Fox News est le croque-mitaine de la politique américaine moderne. Lorsqu’on leur demande comment le président Donald Trump a pu accéder à la présidence, les experts accusent Fox News. Lorsqu’on leur demande comment le président a survécu à une succession de scandales qui auraient probablement emporté n’importe quelle autre présidence, les experts accusent Fox News. Lorsqu’on leur demande comment Trump, malgré une économie en crise, un taux de mortalité COVID-19 parmi les plus élevés du monde et un manque de réalisations législatives majeures, pourrait être proche de remporter un second mandat, la réponse est souvent Fox News. Dans quelle mesure ce blâme est-il justifié ? Comment une chaîne qui, au maximum de ses audiences, est vue par 1 ou 2 % de la population américaine, peut-elle avoir une telle influence ? Il est certain que Donald Trump ne serait pas président aujourd’hui sans la couverture de Fox en 2015, mais son influence, bien qu’elle ne soit peut-être pas aussi étendue que certains critiques l’imaginent, va bien au-delà.

Comme je l’ai montré dans mon livre Fox News and American Politics, paru en 2016, et dans de nombreux articles avant et après, Fox News occupe effectivement une place particulière dans le paysage politique américain. Les décisions prises par la chaîne sur ce qu’elle couvre et sur la façon dont elle encadre ses reportages ont un impact énorme sur les priorités des téléspectateurs et, ce qui est peut-être plus important encore, sur les candidats eux-mêmes. Quand bien même Fox News serait souvent perçue comme prêchant des convertis — en s’adressant à un public qui serait entièrement composé de personnes qui ont déjà certaines opinions —, son influence tient à ce que nombre de ses téléspectateurs ne se décrivent pas comme des conservateurs et recherchent un divertissement qu’ils retirent de la programmation, plutôt que le contenu politique. Cela signifie qu’elle a la possibilité de faire changer d’avis, ou du moins de modifier les priorités, de téléspectateurs qui ne sont pas fermement attachés aux opinions que les animateurs défendent.

Quand bien même Fox News serait souvent perçue comme prêchant des convertis — en s’adressant à un public qui serait entièrement composé de personnes qui ont déjà certaines opinions —, son influence tient à ce que nombre de ses téléspectateurs ne se décrivent pas comme des conservateurs et recherchent un divertissement qu’ils retirent de la programmation, plutôt que le contenu politique.

Dan Cassino

Les données montrent clairement que Fox News distord la politique américaine de plusieurs façons. Elle modifie le comportement des électeurs, en particulier lors des élections primaires. Elle amène les gens à donner de l’argent à certains candidats et pas à d’autres. Elle modifie les priorités de ses téléspectateurs, les amenant à se concentrer sur des sujets qui ne font pas partie de la couverture générique de l’actualité politique, les laissant moins bien informés des questions qui préoccupent le reste du public. Elle les rend plus susceptibles de croire en certaines théories du complot, allant même jusqu’à transformer l’issue normale de ces croyances — l’accumulation de connaissances — en un problème, plutôt qu’en un atout, puisque des téléspectateurs plus cultivés deviennent plus susceptibles de souscrire à des croyances erronées, comme le birtherism, ou au fait que le réchauffement climatique serait un mensonge. Je ne suis pas un libéral qui blâme Fox News pour des choses que je n’aime pas dans le monde. Je suis un chercheur et un homme de chiffres. Mon travail n’est pas de dire si quelque chose est bien ou mal, juste ou injuste. Je laisse cela au département de philosophie qui se trouve au bout du couloir. Mon travail, en tant que psychologue politique et en tant que personne dont l’activité consiste à comprendre comment les gens ordinaires approchent la politique, est de décrire ce qui se passe, et de laisser le lecteur décider lui-même de ce que cela signifie.

Racontée dans ses grandes lignes, l’histoire de Fox News est assez simple. Elle commence par la rencontre d’un producteur de télévision de bas étage, Roger Ailes, avec Richard Nixon, et par l’évolution de celui-ci vers une stratégie de «  harcèlement de l’arbitre  » (playing the ref) pour faire face à sa mauvaise couverture médiatique. Tout comme, au cours d’un match difficile, un entraîneur peut contester des décisions qu’il sait équitable, dans l’espoir que l’arbitre soit plus indulgent lorsqu’une faute est commise, Nixon se plaignait constamment de la partialité de la presse à son égard. Celle-ci l’aurait injustement dépeint comme un corrompu, voire comme un criminel (bien sûr, nous savons comment cela a tourné). Après la chute de Nixon, le mouvement conservateur naissant, qui allait progressivement dominer le parti républicain, a adopté cette stratégie, se plaignant des biais perçus dans leur couverture médiatique. Désireux de défendre leur position d’arbitres neutres, les grands journaux ont essayé de répondre à ces inquiétudes en engageant davantage de conservateurs dans leurs pages éditoriales et en faisant tout leur possible pour traiter les deux côtés des problèmes, même lorsqu’il n’y avait pas vraiment de controverse. Comme on pouvait s’y attendre, ces efforts ne mirent pas un terme aux plaintes des conservateurs, et au début des années 1990, les conservateurs commencèrent à se plaindre d’un autre média, la radio. Des voix conservatrices comme l’ancien DJ Rush Limbaugh, et l’un des cambrioleurs condamnés du Watergate, G. Gordon Liddy, avaient des programmes qui duraient des heures chaque jour qu’ils utilisèrent de plusieurs façons  : ils se moquaient de groupes libéraux comme ceux qui défendaient les droits des femmes, les droits civiques des Afro-Américains ou les droits des homosexuels  ; ils soutenaient les théories du complot sur les Clinton  ; et ils se plaignaient que les conservateurs n’avaient aucun moyen de faire passer leurs messages. Même si leur audience augmentait — à un moment donné, Rush Limbaugh était écouté par plus de 10 millions de personnes chaque semaine (et il prétendait que son audience était bien plus importante) — ils se plaignaient sans cesse que les conservateurs n’avaient aucun moyen de faire passer leur message, et qu’ils étaient à bord d’une sorte de radio pirate, disant une vérité que les autres médias ne diffusaient pas. Ailes, qui avait travaillé à la production de programmes d’information basés sur les tabloïds, y vit immédiatement l’opportunité de créer le genre de médias conservateurs dont on ne pouvait que rêver à l’époque de Nixon, et qui, selon lui, aurait empêché la destitution et la démission de Nixon. Sa première tentative a été une version télévisée de l’émission de Limbaugh, qui se solda rapidement par un échec. Mais Ailes ne renonça pas à traduire à la télévision le format de la radio conservatrice en plein essor, et avec l’aide du magnat australien des médias Rupert Murdoch, le voilà qu’il crée Fox News. Elle devint rapidement la chaîne d’information la mieux cotée des chaînes câblées américaines, tout en restant clairement la descendante des programmes de radio qui lui avait servi d’inspiration au début. L’accent mis sur la critique des politiciens et des dirigeants démocrates, les moqueries à l’égard des groupes féministes, des groupes de défense des droits des homosexuels ou de tout ce qui est considéré comme les excès de la gauche se poursuivent, tout comme les affirmations de plus en plus ridicules selon lesquelles les conservateurs seraient sous-représentés dans la couverture de l’actualité. Tout cela tiendrait au fait que les médias (un groupe auquel Fox New considère qu’elle n’appartient pas) sont entièrement dans la poche des gauchistes.

Racontée dans ses grandes lignes, l’histoire de Fox News est assez simple. Elle commence par la rencontre d’un producteur de télévision de bas étage, Roger Ailes, avec Richard Nixon, et par l’évolution de celui-ci vers une stratégie de «  harcèlement de l’arbitre  » pour faire face à sa mauvaise couverture médiatique.

Dan Cassino

Lorsque la Fox est devenue plus influente au sein du Parti républicain, elle a été confrontée au même problème que le Parti républicain lui-même. D’un côté, il y avait les républicains traditionnels, socialement modérés et tournés vers les affaires, ceux que l’on appelait autrefois les «  républicains à la Rockefeller », dont l’occupation principale était de réduire les impôts et les réglementations, considérant l’État comme l’ennemi des grandes entreprises. De l’autre, on trouvait les conservateurs, héritiers de Barry Goldwater, surtout motivés par des questions culturelles et sociales, comme l’opposition à la législation sur les droits civiques, les lois sur l’égalité des sexes, l’avortement et le contrôle des naissances, tout en défendant un plus grand rôle de la religion dans la vie publique. Les tentatives pour que ces groupes continuent à pousser dans la même direction, alors que leurs objectifs ont très peu en commun, se sont avérées difficiles : Ronald Reagan s’est présenté comme le champion des conservateurs du mouvement, mais sa présidence a été considérée comme un échec par ces derniers, qui jugeaient qu’il ne s’intéressait que du bout des lèvres à leurs priorités sans vraiment faire ce qu’ils voulaient. Les républicains ne retrouvaient une solide plateforme commune que lorsqu’ils plaidaient contre la législation sociale proposée par les démocrates, ou contre des politiciens démocrates eux-mêmes. Lorsque les Républicains ne pouvaient s’entendre sur ce qu’ils voulaient faire, les deux côtés du parti pouvaient s’entendre sur ce qu’ils ne voulaient pas. Pendant les années Bush, alors que la guerre en Irak passait d’une marche triomphale à une opération anti-insurrectionnelle impopulaire, la couverture de Fox News est ainsi passée de pro-Bush à anti-anti-Bush : non pas pour défendre la politique de guerre, mais pour faire valoir des arguments contre les critiques de cette politique. Lorsque l’impopularité de la guerre et la crise des subprimes ont conduit à une victoire démocrate au Congrès en 2007 et à une présidence démocrate en 2009, ils ont pu se recentrer sur la critique des démocrates du Congrès, en particulier de la présidente la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, et du président Barack Obama. Comme toujours, ils étaient beaucoup plus à l’aise en soulignant les prétendus excès de leurs adversaires qu’en soutenant un projet en particulier. Ils pouvaient aussi continuer à se plaindre que leurs voix n’étaient pas entendues sur un marché des médias où ils étaient pourtant la chaîne câblée la mieux cotée — pas la chaîne d’information la mieux cotée, mais la chaîne la mieux cotée dans l’ensemble.

Fox News et la primaire républicaine

Ce rôle dominant signifie qu’être couvert par Fox News est devenue une ressource vitale pour les candidats qui cherchent à obtenir l’investiture républicaine pour la présidence. Aux États-Unis, les élections primaires sont une affaire de longue haleine. Au fil des ans, les candidats rivalisent pour recueillir des contributions de grands donateurs, le soutien des militants de base dans les États qui votent tôt, comme l’Iowa, le New Hampshire et la Caroline du Sud, et une importante couverture médiatique pour se faire connaître des membres de leur parti. Cette couverture est particulièrement importante, en raison de la façon dont elle détermine les autres facteurs : une couverture positive peut signifier plus de contributions, plus de bénévoles, et permettre d’attirer plus facilement le public et d’impressionner les organisateurs locaux dans les premiers États. Si la couverture d’autres chaînes d’information, qui, mises ensemble, captent un public beaucoup plus large que celui de Fox News, ne semble pas changer les niveaux de soutien dans les primaires républicaines, Fox News pèse. Selon les analyses de sa couverture, en moyenne, une seule déclaration positive sur Fox News à propos d’un candidat aux primaires républicaines renforce ce candidat dans les sondages de 0,07 point ; une seule déclaration négative le fait baisser d’environ 0,05 point. Cela peut ne pas sembler beaucoup, mais ces soutiens ou ces attaques arrivent généralement par vagues, le candidat du moment peut recevoir près de 30 mentions par jour sur la chaîne. Si elles sont cumulées sur plusieurs jours de couverture, les mentions à valeur positive sur Fox News peuvent entraîner des hausses importantes dans les sondages, en particulier pour les candidats moins connus. Cette couverture est souvent étonnamment peu critique, comme dans un échange sur Herman Cain, entre Kimberly Guilfoyle et Dana Perino, sur « The Five » de Fox News, le 29 septembre 2011 :

[Guilfoyle] — «  Dans un nouveau sondage de l’institut Rasmussen, Cain est à cinq points de battre le président Obama parmi les électeurs probables. Alors, Dana, pensez-vous qu’il puisse continuer, ou est-ce juste un feu de paille ?  » 

[Perino] — «  Je pense qu’il le peut et qu’il va continuer. He Cain [qui sonne comme « can », il « peut »]. Il a un nom génial, parce qu’il rime avec tellement de choses.  »

(Notez que l’institut Rasmussen, en raison de ses procédures de pondération peu orthodoxes et de son soutien démesuré aux candidats républicains, n’est pas considéré comme un institut de sondage fiable par la plupart des médias). 

Dans des primaires républicaines embouteillées, comme celles de 2012 et 2016, une avance de quelques points donne un énorme avantage au candidat, même si elle s’estompe au bout de quelques jours lorsque la couverture médiatique se tarit. Dans ces grands champs, la plupart des candidats languissent dans les sondages à des scores à un chiffre, et une hausse de 2 ou 3 points fait grimper un candidat vers le haut des classements, même s’il est loin de la majorité.

Dans des primaires républicaines embouteillées, comme celles de 2012 et 2016, une avance de quelques points donne un énorme avantage au candidat, même si elle s’estompe au bout de quelques jours lorsque la couverture médiatique se tarit.

Dan Cassino

Comment Fox News génère-t-elle autant de soutien, alors même que son public est relativement restreint ? Tout d’abord, le nombre d’électeurs dans les primaires est relativement faible — environ 1 Américain sur 6 vote aux primaires républicaines dans une course qui s’étale sur un an. Mais ces électeurs sont, dans des proportions largement supérieures à la moyenne, des spectateurs de Fox News. Deuxièmement, même si les gens ne regardent pas Fox News, ils voient les effets d’entraînement de la couverture de la chaîne : les analyses de Fox News sont partagées sur Facebook et sur d’autres plateformes de médias sociaux, et les sites web conservateurs s’en inspirent pour leur propre couverture. Au total, les effets secondaires et tertiaires du traitement de l’information par la chaîne sont probablement plus importants que les effets sur les téléspectateurs. Fox News étant une source d’information fiable pour les conservateurs, qui ont passé des décennies à se faire dire qu’ils ne pouvaient pas faire confiance aux autres sources d’information, les messages positifs concernant un candidat sont considérés comme une marque de légitimité. 

C’est là que nous voyons comment Fox News a donné à Trump l’investiture présidentielle républicaine de 2016. Bien avant qu’il n’annonce sa candidature à la présidence en 2015, Trump était une voix régulière sur Fox News, apparaissant parfois en personne, parfois au téléphone (souvent de manière inattendue). Bref, il se voyait accorder du temps d’antenne pour énumérer ses griefs contre l’administration Obama, en direct. Parmi les sujets fréquemment abordés, citons la mauvaise gestion présumée par Obama de l’épidémie d’Ebola (en tout, deux Américains ont été infectés par le virus sur le sol américain ; aucun n’est mort. Trump a appelé à la démission d’Obama sur cette question), et les allégations de Trump selon lesquelles Obama n’était pas éligible à la présidence car il serait né au Kenya, avant de passer clandestinement à Hawaï, juste à temps pour que sa naissance soit enregistrée dans les journaux locaux et dans les dossiers des hôpitaux. Trump a souvent prétendu avoir des preuves définitives sur la question, mais a refusé de les produire, avant de finalement se dédire en dénonçant cette théorie. À l’époque, Trump était l’animateur d’une émission de télé-réalité sur le réseau de Fox News. Il faisait partie d’un groupe assez restreint de célébrités conservatrices que l’on pouvait voir sur la chaîne, comme les acteurs James Woods et Kirk Cameron, sans doute parce qu’ils faisaient écho au message de la chaîne selon lequel les conservateurs comme eux étaient victimes de discrimination dans les médias grand public. Si les diatribes de Trump sur Fox News étaient souvent décousues, elles étaient également provocantes, et elles faisaient de lui un «  bon client  » qui donnait lieu à une couverture complémentaire, puisque la chaîne et d’autres médias pouvaient ensuite répondre aux affirmations de Trump.

Lorsque Trump a commencé sa campagne électorale en 2015, cette relation intime avec Fox News s’est poursuivie. Trump était, apparemment, un téléspectateur avide de la chaîne, et il appelait fréquemment les émissions pour répondre à des sujets qui avaient été mentionnés juste avant. Les animateurs lui parlaient en direct au téléphone, lui demandaient de réagir à d’autres nouvelles du moment, puis disséquaient ses réponses. Fox News, bien sûr, n’était pas la seule à accorder à Trump un temps d’antenne disproportionné pendant la primaire républicaine de 2016. CNN a également diffusé de longues interviews de Trump ainsi que ses rassemblements de campagne à un public qui ne les aurait probablement pas vus autrement. Même MSNBC, qui s’était positionnée comme un contrepoint libéral à Fox News après avoir tenté un flirt avec son public conservateur, parlait sans cesse de Trump, bien qu’une grande partie de cette couverture fût moqueuse. Mais, comme nous l’avons déjà noté, la couverture par d’autres sources n’entraîne pas le soutien des électeurs aux primaires républicaines. C’est la couverture de Fox News qui a ce pouvoir. Et si l’on pouvait s’attendre à ce que les effets du traitement médiatique de Trump s’estompent après quelques jours, ce traitement s’est poursuivi sans relâche pendant presque toute la durée des primaires.

Cette domination dans la couverture de Fox News signifiait que Trump avait aspiré tout l’air de la salle : il n’y avait tout simplement pas le temps de donner aux autres candidats un temps d’antenne similaire, même si les dirigeants de la chaîne l’avaient voulu.

Dan Cassino

En fait, il n’y a eu qu’une seule semaine pendant la primaire où Trump n’a pas obtenu la majorité (pas la majorité absolue, ce qui aurait été difficile avec douze candidats, mais une avance bien réelle) de la couverture. En novembre 2015, un de ses rivaux, Ben Carson, a été accusé d’avoir fabriqué une histoire selon laquelle il aurait poignardé un proche dans sa jeunesse, celui-ci répondant énergiquement qu’il avait effectivement commis l’attaque. Cette semaine a également été la seule des primaires au cours de laquelle Trump a perdu du terrain face aux autres candidats. 

Cette domination dans la couverture de Fox News signifiait que Trump avait aspiré tout l’air de la salle : il n’y avait tout simplement pas le temps de donner aux autres candidats un temps d’antenne similaire, même si les dirigeants de la chaîne l’avaient voulu. Comment les électeurs conservateurs et religieux, qui questionnaient la position de Donald Trump sur des questions qui leur tenaient à cœur, comme l’avortement et le rôle de la religion dans la vie publique, ont-ils pu lui faire confiance et le soutenir ? L’imprimatur de Fox News y est pour beaucoup. Si la chaîne le suivait, cela devait être suffisant. D’autres médias tirèrent la sonnette d’alarme sur des scandales ce qui attira l’attention d’autres électeurs, mais la base conservatrice avait été formée pendant des années à ignorer tout ce qui provenait de ces médias, de sorte que ces attaques n’eurent guère d’écho. 

Fox News et l’élection générale

Ceci dit, l’importance de la couverture de Fox News perd beaucoup de valeur pendant les élections générales. Au début de la course, alors que relativement peu d’électeurs sont attentifs et que les candidats tentent de consolider leurs bases, la couverture de médias fortement idéologiques reste importante. Le soutien de Fox News à un candidat républicain sert de signal aux conservateurs et les Républicains peuvent le soutenir, tout comme (dans une moindre mesure) une couverture positive sur les médias à tendance libérale compte pour un candidat démocrate. Toutefois, cet impact s’estompe avec le temps et, dès l’été précédant l’élection, la couverture des nouvelles sur les réseaux joue un rôle beaucoup plus important dans le changement des sondages de l’élection présidentielle. Une vraie course. Chaque déclaration positive sur ABC, NBC ou CBS — des chaînes qui touchent beaucoup plus de téléspectateurs que les informations du câble, et, surtout, plus de téléspectateurs qui ne sont pas activement à la recherche d’informations politiques, et qui peuvent donc être persuadés — augmente le soutien d’un candidat de 0,09 point en moyenne le lendemain, un peu moins si la course est particulièrement serrée. Un bon jour de nouvelles pour un candidat sur ces émissions d’information pourrait lui rapporter environ 3 déclarations positives, ce qui lui permettrait de gagner de 0,15 à 0,3 point dans les sondages le lendemain, selon la position exacte de la course. Une journée de très bonne couverture (dans le décile supérieur) — sept déclarations positives à son sujet sur les chaînes — devrait lui rapporter de 0,35 à 0,63 point dans les sondages le lendemain. Le traitement de Fox News ne semble cependant pas avoir d’effet positif sur les chances des candidats aux élections générales. Le seul effet significatif de la couverture de Fox News survient les jours où la chaîne donne une couverture positive d’un candidat républicain : lorsque cela se produit, celui-ci a tendance à légèrement baisser dans les sondages, peut-être parce que cela affecte leur image de modération. 

Le seul effet significatif de la couverture de Fox News survient les jours où la chaîne donne une couverture positive d’un candidat républicain : lorsque cela se produit, celui-ci a tendance à légèrement baisser dans les sondages, peut-être parce que cela affecte leur image de modération.

Dan Cassino

L’histoire de la couverture médiatique de Fox News, ou de n’importe qui d’autre, pendant les élections générales est assez simple. Les candidats ont essentiellement un niveau de soutien de base, et lorsque leur soutien passe au-dessus ou en dessous de ce chiffre, il a tendance à y revenir sur une période relativement courte d’une à deux semaines. Une couverture positive ou négative dans les émissions d’information peut maintenir un candidat artificiellement haut ou bas pendant un certain temps, mais les chiffres ont toujours tendance à revenir vers les niveaux de base généraux. Les événements de la campagne, comme les débats, ont un impact non pas en changeant le ton de la couverture — en la rendant plus positive ou négative — mais en modifiant le volume de la couverture. Après ces événements de campagne, il y a simplement plus de suivi des candidats dans les médias, ce qui signifie que les nouvelles atteignent plus de personnes qui ne prêtent pas attention à la politique, ce qui fait monter ou descendre le soutien d’un candidat pendant un certain temps. 

Cette dynamique contribue à expliquer pourquoi les événements de la campagne ne semblent pas avoir eu beaucoup d’impact sur la remarquable stabilité de l’élection présidentielle de 2020. En d’autres termes, il y a eu tellement de scandales, tellement de choses qui se sont passées, qu’il n’y a guère de place pour augmenter le volume de la couverture et informer les électeurs qui ne sont pas encore attentifs. Si un électeur n’est pas dans le coma, il a déjà bien plus entendu parler de Trump que de n’importe quel autre Président au cours de sa vie. Certains éléments indiquent que la couverture médiatique de Trump est importante pour faire évoluer ses résultats, et que ses niveaux de soutien actuels sont inférieurs à ce que l’on pourrait considérer comme sa base naturelle, mais la couverture négative de  Trump dans les médias est si envahissante et si soutenue qu’il y a peu de chances qu’elle retrouve les niveaux qu’elle aurait atteints en l’absence d’une telle couverture. En d’autres termes, si Trump devait disparaître comme par magie des nouvelles pendant une semaine ou deux, ses scores dans les sondages augmenteraient probablement de manière substantielle : mais rester en dehors du cycle des actualités semble être quelque chose que Trump est totalement incapable de faire.

C’est ce qu’on a pu constater ces derniers jours : avec Trump à l’hôpital, la plupart des modèles de comportement politique américain auraient prédit un effet de «  ralliement autour du drapeau », ce qui renforcerait la popularité de Trump, comme ce fut le cas pour Ronald Reagan, par exemple, après qu’on lui a tiré dessus. Cependant, pendant son séjour à l’hôpital, il a continué à générer une couverture négative importante, notamment à cause des descriptions erronées de son état et de son traitement par ses médecins, et d’une étrange promenade en voiture autour de l’hôpital pour saluer ses soutiens. Pour dire les choses simplement, il semble incapable de s’empêcher, et le fait qu’il attire constamment l’attention des médias risque de réduire encore plus les chances de réélection qui lui restent.

Pendant son séjour à l’hôpital, Trump a continué à générer une couverture négative importante, notamment à cause des descriptions erronées de son état et de son traitement par ses médecins, et d’une étrange promenade en voiture autour de l’hôpital pour saluer ses soutiens.

Dan Cassino

Informations et financement de campagne

Bien que la couverture de Fox News ne modifie pas le classement d’un candidat dans les sondages des élections générales, la chaîne joue toujours un rôle important dans les élections générales, en stimulant les contributions à la campagne. Pour comprendre comment cela fonctionne, nous pouvons commencer par répartir les donateurs de campagne en deux grands groupes : les gros donateurs et les petits donateurs. Les gros donateurs, qui donnent autant aux candidats que la loi le permet et qui peuvent très bien donner de l’argent en plus à des groupes soutenant un candidat, donnent généralement après avoir été sollicités directement par un candidat ou par l’un de ses délégués. On leur demande de contribuer, et ils peuvent très bien attendre quelque chose en retour de leur contribution : accès au candidat, traitement spécial lors d’événements, etc. Les petits donateurs — des personnes qui donnent généralement quelques dizaines ou quelques centaines de dollars — ne sont pas sollicités personnellement, mais choisissent de répondre à des messages qu’ils reçoivent dans les médias ou dans le cadre de campagnes de collecte de fonds. La capacité à collecter efficacement les contributions de ces petits donateurs est relativement récente, puisqu’elle remonte au début des années 2000, lorsque les candidats ont commencé à utiliser des plateformes de dons en ligne. Ce système a connu un essor important ces dernières années avec les sollicitations par SMS et par les réseaux sociaux. La couverture médiatique d’un jour est fortement corrélée aux contributions des deux groupes de donateurs les jours suivants, bien qu’ils semblent prêter attention à des sources différentes. 

Tout indique que les grands donateurs sont beaucoup plus stratégiques dans leurs modes de contribution. Ils donnent plus d’argent aux candidats qui font bonne figure dans les sondages, et aux candidats qui sont en hausse dans les sondages : si vous essayez de soutenir un cheval gagnant, il n’est pas logique de contribuer à celui qui est en tête mais qui s’efface. Ils donnent également de l’argent en réponse à la couverture des émissions d’information des chaînes nationales, une couverture positive entraînant une augmentation des contributions. Ce n’est pas un signe qu’ils sont idéologiquement modérés ou qu’ils ne font pas attention, mais c’est plutôt un signe qu’ils cherchent à contribuer à des candidats qui rassemblent largement sans être dans une niche, et qui sont donc plus susceptibles de gagner les élections. N’oubliez pas que la couverture de Fox News n’est pas utile lors d’une élection générale, alors que celle des chaînes nationales l’est, et que les grands donateurs semblent le savoir et réagissent en conséquence.

Les petits donateurs, en revanche, font des contributions pour montrer leur soutien à un candidat. Ils donnent plus d’argent aux candidats qui sont en tête des sondages, mais ne font pas très attention au fait que ces chiffres augmentent ou diminuent. Les petits donateurs républicains accordent également une grande attention à la couverture de Fox News : les mentions positives d’un candidat sur cette chaîne entraînent une forte augmentation du nombre de petites contributions, généralement le lendemain. En fait, ils réagissent comme des fans : lorsque Fox News signale qu’il s’agit d’un bon candidat, ils sont plus susceptibles d’envoyer de l’argent en signe de soutien symbolique, pour s’impliquer d’une manière ou d’une autre avec ce candidat, comme les fans de football qui portent le maillot de leur équipe favorite tout en regardant le match à la maison. Ils ne pensent pas vraiment qu’ils font une différence, mais ils s’associent à leur équipe. 

En transformant les élections en une sorte de match de football, la couverture de Fox News conduit les petits donateurs à être moins efficaces, et à être beaucoup plus enclins à jeter leur argent par la fenêtre.

Dan Cassino

Si le montant total des fonds versés directement aux candidats est à peu près égal entre les grands et les petits donateurs, cette différence dans ce qui pousse les individus à donner entraîne des inégalités importantes dans l’impact de leur argent sur la course. Les petits donateurs peuvent donner à peu près autant d’argent que les grands donateurs, mais ces fonds vont de manière disproportionnée aux candidats qui ont moins de chances de gagner : les candidats qui s’adressent à une base conservatrice, plutôt qu’à une base plus large, et même les candidats qui s’enfoncent dans les sondages. La stratégie dynamique utilisée par les grands donateurs signifie que leurs dollars vont à des candidats qui ont plus de chances de gagner, ce qui leur permet d’avoir une plus grande influence sur le résultat. En transformant les élections en une sorte de match de football, la couverture de Fox News conduit les petits donateurs à être moins efficaces, et à être beaucoup plus enclins à jeter leur argent par la fenêtre. 

Fox news et la (mé)connaissance politique

La conclusion la plus controversée sur Fox News — et qui ne vient pas seulement de mon propre travail, mais aussi de celui d’autres chercheurs, utilisant des méthodes variées — est peut-être l’impact de la chaîne sur les connaissances politiques de ses téléspectateurs. Selon différentes méthodologies, les personnes qui regardent régulièrement Fox News sont moins capables de répondre aux questions sur les événements politiques récents que celles qui reçoivent leurs informations d’autres sources.

La connaissance politique n’est pas un sujet que les spécialistes des sciences sociales étudient beaucoup, pour deux raisons principales. Premièrement, nous avons passé les vingt dernières années à montrer que les gens peuvent généralement s’en sortir sans trop connaître la politique. Deuxièmement, parce que lorsqu’on la mesure, les résultats sont déprimants.

À quel point cet état des connaissances politiques est-il déprimant aux États-Unis ? Ça va mal. Et c’est comme cela depuis longtemps. Selon les données de 1985, moins d’un quart des Américains savaient qui était le secrétaire à la défense ou encore Thurgood Marshall (alors juge à la Cour suprême depuis longtemps et premier Afro-Américain à occuper ce poste). Peu de gens savaient où se trouve le siège de l’ONU ou ce qu’est l’OTAN, et moins de la moitié savaient si la Pologne faisait partie du bloc soviétique.

Alors même que l’on partait de loin, les choses ne se sont pas beaucoup améliorées. En pleine élection présidentielle de 2012, des sondages ont montré que seuls 40 % des Américains savaient qui avait gagné les caucus de l’Iowa, et que seulement la moitié d’entre eux savaient qui avait gagné les primaires du New Hampshire, bien que ces élections aient été le sujet principal de toutes les émissions d’information pendant des semaines. Interrogés sur des mesures politiques spécifiques, comme l’extension d’une réduction des charges sociales qui avait été traitée aux informations, moins de 10 % savaient ce qui se passait. Et cela n’est guère mieux dans des sujets plus accessibles, seule la moitié des Américains savent qui est le vice-président dans diverses enquêtes menées sous plusieurs mandats, la dernière en date étant celle de 2010.

Seule la moitié des Américains savent qui est le vice-président dans diverses enquêtes menées sous plusieurs mandats, la dernière en date étant celle de 2010.

Dan Cassino

C’est important car la démocratie représentative exige un certain niveau de connaissance de la part des électeurs. Idéalement, lorsque les gens décident pour quel candidat voter, ils sont censés connaître la position des candidats sur les questions importantes, les comparer et utiliser cette information pour décider comment voter. Si les gens ne savent même pas qui sont les candidats, ils ne sauront pas quelle est la position des candidats sur ces questions. Une étude de 1996 a montré, par exemple, qu’environ un tiers des partisans de Bill Clinton votaient pour lui en raison de ses opinions anti-avortement très marquées (alors même que ce n’était pas le cas). En 2010, 33 % des Américains pensaient que le Parti démocrate se situait du côté libéral de la fracture idéologique ; 39 % pensaient qu’ils étaient conservateurs. Ce genre d’erreurs remet réellement en question la capacité du public américain à faire le genre de calculs politiques que le vote leur impose. Comment quelqu’un est-il censé décider quel parti soutenir – et encore plus quel candidat soutenir – s’il ne sait même pas si ce parti est conservateur ou libéral ?

Face à de telles conclusions, les politologues ont déployé beaucoup d’efforts pour trouver des moyens de faire coexister la démocratie avec un très faible niveau de connaissance du public, et ils ont inégalement réussi. Les chercheurs ont constaté, par exemple, que les gens ont tendance à oublier les faits réels qu’ils entendent sur les politiciens, mais à se souvenir s’ils les aiment ou non. Pourtant, même si les Américains peuvent se débrouiller sans trop d’informations sur les candidats et leurs plateformes, presque rien ne prouve que la démocratie fonctionnerait mieux si les gens étaient mieux informés, ce qui est important. 

Le fait qu’une source d’information soit biaisée ne signifie pas nécessairement qu’elle n’est pas informative. Si vous entendez un reportage biaisé sur le secrétaire d’État, par exemple, vous devriez quand même apprendre qui est le secrétaire d’État. Pourtant, cela ne semble pas fonctionner de cette façon. Les résultats indiquent que l’exposition à des sources médiatiques idéologiques — comme Fox News, MSNBC et les talk-shows — ne contribue guère à donner aux gens plus d’informations sur le monde qui les entoure. Dans certains cas, une plus grande exposition à des informations idéologiques rend les gens moins bien informés qu’ils ne le seraient autrement.

Comment quelqu’un est-il censé décider quel parti soutenir – et encore plus quel candidat soutenir – s’il ne sait même pas si ce parti est conservateur ou libéral ?

Dan Cassino

Il est difficile de déterminer les effets de la consommation d’informations sur la connaissance de la politique, car les téléspectateurs ne sont pas affectés aux organes d’information au hasard. Les auditeurs des radios publiques ou les lecteurs du New York Times sont peut-être mieux informés que les autres Américains, mais ils sont aussi plus instruits, ont des revenus plus élevés, sont plus âgés et présentent d’autres caractéristiques qui font qu’ils en sauraient probablement plus de toute façon. C’est pourquoi des techniques statistiques sont utilisées pour examiner les autres facteurs dont nous savons qu’ils sont corrélés au fait d’avoir plus ou moins de connaissances politiques, dans le but de déterminer quels effets sont dus à la consommation d’informations et lesquels sont liés à d’autres caractéristiques.

Les personnes interrogées devaient répondre à huit questions sur l’actualité, quatre sur la politique américaine et quatre sur les événements dans d’autres pays. Toutes choses égales par ailleurs, un répondant politiquement modéré qui ne regarde aucune des sources d’information que nous avons examinées est censé répondre correctement à environ 2,5 questions — ce qui n’est pas terrible, étant donné qu’il s’agit d’une échelle de huit questions — mais pas trop inquiétant, étant donné que presque tous les membres de l’échantillon regardent quelque chose. Le même répondant devrait répondre correctement à environ 3,4 questions s’il déclare écouter la radio publique. 

D’autres médias, comme les talk-shows de fin de soirée ou du dimanche matin, ont des effets similaires, bien que moins importants, sur l’amélioration des connaissances politiques. Mais les effets les plus frappants proviennent de l’audience de Fox News. Quelqu’un de politiquement modéré qui ne regarde que Fox News ne devrait répondre correctement qu’à 2,1 questions, soit moins que la base de référence de 2,5. Il semblerait donc que regarder Fox News aurait pour conséquence qu’une personne politiquement modérée soit moins capable de répondre aux questions qu’elle ne le serait si elle ne regardait rien du tout. 

Il semblerait donc que regarder Fox News aurait pour conséquence qu’une personne politiquement modérée soit moins capable de répondre aux questions qu’elle ne le serait si elle ne regardait rien du tout. 

Dan Cassino

Ce résultat a été largement discuté aux États-Unis comme signifiant que «  Fox News vous rend stupide », mais la réalité est un peu plus nuancée que cela. Bien qu’il soit impossible d’être certain à partir des données, il est probable que ces résultats, et d’autres montrant la même chose, soient moins motivés par le fait que les téléspectateurs deviennent plus bêtes, et plus par le fait que les téléspectateurs ne sont pas testés sur des connaissances qu’ils maîtrisent. Les autres sources d’information sur lesquelles les répondants ont été testés couvrent toutes fondamentalement les mêmes sujets, parmi lesquels on trouve les sujets politiques sur lesquels on a élaboré le test. La couverture de Fox News, cependant, semble souvent provenir d’un univers parallèle, où les sujets qu’ils couvrent ne croisent que très rarement ceux qui sont couverts par d’autres chaînes. Par exemple, ces dernières semaines, le sujet principal des bulletins d’information du soir était les incendies dévastateurs en Californie, ou les enregistrements du président disant à Bob Woodward qu’il sous-estimait délibérément la gravité de COVID-19. Ces mêmes jours, les sujets principaux des émissions du soir de Fox News étaient les inquiétudes concernant l’utilisation par Hillary Clinton d’un serveur de messagerie privé, les manifestations dans le Wisconsin qui avaient cessé une semaine plus tôt, et les affrontements violents à Portland qui avaient cessé un mois plus tôt. Ainsi, un téléspectateur de Fox news pourrait bien se retrouver avec moins d’informations sur les événements politiques qui intéressent les Américains en général, parce qu’il ne reçoit tout simplement pas d’informations sur ces événements. Alors que l’Américain moyen peut savoir quelque chose à leur sujet, simplement en jetant un coup d’œil à un journal ou à un post sur Facebook, les téléspectateurs de Fox News n’entendent pas beaucoup parler de ces grands sujets, et sont très attentifs à d’autres sujets qui n’intéressent pas nécessairement les autres Américains. Ce n’est pas qu’ils en savent moins sur l’actualité, c’est qu’ils en savent beaucoup sur certaines questions qui sont couvertes sur Fox News, et moins sur les sujets qui intéressent tout le monde.

Cependant, si nous nous interrogeons sur la capacité du public à tirer des conclusions sur l’état du pays à partir de la couverture de l’actualité, en tenant les hommes politiques pour responsables des succès et des échecs, nous pouvons voir pourquoi les effets de Fox News sur les téléspectateurs sont si troublants. Il y a peu de débats parmi les principaux médias américains, par exemple, sur le fait que la réponse des États-Unis à la pandémie COVID-19 a été désastreuse. On pourrait raisonnablement s’attendre à ce que les électeurs en tiennent compte lorsqu’ils voteront aux élections de 2020, et beaucoup d’entre eux, peut-être la plupart, semblent le faire. Mais on ne s’attendrait pas à ce que les téléspectateurs de Fox News suivent cet exemple. Dans les reportages qu’ils voient, le COVID-19 n’est pas une grosse affaire, alors que d’autres sujets, comme les émeutes et les milices de gauche violentes (pour la plupart imaginaires) le sont. C’est pourquoi ils voteront sur ces questions. Les sujets traités dans les émissions d’information sont importants, et les électeurs moins informés, ou ceux qui ne connaissent pas les questions d’importance générale, sont mal équipés pour s’engager dans le débat démocratique. Ce n’est pas un problème pour les téléspectateurs de Fox News, mais plutôt pour les Américains en général.

Théories du complot

Les effets de l’audience de Fox News sur les questions d’intérêt général ne se limitent pas à ce qui se passe dans l’actualité à un moment donné. En regardant Fox News, les téléspectateurs sont également beaucoup plus enclins à exprimer leur accord avec des théories du complot sur des sujets comme le changement climatique et le lieu de naissance du président Obama. 

L’Amérique a une longue histoire avec les théories politiques du complot. Lorsque George Washington était encore président, les journaux d’un camp prétendaient que John Adams voulait se couronner roi, tandis que ceux de l’autre bord affirmaient que Thomas Jefferson avait des enfants avec la demi-sœur de sa défunte épouse qui était aussi esclave (personne n’a jamais dit que toutes les théories du complot étaient fausses). L’un des premiers tiers partis de l’histoire américaine s’est formé autour de la théorie selon laquelle les francs-maçons dirigeaient le pays et couvraient des meurtres dans le nord de l’État de New York peut nous sembler fou aujourd’hui, mais à une époque, les gouverneurs du Vermont et de la Pennsylvanie étaient membres du parti anti-maçonnique.

L’un des premiers tiers partis de l’histoire américaine s’est formé autour de la théorie selon laquelle les francs-maçons dirigeaient le pays et couvraient des meurtres dans le nord de l’État de New York peut nous sembler fou aujourd’hui, mais à une époque, les gouverneurs du Vermont et de la Pennsylvanie étaient membres du parti anti-maçonnique.

Dan Cassino

La psychologie sociale classique explique la croyance dans les complots par le fait que les gens pensent que les événements importants doivent avoir des causes importantes. L’assassinat de John F. Kennedy est un événement marquant, il semble donc qu’il devrait y avoir plus qu’un seul tireur.  Lorsque les gens examinent une situation en profondeur, ils peuvent trouver des schémas qui ne semblent pas correspondre à la version acceptée de la vérité — ces schémas et ces incohérences forment la base de théories du complot qui deviennent impossibles à dissiper. Dans les résultats du dernier sondage sur cette question, seuls 19 % des Américains ont déclaré qu’un seul homme était responsable de l’assassinat.  Après tout, toute preuve contre la théorie aurait pu être produite par des comploteurs, et plus les gens argumentent contre la théorie, plus il y a de preuves que certaines personnes essaient d’étouffer la vérité. Les psychologues sociaux ont également fait valoir que les théories du complot aident les gens à comprendre un monde autrement absurde : il peut être plus facile de croire qu’une cabale maléfique est derrière un événement que d’admettre qu’il est arrivé aléatoirement. Essayer de comprendre le complot est un moyen pour les gens d’essayer de reprendre le contrôle et de comprendre le monde.

Ces modèles explicatifs ont en commun de proposer une solution intégrée aux théories de la conspiration : l’information. Plus les gens en savent sur le monde et sur ce qu’il s’y passe réellement, moins ils devraient être enclins à adhérer à ces théories. Le savoir donne aux gens un sentiment de contrôle, et les faits mènent à la vérité, qui n’est généralement pas un complot. La croyance selon laquelle l’alunissage de 1969 était un canular ne résiste pas à un examen approfondi, et les explications normales de la psychologie sociale voudraient que d’autres théories du complot aient aussi peu de fondement. Et si cela peut fonctionner pour la plupart des complots, il y a plusieurs raisons pour lesquelles cela ne fonctionne pas pour les conspirations politiques de l’ère moderne.

Le plus souvent, le conspirationnisme politique n’est pas porté par les explications normales de la psychologie sociale, mais par un raisonnement motivé. Tout ce que les chercheurs savent de la psychologie cognitive nous dit que les réponses émotionnelles passent avant les réponses réfléchies : les gens savent ce qu’ils ressentent à propos de quelque chose avant de savoir ce qu’ils en pensent. Une fois que les gens ont établi leurs sentiments à l’égard de quelqu’un ou de quelque chose, il ne leur est pas difficile de créer des faits afin de soutenir ces croyances, et encore plus facile pour eux de croire des choses qui soutiennent ces croyances. Pour les personnes qui détestent Bill Clinton, les théories selon lesquelles il aurait assassiné Vince Foster pour couvrir un scandale dans le cadre du scandale de l’agence de voyage de la Maison Blanche semblent beaucoup plus plausibles qu’elles ne le seraient autrement. Après tout, c’est le genre de type qui ferait cela, et plus l’individu ne l’aime pas, plus il est enclin à le croire.

Le plus souvent, le conspirationnisme politique n’est pas porté par les explications normales de la psychologie sociale, mais par un raisonnement motivé.

Dan Cassino

D’autre part, les médias que les Américains recherchent afin d’obtenir plus d’informations sur les conspirations ne sont pas réellement intéressés à les dissiper.  Si un individu a tendance à se tourner vers des sources d’information qui sont déjà d’accord avec ce qu’il croit déjà — les libéraux qui regardent MSNBC, les conservateurs qui regardent Fox News — il n’obtiendra pas d’information corrective. Au contraire, il est probable qu’ils recevront davantage d’informations qui auront tendance à renforcer leurs sentiments à l’égard des personnes impliquées dans la conspiration. Cela signifie qu’ils seront peut-être plus enclins à croire la conspiration : maintenant, Bill Clinton ressemble encore plus au genre de personne qui serait impliquée dans la dissimulation d’un meurtre.

La plus populaire des théories que nous avons interrogées dans nos enquêtes est ce que l’on appelle birtherism — la croyance qu’Obama cacherait des informations importantes sur sa naissance et son enfance. Au départ, ces théories se concentraient sur l’argument selon lequel Obama était en fait né au Kenya et n’était donc pas éligible à la présidence des États-Unis, mais en 2012, elles se sont transformées en un certain nombre de théories selon lesquelles Obama possédait une citoyenneté étrangère, utilisait un numéro de sécurité sociale volé, s’était inscrit à l’université en tant qu’étudiant étranger, etc. Et même si la question était ouverte — demandant aux personnes sondées si Obama « cachait des informations importantes » plutôt qu’en demandant directement s’il était né au Kenya — il était quand même surprenant que 36 % des électeurs (et 64 % des républicains) pensent que c’était probablement vrai.

Une fois qu’Obama a répondu à la pression en produisant publiquement son certificat de naissance, beaucoup ont pensé que les théories du complot entourant sa naissance iraient dans le même sens — mais cela ne semble absolument pas avoir été le cas. En fait, l’acte de naissance a donné plus de munitions aux complotistes, car ils ont commencé à prétendre qu’il n’était pas authentique ou qu’il avait été modifié numériquement.

Ce qui est peut-être plus important, c’est que chez les républicains, une meilleure connaissance de la politique a semblé conduire à une plus grande probabilité de croire en ces théories du complot. Ces résultats indiquent qu’il y a quelque chose dans les informations que les républicains reçoivent qui les rend plus susceptibles de croire aux conspirations, et les sources d’information conservatrices populaires semblent être les coupables. Lorsque les résultats de cette étude ont été discutés sur Fox News, par exemple, la présentatrice, Megan Kelly, a déclaré qu’il était étrange que tant de gens croient aux conspirations. Ils se sont ensuite tournés vers le commentateur Tucker Carlson, qui a trouvé cela particulièrement étrange, étant donné que la vraie question était de savoir pourquoi Obama n’avait pas encore publié ses relevés de notes universitaires. Compte tenu de la nature partisane de la différence, et des échanges de ce genre, il semble probable que les différences entre les sources médiatiques jouent un certain rôle dans les différences d’évaluation de certaines théories de conspiration par les républicains et les démocrates.

Chez les républicains, une meilleure connaissance de la politique a semblé conduire à une plus grande probabilité de croire en ces théories du complot.

Dan Cassino

Nous constatons ces effets lorsque nous examinons la croyance dans les théories du complot sur le changement climatique. Une majorité — 54 % — des Américains qui disent recevoir leurs nouvelles de Fox News affirme que le réchauffement climatique est probablement un canular, contre seulement 23 % de ceux qui regardent CNN, mais les effets sont conditionnés par l’éducation. Parmi les personnes qui n’ont jamais été à l’université, regarder Fox News n’a aucun effet réel sur la probabilité de croire que le changement climatique est un canular. Parmi ceux qui ont fait des études, regarder Fox News augmente la probabilité de neuf points ; pour ceux qui ont obtenu un diplôme universitaire, le fait de regarder Fox News augmente la probabilité de douter du changement climatique de 21 points. Bien sûr, les personnes ayant un niveau d’éducation plus élevé sont plus susceptibles d’accepter le consensus scientifique au départ, donc l’effet net est que regarder Fox News annule l’effet d’une éducation accrue. 

Parmi les Américains qui ne regardent pas Fox News, aller à l’université réduit la probabilité de douter du réchauffement climatique de 13 points, et recevoir un diplôme universitaire la réduit de 11 points supplémentaires. Pour ceux qui déclarent regarder Fox News, cependant, une éducation accrue n’a pas d’effet sur la probabilité d’accepter le consensus scientifique sur le changement climatique. De tels effets sont tout à fait conformes aux recherches passées montrant les différences dans la manière dont les chaînes d’information par câble couvrent le changement climatique. La couverture de Fox News est généralement plus dédaigneuse du changement climatique, et les invités de la chaîne comprennent une proportion beaucoup plus importante de négateurs du changement climatique que la couverture de CNN et de MSNBC.

Cette relation entre le niveau d’éducation et l’audience de Fox News sur le complotisme s’étend même aux fausses croyances, comme l’affirmation selon laquelle les États-Unis ont trouvé des armes de destruction massive en Irak. Dans le cas du climatoscepticisme, les téléspectateurs de Fox News les plus éduqués ont plus tendance à ignorer le consensus scientifique et à croire que le réchauffement climatique n’existe pas. Comment est-ce possible ? Une explication vient de l’examen du traitement médiatique de Fox News. Sur des questions comme le changement climatique et la présence d’armes de destruction massive en Irak, la chaîne traite ces questions comme elle traite Trump. Plutôt que de dire que le changement climatique est un canular, par exemple, la chaîne s’appuie sur une approche «  anti-anti », affirmant que les experts qui s’expriment sur le changement climatique sont radicaux, ou sont biaisés, ou sont liés à des forces malfaisantes, ou encore qu’ils sont financés par George Soros ou Bill Gates. Ainsi, les personnes qui en savent plus, en général, et qui sont plus attentives à la question, obtiennent davantage d’informations qui les amèneraient à douter de la véracité du consensus scientifique. L’éducation, plutôt que d’aider à lutter contre les fausses croyances, est mise à profit pour rendre les gens plus douteux, plutôt que moins.

Plutôt que de dire que le changement climatique est un canular, par exemple, la chaîne s’appuie sur une approche «  anti-anti », affirmant que les experts qui s’expriment sur le changement climatique sont radicaux, ou sont biaisés, ou sont liés à des forces malfaisantes, ou encore qu’ils sont financés par George Soros ou Bill Gates.

Dan Cassino

Il va sans dire que cela est troublant : normalement, on suppose que la solution aux fausses croyances est plus d’éducation, plus d’information, en supposant que la vérité l’emporte sur la fausseté. Mais il est clair que ce n’est pas toujours le cas, en particulier chez les personnes qui obtiennent leurs informations d’une source d’information qui s’efforce de brouiller les pistes et de remettre en question le consensus entre les experts. Le fait qu’il y ait un désaccord sur des faits fondamentaux comme l’absence d’armes de destruction massive en Irak après l’invasion américaine est troublant — mais le fait que plus de connaissances et plus d’éducation n’aident pas à dissiper cette croyance l’est encore plus.

Que fait Fox News à partir de là ?

La couverture de la chaîne a énormément aidé Trump lors des primaires républicaines en 2016, et renforce encore aujourd’hui son soutien de base. Mais cela n’a pas beaucoup aidé le Président lors des élections générales de 2016, et cela ne l’aidera pas non plus en 2020. La couverture de Fox News peut aider Trump à collecter des fonds auprès de petits donateurs, mais il est peu probable qu’elle puisse faire autre chose.

Depuis qu’il est devenu président, son traitement par Fox News n’a pas été très positif. Elle est plutôt revenue à la méthode qu’elle avait utilisée lors des dernières phases de l’administration Bush : la couverture anti-anti-Trump. Les reportages qui soutiennent directement Trump sont relativement rares : ils se concentrent plutôt sur l’opposition aux personnalités qui s’opposent à Trump. Au cours du cycle de 2016, il est apparu que l’attention des médias sur Trump a nui à ses chances : après les débats des élections générales, par exemple, au cours desquels sa performance a été largement critiquée, son soutien parmi les électeurs a chuté, comme cela a été le cas après divers scandales et révélations. Ce n’est que lorsque les projecteurs se sont braqués sur son adversaire, en raison de préoccupations concernant sa santé ou l’enquête du FBI sur son serveur de messagerie, que Trump a regagné du terrain. Le même schéma devrait s’appliquer en 2020 : tant que les projecteurs seront braqués sur Trump, il est peu probable qu’il gagne du terrain dans les sondages. Il semblerait donc que sa meilleure stratégie serait de mener une campagne tranquille, et de mettre l’accent sur Biden, mais il semble totalement incapable de le faire. En fait, il a tiré la mauvaise leçon des primaires de 2016. Pour ces élections particulières, une couverture plus importante signifiait qu’il pouvait dominer ses adversaires : c’était un signe de victoire. Aujourd’hui, plus de couverture lui fait du mal, mais il considère toujours le manque de couverture comme un problème à régler avec des appels en direct aux émissions de Fox News.

En un sens, une victoire de Biden serait la meilleure chose qui puisse arriver à Fox News. Lors de l’élection présidentielle américaine de 2016, Fox News a publié de nombreux articles sur des prétendus scandales impliquant Hillary Clinton, et bien que ces scandales n’aient généralement pas été repris par les grands médias, un nombre suffisant d’entre eux se sont glissés dans le traitement médiatique d’autres chaînes pour provoquer des reportages sur des questions qui, autrement, n’auraient probablement pas attiré beaucoup d’attention. Si Hillary Clinton avait gagné en 2016, cette tendance se serait poursuivie. Mais elle a perdu. Au lieu de cela, Fox News a été acculée au pied du mur, essayant de défendre les actions de Trump tout en maintenant une base idéologiquement conservatrice, essayant d’expliquer en quoi ses actions étaient conservatrices, même si elles ne l’étaient pas. Dans un effort de recadrage du récit, Fox News a passé les dernières années à poursuivre une stratégie « anti-anti », ne défendant pas tant Trump que s’attaquant à ceux qui l’attaquent, dans un effort pour éviter de s’aliéner une partie de leur audience. Après tout, de nombreux conservateurs n’aiment pas Trump, mais ils peuvent tous convenir que les démocrates sont mauvais. Dans un effort pour expliquer et défendre Trump, beaucoup d’animateurs parmi les plus populaires de Fox News ont embrassé des mouvements autrefois marginaux, comme le nationalisme blanc, ce qui leur coûte des revenus publicitaires car les grands annonceurs refusent d’être associés à des animateurs qui sont maintenant considérés comme toxiques. L’une des émissions les plus populaires de Fox News aux heures de grande écoute diffuse aujourd’hui des publicités pour une seule société, appartenant à un partisan déclaré de Trump, car personne d’autre ne veut s’approcher de l’émission. Ce modèle économique n’est clairement pas durable, mais c’est en grande partie un problème qui se résoudra de lui-même si Trump perd en 2020. La chaîne pourra alors recommencer à dénigrer les démocrates, plutôt que d’essayer de défendre un président dont les actions sont souvent en contradiction avec la vision du monde de la chaîne.

Dans un sens plus large, cependant, l’influence de Fox News est un problème pour la démocratie aux États-Unis. La démocratie se nourrit des désaccords sur la politique, sur la meilleure façon de régler un problème, et même, dans une certaine mesure, des débats sur ce qui est, et ce qui n’est pas, un sujet de préoccupation politique.

Dan Cassino

Dans un sens plus large, cependant, l’influence de Fox News est un problème pour la démocratie aux États-Unis. La démocratie se nourrit des désaccords sur la politique, sur la meilleure façon de régler un problème, et même, dans une certaine mesure, des débats sur ce qui est, et ce qui n’est pas, un sujet de préoccupation politique. Il est moins évident, cependant, que la démocratie puisse être défendue dans un monde où il y a de sérieux désaccords sur les faits de base qui sous-tendent les questions d’intérêt national. En d’autres termes, des personnes raisonnables peuvent être en désaccord sur la meilleure façon de faire face au changement climatique ; mais il n’y a aucun moyen de parvenir à un compromis politique lorsque la moitié des électeurs pensent que le changement climatique est un canular dans lequel se mélange erreurs scientifiques et stéréotypes antisémites.

Bien que le modèle économique de Fox News ait été attaqué par les militants, l’institution reste extrêmement rentable et les tentatives de la déborder avec des chaînes qui vont plus à droite — comme OAN — n’ont pas réussi à réduire son audience. La plus grande menace pour la chaîne, semble-t-il, est le passage du temps. Bien que Fox News ait un large public, celui-ci est âgé, avec un âge médian approchant les 70 ans, et aucun signe de l’arrivée de jeunes téléspectateurs. Dans ses tentatives pour conserver son audience, Fox News s’est peut-être condamnée à l’obsolescence à long terme, mais cela ne signifie pas que nous pouvons l’ignorer maintenant.