partisi<\/em> : MHP) s\u2019est ralli\u00e9 \u00e0 Erdo\u011fan en faisant campagne pour le r\u00e9gime hyper-pr\u00e9sidentiel, elle l\u2019a quitt\u00e9 pour fonder le Bon Parti (\u0130yi Parti<\/em>) le 25 octobre 2017. Appel\u00e9e la \u00ab dame de fer \u00bb de Turquie, elle promet de retourner au r\u00e9gime parlementaire, d\u2019appliquer les standards europ\u00e9ens en mati\u00e8re de libert\u00e9 de la presse et de d\u00e9fendre l\u2019\u00e9galit\u00e9 des sexes en mobilisant les femmes dans tous les domaines de la vie <\/span>7<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Le Bon Parti propose d\u2019incarner une troisi\u00e8me voie : bien qu\u2019il ne puisse rallier la base \u00e9lectorale du HDP, il peut s\u00e9duire les conservateurs qui craignent l\u2019islamisation du pays tout en demeurant r\u00e9ticents \u00e0 voter \u00e0 gauche. <\/p>\n\n\n\n Deux grands blocs se sont constitu\u00e9s pour les \u00e9lections l\u00e9gislatives. Le MHP et l\u2019AKP forment l\u2019Alliance populaire (Cumhur \u0130ttifak\u0131<\/em>). \u00c0 l\u2019oppos\u00e9, l\u2019Alliance de la nation (Millet \u0130ttifak\u0131<\/em>) r\u00e9unit le CHP, le Bon Parti, le Parti d\u00e9mocrate (Demokrat Parti <\/em> : DP) et le Parti de la f\u00e9licit\u00e9 (Saadet Partisi<\/em> : SP). Ces alliances font d\u00e9bat dans la mesure o\u00f9 le MHP se consid\u00e9rait comme un parti d\u2019opposition avant le r\u00e9f\u00e9rendum constitutionnel et son leader, Devlet Bah\u00e7eli, critiquait \u00e2prement Erdo\u011fan. Aujourd\u2019hui, les deux marchent main dans la main. Du c\u00f4t\u00e9 de l\u2019Alliance de la nation, le rapprochement entre le SP et le CHP peut surprendre : alors que l\u2019une des six fl\u00e8ches du CHP est la la\u00efcit\u00e9, le SP est de tendance islamique et a \u00e9t\u00e9 autrefois dirig\u00e9 par Necmettin Erbakan, \u00ab p\u00e8re spirituel \u00bb d\u2019Erdo\u011fan et fondateur de l\u2019islam politique en Turquie. Les deux partis partagent pourtant la volont\u00e9 de retourner au r\u00e9gime parlementaire. Le HDP a \u00e9t\u00e9 exclu de cette alliance car le Bon Parti aurait craint de perdre le vote des nationalistes turcs <\/span>8<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n Dans le contexte turc, le terme de \u00ab nationaliste \u00bb recouvre en r\u00e9alit\u00e9 plusieurs dimensions. Que l\u2019on soit de gauche ou de droite, des courants nationalistes traversent la soci\u00e9t\u00e9 turque, et la lecture binaire qui oppose gauche s\u00e9culariste et droite islamique ne correspond pas \u00e0 la r\u00e9alit\u00e9. Depuis dix ans, deux \u00e9volutions parall\u00e8les ont lieu et marquent de leur empreinte la politique \u00e9trang\u00e8re turque. D\u2019un c\u00f4t\u00e9, le courant ulusalc\u0131l\u0131k<\/em> (de ulus<\/em>, form\u00e9 sur la racine mongole) s\u2019est greff\u00e9 au sein des s\u00e9cularistes, d\u00e9finissant les Turcs comme un groupe ethnique et une classe opprim\u00e9e par les \u00ab imp\u00e9rialismes \u00bb occidentaux et les communaut\u00e9s non turques du pays <\/span>9<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n De l\u2019autre c\u00f4t\u00e9, le courant milliyet\u00e7ilik<\/em> (form\u00e9 sur la racine arabe millat<\/em>) se rapproche plus de la d\u00e9finition fran\u00e7aise du nationalisme, et est notamment repr\u00e9sent\u00e9 par Devlet Bah\u00e7eli et le MHP. On peut donc retrouver un nationalisme aussi bien au sein du CHP (class\u00e9 \u00e0 gauche) qu\u2019au sein de l\u2019AKP (class\u00e9 comme islamo-conservateur). Et ces deux courants impr\u00e8gnent tant la politique que l\u2019arm\u00e9e. <\/p>\n\n\n\n L\u2019arm\u00e9e (ordu<\/em>) occupe une place centrale dans la vie des Turcs. Tout d\u2019abord, la conscription est obligatoire : les jeunes hommes qui ont atteint la majorit\u00e9 doivent n\u00e9cessairement effectuer leur service militaire (askerlik<\/em>). La d\u00e9fense nationale, loin d\u2019\u00eatre per\u00e7ue comme une corv\u00e9e, repr\u00e9sente au contraire un honneur et les soldats qui meurent en martyrs (\u015fehit<\/em>) sont port\u00e9s au pinacle. L\u2019arm\u00e9e est \u00e9galement la garante de la la\u00efcit\u00e9 et de l\u2019establishment <\/em>k\u00e9maliste. C\u2019est \u00e0 ce titre qu\u2019elle est intervenue dans la politique du pays \u00e0 plusieurs reprises. Le 27 mai 1960, le premier coup d\u2019\u00c9tat de l\u2019histoire de la R\u00e9publique de Turquie, organis\u00e9 par Alparslan T\u00fcrke\u015f, avait renvers\u00e9 le gouvernement d\u2019Adnan Menderes, le Premier ministre de l\u2019\u00e9poque qui \u00e9tait accus\u00e9 d\u2019avoir \u00e9branl\u00e9 la la\u00efcit\u00e9. La Turquie a \u00e9t\u00e9 secou\u00e9e par une succession de putschs militaires, du coup d\u2019\u00c9tat de 12 septembre 1980 organis\u00e9 par Kenan Evren jusqu\u2019au m\u00e9morandum militaire du 28 f\u00e9vrier 1997, qui a pr\u00e9cipit\u00e9 la d\u00e9mission du Premier ministre islamiste Necmettin Erbakan et qui a conduit Recep Tayyip Erdo\u011fan, alors maire d’Istanbul, \u00e0 la prison <\/span>10<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n Depuis 2007, date \u00e0 laquelle l\u2019arm\u00e9e publie un m\u00e9morandum sur la la\u00efcit\u00e9, le pr\u00e9sident Erdo\u011fan m\u00e8ne une bataille contre celle-ci, qui est accus\u00e9e d\u2019\u00eatre un \u00ab \u00c9tat profond \u00bb. Le 12 juin 2007, une cache d\u2019armes est d\u00e9couverte \u00e0 \u00dcmraniye, un district d\u2019Istanbul. Ainsi \u00e9clate l\u2019affaire \u00ab Ergenekon <\/em> \u00bb, qui conduit \u00e0 l\u2019arrestation de 588 personnes accus\u00e9es de complot visant \u00e0 renverser le gouvernement <\/span>11<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Une seconde affaire frappe l\u2019arm\u00e9e avec l\u2019envoi au journal Taraf <\/em>d\u2019une valise contenant 500 000 pages de documents et 19 CD-ROM sur la pr\u00e9paration d\u2019un \u00e9ventuel coup d\u2019\u00c9tat <\/span>12<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Baptis\u00e9e \u00ab Balyoz<\/em> \u00bb, cette affaire lance une seconde vague d\u2019arrestations permettant le \u00ab nettoyage \u00bb de l\u2019arm\u00e9e des k\u00e9malistes. Or, cette fois-ci, ce sont les g\u00fclenistes \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur de l\u2019arm\u00e9e turque qui sont accus\u00e9s de vouloir renverser le r\u00e9gime la nuit du 15 juillet 2016. Cette tentative de coup d\u2019\u00c9tat, qualifi\u00e9e par le pr\u00e9sident Erdo\u011fan de \u00ab gr\u00e2ce de Dieu \u00bb, a permis le passage \u00e0 l\u2019\u00e9tat d\u2019urgence et \u00e0 la transformation de l\u2019arm\u00e9e, qui est depuis d\u00e9finitivement plac\u00e9e sous la coupe du gouvernement. <\/p>\n\n\n\n Le gouvernement Erdo\u011fan s\u2019est entour\u00e9 de plusieurs \u00e9l\u00e9ments influents pour faire de l\u2019AKP une force politique majeure en Turquie. Parmi eux, le soutien du cemaat <\/em>(communaut\u00e9) ou hizmet<\/em> (service) repr\u00e9sentant la n\u00e9o-confr\u00e9rie de Fethullah G\u00fclen, un mouvement central dans la vie sociale et religieuse turque, s\u2019est av\u00e9r\u00e9 particuli\u00e8rement utile pour le gouvernement conservateur : il concentre influences politiques, religieuses et sociales. <\/p>\n\n\n\n L\u2019AKP appartient \u00e0 la tradition de l\u2019islam politique alors que le mouvement de G\u00fclen rel\u00e8ve du mysticisme musulman inspir\u00e9 des id\u00e9es de Sa\u00efd Nurs\u00ee. Pourtant, tous les deux ont uni leurs forces d\u00e8s 2002 car ils avaient des int\u00e9r\u00eats convergents <\/span>13<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Si le mouvement est officiellement apolitique, il a tout de m\u00eame une influence politique dans la mesure o\u00f9 l\u2019objectif est de faire \u00e9merger une nouvelle \u00e9lite anatolienne et conservatrice. C\u2019est cette classe moyenne conservatrice mais favorable au d\u00e9veloppement des \u00e9changes \u00e9conomiques internationaux qui repr\u00e9sente la base sociale de l\u2019AKP et du mouvement G\u00fclen. <\/p>\n\n\n\n Ce dernier se d\u00e9finit surtout par la personnalit\u00e9 de son leader spirituel qui rassemble des millions de sympathisants et qui s\u2019est impos\u00e9 dans les secteurs de l\u2019\u00e9conomie, de l\u2019\u00e9ducation, des m\u00e9dias et dans les diff\u00e9rentes administrations. Le penseur mystique pr\u00f4ne la foi islamique comme l\u2019esprit du capitalisme. Il dispose d\u2019un r\u00e9seau d\u2019\u00e9coles dynamiques, qui sont pr\u00e9sentes partout dans le monde et qui ont fortement particip\u00e9 au rayonnement de la Turquie. <\/p>\n\n\n\n Toutefois, des signes de fragilit\u00e9 et de divergence sont apparus d\u00e8s le d\u00e9but des ann\u00e9es 2010. Sur la sc\u00e8ne int\u00e9rieure, l\u2019influence des g\u00fclenistes se d\u00e9veloppe au sein de la police et de la justice. D\u00e8s lors, en d\u00e9cembre 2013 une crise \u00e9clate suite \u00e0 la r\u00e9v\u00e9lation de la corruption de l\u2019entourage de Recep Tayyip Erdo\u011fan, alors Premier ministre. Avec la tentative de coup d\u2019\u00c9tat du 15 juillet 2016, la rupture est totale et Fethullah G\u00fclen est consid\u00e9r\u00e9 par le gouvernement comme ennemi de la nation et son mouvement un \u00ab \u00c9tat parall\u00e8le \u00bb dor\u00e9navant qualifi\u00e9 d\u2019organisation terroriste du FET\u00d6<\/em>. Loin de se limiter au seul pr\u00e9dicateur auto-exil\u00e9 aux \u00c9tats-Unis depuis 1999, ce sont tous les soutiens (proches directement ou indirectement) du mouvement qui sont pourchass\u00e9s par l\u2019appareil s\u00e9curitaire du pouvoir. <\/p>\n\n\n\n \u00c0 l\u2019\u00e9tranger \u00e9galement, le gouvernement turc tente de faire pression pour fermer les \u00e9coles proches du mouvement. Cette d\u00e9cision brutale cristallise les diff\u00e9rentes relations diplomatiques bilat\u00e9rales. Certains font le choix de se plier aux exigences d\u2019Erdo\u011fan comme le Maroc, l\u2019Ethiopie ou le Tadjikistan, d\u2019autres refusent de se s\u00e9parer de l\u2019enracinement social des \u00e9coles g\u00fclenistes comme le Kazakhstan et le Kirghizstan. Enfin, d\u2019autres tentent de modifier le statut de ces \u00e9coles influentes. <\/p>\n\n\n\n Les Kurdes sont estim\u00e9s \u00e0 environ 40 millions de personnes r\u00e9parties entre la Turquie, l\u2019Irak, l\u2019Iran, la Syrie et la diaspora, suite au partage de l\u2019Empire ottoman apr\u00e8s la Premi\u00e8re Guerre mondiale <\/span>14<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Ils sont 15 \u00e0 16 millions en Turquie, majoritairement au Sud-Est. Sur le plan religieux, ils sont majoritairement sunnites, mais aussi al\u00e9vis. Depuis Misak-\u0131 Mill\u00ee<\/em>, le pacte national turc qui pr\u00e9voyait la r\u00e9cup\u00e9ration des territoires amput\u00e9s par le trait\u00e9 de S\u00e8vres et la signature du trait\u00e9 de Lausanne en 1923, l\u2019enjeu est de maintenir l\u2019int\u00e9grit\u00e9 territoriale du pays. La constitution d\u2019un Kurdistan en nation ind\u00e9pendante est donc un sujet tr\u00e8s sensible. Pour \u00e9viter sa constitution, la jeune R\u00e9publique k\u00e9maliste avait voulu assimiler les Kurdes en interdisant l\u2019usage de leur langue. Cependant, la gu\u00e9rilla dure depuis plus de 30 ans en Turquie <\/span>15<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n Un mouvement politique l\u00e9gal a port\u00e9 l\u2019espoir d\u2019\u00e9volutions pacifiques dans les relations avec le pouvoir turc. Celui-ci a permis l\u2019ouverture d\u2019une cha\u00eene de t\u00e9l\u00e9vision kurde et a montr\u00e9 une volont\u00e9 d\u2019apaisement, notamment pour des raisons \u00e9lectorales. En effet, les Kurdes, qui repr\u00e9sentent 15 % des \u00e9lecteurs, sont un enjeu crucial des \u00e9lections. Or le contexte \u00e9lectoral a beaucoup \u00e9volu\u00e9 depuis le d\u00e9but de l\u2019\u00e8re de l\u2019AKP car le parti a perdu la majorit\u00e9 absolue au Parlement le 7 juin 2015 : le HDP de Demirta\u015f a r\u00e9alis\u00e9 un score historique avec plus de 10 % des voix, ce qui lui a permis de faire son entr\u00e9e au Parlement <\/span>16<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n Alors qu\u2019un cessez-le-feu \u00e9tait en vigueur depuis 2013 entre le gouvernement AKP et le Parti des travailleurs du Kurdistan (Partiya Karker\u00ean Kurdistan<\/em> : PKK), un groupe terroriste et ind\u00e9pendantiste kurde, ce conflit est d\u00e9sormais entr\u00e9 dans un nouveau cycle. La prise de Tel Abiat en juin 2015, tout comme la bataille de Koban\u00e9 sont des \u00e9l\u00e9ments cl\u00e9s dans le choix d\u2019arr\u00eater le d\u00e9veloppement du PKK. <\/p>\n\n\n\n Depuis la reprise des combats avec le PKK au Sud-Est du pays, les combats s\u2019effectuent surtout dans les zones urbaines. Par exemple, Cizre, la \u00ab ville martyre \u00bb des Kurdes, est compl\u00e8tement d\u00e9vast\u00e9e <\/span>17<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Les combats urbains ont \u00e9t\u00e9 particuli\u00e8rement sanglants et se sont sold\u00e9s par une d\u00e9faite de la gu\u00e9rilla urbaine kurde. D\u00e8s lors, le gouvernement a verrouill\u00e9 la solution politique kurde comme force d\u2019opposition gouvernementale en destituant les maires des municipalit\u00e9s kurdes en juillet 2015. Ils ont \u00e9t\u00e9 remplac\u00e9s par des pr\u00e9fets ou des sous-pr\u00e9fets. Depuis novembre 2016, le leader charismatique du HDP, Selahattin Demirta\u015f, est emprisonn\u00e9 pour activit\u00e9s \u00ab terroristes \u00bb et propagande pour le PKK. C\u2019est donc depuis sa prison qu\u2019il tente d\u2019incarner l\u2019espoir de voir \u00e9merger une force politique capable de d\u00e9fendre les droits des populations kurdes en Turquie. <\/p>\n\n\n\n La Turquie figure \u00e0 la 157\u00e8me place sur 180 au classement de la libert\u00e9 de la presse r\u00e9alis\u00e9 par Reporters Sans Fronti\u00e8res en 2018 <\/span>18<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Selon Amnesty International, au moins 180 organes de presse ont \u00e9t\u00e9 ferm\u00e9s par d\u00e9cret ex\u00e9cutif depuis la tentative de putsch du 15 juillet 2016 <\/span>19<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Dans un tel climat, les \u00e9lecteurs peuvent-ils r\u00e9ellement faire un choix libre et \u00e9clair\u00e9 avant d\u2019aller aux urnes ? Les m\u00e9dias passent sous silence les campagnes \u00e9lectorales de l\u2019opposition, qui se voit exclue des journaux et de la t\u00e9l\u00e9vision. Muharrem Ince, qui a \u00e9t\u00e9 invit\u00e9 au programme t\u00e9l\u00e9vis\u00e9 \u00ab Se\u00e7ime Do\u011fru <\/em> \u00bb, diffus\u00e9 sur la cha\u00eene NTV, s\u2019est indign\u00e9 contre le traitement in\u00e9gal des m\u00e9dias. Il a rappel\u00e9 que la NTV avait diffus\u00e9 l’int\u00e9gralit\u00e9 des 16 r\u00e9unions \u00e9lectorales du pr\u00e9sident Erdo\u011fan en direct alors qu\u2019elle n\u2019a diffus\u00e9 aucune de ses 77 r\u00e9unions <\/span>20<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n Les critiques visent surtout la partialit\u00e9 de la TRT (T\u00fcrkiye Radyo Televizyon Kurumu<\/em>), qui est pourtant une cha\u00eene publique percevant des taxes sur la consommation d\u2019\u00e9lectricit\u00e9 <\/span>21<\/sup><\/a><\/span><\/span>. En effet, du 14 au 30 mai 2018, la TRT a accord\u00e9 67 heures 58 minutes et 56 secondes au pr\u00e9sident Erdo\u011fan, 6 heures 43 minutes et 31 secondes \u00e0 Muharrem \u0130nce et 45 minutes au total pour tous les autres candidats (Meral Ak\u015fener, Temel Karamollao\u011flu et Do\u011fu Perin\u00e7ek) \u00e0 l\u2019exception de Selahattin Demirta\u015f, qui est actuellement en prison <\/span>22<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Au probl\u00e8me du traitement m\u00e9diatique s\u2019ajoute aussi la censure des r\u00e9seaux sociaux o\u00f9 les personnes qui s\u2019expriment \u00ab librement \u00bb sont parfois poursuivies par la justice. <\/p>\n\n\n\n Comme nous l’avons vu plus haut, l’arm\u00e9e occupe une place centrale dans la vie politique turque. Elle est aussi un instrument politique d\u00e9terminant \u00e0 l’ext\u00e9rieur des fronti\u00e8res nationales alors m\u00eame que le corps militaire est d\u00e9structur\u00e9 depuis plusieurs ann\u00e9es. Du 24 ao\u00fbt 2016 au 29 mars 2017 est lanc\u00e9e l’op\u00e9ration \u00ab Bouclier de l’Euphrate \u00bb (F\u0131rat Kalkan\u0131 Harek\u00e2t\u0131<\/em>), intervention unilat\u00e9rale qui signe le revirement de la politique \u00e9trang\u00e8re turque. Elle est officiellement une action de politique ext\u00e9rieure qui a plusieurs objectifs strat\u00e9giques comme emp\u00eacher le PKK de gagner un statut politique en Syrie via <\/em>l’obtention d’une unit\u00e9 territoriale. Dans ses op\u00e9rations ext\u00e9rieures, la Turquie se repose sur ses forces militaires mais aussi sur des groupes de l’opposition syrienne \u00e0 Bachar el-Assad comme l’Arm\u00e9e Syrienne Libre. Ces interventions visent \u00e0 pr\u00e9server le territoire national de la menace d’attentats de Daech comme de l’instauration de territoires kurdes ind\u00e9pendants. Elles permettent enfin d’assurer \u00e0 la Turquie une place dans la comp\u00e9tition de puissance au Moyen-Orient tout en d\u00e9stabilisant le r\u00e9gime syrien. <\/p>\n\n\n\n Mais, le gouvernement n’a cess\u00e9 d’annoncer la prise d’Afrin et de Manbij comme les prochains objectifs depuis la fin de l’op\u00e9ration Bouclier de l’Euphrate. D\u00e8s lors, en janvier 2018, et apr\u00e8s n\u00e9gociations avec les Russes <\/span>23<\/sup><\/a><\/span><\/span>, la Turquie lance l’op\u00e9ration \u00ab Rameau d’olivier \u00bb (Zeytin Dal\u0131 Harek\u00e2t\u0131<\/em>) pour briser l’unit\u00e9 territoriale des YPG (Yek\u00eeney\u00ean Parastina Gel <\/em> : Unit\u00e9s de protection du peuple, branche arm\u00e9e du PYD syrien) dans le Nord de la Syrie <\/span>24<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Deux mois plus tard, les forces turques et ses alli\u00e9s contr\u00f4lent Afrin et sa r\u00e9gion et annoncent l’instauration d’une zone tampon. Toutefois, les strat\u00e9gies militaires turques ne correspondent pas \u00e0 celles de ses alli\u00e9s ou des puissances r\u00e9gionales. En effet, la strat\u00e9gie am\u00e9ricaine consiste \u00e0 miser sur la coalition arabo-kurde en Syrie. D\u00e9fendant ses propres objectifs politiques, la Turquie d\u00e9cide d’intervenir unilat\u00e9ralement au-del\u00e0 de sa fronti\u00e8re en prenant le risque de se brouiller avec ses alli\u00e9s. Erdo\u011fan a fait la promesse d’une intervention \u00e0 Manbij mais il doit se coordonner avec les \u00c9tats-Unis, qui disposent de forces sp\u00e9ciales sur le terrain. <\/p>\n\n\n\n Les relations entre la Turquie, les \u00c9tats europ\u00e9ens et l\u2019Union europ\u00e9enne sont marqu\u00e9es par des tensions croissantes depuis l\u2019entr\u00e9e de la Turquie dans les n\u00e9gociations d\u2019adh\u00e9sion \u00e0 l\u2019UE. Le statut de candidat de la Turquie fut accept\u00e9 en 1999 et les n\u00e9gociations d\u2019adh\u00e9sions ouvertes en octobre 2005. Depuis, les relations multilat\u00e9rales ne cessent de se d\u00e9grader. Deux \u00e9v\u00e9nements majeurs ont particip\u00e9 \u00e0 cette d\u00e9gradation : l\u2019\u00e9chec du Plan Annan pour Chypre et des n\u00e9gociations tripartites de 2007 o\u00f9 la Turquie a \u00e9t\u00e9 abandonn\u00e9e par ses partenaires europ\u00e9ens et l\u2019\u00e9volution de la crise en Syrie, qui a rapidement montr\u00e9 la divergence d’int\u00e9r\u00eat entre la Turquie et les pays europ\u00e9ens. La Commission europ\u00e9enne a suspendu les n\u00e9gociations d\u2019adh\u00e9sion en novembre 2016, quelques mois apr\u00e8s le coup d\u2019\u00c9tat manqu\u00e9 du 15 juillet. <\/p>\n\n\n\n Les discours politiques des dirigeants turcs comme de leurs homologues europ\u00e9ens sont de plus en plus virulents. Les tensions \u00e9taient \u00e0 leur apog\u00e9e en 2017 \u00e0 la veille du r\u00e9f\u00e9rendum du 16 avril. Alors que l\u2019AKP pr\u00e9voyait des meetings en Allemagne et aux Pays-Bas, le refus de ces derniers d\u2019accueillir des ministres turcs a d\u00e9clench\u00e9 l\u2019ire du pr\u00e9sident turc, qui a trait\u00e9 la chanceli\u00e8re allemande Angela Merkel de \u00ab nazie \u00bb. C\u00f4t\u00e9 europ\u00e9en, le pr\u00e9sident de la Commission europ\u00e9enne Jean-Claude Juncker a d\u00e9clar\u00e9, en ao\u00fbt 2017, \u00ab la Turquie s\u2019\u00e9loigne \u00e0 pas de g\u00e9ant de l\u2019Europe \u00bb avant d\u2019ajouter qu\u2019 \u00ab [il] voudrait que [l\u2019Europe se conduise] de fa\u00e7on \u00e0 ce que les Turcs remarquent que ce sont eux, c\u2019est-\u00e0-dire le syst\u00e8me Erdo\u011fan, qui rendent impossible l\u2019adh\u00e9sion de la Turquie \u00e0 l\u2019Union europ\u00e9enne \u00bb.<\/p>\n\n\n\n L\u2019adh\u00e9sion de la Turquie \u00e0 l\u2019Union europ\u00e9enne demeure un horizon lointain mais n\u2019est clairement plus au centre de l\u2019agenda de l\u2019Union europ\u00e9enne ni de celui de la Turquie. La r\u00e9f\u00e9rence \u00e0 l\u2019Union europ\u00e9enne et les \u00e9changes bilat\u00e9raux entre la Turquie et les pays europ\u00e9ens sont devenus pour la Turquie un enjeu de politique int\u00e9rieure : l\u2019important ne r\u00e9side pas dans des solutions mais dans le message que le pr\u00e9sident envoie \u00e0 ses \u00e9lecteurs et \u00e0 ses partenaires. Longtemps mis au ban de la communaut\u00e9 europ\u00e9enne, la Turquie ne se laissera plus marcher sur les pieds par l\u2019Union europ\u00e9enne et les pays qui la composent. <\/p>\n\n\n\n La relation n\u2019est pourtant pas rompue entre la Turquie et l\u2019Union europ\u00e9enne. Les deux entit\u00e9s jouent chacune un double jeu. Les tensions croissantes et l\u2019arr\u00eat des n\u00e9gociations ne marquent pas encore de rupture sur les ph\u00e9nom\u00e8nes de long terme. La coop\u00e9ration en M\u00e9diterran\u00e9e dans le cadre de l\u2019OTAN demeure, l\u2019arr\u00eat des n\u00e9gociations d\u2019adh\u00e9sion n\u2019implique pas l\u2019arr\u00eat des aides de l\u2019instrument de pr\u00e9-adh\u00e9sion de l\u2019Union europ\u00e9enne et le blocage des discussions concernant les chapitres ouverts ne remet pas en cause la r\u00e9alisation des projets pr\u00e9vus. L\u2019accord sur les r\u00e9fugi\u00e9s sign\u00e9s entre l\u2019Union europ\u00e9enne et la Turquie le 18 mars 2016 a montr\u00e9 l\u2019interd\u00e9pendance politique et la n\u00e9cessaire collaboration entre la Turquie et l\u2019Union europ\u00e9enne. Certes, la position de force de la Turquie lui a permis de n\u00e9gocier en des termes favorables. N\u00e9anmoins, l\u2019application de l\u2019accord et son maintien montrent que la coop\u00e9ration reste un objectif pour les deux parties. <\/p>\n\n\n\n L\u2019adh\u00e9sion \u00e0 l\u2019Union europ\u00e9enne et les relations avec les pays europ\u00e9ens ne sont pas des enjeux majeurs dans la campagne pour les \u00e9lections pr\u00e9sidentielles et l\u00e9gislatives du 24 juin comme ils ont pu l\u2019\u00eatre en 2001 ou en 2017. Le sommet Turquie-Union europ\u00e9enne du 26 mars 2018 a \u00e9t\u00e9 l\u2019occasion pour le Pr\u00e9sident et le Premier ministre turcs de rappeler que l\u2019adh\u00e9sion \u00e0 l\u2019Union europ\u00e9enne reste un objectif pour la Turquie. Cependant, le sujet a \u00e9t\u00e9 peu \u00e0 peu \u00e9clips\u00e9 par l\u2019annonce des \u00e9lections anticip\u00e9es le 18 avril. Ainsi, l\u2019arr\u00eat des n\u00e9gociations, les tensions croissantes entre la Turquie et ses partenaires europ\u00e9ens et le recul de la question de l\u2019adh\u00e9sion dans l\u2019agenda politique en Turquie consacrent le blocage de la situation. <\/p>\n\n\n\n Le syst\u00e8me con\u00e7u par Atat\u00fcrk d\u00e8s les premi\u00e8res ann\u00e9es de la R\u00e9publique repose sur la neutralit\u00e9. En effet, l\u2019une de ses phrases les plus c\u00e9l\u00e8bres, \u00ab Yurtta sulh, cihanda sulh<\/em> \u00bb (\u00ab Paix dans le pays, paix dans le monde \u00bb), constitue non seulement la devise du pays mais aussi le fondement de sa politique ext\u00e9rieure. Il s\u2019agit de tourner la Turquie vers l\u2019Occident, de promouvoir une intervention minimale dans les affaires du monde et de pr\u00e9server le statu quo<\/em>. Turgut \u00d6zal puis Ahmet Davuto\u011flu ont mis fin \u00e0 cette doctrine, le premier en relan\u00e7ant la politique ext\u00e9rieure de la Turquie vers le Moyen-Orient et le second en th\u00e9orisant une nouvelle strat\u00e9gie de politique ext\u00e9rieure pour la Turquie. <\/p>\n\n\n\n Le \u00ab Yeni Osman\u0131l\u0131c\u0131k <\/em> \u00bb \u2013 n\u00e9o-ottomanisme en fran\u00e7ais \u2013 a \u00e9t\u00e9 d\u00e9velopp\u00e9 par Ahmet Davuto\u011flu dans son ouvrage Stratejik derinlik <\/em>\u2013 La Profondeur strat\u00e9gique<\/em> \u2013 publi\u00e9 en 2001. Il y pr\u00e9sente les potentialit\u00e9s g\u00e9opolitiques du voisinage de la Turquie. L\u2019islam, l\u2019h\u00e9ritage de l\u2019Empire ottoman, et la position interm\u00e9diaire de la Turquie, \u00e0 cheval entre l\u2019Asie centrale, le Moyen-Orient et l\u2019Europe, sont autant d\u2019atouts pour mener une politique ext\u00e9rieure ambitieuse. D\u2019abord conseiller diplomatique aupr\u00e8s de Recep Tayyip Erdo\u011fan puis successivement ministre des Affaires europ\u00e9ennes, des Affaires \u00e9trang\u00e8res et enfin Premier ministre, il a pu appliquer pendant plus d\u2019une d\u00e9cennie sa doctrine avec plus ou moins de r\u00e9ussite.<\/p>\n\n\n\n Plus encore que son application concr\u00e8te, l\u2019utilisation m\u00e9diatique de la doctrine n\u00e9o-ottomane est impressionnante. Toute la politique de l\u2019AKP est lue \u00e0 travers le prisme du n\u00e9o-ottomanisme. Si la notion n\u2019est pas rest\u00e9e centrale pour le gouvernement turc, elle a eu du succ\u00e8s aupr\u00e8s de l\u2019opposition et des commentateurs \u00e9trangers, qui l\u2019utilisent pour analyser tant la politique ext\u00e9rieure que la politique int\u00e9rieure du r\u00e9gime d\u2019Erdo\u011fan. D\u2019un terme th\u00e9orique, le n\u00e9o-ottomanisme est devenu une arme politique brandie d\u2019abord par l\u2019AKP, puis appropri\u00e9e et retourn\u00e9e par l\u2019opposition. Dans le m\u00eame temps, la Turquie a renforc\u00e9 sa pr\u00e9sence dans la r\u00e9gion par le biais des \u00e9coles de Fethullah G\u00fclen d\u2019abord puis par le d\u00e9veloppement des instituts Yunus Emre, institutions financ\u00e9es par l\u2019\u00c9tat turc sur le mod\u00e8le des Instituts Confucius chinois, ainsi que par le biais de l\u2019aide au d\u00e9veloppement. L\u2019\u00e9volution des crises politiques en Irak et surtout en Syrie a cependant mis en \u00e9chec la politique ext\u00e9rieure de la Turquie dans le monde arabe. L\u2019autre r\u00e9gion cibl\u00e9e par la doctrine n\u00e9o-ottomane est la p\u00e9ninsule balkanique. La pr\u00e9sence de l\u2019Union europ\u00e9enne et les tensions li\u00e9es \u00e0 l\u2019\u00e9clatement de la Yougoslavie laissent peu de marge de manoeuvre \u00e0 la diplomatie turque. Ainsi, au del\u00e0 de relations privil\u00e9gi\u00e9es avec certains partenaires de la r\u00e9gion comme la Mac\u00e9doine ou le Kosovo, le principal atout de la Turquie est son aide au d\u00e9veloppement, qu\u2019elle utilise comme un outil g\u00e9opolitique. <\/p>\n\n\n\n L\u2019Agence turque de coop\u00e9ration et de d\u00e9veloppement (T\u00fcrk \u0130\u015fbirli\u011fi ve Kalk\u0131nma Ajans\u0131<\/em> : TIKA), plac\u00e9e sous l\u2019autorit\u00e9 du Premier ministre, est pr\u00e9sente dans les Balkans et participe notamment \u00e0 la r\u00e9novation de b\u00e2timents ottomans. L\u2019\u00e9chec de la politique de la Turquie au Moyen-Orient a renforc\u00e9 l\u2019int\u00e9r\u00eat de l\u2019AKP sur les Balkans, proches de devenir le nouvel eldorado <\/em>diplomatique de l\u2019AKP, non sans renforcer la tension entre la Turquie et l\u2019Union europ\u00e9enne. Plusieurs d\u00e9clarations de Recep Tayyip Erdo\u011fan, notamment apr\u00e8s qu\u2019il a d\u00e9clar\u00e9 \u00ab le Kosovo c\u2019est la Turquie \u00bb en octobre 2016, ont renforc\u00e9 les tensions entre la Turquie et l\u2019Europe et l\u2019inqui\u00e9tude de l\u2019opinion publique europ\u00e9enne. Si ce type de verve v\u00e9h\u00e9mente n\u2019est pas \u00e0 prendre au premier degr\u00e9 \u2013 elle est en effet davantage destin\u00e9e \u00e0 l\u2019\u00e9lectorat turc \u2013, elle se situe dans la continuit\u00e9 de la pens\u00e9e n\u00e9o-ottomane. Plus r\u00e9cemment, la visite d\u2019Erdo\u011fan \u00e0 Sarajevo en mai dernier a r\u00e9v\u00e9l\u00e9 l\u2019importance croissante des Balkans pour l\u2019AKP. <\/p>\n\n\n\n Les relations de la Turquie avec les pays arabes sont pleines de contradictions. Certes le Moyen-Orient ne s\u2019impose plus comme une priorit\u00e9 aux yeux des strat\u00e8ges turcs ; le Caucase, les Balkans ou la Russie occupent la premi\u00e8re place. Mais avec l\u2019arriv\u00e9e de l\u2019AKP au pouvoir, Recep Tayyip Erdo\u011fan s\u2019est mu\u00e9 en un d\u00e9fenseur de l’oumma<\/em> (la communaut\u00e9 des musulmans) et des Palestiniens, comme le montre le sommet extraordinaire de l’Organisation de Coop\u00e9ration Islamique \u00e0 Istanbul le 18 mai dernier. Les d\u00e9s\u00e9quilibres provoqu\u00e9s dans la r\u00e9gion par l\u2019intervention am\u00e9ricaine en Irak ont parfois conduit Turcs et Arabes \u00e0 partager les m\u00eames int\u00e9r\u00eats, notamment face \u00e0 la grande peur turque de l\u2019irr\u00e9dentisme kurde <\/span>25<\/sup><\/a><\/span><\/span>.<\/p>\n\n\n\n Une autre dimension de leur coop\u00e9ration est \u00e9conomique, la Turquie repr\u00e9sentant aux yeux des pays arabes un mod\u00e8le de d\u00e9veloppement \u00e9conomique alliant islam et lib\u00e9ralisme. De m\u00eame, dans les domaines soci\u00e9taux ou culturels, la Turquie utilise son pass\u00e9 ottoman pour promouvoir son image <\/span>26<\/sup><\/a><\/span><\/span>. Une dimension \u00e0 double-tranchant puisque ce \u00ab n\u00e9o-ottomanisme \u00bb de la diplomatie turque inqui\u00e8te, notamment la Syrie du fait des incursions turques sur son territoire, ou encore l\u2019\u00c9gypte, o\u00f9 le rapprochement r\u00e9cent avec le Soudan n\u2019a pas \u00e9t\u00e9 vu d\u2019un bon \u0153il. De m\u00eame, la relation que le pays entretient avec l\u2019Iran agace de nombreux pays qui craignent la mont\u00e9e en puissance de la r\u00e9publique islamique. <\/p>\n\n\n\n Les relations avec le monde occidental sont elles aussi compliqu\u00e9es. Malgr\u00e9 les diff\u00e9rends qui ont pu opposer les \u00c9tats-Unis et la Turquie (notamment la crise de Chypre de 1974, qui a entra\u00een\u00e9 un embargo am\u00e9ricain sur les armes \u00e0 destination de la Turquie), l\u2019atlantisme est rest\u00e9 un pilier de la politique \u00e9trang\u00e8re turque depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Devenue membre de l\u2019Organisation du Trait\u00e9 de l\u2019Atlantique Nord en 1952 (l\u2019envoi rapide de troupes turques pour soutenir les Am\u00e9ricains en Cor\u00e9e ayant \u00e9t\u00e9 bien vu par Washington), la Turquie est la cl\u00e9 de vo\u00fbte du dispositif du front sud du Pacte. Cependant, les r\u00e9cents d\u00e9veloppements de la politique turque, notamment les suites de la tentative de coup d\u2019\u00c9tat de 2016, ont fait s\u2019\u00e9loigner le pays de l\u2019OTAN. La Turquie s\u2019est en effet vue menac\u00e9e d\u2019exclusion par John Kerry \u00e0 la suite des \u00ab purges \u00bb men\u00e9es par l\u2019administration apr\u00e8s le 16 juillet 2016. <\/p>\n\n\n\n Au-del\u00e0 des querelles r\u00e9currentes avec la Gr\u00e8ce, la Turquie a \u00e9galement op\u00e9r\u00e9 un retournement (soudain par sa violence), en d\u00e9cidant de s\u2019\u00e9quiper du syst\u00e8me russe de d\u00e9fense a\u00e9rienne S-400. En janvier dernier, l\u2019op\u00e9ration \u00ab Rameau d’olivier \u00bb, dirig\u00e9e contre les milices kurdes syriennes soutenues par les principaux membres de l\u2019OTAN, a jet\u00e9 un nouveau froid, amplifi\u00e9 par l\u2019opposition du S\u00e9nat am\u00e9ricain \u00e0 la livraison d’avions de combat F-35. Sous r\u00e9serve d\u2019un changement de gouvernement, la Turquie se rapproche peu \u00e0 peu de la Russie. <\/p>\n\n\n\n La Russie et la Turquie sont toutes deux gouvern\u00e9es par des dirigeants aux pouvoirs forts et personnifi\u00e9s, nostalgiques de leurs empires respectifs, et dont ils se servent pour leurs ambitions. Ils ont en commun un rapport ambivalent face aux puissances occidentales, mais malgr\u00e9 leur opposition strat\u00e9gique concernant le conflit syrien, la Turquie et la Russie ont pris conscience de leur interd\u00e9pendance. Ce ne sont donc pas des ennemis mais des concurrents. La coop\u00e9ration \u00e9conomique et \u00e9nerg\u00e9tique s\u2019est poursuivie entre les deux pays tout au long du conflit syrien. Cependant, lorsqu’en novembre 2015 un chasseur russe est abattu par l’aviation turque, la stabilit\u00e9 de cette relation est rompue. <\/p>\n\n\n\n C\u2019est par pragmatisme que ces deux puissances finiront par se rapprocher \u00e0 nouveau. Sur le plan \u00e9conomique, de nouveaux accords sont sign\u00e9s en avril 2017 et sur le plan diplomatique ce rapprochement avec la Russie fait partie de la n\u00e9cessaire adaptation strat\u00e9gique de la politique turque \u00e0 l’\u00e9gard du conflit syrien. Le \u201cclub d\u2019Astana\u201d, pilot\u00e9 par la Russie et qui inclut l\u2019Iran et la Turquie <\/span>27<\/sup><\/a><\/span><\/span>, se situe dans cette optique, tout comme le maintien des liens avec Isra\u00ebl, contre qui le discours s\u2019est fait plus ferme ces derni\u00e8res ann\u00e9es. <\/p>\n\n\n\n L\u2019alliance historique entre Ankara et Tel Aviv (la Turquie fut le premier \u00c9tat \u00e0 majorit\u00e9 musulmane \u00e0 reconna\u00eetre de facto <\/em>l\u2019\u00c9tat d\u2019Isra\u00ebl en 1949), g\u00eane la projection d’influence turque vers le Moyen-Orient. C’est donc pour afficher son implication et son soutien au peuple palestinien que le gouvernement turc adopte une rh\u00e9torique corrosive \u00e0 l’\u00e9gard d’Isra\u00ebl. Suite \u00e0 l’incident de la flottille Mavi Marmara<\/em> en mai 2010, Turcs et Isra\u00e9liens avaient rompu leurs relations diplomatiques. <\/p>\n\n\n\n Quelques mois plus t\u00f4t, en janvier 2009 Erdo\u011fan avait acquis une singuli\u00e8re popularit\u00e9 lorsqu’il avait exprim\u00e9 sa col\u00e8re contre Shimon P\u00e9r\u00e8s lors du sommet de Davos. Toutefois, en raison de l’\u00e9clatement du conflit syrien et de sa persistance et face \u00e0 l’intrusion de la Russie et de l’Iran, la Turquie et Isra\u00ebl ont d\u00fb signer un accord de r\u00e9conciliation en 2016. Il est aujourd’hui mis \u00e0 mal par la r\u00e9action du gouvernement turc face \u00e0 la mort de plus de cent Palestiniens tu\u00e9s par l’arm\u00e9e isra\u00e9lienne lors de la \u00ab marche du grand retour \u00bb mi-mai 2018 et par la volont\u00e9 de la Turquie de se pr\u00e9senter comme un leader dans la d\u00e9fense de la cause palestinienne <\/span>28<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":" \u00c0 la veille des \u00e9lections turques, le GEG M\u00e9diterran\u00e9e propose une analyse plurielle de leurs implications g\u00e9opolitiques.<\/p>\n","protected":false},"author":4,"featured_media":28586,"comment_status":"closed","ping_status":"open","sticky":false,"template":"templates\/post-angles.php","format":"standard","meta":{"_acf_changed":false,"_trash_the_other_posts":false,"footnotes":""},"categories":[1731],"tags":[],"geo":[543],"class_list":["post-10880","post","type-post","status-publish","format-standard","hentry","category-politique","staff-david-billeau","staff-matthieu-caillaud","geo-mediterranee"],"acf":[],"yoast_head":"\n1 – Contexte et enjeu de l\u2019\u00e9lection pr\u00e9sidentielle<\/strong><\/h3>\n\n\n\n
Alors que la r\u00e9gularit\u00e9 des pr\u00e9c\u00e9dentes campagnes \u00e9lectorales avait \u00e9t\u00e9 fortement remise en question par des t\u00e9moignages attestant de pressions exerc\u00e9es sur l\u2019opposition et par des soup\u00e7ons de corruption, la volont\u00e9 du r\u00e9gime d’organiser des \u00e9lections justes et libres reste \u00e0 d\u00e9montrer <\/span>2<\/sup><\/a><\/span><\/span>. <\/p>\n\n\n\n
Ainsi, alors que le pays se pr\u00e9pare pour les \u00e9lections, la s\u00e9curit\u00e9 et l’organisation des \u00e9lections restent controvers\u00e9es notamment en ce qui concerne l’attribution des bureaux \u00e9lectoraux et le d\u00e9pouillement du scrutin. <\/p>\n\n\n\n2 – Profil des candidats et partis politiques <\/strong><\/h3>\n\n\n\n
\r\n <\/picture>\r\n \n 3 – Nationalisme en Turquie et place de l\u2019arm\u00e9e<\/strong><\/h3>\n\n\n\n
4 – Erdo\u011fan et G\u00fclen, entre d\u00e9rive autoritaire et ing\u00e9rence politique : la gen\u00e8se de la guerre fratricide<\/strong><\/h3>\n\n\n\n
\r\n <\/picture>\r\n \n 5 – La situation des Kurdes <\/strong><\/h3>\n\n\n\n
6 – Un traitement m\u00e9diatique in\u00e9gal<\/strong><\/h3>\n\n\n\n
7 – Erdo\u011fan, chef de guerre<\/strong><\/h3>\n\n\n\n
Comment est-on pass\u00e9 du \u00ab z\u00e9ro probl\u00e8me avec les voisins \u00bb du hoca<\/em> (professeur) Davuto\u011flu, qui mettait en avant la Turquie comme m\u00e9diateur r\u00e9gional durant les ann\u00e9es 2000, \u00e0 Erdo\u011fan gazi <\/em>(chef de guerre) ?
L’ann\u00e9e 2015 marque certainement un tournant. En effet, suite \u00e0 l’attentat de Suru\u00e7 en juillet, la Turquie ouvre la base militaire d’\u0130ncirlik \u00e0 ses alli\u00e9s de l’OTAN et annonce un virage dans sa propre action ext\u00e9rieure. L’\u00c9tat turc engage un front \u00e0 sa fronti\u00e8re sud, le mot \u00ab guerre \u00bb resurgit et l’ennemi est clairement d\u00e9sign\u00e9 comme \u00e9tant Daech et le PKK\/PYD (Partiya Yek\u00eetiya Demokrat <\/em> : Parti de l’union d\u00e9mocratique, consid\u00e9r\u00e9 par les autorit\u00e9s turques comme la branche syrienne du PKK). <\/p>\n\n\n\n
La projection des forces arm\u00e9es dans le Nord de la Syrie a \u00e9t\u00e9 au centre des discours des derniers mois permettant ainsi d’exacerber l’\u00e9lan nationaliste. De m\u00eame, les cha\u00eenes de t\u00e9l\u00e9visions et journaux relaient quotidiennement le nombre de morts et martyrs relatifs aux actions militaires au Nord de l’Irak, notamment \u00e0 Qandil. Toutes les critiques \u00e0 l’\u00e9gard des actions militaires ext\u00e9rieures sont d\u00e9nonc\u00e9es comme tra\u00eetrise \u00e0 la nation. C’est donc logiquement qu’Erdo\u011fan, chef de guerre, se pr\u00e9sente comme d\u00e9fenseur de la patrie dans ces \u00e9lections. <\/p>\n\n\n\n8 – L\u2019int\u00e9gration de la Turquie \u00e0 l\u2019Union europ\u00e9enne, encore un enjeu ?<\/strong><\/h3>\n\n\n\n
9 – Le \u00ab n\u00e9o-ottomanisme <\/strong> \u00bb <\/h3>\n\n\n\n
Le n\u00e9o-ottomanisme th\u00e9oris\u00e9 par Ahmet Davuto\u011flu reposait sur l\u2019utilisation de la \u00ab profondeur strat\u00e9gique \u00bb de la Turquie dans son voisinage. D\u00e8s l\u2019arriv\u00e9e de l\u2019AKP au pouvoir en 2001, la Turquie normalise ses relations avec ses voisins syrien et irakien puis d\u00e9veloppe ses relations avec le Liban et la Jordanie. Le point d\u2019orgue de ce retour au Moyen-Orient est le projet de libre-\u00e9change entre la Turquie et ces quatre pays, sign\u00e9 \u00e0 Istanbul en 2010. <\/p>\n\n\n\n10 – Autres enjeux ext\u00e9rieurs : relations avec l\u2019OTAN, la Russie, l\u2019\u00c9tat d\u2019Isra\u00ebl et la Palestine<\/strong><\/h3>\n\n\n\n
\r\n <\/picture>\r\n \n