Résultat pour : Haftar


La journée romaine de Poutine a été riche en rencontres, mais sans progrès réels, au-delà des déclarations de façade. D’une part, l’Italie ne peut pas se permettre une trop grande autonomie par rapport aux engagements pris avec l’Union et l’OTAN  ; d’autre part, la Russie ne semble pas encore disposée à modifier sa stratégie libyenne, condition nécessaire pour la relance de la triangulation avec Rome sur ce front. Paradoxalement, le dialogue semble pour l’instant plus fructueux avec le Vatican qu’avec l’allié temporairement «  souverainiste  ».

L’attaque de Tajoura par les forces aériennes de Khalifa Haftar, qui a causé la mort d’au moins 44 migrants logés dans le centre de détention, a ouvert un nouveau front diplomatique inattendu. Cela représente une véritable «  ligne rouge  » pour les diplomaties internationales et les autres acteurs actifs sur le terrain. Parmi ceux-ci, on trouve l’axe États-Unis-Émirats arabes unis, défini par une forte coopération en matière de défense qui pourrait s’envoler étant donné l’ambiguïté d’Abou Dhabi sur le scénario libyen. L’incapacité de Washington à maintenir l’équilibre en Libye apparaît de plus en plus évidente.

La rivalité entre la France et l’Italie sur le dossier libyen n’est pas nouvelle. Depuis 2011, les positions des deux pays divergent radicalement, au point de se livrer à une concurrence féroce, qui a culminé avec le rappel de l’Ambassadeur de France à Rome. Dans ce contexte, l’attaque de Khalifa Haftar sur Tripoli change la donne  : embourbées dans leur rivalité, Paris et Rome s’écartent du jeu libyen malgré elles, laissant la place à des puissances non européennes.

Dans le contexte du regain de tension libyen, le ministre de l’Intérieur Matteo Salvini a signé une nouvelle directive interdisant l’arrivée de migrants en Italie. Point particulier, cette directive s’adressait non seulement aux forces de police mais aussi au chef d’État-Major de la marine militaire et au commandant général de la capitainerie du port, subordonnés au ministère de la Défense (contrôlée par Elisabetta Trenta du Mouvement 5 Étoiles), ce qui a abouti à un nouvel affrontement entre les deux ministres… mais aussi, cette fois, avec l’armée italienne. Signaux faibles de conflit institutionnel au sein du gouvernement Conte.

Malgré la pression de la communauté internationale, l’opération militaire lancée par Khalifa Haftar le 4 avril se poursuit. L’homme fort de l’Est a décidé de mettre fin à la présence du gouvernement de Tripoli, soutenu par l’ONU, et compte reprendre la capitale par les armes. Un contrecoup pour comprendre qu’en est-il de la stratégie du maréchal Haftar, de ses soutiens et de la nouvelle configuration politique en Libye qui est en train de se créer.

L’avancée des forces armées libyennes de Khalifa Haftar vers Tripoli, avec le soutien d’un large éventail de puissances internationales, dont Riyad en particulier, s’inscrit dans le cadre de la tentative du maréchal de s’asseoir à la table des négociations en position de force lors des élections. Dans une situation où la position d’Al Serraj semble de plus en plus mince, la perspective la plus réaliste semble être celle d’un renforcement des négociations avec Tobrouk.

Début février, Le Caire prendra la tête de l’Union africaine pour un an. Bien que la rhétorique officielle tourne autour du renforcement des échanges commerciaux et financiers entre les pays africains, l’Égypte devrait également profiter de cette occasion pour défendre ses propres intérêts, en particulier sécuritaires, et avancer ses pions sur le continent.

La situation libyenne actuelle est le résultat d’un certain nombre de facteurs. L’un des principaux est la division du territoire libyen en régions et districts. Pour comprendre cette dynamique, il ne faut pas sous-estimer les événements qui ont caractérisé la diplomatie internationale entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et 1951, année de l’indépendance.